Si vous n'arrivez pas à lire correctement cette newsletter, cliquez ici.
 

www.leducation-musicale.com



janvier-février 2009
n° 559


novembre-décembre 2008
n° 557-558



BACCALAUREAT 2009
Supplément au n° 555-556



 


Sommaire :

1. L'éditorial de Francis Cousté : "Utopies et framboises..."
2. Informations générales
3. Varia
4. Manifestations et Concerts
5. Hommage à Richard Sydney Hickox (1948-2008)
6. Entretien avec Alice de Monfreid
7. Comptes rendus de spectacles et concerts
8. Orgues nouvelles, revue
9. Spectacles lyriques
10. L'édition musicale
11. Bibliographie
12. CDs et DVDs
13. La vie de L’éducation musicale



Utopies et framboises…

 

L’utopie est une entreprise qui

honore le cœur et disqualifie l’intellect.

 

Tels des hallebardiers d’opéra s’exclamant : « Marchons, marchons ! », nos chantres de la Grande Mutation martèlent à l’envi leurs rêves fous d’un monde ivre de décroissance et de sobriété, d’un monde post-capitaliste dans lequel le poétique prendrait enfin le pas sur le politique, où musique et autres arts seraient enfin « produits de haute nécessité »…

 

Qui ne s’enflammerait à de si douces perspectives, à d’aussi nobles et humanistes projets ? Faudrait-il encore que ces âmes généreuses aient une quelconque idée des leviers à mettre en œuvre, des moyens dont il leur faudra se doter pour vaincre l’insatiable voracité d’un monde hypertechnologisé, où l’intelligence aveugle détient quasiment partout les commandes.  Comment d’ailleurs - hors sanglantes convulsions - un tel monde pourrait-il voir le jour ?

 

Tout « animal musical » qu’il soit (selon l’heureuse formule du neurologue Oliver Sachs), l’homme n’est certes pas à la veille de reconnaître que « le travail, c’est ce que l’homme a trouvé de mieux pour ne rien faire de sa vie » (Raoul Vaneigem).  Et comment ne pas rendre hommage au grand visionnaire que fut le savant atomiste Jean Perrin : « Si les ouvriers ont des congés, ils en profiteront pour se cultiver »…

 

Non ! Seule l’école a encore une chance de créer, pacifiquement, les conditions favorables à l’émergence d’un tel monde « poétique ».  D’où la nécessaire refondation, à l’échelle de la planète, de tous nos systèmes d’enseignement - telle est la seule utopie aujourd’hui accessible.  On ne saurait toutefois dire qu’à cet égard, notre pays ouvre une voie radieuse…

 

Francis B. Cousté

 

 

 


Haut

Rénové, le site de l’Ircam est en ligne : www.ircam.fr

©Myr Muratet

 

Édith Canat de Chizy [notre photo] vient d’être nommée présidente de la « Commission de la Musique symphonique » de la Sacem.

©C.Daguet/Henry-Lemoine

 

Archipel », Festival des musiques d’aujourd’hui, se déroulera à Genève, du 20 au 28 mars 2009 Renseignements : +41 22 329 42 42 . www.archipel.org

 

Le « Printemps des Arts de Monte-Carlo » fêtera son XXVe anniversaire du 31 mars au 18 avril 2009 Renseignements : +377 93 25 58 04 www.printempsdesarts.com

 

La 1re Triennale de la recherche sur les politiques culturelles en Europe, « Regards de jeunes chercheurs européens », se tiendra à Grenoble, les 28 et 29 mai 2009 Renseignements : 04 76 44 33 26 www.observatoire-culture.net/data/public/pdf403.pdf

 

Académie des Beaux-Arts.  Le Prix 2008 de Chant choral Liliane Bettencourt (d’un montant de 40 000 €) a été décerné au Jeune Chœur de Paris [notre photo], dirigé par Laurence Equilbey & Geoffroy Jourdain.

©DR

 

La XXIXe édition du festival « Jazz à Vienne » se déroulera du 27 juin au 10 juillet 2009 Renseignements : 21, rue des Célestes, 38200 Vienne.  Tél. : 04 74 78 87 89 www.jazzavienne.com

 

Centre de Formation de Musiciens Intervenants (CFMI).  Les épreuves du test d’entrée se dérouleront du mardi 9 au samedi 13 juin 2009 .  Inscriptions prises jusqu’au 4 mai 2009 Renseignements : Université de Provence - 29, avenue Robert-Schuman, 13621 Aix-en-Provence Cedex 01.  Tél. : 04 42 95 32 40 www.cfmiprovence.com

 

Les Francofolies se dérouleront à La Rochelle, du 10 au 14 juillet 2009 .  Sur 8 scènes, plus de 100 concerts.  Renseignements : www.francofolies.fr

 

***

 

 

 


Haut

Jeunesses musicales de France… Offrir l’expérience de la musique vivante, telle est la vocation des JMF.  Ainsi, en 2008, pas moins de 460 000 jeunes spectateurs auront-ils assisté à des concerts de musiques classiques ou contemporaines, musiques actuelles ou musiques du monde.  Et 2009 ne sera pas en reste !  Renseignements : 01 44 61 86 86 www.lesjmf.org

 

Au Musée d’ethnographie de Genève (MEG), se tiendra, du 13 mars au 30 décembre 2009 , l’exposition sonore L’air du temps.  Sur la base des Archives internationales de musique populaire (AIMP) constituées par le fameux ethnomusicologue roumain Constantin Brăiloiu (1893-1958).  Renseignements : bd Carl-Vogt 65, 1205 Genève.  Tél. : +41 (0)22 418 45 50 . www.ville-ge.ch/meg

 

À l’occasion de l’Année Haydn (1732-1809), est organisé, du 15 au 19 mai 2009 , un voyage à Stuttgart, Forêt Noire, Alsace et Vosges.  Sous la houlette de Mme Édith Weber, professeur émérite à la Sorbonne.  Seront notamment visités : la célèbre Bachakademie de Stuttgart et, à Gunsbach, le musée Albert Schweitzer.  Audition en concert, à Stuttgart, de l’oratorio Les Saisons (Die Jahreszeiten).  Renseignements : Voyages Terrien, tél. : 02 40 47 77 78 www.voyages-terrien.com

J.Haydn, par Thomas Hardy (1792)

 

1959-2009, Cinquante ans déjà !

 

« D’une musicologie des textes à une musicologie des processus créateurs ». Ce séminaire se déroulera les jeudis 12 et 26 mars 2009 , de 11h à 13 h, à l’EHESS (salle 6 / 105, bd Raspail Paris VIe).  Renseignements : Rémy Campos : remycampos@hotmail.com), Nicolas Donin : nicolas.donin@ircam.fr ou www.ehess.fr

 

Perplexitas… Portrait type du collégien parisien, en classe de 3e.  Fument : 17% des filles, 11% des garçons.  Consomment de l’alcool : 33% des filles, 30% des garçons.  Ont consommé du cannabis : à parité, 10% des filles & des garçons.  Ne prennent pas un petit déjeuner tous les matins : 36% des filles, 30% des garçons (Étude « DIESE » menée, en 2007-2008, par le rectorat de Paris).

 

Music Copyright.  Sur décision du Legal Affairs Commitee, les droits réservés pour la musique enregistrée viennent de passer, aux États-Unis, de 50 à 95 ans (Source : www.mi2n.com).

 

Salles de concert : En 2008, The O2 Arena de Londres (23 000 places) [notre photo] a accueilli 1 806 447 spectateurs.  C’est la première salle au monde en termes de fréquentation.  Viennent ensuite le Madison Square Garden de New York (1 161 000 spectateurs) puis l’Evening Star News Arena de Manchester (1 157 000 spectateurs).

The O2

©D.R.

 

La « Fédération des associations de musiciens éducateurs du Québec » développe son site : www.fameq.org

 

Le Festival de Saint-Denis [Classique / Métis / Création] se déroulera du 7 juin au 7 juillet 2009 Renseignements : 01 48 13 06 07 www.festival-saint-denis.com

 

« Songs about Science », une curiosité…

http://blogs.nature.com/news/thegreatbeyond/2008/01/songs_about_science.html

 

Qu’en des termes pi-eux…! « Un chantier auquel j’attache une grande importance, c’est le chantier des enseignements artistiques.  Si on développe les enseignements artistiques à l’école, on développera le public culturel et artistique. […] Je veillerai à ce que toutes les écoles et toutes les institutions culturelles signent des partenariats de la Maternelle à l’université.  C’est aussi la raison pour laquelle, en validant le projet de construire la Philharmonie de Paris, j’ai voulu l’associer étroitement avec la Cité de la musique, pour en faire aussi un outil d’éducation des publics. » (Nicolas Sarkozy, Présentation des vœux au monde culturel, 13 janvier 2009, Nîmes).

 

Sponsoring au Royaume-Uni : « Dans le climat actuel, le soutien des institutions musicales classiques doit être considéré, par les grandes banques, comme inapproprié » (Source : www.guardian.co.uk / 11 February 2009 ).

Royaume-Uni

 

« Musical Tales ».  Dédié à Hélène Grimaud, Helena & l’orchestre du monde des brouillards met en scène la grande pianiste confrontée à un monde gothique, où ses loups la protègeraient de créatures terrifiantes.  Créateur visionnaire, compositeur mais aussi producteur de cette Heroic Fantasy, Stéphane Meer a ici réalisé un fantastique « objet non identifié ».  Il n’est, pour vous en convaincre, que de le découvrir sur : www.musical-tales.com (vidéos musicales illustrées de dessins et de photos – le tout gratuitement accessible en version française, anglaise, allemande, espagnole, russe et chinoise).

 

City of London Festival.  Le vendredi 19 juin 2009 , après avoir défilé dans les plus anciens quartiers de Londres, un cortège de jeunes danseurs, musiciens, marionnettistes, artistes des rues (de 8 à 19 ans) se regroupera - pour un grand concert final - sur les marches de St Paul’s Cathedral.  Renseignements : procession@colf.org ou www.colf.org

 

***

 

 

 

 

 

 


Haut

 

 

Journée internationale de la femme.  À cette occasion, l’association « Femmes et musique » organise une table ronde sur le thème « Les femmes dans l’histoire de la musique, hier et aujourd’hui ».  Samedi 7 mars 2009 , 9h30, Mairie du VIIIe arrondissement de Paris.  Avec notamment : Pierrette Germain-David, Odile Bourin, Isabelle Aboulker, Édith Canat de Chizy, Hugues Reiner…  Entrée libreRéservations : 01 44 90 76 98 .

©Svemir-fotolia.com

 

En l’Auditorium du musée Guimet, se produiront les 6 et 7 mars 2009 , à 20h30 : Huong Thanh, chant (Vietnam), Mieko Miyazaki, koto (Japon), Guo Gan, erhu (Chine), Alex Tran, percussion.  En 1re partie : Daniel Lifermann, shakuhachi (Japon).  Renseignements : 6, place d’Iéna, Paris XVIe. Tél. : 01 40 73 88 18 www.guimet.fr

©Hong Nguyen

 

« Sax and the cité » : Jeudi 12 mars (20h, Paris, Cité de la musique) et vendredi 13 mars 2009 (20h30, Théâtre de Saint-Quentin-en-Yvelines), le saxophoniste américain Dave Liebman, Riccardo Del Fra, Timo Hietala, Christophe Dal Sasso & l’Ensemble Intercontemporain, dir. Susana Mälkki, interprèteront librement Colors et The Tree, compositions de Dave Liebman.  Renseignements : www.musicareaction.com

 

Le pianiste Roustem Saïtkoulov [notre photo] donnera un concert, Salle Gaveau, le lundi 16 mars 2009 , à 20h30.  Au programme : Mozart, Schubert, Liszt.  Renseignements : 01 49 53 05 07 . www.sallegaveau.com

©DR

 

Chansons françaises au Musée d’Orsay.  Mardi 24 mars, 12 h30 : Jean Richepin (1849-1926), de Fauré à Fragerolles (Roula Safar, mezzo-soprano, et Mirella Giardelli, piano).  Mardi 28 avril, 12 h30 : chansons et ballades dans l’œuvre de Debussy, Ravel et Poulenc (Jérôme Correas, baryton, et Philippe Cassard, piano).  Mardi 19 mai, 12 h30 : Joseph Kosma, de La Fourmi aux Feuilles mortes (Françoise Masset, mezzo-soprano, et Christine Icart, harpe).  Renseignements : www.musee-orsay.fr

©DR

 

La 1re édition du festival « Les Voix du printemps de la Sorbonne » se déroulera du 18 au 20 mars 2009.  Au Réfectoire des Cordeliers, pour les récitals & concerts de musique de chambre.  Au Grand Amphithéâtre de la Sorbonne, pour le grand concert choro-symphonique du 18 mars consacré à Ravel : Boléro, Tzigane, Mélodies hébraïques, Daphnis et ChloéRenseignements : 01 42 62 71 71. www.musiqueensorbonne.fr

 

L’opéra Didon et Énée de Purcell sera donné (en version de concert) les 18 et 19 mars 2009, à 21h, au Théâtre de Neuilly-sur-Seine (167, avenue Charles-de-Gaulle, 92200), par « Les Petits Chanteurs de Sainte-Croix de Neuilly » [notre photo], direction : François Polgár.  Renseignements : 06 10 32 55 99.  www.petitschanteurs.com

©DR

 

Quatuors à cordes à l’Auditorium du Louvre.  Mercredi 11 mars, 20 h : Quatuor Emerson (Beethoven, Bartók, Haydn).  Jeudi 12 mars, 12 h30 : Quatuor Escher (Haydn, Jalbert, Beethoven).  Mercredi 29 avril, 20 h, & jeudi 30 avril, 12 h30 : Quatuor Modigliani (Haydn, Lévinas, Beethoven, Webern).  Renseignements : 01 40 20 55 55 www.louvre.fr

 

Les 2es Rencontres chorales de Paris, Festival de chorales amateurs a cappella, réunira – du vendredi 20 mars au dimanche 5 avril 2009 - toutes les tendances vocales : du classique au contemporain, sans oublier le jazz, le gospel, les musiques du monde…  Lieux : salles de concert, auditoriums, lieux cultuels… des Xe et XIXe arrondissements.  Renseignements : 01 48 03 33 22 . www.jemmapes.com

 

Un concert Marc-Antoine Charpentier (1643-1704) sera donné, aux chandelles, le samedi 21 mars 2009, à 18h30, en l’Église du Val-de-Grâce.  Renseignements : 1, place Alphonse-Laveran, Paris Ve.  Tél. : 06 75 09 04 71. claude.sprezzatura@gmail.com

Hommage à Maurice Journeau (1898-1999).  Pour le dixième anniversaire de la disparition du compositeur, Isolde Choltes donnera un récital de ses œuvres pour piano, le samedi 28 mars 2009 , à 17h, en l’Église réformée du Luxembourg (58, rue Madame, Paris VIe).  Renseignements : www.journeau.com

 

Grand Amphithéâtre de la Sorbonne.  Mardi 7 avril, 20 h30 : Requiem de Fauré, Vier Gesänge op.17 (pour chœur de femmes, 2 cors & harpe) de Brahms.  Suite modale (pour orchestre à cordes & flûte) de Bloch.  Psaume 130  (pour chœur, positif & viole de gambe) de Hersant.  Avec Pauline de La Rochelambert (flûte), Mélodie Millot (soprano), Antoine Garcin (baryton), Ensemble instrumental & Chœur de Paris-Sorbonne, dir.  Denis Rouger [notre photo].  Renseignements : 01 42 62 71 71 www.musiqueensorbonne.fr

©DR

 

Au bénéfice de l’Unicef : Concert exceptionnel de l’Orchestre philharmonique de Radio France, dir. Myung-Whun Chung, le samedi 11 avril 2009 , à 20h, au Théâtre du Châtelet.  Airs d’opéra français et italiens, avec Natalie Dessay, Roland Naouri et Stéphane Degout.  Renseignements : 01 56 40 15 16 . www.radiofrance.fr

 

Collège de L’Itinéraire.  Le jeudi 30 avril, 15 h-18h30, au Centre de documentation de la musique contemporaine : conférence, projection & concert (coordination Nicolas Darbon).  Les solistes de l’Ensemble L’Itinéraire interprèteront le Quatuor n°1 de Michaël Lévinas.  Renseignements : CDMC – 12, place de la Fontaine-aux-Lions, Paris XIXe.  Tél. : 01 47 15 49 86 www.cdmc.asso.fr  ou www.ensembleitineraire.org

©C.Daguet/ éditions Henry-Lemoine

 

« Extension du domaine de la note », 9e Festival de création musicale (principalement consacré aux ensembles instrumentaux & au rapport musique/texte), se déroulera du 28 avril au 30 mai 2009 , à Paris et dans le Val-de-Marne.  Renseignements : 01 43 78 80 80 www.alamuse.com

 

Correspondances Schoenberg-Kandinsky.  Conférence d’Esteban Buch : « Die glückliche Hand d’Arnold Schoenberg / La Sonorité jaune de Wassily Kandinsky » (dimanche 5 avril, 11h30, Petite salle du Centre Pompidou).  Trois concerts : « Sprechcantando », œuvres de Luigi Nono, Andrea Vigani, Arnold Schoenberg (jeudi 9 avril, 20h, Ensemble de projection de l’Ircam).  « Solistes de l’Ensemble intercontemporain », œuvres de Bach, Liszt, Scriabine, Stravinsky, Schoenberg, Webern, Gérard Pesson (samedi 23 mai, 20h, Grande salle du Centre Pompidou).  « L’air d’autres planètes », œuvres de Schoenberg, Philippe Schoeller, Denis Cohen (vendredi 19 juin, 21h, Grande salle du Centre Pompidou).  Renseignements : 01 44 78 48 43 / www.ircam.fr ou 01 44 84 44 50 / www.ensembleinter.com

 

Les « Orchestrades Universelles » fêteront leur 25e anniversaire, sous le thème « Musique populaire : bonheur partagé ! ».  À Brive-la-Gaillarde (Corrèze), du 17 au 27 août 2009.  Inscriptions ouvertes.  Renseignements :   04 78 35 87 14 .  www.orchestrades.com

©DR

Francis Cousté

 

 

 

 

 

 


Hommage à Richard Sidney HICKOX (1948-2008)

 

Le 23 novembre, le grand chef d’orchestre anglais Richard Sidney Hickox disparaissait à l’âge de 60 ans.  Dans ces mêmes colonnes, j’avais rendu compte de la mémorable exécution londonienne qu’il avait conduite, en juin dernier, à Sadler’s Wells, de The Pilgrim’s Progress (1951), l’opus magnum de Ralph Vaughan Williams (1872-1958). Quelques mois après, vingt et un jours avant son décès, j’assistais - au Royal Festival Hall de Londres - à l’avant-dernier concert anniversaire qu’il consacrait à Vaughan Williams, à la tête du Philharmonia Orchestra. Ce concert de plus de trois heures, d’une rare densité, témoignait d’une belle reconnaissance envers l’un des compositeurs majeurs du XXe siècle. L’interprétation d’œuvres emblématiques - telles que la Fantasia on a Theme by Thomas Tallis (1910/19), la 9e Symphonie en mi mineur (1956/58), les Three Shakespeare Songs (1951), la 6e Symphonie en mi mineur (1944/50) et la 5e Symphonie en (1938/51) - a en tous points été exemplaire. L’énergie et l’émotion de Richard Hickox ont profondément touché un public nombreux, enthousiaste et concentré. Il est vrai que tout au long de cette année commémorative du cinquantième anniversaire de la mort de Vaughan Williams, Richard Hickox a déployé une activité qui, sans doute, a eu raison de ses forces. Il était véritablement au service de cette musique, en toute humilité.

 

Né le 5 mars 19 48, à Stokenchurch, dans le Buckinghamshire, Richard Sidney Hickox dirige, dès l’âge de 16 ans, le chœur de l’église de son père. Il poursuit ses études à la Royal Grammar School, High Wycombe, et à la Royal Academy of Music pour une année avant de rejoindre Queens’ College, de Cambridge, en tant qu’organiste. En 1971, il fait ses débuts professionnels de chef d’orchestre tout en formant le City of London Sinfonia (CLS) et les Richard Hickox Singers avec lesquels il présente un vaste répertoire du XIVe au XXe siècle. Entre 1972 et 1982, Richard Hickox est organiste et Master of Music à St Margaret’s, Westminster Abbey. Puis, dès 1976, il est nommé directeur du London Symphony Chorus. Deux ans plus tard, il se trouve à la tête de la Bradford Festival Choral Society. Sa compétence le fait connaître à l’extérieur : entre 1980 et 1985, il est un invité privilégié de la radio néerlandaise. Ce, sans compter les nombreuses sollicitations internationales. En 1988, le City of London Sinfonia lance un programme éducatif à partir duquel les musiciens travaillent dans les écoles, auprès des élèves, enfants et adolescents. Ils se rendent également dans les établissements spécialisés, soutiennent les ensembles formés d’amateurs, donnent des concerts auprès des malades dans les hôpitaux et dans les hospices.

 

Richard Hickox a, de surcroît, été un inlassable défenseur de la musique anglaise, non seulement celle de Vaughan Williams mais aussi celles de nombreuses personnalités pour la plupart inconnues en France. Parmi elles, il convient de citer, plus spécialement, outre Gustav Theodore Holst (1874-1934) - proche de Vaughan Williams - l’impressionnante figure de Sir Charles Villiers Stanford (1852-1924), grand symphoniste et remarquable professeur au Royal College of Music de Londres où il a formé de nombreux compositeurs non moins remarquables, comme Vaughan Williams et Holst. Richard Hickox s’est encore intéressé à l’emblématique Sir Edward William Elgar (1857-1934) et à ses nobles oratorios The Dream of Gerontius, opus 38 (1900), The Kingdom, opus 51 (1901/06), ce dernier réalisé à la suite de l’enregistrement inoubliable de Sir Adrian Cedric Boult (1889-1983), en 1969. Richard Hickox a encore gravé la musique du nostalgique Frederick Theodore Albert Delius (1862-1934), l’ami du dramaturge suédois Johan August Strindberg (1849-1912), et celle des maîtres de Britten, Frank Bridge (1879-1941) et John Nicholson Ireland (1879-1962). Sa version de la cantate The Canterbury Pilgrims, d’après le Prologue des « Contes de Canterbury » du poète médiéval Geoffrey Chaucer (1340/45-1400), de Sir George Dyson (1883-1964), manifeste la juste reconnaissance d’un chef-d’œuvre oublié. Richard Hickox a également valorisé les musiques du Master of the Queen’s Music Sir Arthur Drummond Bliss (1891-1975), de Herbert Norman Howells (1892-1983), l’un des plus importants compositeurs de musique liturgique, et de Gerald Raphaël Finzi (1901-1956), inspiré notamment par les textes de Thomas Hardy (1840-1928). Comptent aussi ses interprétations du surprenant symphoniste Charles Edmund Rubbra (1901-1986), de l’opéra Troilus and Cressida (1947/76) de Sir William Walton (1902-1983), de l’opéra biblique Ruth de Sir Lennox Randall Francis Berkeley (1903-1989), des partitions du jungien Sir Michael Tippett (1905-1998), et du symphoniste William Alwyn (1905-1985). Richard Hickox s’est encore consacré aux ouvrages lyriques de Benjamin Britten (1913-1976), Peter Grimes (1944/45), Billy Budd (1950/51) et Death in Venice (1971/74), et à la musique du trompettiste Sir Malcolm Arnold (1921-2006). En 2002, une fois de plus pour la marque Chandos, Richard Hickox a redonné vie à la belle Norfolk Rhapsody N°2 de Vaughan Williams, restée inédite depuis sa création au Festival de Cardiff, le 27 septembre 19 07, sous la direction du compositeur. Enfin, il a consacré l’un de ses derniers enregistrements à Kenneth Leighthon (1929-1988), promoteur d’un style fondamentalement mélodique qui a profondément influencé l’un des compositeurs actuels les plus impressionnants, l’écossais James MacMillan (1959-). Cet étonnant corpus voué à la musique anglaise constitue une précieuse collection pour une connaissance presque exhaustive de ce répertoire d’une richesse généralement insoupçonnée.

 

La vie de Richard Hickox était très occupée en tant que directeur musical de l’Opera Australia à Sidney, et de l’Orchestre national de la BBC du Pays de Galles (BBC National Orchestra of Wales). C’est précisément en ce dernier lieu, à Cardiff, qu’il se trouvait en novembre 2008 pour l’enregistrement d’une anthologie de Holst. Quelques jours plus tard, le 27, il devait diriger la représentation, à l’English National Opera de Londres, du visionnaire Riders to the Sea (1925/32), Play du dramaturge irlandais Edmund John Millington Synge (1871-1909) mis en musique par Ralph Vaughan Williams. Au cours de l’année 2008, sa collaboration avec le Philharmonia Orchestra a été très étroite. Le lundi 24 novembre, dans un message diffusé sur son site Internet, le comité de l’orchestre faisait part de sa profonde tristesse. De toute évidence, Richard Hickox a occupé une position unique dans la vie musicale britannique. En ce sens, il est le véritable successeur spirituel d’un Sir Adrian Cedric Boult qui, lui aussi, s’était mis au service de la musique de Vaughan Williams avec un profond sens du pastoralisme musical.

James Lyon, Hymnologue

 

 

 

 


Entretien avec Alice de Monfreid,

coordinatrice artistique et pédagogique d’Accentus

 

Quel a été votre parcours avant de rejoindre Accentus ?

J’ai commencé à apprendre le violoncelle à l’âge de six ans.  À dix-huit ans, je me suis mise au chant et j’ai intégré le Jeune Chœur de Paris, où j’ai chanté jusqu’à mes vingt-cinq ans.  En parallèle, j’ai suivi des études théâtrales à l’Université de la Sorbonne Nouvelle.  Je n’avais pas le caractère pour devenir intermittente du spectacle, j’avais besoin de stabilité.  En 2001 et 2002, j’ai donc été assistante de formation et de production à la maîtrise du Centre de musique baroque de Versailles.  J’ai ensuite été chargée de formation et de production du Jeune Chœur de Paris, avant de devenir, en 2006, coordinatrice artistique et pédagogique d’Accentus.  Avec le recul, je remarque que les questions pédagogiques ont toujours été importantes pour moi.  En Licence, j’avais ainsi monté une troupe pour promouvoir le théâtre contemporain dans les lycées.

 

En quoi consiste votre poste de coordinatrice artistique et pédagogique ?

Le poste se partage en deux fonctions. D’un côté, j’assiste Loïc Lachenal, notre délégué artistique, et de l’autre, je m’occupe des actions culturelles.  Avant ma prise de fonctions, celles-ci n’étaient que très peu développées. Il y avait eu quelques demandes, notamment de la part d’un responsable des Hauts-de-Seine qui souhaitait des ateliers pédagogiques dans les écoles, et de la part de la Maison de Solenn, une structure de l’hôpital Cochin qui traite des pathologies adolescentes.  C’était donc à moi de lancer ce vaste chantier ! Je recherche par ailleurs les sources de financement de ces actions culturelles, notamment dans le cadre du mécénat privé (la Fondation Orange nous apporte ainsi un soutien considérable).

 

Quelles sont les différentes actions culturelles proposées par Accentus ?

Il y a différents types d’ateliers.  Nous proposons une initiation à la musique polyphonique, où, pendant une heure, les enfants découvrent les différentes tessitures de la voix, encadrés par quatre chanteurs d’Accentus.  Au bout de la séance, les enfants arrivent à chanter une mélodie en quatuor vocal. Les pièces travaillées doivent être relativement faciles rythmiquement et d’un ambitus pas trop large (les enfants ne peuvent pas chanter au-dessus du mi).  Le répertoire va ainsi de l’Ave verum corpus de Mozart à des chants de Milhaud en passant par des Lieder de Brahms.  À côté de cela, nous proposons également une initiation à la musique contemporaine, basée sur le jeu vocal du compositeur Guy Reibel.  C’est un outil formidable qui permet de faire découvrir aux enfants les techniques propres au langage contemporain, depuis les bruits de souffle jusqu’aux cris en tous genres.  Différents chanteurs d’Accentus ont été formés à cette méthode et interprètent, en guise d’exemples, les Récitations d’Aperghis ou la Sequenza III de Berio.  Il y a aussi un atelier consacré aux voix de femmes, encadré par deux chanteuses.

 

Dans quel cadre proposez-vous ces actions jeune public ?

Nous sommes associés avec l’Éducation nationale.  À Paris, nous travaillons avec différents établissements du XIe arrondissement, classés en Zone d’Éducation Prioritaire.  L’avantage est de pouvoir suivre les élèves sur trois ans, du CM2 à la Cinquième, ce qui permet de développer une approche graduée de la voix.  Dans le cadre de notre conventionnement avec l’Opéra de Rouen, nous faisons aussi une tournée, avec différents ateliers, en Haute-Normandie.  En outre, nous nous intéressons aux écoles de musique. Nous avons créé un atelier spécifique destiné aux élèves instrumentistes.  L’idée est de les faire chanter et de leur montrer, par exemple, toute l’importance de la respiration.  Nous allons ainsi plus loin en technique vocale que ce qui est généralement proposé dans les cours de formation musicale.

 

Quelles sont les retombées de vos actions ?

Il y a des retombées sympathiques : nous recevons des dessins et de petits mots de la part des enfants.  Une classe s’est même amusée à écrire un roman policier, dans lequel Laurence Equilbey disparaissait le jour du concert.  Il fallait à tout prix la retrouver ! Ces actions enrichissent assurément le développement personnel de l’enfant.  Mais nous sommes à présent en train de mettre en place un système pour mesurer les retombées de manière plus précise.

 

Vos actions ne concernent pas que les enfants…

Nous formons également les professeurs d’école pour qu’ils préparent au mieux le terrain où nous allons encadrer un atelier.  Mais surtout, nous développons un grand nombre d’actions en milieux « empêchés ».  Nous travaillons ainsi en collaboration avec le CHU de Rouen.  Nos actions concernent notamment le service de pédo-psychiatrie, dans lequel sont traités en particulier les anorexiques.  Notre but est de montrer comment la voix peut constituer un outil pour se réapproprier son corps. Nous sommes aussi présents dans le service de rééducation des personnes âgées.  Nous réfléchissons actuellement à mener des actions envers les aveugles, d’autant que l’un des chanteurs d’Accentus, Bertrand Bontoux, est lui-même malvoyant.  Et nous essayons aussi de développer des projets en prison ainsi qu’un ancrage permanent dans un quartier parisien, nous permettant d’agir auprès des différentes tranches d’âge.  Au total, en 2008-2009, ce sont pas moins de 150 ateliers qui sont proposés, du CP aux maisons de retraite.

 

Continuez-vous personnellement à chanter ?

Je fais partie du Chœur de l’Orchestre de Paris – nous venons ainsi de donner la Messe en ut mineur de Mozart sous la direction de Paavo Järvi.  Je revendique l’idée qu’il est important, à un poste comme le mien, de garder un lien avec la pratique.  Cela me permet de savoir ce que je peux ou non demander à un chanteur, lors d’une action culturelle.

Atelier d’initiation à la polyphonie, Opéra de Rouen

 

Propos recueillis par Antoine Pecqueur

 

 

 

 


 

L'événement : Pelléas et Mélisande à Vienne.  Décidément le Theater an de Wien joue avec le succès.  Après un inoubliable De la Maison des morts de Janacek ( Boulez-Chéreau ) voici le chef-d’œuvre de Debussy. On attendait avec impatience la forme qu’allait lui donner Laurent Pelly, qui s’était jusqu’alors peu confronté aux sujets dramatiques.  Et on est conquis une nouvelle fois par son intuition théâtrale.  Le drame lyrique de Debussy n’est pas aisé à interprêter ; et pourtant quelle mine ! Le drame, intense, a pour centre de gravité le personnage de Golaud dont les autres ne sont peut-être que la projection.  Non pas un homme d'âge mûr, mais dans la force vitale, ce qui le rend à la fois plus vrai, plus vulnérable aussi dans son besoin de protéger.  La différence avec Pelléas est moins flagrante que de coutume, mais le rapport est plus juste.  Ce dernier est un jeune homme sain, spontané dans ses attitudes et ses sentiments.  Tout sauf éthérée comme dans une toile préraphaélite, Mélisande n’est pas passive.  Sa fragilité d’animal effarouché va vite disparaître, dès la rencontre avec Golaud.  De prime abord insouciante – elle rit, elle danse –, elle joue avec le hasard des rencontres.  Lors de la scène de la fontaine, partie de cache-cache avec Pelléas pas si anodine qu’il y paraît, elle ne semble pas naïve.  L’ambiguité caractérise le personnage plus que le mystère qui en émane.  Est-elle sincère ?  Ses dissimulations ne sont-elles que réactions naturelles d'un être instinctif ?  À la volonté de délivrer le texte sans affectation correspond, chez Laurent Pelly, la nécessité d’une dramaturgie misant sur la proximité des personnages.  Car ils fonctionnent, selon lui, entre générations en circuit fermé.  Ils évoluent dans une sorte de dédale intérieur (les diverses pièces du château enfoncé dans les ténèbres) ou extérieur.  L’atmosphère sombre entretient le secret. C’est que l’imagination s’empare du décor (Chantal Thomas).  Une vraie théâtralité s’en dégage, mystère insondable des êtres et des lieux, car - symbolisme oblige - les personnages sont profondément liés à un milieu, à une atmosphère.

Golaud (Roland Naouri), Mélisande (Natalie Dessay)

Theater an der Wien, janvier 2009 ©Armin Bardel

 

Les grands fûts d’arbres qui s’élancent, le treillis qui borde la fontaine, les lambeaux de pièces en enfilade, tout évolue dans un système tournant pour évoquer la diversité des lieux qui se glissent plus ou moins imperceptiblement à la faveur des interludes.  La gestuelle va au plus juste : le subit étonnement de Golaud découvrant l’absence de l’anneau au doigt de sa femme – tiens ! lâché mezza voce -, l’épisode de la tour où Pelléas enlace délicieusement Mélisande, le terrible échange entre père et fils à la fin du IIIe acte, d’une justesse expressive inouïe, le dialogue entre Arkel et Mélisande peu après, d’une extrême pudeur, contrastant avec la violence de la tirade subséquente de Golaud.  Lors de la rencontre du dernier soir, Mélisande dans un irrésistible élan se jette dans les bras de Pelléas qui la soulève pour l’étreindre : indicible émotion.  La scène finale a pour théâtre une chambre exiguë, les personnages serrés autour de la couche de Mélisande.  Le questionnement de Golaud, penché à la tête du lit, est presque insupportable, pour arracher ce qu’il veut ou croit savoir.  Mais elle s’en ira sur ces deux mots murmurés dans un souffle « la vérité, la vérité ».  Il restera seul comme il l’était au début, lorsqu’il disait être perdu lui-même, s’enfonçant dans la forêt de nulle part.

Pelléas (Stéphane Dégout), Mélisande (Natalie Dessay)

Theater an der Wien, janvier 2009 ©Armin Bardel

 

Natalie Dessay atteint dans cette dernière scène la sobre grandeur, ses interventions parées d’une simplicité si vraie qu’elle en devient bouleversante.  Cette simplicité forge un parcours qui vit le personnage du tréfonds.  Quelle chance de l’aborder en telle circonstance ! La voix tutoie peut-être bien celle, idéale, de Mélisande, justement corsée dans le medium.  Le Pelléas de Stéphane Degout est la lumière même, le naturel généreux, et le timbre rêvé de baryton Martin.  Le rôle de Golaud, Laurent Naouri l’a encore peaufiné, d’une tragique franchise : un homme blessé dans ses convictions, rongé par la jalousie, certes – à la différence du roi Marke qui lui, saura pardonner – mais sans cette vilenie qui tire souvent vers l’excès opératique.  Quel régal que cette diction claire qui fait un si beau sort au texte de Maeterlinck ! La parfaite intelligibilité des mots caractérise encore Arkel, Philippe Ens, et Geneviève, Marie-Nicole Lemieux.  Le Radio-Symphonieorchester Wien de Bertrand de Billy place l’accent sur les sonorités dramatiques, en accord avec la régie.  Le discours est poignant et les « citations » wagnériennes se sont pas gommées.  La fluidité du tempo donne au texte musical une plasticité qui enveloppe les paroles, avec juste cette accélération du débit là où le drame devient prégnant.  Les interludes, joués à rideau ouvert, ont rarement semblé aussi intégrés à l’action.  Une immense réussite !

 

***

 

Fra Diavolo à l’Opéra-Comique.  Si l'idée était judicieuse de monter la pièce célèbre d’Auber, un bon exemple du genre opéra-comique qui fleurit au XIXe siècle, la réalisation scénique qui en a été donnée à l'Opéra-Comique laisse un sentiment de frustration.  Le maître des lieux, Jérôme Deschamps, joue le premier degré et l'imagerie presque banale.  Le parti pris pourrait être intéressant s'il s'accompagnait de clins d'œil.  Rien de cela ici, ou si peu. Une impression de vacuité s'empare du plateau à plus d'un moment.  La direction d'acteurs est peu consistante, livrant les interprètes à eux-même en des attitudes convenues.  On les sent peu à l'aise : Kenneth Tarver, dans le rôle éponyme, paraît bien (trop) sympathique pour camper un brigand, même au grand cœur.  Son beau sourire et sa séduisante prestance ne suffisent pas à l'affaire.  La ligne de chant n'est, en outre, pas toujours immaculée dans une partie, il faut le reconnaître, d'une redoutable difficulté pour ce qui est du registre aigu.  Sumi Jo, qu'on a plaisir à revoir, est elle aussi bien empruntée. On mesure ici combien est déterminante la direction d'acteur pour la crédibilité d'un personnage.  Passé un début laborieux, la voix retrouvera vite tout son prestige.  Le grand air de Zerline et ses vocalises acrobatiques sont un régal.  Doris Lamprecht et Marc Molinot prêtent tous leurs efforts au deuxième couple, une lady et son lord de mari.  Vincent Pavesi, Matteo, campe un aubergiste très amusant.  Alexandre Guerrero, Lorenzo, campe par contre un père très libéré, doté d'un beau timbre de baryton-basse.

La direction de Jérémie Rohrer procure un vrai plaisir, se délectant de l'originalité de cette musique fort nuancée qui de la gaillarde marche militaire vous fait, en un instant, passer à l'épanchement lyrique tout sauf sentimental, à travers une amusante enfilade de duos, trios et quatuors vocaux.  Car il sait ménager les écarts de dynamique. Et ce n'est pas sa faute si l'acoustique en forme de loupe délivre un fff, là où le chef a voulu ne donner qu'un ff.  Ses musiciens du Cercle de l'Harmonie ajoutent à la sûreté de l'exécution la finesse d'une subtile palette sonore, celle en particulier de la petite harmonie dont se détache le chant du basson.  Enfin les chœurs des Éléments font merveille par une claire diction et une absence totale de routine. Dommage qu'ils ne soient pas mieux dirigés par le metteur en scène.

©Pierre Grobois

 

***

 

Une rareté à l'Opéra de Lyon : Le JoueurDans le cadre de sa prospection du répertoire russe, et après la trilogie Tchaïkovski, l'Opéra de Lyon s'attache à faire découvrir une œuvre plus rare, Le Joueur de Serge Prokofiev.  Rare, mais passionnante.  Écrit par le compositeur lui-même d'après la pièce éponyme de Dostoïevsky, l'opéra connaîtra une genèse difficile puisque débuté en 1915, il ne sera créé, à Bruxelles, qu'en 1929.  Calquant la pièce moyennant quelques adaptations pour des besoins de logique musicale, Prokofiev y dresse une formidable galerie de portraits sortis d'une microsociété dévorée par la passion du jeu et le credo « l'argent peut tout ».  La représentation est une réussite car elle réunit une équipe soudée musique-régie.  Pour sa première prestation opératique lyonnaise, Kasushi Ono réussit haut la main à faire de l'Orchestre de l'Opéra de Lyon un personnage essentiel.  Sa battue nerveuse et colorée fait merveille dans cette musique fondue et dense, aux thèmes enchevêtrés plus que de coutume chez le compositeur - à la différence de l'Amour des trois Oranges par exemple. L'extrême mouvance, en forme de sautillement permanent est irrépressible, comme la brillance de l'orchestration ou encore le sombre lyrisme qui s'attache au personnage de Polina. La distribution est de choix. Le rôle titre, ce jeune fou, infatigable parleur, est incarné par Mischa Didyk, d'un étonnant naturel et d'une déconcertante facilité vocale malgré une tessiture tendue, suffisamment distingué pour l'avoir déjà chanté avec Barenboim à Berlin et à Milan.  Marianna Tarasova campe une grand-mère hystérique, figure obligée des grandes fresques russes – on pense à la comtesse de La Dame de Pique.  Kristina Opolais, Polina, et Alexander Teliga, le Général, sont tout aussi excellents.

La mise en scène de Grzegorz Jarzyna donne à voir un vrai travail de dramaturgie : utilisation optimale de l'environnement décoratif – un hôtel dont la configuration se transforme au gré de l'action par des effets de symétrie, rehaussée par des éclairages aux couleurs vives et utilisés en figures géométriques.  Une gestuelle compulsive et des gestes au ralenti, pour ce qui est des rôles muets qui composent l'environnement, mettent en exergue la passion rentrée des protagonistes pour le jeu.  Elle permet aussi d'animer le plateau durant des dialogues par endroit un brin rébarbatifs - à la limite peut-être de distraire l'attention, durant la première partie du moins.  Le traitement inventif des masses rappelle le travail d'un Erlo, telle cette animation en ombres chinoises sur fond bleu nuit, durant le premier interlude du dernier acte, de la foule des joueurs et autres curieux déambulant en tous sens.  Les confrontations livrent constamment des moments de théâtre forts.

©Jean-Pierre Maurin

 

***

 

Yvonne, princesse de Bourgogne de Philippe Boesmans à Garnier.  Philippe Boesmans peut être un compositeur heureux car il a la main juste.  Son nouvel opéra Yvonne, princesse de Bourgogne vient de remporter un triomphe à l'Opéra de Paris.  Chose rare…  Il faut dire qu'il sait comme peu choisir ses sujets.  Avec le complice Luc Bondy, il aime se confronter à des textes forts : hier Schnitzler, Shakespeare ou Strindberg, aujourd'hui Witold Gombrowicz.  La partition ne laisse pas indifférent : sonorités nerveuses et transparentes, la plupart du temps chambristes, d'un orchestre d'une trentaine de musciens, oscillant entre tonal et atonal avec soudain des bribes d'airs semble-t-il connus ; des passages fortement lyriques et de brusques ruptures stylistiqes pour passer du sombre au léger.  Les voix sont traitées en sprechgesang, voire parlées.  Basée sur la pièce de Gombrowicz, sa « comédie tragique » mêle le burlesque, presque le grotesque, et le dramatique vrai en un tout savamment dosé qui enchevêtre théâtre et musique au point de conduire à faire de l'héroïne un rôle non chanté, quasi muet.  Pari osé, mais totalement maîtrisé, car le personnage de celle qui va devenir, pour un temps, la Princesse, par le caprice d'un Prince fantasque, tient l'espace malgré son apathie - à moins que ce ne soit à cause d'elle - comme attirant irrésisiblement toutes les autres figures.  Et quelles figures ! Un roi à la fois bestial et infantilisant, veule et trivial, une Reine quelque peu hystérique dont la passion pour l'écriture reste en demi-teinte, un Prince révolté contre le carcan familial qui, par bravade vis à vis de l'ordre établi, s'entiche d'une femme parce qu'elle est laide.  Tous cherchent à saisir l'insaisissable, l'énigme qu'est cette jeune femme qui ne parvient pas à séduire.  Elle en devient déchirante, déchaînant la bêtise alentour – une scène de rires d'anthologie - et la faconde cynique, ubuesque, de ceux qui la côtoient.

La régie de Luc Bondy est hallucinante de vérité, attitudes parodiques, gestes vécus au ralenti comme mécaniques, rictus des visages, corps tendus de douleur, telle Yvonne dévalant peu à peu l'escalier la tête en bas.  Les compositions de groupes ont le tranchant du rasoir et la cruauté de la provocation.  Le tableau final atteint le degré ultime du monstrueux : un banquet de noces où, pour se débarrasser de l'encombrante épousée, on provoque sa mort par « étouffement naturel » alors que les invités, vêtus de noir et blanc, entonnent un sarcastique « Lacrimosa » sur l'air « Nous sommes tous mortels ».  Le débit lent de la mise en scène devient une force, qui accentue le satirique, le grotesque parodique, que n'aurait pas rénié un Chostakovitch.  Les interprètes sont hors pair, à commencer par l'actrice Dörte Lyssewski qui est un tour de force à elle seule : une présence étonnante, grand enfant apeuré, d'une gaucherie désarmante, si poignante dans le drame qu'on lui fait jouer.  La Reine, Mireille Delunsch, dont le talent dramatique est prodigieusement mis en valeur, livre une interprétation d'une fascinante facture.  Paul Gay, le Roi - découvert naguère à l'Opéra de Lyon et désormais bien établi dans la cour des grands – est grandiose.  Yann Beuron prête au Prince sa voix magnifiquement conduite, pour une composition des plus étudiées, et pourtant spontanée.  Le Klangforum Wien est, sous la houlette habile de Sylvain Cambreling, on ne peut plus à l'aise pour décortiquer la superbe musique évocatrice de Boesmans.

©Ruth Walz/Opéra national de Paris

 

***

 

Beethoven à Pleyel, vu par Gardiner.  La résidence, Salle Pleyel, du London Symphony Orchestra est devenue un événement marquant de la vie musicale parisienne, tout comme celle des Wiener Philharmoniker.  C'est dire le niveau d'excellence auquel s'est hissé l'orchestre londonien.  La baguette était, cette fois, confiée à John Eliot Gardiner et le compositeur choisi Beethoven.  Programmation à fois aisée et délicate. Car interpréter le maître de Bonn dans des pièces aussi rabâchées que la 5e Symphonie et le 3e Concerto amène immanquablement au jeu des comparaisons entre orchestres, entre chefs.  Eh bien, sir Eliot a conquis ! Non parce qu'il se fend d'une intervention parlée, façon Bernstein, pour dire - avec raison - que plus que du Destin, la 5e relève de l'hymne à la liberté, et doit être lue avec, à l'esprit, les liens qui l'unissent à la musique française de l'époque, un Chérubini en particulier, mais bien parce qu'il en livre une étonnante exécution, aussi éloignée que possible du poncif grandiloquent.  Le premier mouvement, joué prestissime, mais vite assimilé tant la démarche est cohérente, a l'élan, l'urgence de l'évidence.  Et lorsque se détache, moment de répit, la mélopée du hautbois, on est empli de bonheur.  La virtuosité exigée des musiciens est phénoménale – ils sont, à vrai dire, habitués à de telles prouesses avec leur chef permanent, Valery Gergiev.  Les traits des contrebasses, placées au fond pour envelopper le son (tout comme les cellos disposés au centre gauche), ont rarement sonné aussi emportés au 3e mouvement qui fait bien figure de scherzo malgé son appelation d'allegro.  Le finale est fort brillant, glorieux au bas mot, avec cette fermeté non cassante qui doit caractériser toute conclusion beethovénienne.  Il emporte l'enthousiasme en tout cas.  Maria João Pires [notre photo], dont chaque apparition est marquée au coin de la musicalité la plus sûre, jouait peu avant le 3e Concerto pour piano.  Là encore quelle leçon de sensibilité : l'entrée affirmée du soliste, le dialogue cursif avec la flûte durant le bel allegro con brio, dont la cadence sera un moment de ravissement, du plus pur Beethoven, mais qui dans son traitement d'arpèges, annonce peut-être Chopin (un bis de celui-ci tendrait-il à le prouver ?).  La profondeur abyssale teintée d'une vraie émotion, sans afféterie, parera le largo, immense mélodie sur un orchestre lustré.  Le finale sera une dynamique ballade où le piano caracole et entraîne avec lui tout l'orchestre dans une fort joyeuse équipée au presto conclusif.  Partout la complicité entre soliste et chef fait plaisir à voir, et à entendre.

©Roland Bouvier

 

***

 

Le Gewandhaus Orchester de Leipzig à Pleyel.

Le Gewandhaus Orchester [notre photo, à Leipzig] occupe une place à part parmi les grandes phalanges européennes.  Créé en 1781, il a, à son actif, d'avoir joué les symphonies de Beethoven du vivant du compositeur. Ne sera-t-il pas dirigé ensuite par Mendelssohn, Furtwängler, Walter, Kurt Masur plus près de nous.  Il a joué, dit-on, la première intégrale au monde des symphonies de Bruckner. Ce qui le qualifie particulièrement pour interpréter sous la houlette de son actuel directeur musical, Riccardo Chailly, la Symphonie n°3. La sonorité est riche, marquée de cette patine que seules les grandes phalanges savent préserver : cordes soyeuses, cuivres ronds et chauds, petite harmonie suprêmement expressive - la flûte solo est un régal en soi.  De telles qualités deviennent des atouts lorsqu'il s'agit de traduire le vaste univers de Bruckner. Cette troisième dite « Wagner » en hommage au maître vénéré, fut un échec lors de sa création : salle à peu près vidée dès mi-parcours et critiques acerbes du fameux Hanslick : « Union de la Neuvième symphonie de Beethoven avec la chevauchée des Walkyries » assènera-t-il ! Le maestro Chailly, en bon italien, possède la mesure de cette musique dont il décortique la dramaturgie souvent déroutante (premier et dernier mouvement). Il semble se délecter de ces masses sonores voluptueuses – les cordes sont disposées de manière originale : contrebasses à gauche, cordes graves au milieu et violons répartis à droite et à gauche – de ces accords amplifiés, de ces crescendos en entonnoir, de ces ruptures où le silence assume un rôle aussi important que ce qui précède ou va suivre.  L'andante dont la dynamique nuancée est on ne peut plus travaillée, atteint des profondeurs abyssales, là ou l'hommage à Wagner est le plus tangible avec ses cuivres triomphants.  Le scherzo débute immatériel et danse comme rarement. Il évolue tel un mouvement perpétuel. La version jouée ici - le remake de 1878 - ajoute en effet une sorte de déroulement à la coda. Le trio en forme de ndler, apporte une belle diversion agreste à une ambiance qui confine déjà à quelque fête campagnarde. Formidable exécution qui emporte l'adhésion.  En première partie, l’exécution de la Deuxième Symphonie de Beethoven a paru plus prosaïque : effectifs un peu trop fournis, tempos moins imaginatifs, loin des interrogations d’un Gardiner deux jours avant dans la Cinquième. Il n’empêche, une mémorable soirée d'orchestre !

©DR

Jean-Pierre Robert

 

 

 


 

 

Nous connaissions le PAF (Paysage Audiovisuel Français), je voudrais m’interroger ici sur le PIP (Paysage Inquiétant de la Presse) : trois revues musicales « généralistes » s’offraient en kiosque aux mélomanes ; il n’y en aura plus que deux – ce qui signifie deux opinions différentes seulement dans un domaine aussi subjectif et passionné – en raison des fusions annoncées.  Si l’on compare la place de la musique dans les grands quotidiens avec ce qu’elle fut il y a trente ans et plus, on peut légitimement se demander si notre art existe encore (mais il est vrai que les recettes publicitaires générées par le moindre coup de pied d’un footballeur incitent à autrement plus de considération...).  Chacun sait qu’en musique, comme en d’autres domaines, la recherche assidue de tout ce qui a trait au sujet favori de chaque individu passe désormais par Internet, remettant en cause la prétention des rédactions de journaux à poser des perspectives informées sur des « complexes » de situations, alors que la mentalité, soit monomaniaque, soit « zappeuse », de l’internaute se concentre sur la collecte de « simples » additionnés bribe par bribe, sans esprit de synthèse, sans recul historique (nous adoptons volontairement un vocabulaire pharmacologique, car c’est peut-être au chevet d'une société malade que les symptômes de notre discipline appellent de se pencher).  Les journalistes politiques, on le sait, s’inquiètent de l’importance donnée aux blogs – opinions individuelles écrites à chaud – par rapport à l’analyse des grands courants de fond que l’on serait en droit d’attendre de la réflexion de professionnels indépendants.  Certes, à ne point se montrer irréprochables (priorité donnée à « l’événementiel », perméabilité aux courants d’opinion, faiblesse face à certaines pressions), les journalistes ont, dans maints domaines dont le nôtre, perdu toute crédibilité : il est à ce sujet fort instructif de se rendre chez un disquaire pour discuter avec sa clientèle de la « valeur » des récompenses attribuées par les revues spécialisées (à mettre en parallèle avec ce qui se dit sur les Prix littéraires !)...

Dans ce sombre contexte, on demeure un peu éberlués de voir une équipe de sympathiques téméraires fonder une revue (oui ! oui ! à l’heure où, soit l’asphyxie, soit la survie artificielle guettent de véritables institutions en place depuis des décennies !), qui plus est, dans le domaine le plus confidentiel qui soit : l’orgue (rendez-vous compte ! quels inconscients !).  Et en plus, ils la veulent attractive, belle à regarder et à entendre (CD-Rom joint, avec des éléments documentaires par le son, l’image, le texte additionnel)... et en plus, leur initiative marche (bon départ, avec un chiffre d’abonnés à faire pâlir leurs aînés) !  Nous voulons parler de la revue Orgues Nouvelles qui s’achemine gaillardement vers son n°4, grâce à un éditeur lyonnais (« Voix Nouvelles ») qui n’a rien d’un illuminé (précision utile, car le seul fait de créer un magazine d’orgue aurait pu laisser planer le doute sur ce chapitre !).  L'initiateur artistique du projet, Georges Guillard, a d’emblée tenu à ce que la musique soit au premier plan (quel audacieux !), et non le fétichisme du tuyau qui rend généralement le milieu organistique si replié sur lui-même ; il a été vite rejoint par Pascale Rouet, bien connue pour son engagement d’interprète et d’exégète en faveur de la musique contemporaine, et secondé par Alain Cartayrade, véritable centre de documentation vivant sur l’orgue.  À une rédaction partisane, qui donnerait une couleur sectaire dommageable dans un milieu incurablement noyauté par ses « chapelles », il a été préféré l’appel à des collaborateurs divers, en fonction de leurs domaines de compétence.  À sa grande surprise, l’auteur de ces lignes a même été contactée pour s’exprimer sur ses « spécialités » (c’est dire !).  Paradoxe des paradoxes, à l’heure où l’offre généraliste décline, une publication nouvelle-née, partie d'une « niche » ultra-spécialisée, peut-elle espérer gagner du terrain en élargissant le champ de l’information et en comblant les vides laissés au sujet de certains répertoires musicaux ? C’est tout le mal que l’on souhaite à la courageuse équipe d’Orgues Nouvelles.

Sylviane Falcinelli

 

 

 


Festival d’Aix-en-Provence.  La 61e édition du célèbre festival français aura lieu du 3 au 31 juillet 2009 , sous le thème « Opéra et mythe ».  Quatre opéras se partageront l’affiche : Le Crépuscule des Dieux, ultime journée du Ring, dernier volet de la passionnante production signée de Stéphane Braunschweig et dirigée par Simon Rattle, avec ses prodigieux Berliner.  Une aventure « qui aura fait reculer les limites du Festival d’Aix », selon Bernard Foccroulle, son directeur. Incontournable ! (3, 6, 9, 12 juillet).  Idomeneo se verra offrir une nouvelle production due à Olivier Py et dirigée par Marc Minkowski, qui sauront trouver les vrais accents de ce qui est sans doute la plus tragique des œuvres lyriques de Mozart et qui porte explicitement l’empreinte des Lumières (4, 7, 10, 13, 15, 17 juillet).  Avec Orphée aux Enfers, Offenbach revisite un mythe combien célébré sur la scène opératique, avec drôlerie cette fois, pour ne pas dire causticité ; en tout cas une fine intelligence.  La régie d’Yves Beaunesne fera équipe avec la direction d’Alain Altinoglu (5, 8, 9, 11, 14, 16, 18, 20 juillet).  Enfin une nouvelle présentation de La Flûte enchantée (dans une régie connue de William Kentridge) sera adornée par René Jacobs, dont on sait la manière personnelle qu’il a de renouveler l’interprétation mozartienne (25, 26, 28, 29, 30, 31 juillet).

Côté concerts, on écoutera, au délicieux Théâtre du Jeu de Paume, une intéressante série de musique de chambre jouée par les diverses formations du Berliner (4, 6, 7, 10 juillet), un concert de l’Académie européenne de musique et de la Camerata Salzburg (15 juillet) et des récitals du celliste Heinrich Schiff (23, 24 juillet). Ou au Grand Théâtre de Provence, trois concerts du Berliner Philharmoniker (dirigé par Boulez, le 5 ; par Rattle, les 8 et 11 juillet), et encore des soirées à thème, avec Louis Langrée et Magdalena Kozena (10 juillet), ou Christophe Rousset et Joyce di Donato (27 juillet).

L’Académie européenne de musique, pour sa 12e édition, sera encore un creuset d’actions de formation (100 artistes encadrés par 27 professionnels) sur le chant mozartien, les mélodies et le lied, ou encore la musique de chambre de Haydn, comme de créations : atelier « Opéra et création ».  Les actions éducatives seront articulées autour de trois axes : sensibilisation, création (dont un projet « Parades » inspiré de l’œuvre de Picasso, le 27 juillet) et formation proprement dite.  Des actions socio-artistiques, dites « Passerelles », compléteront ce dispositif ambitieux qui fait d’Aix un vivier de jeunes talents et un lieu de convivialité entre publics.

Renseignements : Boutique du Festival, Palais de l’Ancien Archevêché.  Tél. : 0 820 922 923.  www.festival-aix.com

 

***

 

Théâtre du Châtelet.  Sait-on que les dix grands drames lyriques de Richard Wagner furent précédés de quelques essais, dont Les Fées, son premier opéra (1833).  Sur un conte de Carlo Gozzi, dont il modifiera le dénouement, le musicien écrit un opéra romantique dans la veine de Weber, et à grand spectacle, impressionné qu'il était alors par Meyerbeer.  Fantastique échevelé, philtres, épreuves initiatiques, symbolisme moral et philosophique, voilà des recettes qui carctériseront l'esthétique du maître futur de Bayreuth.  Le spectacle du Châtelet devrait apporter son lot de surprises grâce à la régie de Emilio Sagi, jamais à cours d'imagination. La direction musicale de Marc Minkowski est gage de qualité, qui sait choisir ses sujets, en l'occurrence une œuvre gigantesque de par ses proportions orchestrales et vocales !  Les 27 et 29 mars ; 1er, 4, 7 et 9 avril 2009.  Renseignements : 01 40 28 28 40. www.chatelet-theatre.com

 

***

 

L’Opéra de Nancy présente - en coproduction avec le Theater an der Wien - une version scénique du Messie de Haendel, qui sera défendue par Claus Guth.  Si l'idée paraît a priori curieuse, il faut se souvenir que chez Haendel la spiritualité tenait sa force du savoir-faire de l'homme de théâtre. Il est intéressant de voir quelle lecture de cet oratorio peut avoir un des grands régisseurs actuels. En tout cas Jean-Christophe Spinozi et l'Ensemble Matheus auront à cœur de magnifier ces pages d'une sublime inspiration.  Opéra national de Lorraine, les 24, 26, 28, 29, 30 avril 2009.  Renseignements : 03 83 85 33 11 (13h-19h).  www.opera-national-lorraine.fr

 

***

Jean-Pierre Robert

 

 

 


Haut

FORMATION MUSICALE

Mikaël LE PADAN : L’Opus à l’Oreille Cours complet de formation musicale.  1er cycle, 4e année.  « Crescendo », Billaudot : G 7433 B.

L’idée fait son chemin : la principale originalité de ce cours de Formation musicale est de faire le lien, à l’intérieur même du cours, entre les notions solfégiques et leur application directe à l’instrument. On ne peut que se réjouir de cet état d’esprit. Tous les paramètres du cours sont pris en charge, aussi bien les incontournables (lecture, rythme, chant) que la culture musicale (acquisition d’un vocabulaire, chronologie des compositeurs…).  Les œuvres musicales sont très présentes.  Une méthode à découvrir très vite.

 

Anthony GIRARD : Le langage musical de Bach dans Le Clavier bien tempéré, vol. 2. Billaudot : G 8464 B.

L’actuel directeur du CRR de Rouen nous donne ici un travail d’analyse passionnant orienté notamment vers le nouvel « éthos » des modes que suppose l’exploitation des vingt-quatre tonalités permise par un « clavier bien tempéré ». C’est donc un ouvrage à lire partition en main et - si l’on n’est pas pianiste ou que l’on ne se « débrouille » pas sur un clavier - avec plusieurs interprétations de ce chef-d’œuvre.

 

Olivier NOCLIN & Serge FOLIE : Lugdirythmes 3.  Lugdivine (www.lugdivine.com. Avec CD.

Même s’il ne s’agit pas à proprement parler d’une nouveauté mais d’une réédition, il est indispensable de parler à nouveau de cette remarquable collection. Nous avions dit tout le bien que nous pensions de ce travail dans la Lettre n°21.  On pourra s’y reporter pour de plus amples détails. Mais disons que ce n°3 possède les mêmes qualités que le n°2 : qualité de la réalisation, pertinence des conseils donnés. Rappelons qu’il s’agit d’initier au rythme, par la pratique, des enfants de la fin du primaire au collège.

 

Olivier NOCLIN : Pays des Andes. « Rythmes en stock ». 1CD.  Du même auteur, dans la même collection : Brésil.  Lugdivine (www.lugdivine.com).

Là non plus, ce n’est pas une nouveauté, mais il me semble important de parler de ces réalisations trop peu connues et de grande qualité. Chaque titre, outre la partition publiée dans le livret, fait l’objet de trois versions sonores : une qui propose l’enregistrement intégral, une deuxième qui donne seulement l’accompagnement instrumental, et une version « approfondissement » - la plus originale - qui traite uniquement les parties de percussion pour faire ressortir à la fois la décomposition de chaque rythme et sa place au sein de la polyrythmie. Une présentation géographique, historique et musicale précède le tout. Il s’agit donc de deux livrets d’une grande richesse et qui méritent vraiment d’être expérimentés et exploités.

                   

 

 

PIANO

PIANO

Cécile MÜLLER : La musique au piano. Histoire d’écoutes et de touchers.  Fuzeau : 50517.

Voilà un ouvrage passionnant qui veut englober tous les aspects de l’enseignement du piano en rappelant avec force que cet enseignement est d’abord destiné à faire… de la musique ! Rappel, hélas, toujours d’actualité.  Ce livre intéressera tout autant les musiciens pianistes, jeunes ou adultes, débutants ou confirmés, les professeurs de piano, les parents de jeunes pianistes, et tous ceux qui s’intéressent de près ou de loin à la musique de piano.  Certes, on ne peut s’attendre, en moins de deux cents pages, à un travail exhaustif, mais il faut reconnaître que toutes les questions essentielles sont traitées, et souvent sous un jour original, plein d’intérêt.  On notera en particulier l’apport du point de vue de l’ostéopathie sur les postures du pianiste et le fonctionnement de ses mains.  Claude Vatère, ostéopathe-posturologue, est particulièrement convaincant.  Et bien sûr, le pianiste ne serait rien sans le piano : le chapitre consacré à l’histoire de l’instrument, intimement lié au propos pédagogique, doit beaucoup à la collaboration de Renée Geoffrion, facteur et restaurateur de pianos anciens et clavicordes.  Cet ouvrage éminemment pratique incitera à continuer et enrichir la réflexion proposée.  Un lexique et une bibliographie qui n’oublie pas Marie Jaëll, abondamment citée, complètent le tout.  Bref, il s’agit d’une sorte de livre de chevet qu’on pourra reprendre souvent avec profit.

 

Éric LEBRUN : Luni di fuoco.  Trois poèmes pour piano, op.14. 1CD. Delatour : DLT 1473.

Ces trois poèmes sont dédiés à Cécile Hugonnard-Roche, qui a enregistré ces trois pièces avec une grande sensibilité et un grand talent sur le CD joint. Il s’agit bien de poèmes, à la fois fougueux, sensibles, méditatifs, d’une grande beauté. Éric Lebrun est un compositeur avec lequel il faut compter.

 

Davide PERRONE : Jazz miniatures pour piano.  Delatour : DLT 1235.

Sans grande difficulté, ces deux petites pièces ne manquent ni de charme ni de caractère.

 

Davide PERRONE : Dandy Valses pour piano.  Delatour : DLT 1575

Deux courtes valses élégantes, simples, mais pas si faciles… Une musique de qualité qui ne peut que développer le sens musical des élèves.

 

Ludwig van BEETHOVEN : Grande sonate pathétique pour le clavecin ou le pianoforte.  Œuvre 13 – (1799), publiée sous la direction de Jean Saint-Arroman. « Facsi Music », Fuzeau : 50161.

Ce fac-similé a été réalisé à partir d’un exemplaire de l’édition originale de cette œuvre par l’éditeur viennois Joseph Eder, en 1799. Quand on connaît le soin que le compositeur apportait au contrôle des épreuves de ses œuvres, on comprend l'importance de ce document. Il est émouvant de regarder tous les détails de cette édition et de jouer en utilisant cette partition. Rappelons que le soin apporté par les éditions Fuzeau à ces fac-similés est fait précisément pour que ces « Facsi Music », publiés sans commentaire, permettent – à un prix intéressant - de se servir de ces partitions pour le travail quotidien.

 

VIOLONCELLE

JANÁČEK : Œuvres pour violoncelle et piano.  Nouvelle édition par Jiří Fukač, Bedřich Havlík & Jiří ZahrádkaBärenreiter Urtext : BA 9509.

Il s’agit de deux versions de Pohádka, œuvre écrite vers 1910. L’histoire de l’œuvre et des éditions est assez complexe.  L’important est de disposer maintenant d’une édition critique et intégrale de ces deux versions qui diffèrent de façon significative.

 

Christophe DELABRE : Jeux croisés.  Sept pièces pour 2 et 3 violoncelles.  Niveau 1er et 2e cycle.  Delrieu : GD 40 017.

Comme le dit fort justement l’auteur, « la musique de chambre tient un rôle fédérateur et incitateur dans les apprentissages musicaux ». Comme son titre l’indique, mélodie et accompagnement sont équitablement répartis dans ces sept pièces de style varié et toujours caractéristique, allant du Tango au Parfum du désert en passant par la Tarentelle.  Voilà de quoi ne pas oublier que la musique est d’abord un plaisir.

 

SAXOPHONE

Marie-Hélène FOURNIER : 5 Muses (1990) pour saxophone alto, saxophone soprano, saxophone ténor et acousmatique.  « Nouveaux horizons », série « Les cahiers de l’électro ». Fuzeau Classiques : 8643.

Précisons tout de suite que ces pièces s’adressent à un seul saxophoniste (ou plusieurs à la suite) jouant successivement les différents membres de la famille.  Le CD est le complément indispensable de l’exécution de l’œuvre qui forme un ensemble cohérent. La compositrice, qui explore par ailleurs toutes les formes de musique, indique qu’« un aspect important de cette écriture est de montrer qu’il est possible d’envisager la justesse rythmique et la justesse d’intonation de plusieurs façons ».

 

CHANT CHORAL

Kurt SUTTNER, Max FREY, Stefan KALMER, Bernd-Georg METTKE : Let’s get singing.  Musique pour chœur mixte du monde entier.  Gustav Bosse Verlag (www.bosse-verlag.de).

Voilà un copieux recueil qui comblera les chefs de chœur à la recherche de répertoire. Ces chants de tous pays sont soit des originaux, soit des arrangements pour chœur mixte a cappella, généralement de difficulté moyenne. Ils sont présentés dans leur langue d’origine, ce qui est toujours préférable même si la prononciation du chœur laisse parfois à désirer, ou doublés d’une traduction anglaise. Si l’on désire une adaptation française, il faudra donc faire preuve d’un peu d’imagination… sauf pour les quelques chansons françaises, bien entendu ! Un CD est disponible avec les textes parlés enregistrés pour travailler la prononciation.

 

ACCORDÉON

Gaëtane LAMBERT : Au creux du temps.  Valse pour accordéon.  Lafitan : P.L. 1699.

Cette valse est plus vraie que nature… La première phrase évoque irrésistiblement le thème de la « Romance à l’étoile » de Tannhäuser. Et pour le reste, nous sommes plongés dans l’atmosphère mélancolique et surannée d’un vieux bal musette. Qu’on ne s’y trompe pas : cette nostalgie est de très bon aloi. Une pièce bien agréable, pleine de réminiscences.

 

ORGUE

Naji HAKIM : Sakskǿbing Praeludier, pour orgue.  Combre : C06511 (pour ensemble de chambre : C06512).

Voir compte-rendu, ci-dessous, rubrique « Ensembles ».

 

ENSEMBLES

Naji HAKIM : Sakskǿbing Praeludier pour ensemble de chambre.  Combre : C06512.  Existe également pour orgue : C06511.

Cette œuvre repose sur quelques-uns des chorals danois parus en septembre 2004.  Ils s’inscrivent dans une démarche œcuménique pour rendre hommage à la paroisse de Sakskǿbing, à son organiste et son pasteur.  À l’instar des préludes de chorals de Bach, ceux de Naji Hakim sont en lien étroit avec le texte des chorals et l’axe théologique qui les sous-tend.  Il s’agit d’une œuvre importante aussi bien à l’orgue qu’en orchestre de chambre.

 

Ludwig van BEETHOVEN : Quintette en mib majeur d’après l’Octuor à vent, op.103.  Transcription : David Walter.  Flûte, hautbois, clarinette en sib, cor en fa et basson. Billaudot : G 7794 B.

Fidèle et habile, cette transcription sera très appréciée des ensembles à vent.

 

Michèle REVERDY : Trio Nomade pour alto, violoncelle et piano.  Leduc : AL 29 735.

Cette œuvre d’environ 12’ est d’un seul mouvement aux aspects très divers. L’osmose entre alto et violoncelle est telle que les parties des deux instruments sont imprimées sur la même partition, de sorte que chacun puisse suivre et partager le discours de l’autre.  Une œuvre lyrique et attachante pour une formation inhabituelle.

 

Jérôme NAULAIS : Ballade à St-Louis/ Black Rag pour quintette de cuivres.  Delatour : DLT 1559.

Composé pour deux trompettes, cor en fa, trombone et tuba, ces deux pièces dynamiques incitent à l’optimisme.

 

Jean CASSIGNOL & Michel DEMAREZ : Promenades en duo, recueil de 6 pièces classiques et romantiques pour flûte traversière (ou flûte à bec ou violon) & guitare.  Volume 1.  International Music Diffusion (www.arpeges.fr/international-music-diffusion/).

Ces transcriptions et arrangements séduiront certainement harpistes et flûtistes : de Telemann et Caccini à Elgar en passant par Bach, Mendelssohn et Chopin, le choix est tout à fait pertinent.  Et les transcriptions, sans être faciles, seront abordables par beaucoup de musiciens jeunes ou moins jeunes. Souhaitons que ce premier volume soit suivi de nombreux autres.

 

Lourival SILVESTRE & Francesca PERISSINOTO : Chora Chôro.  10 chôros pour instrument soliste et accompagnateur.  CD d’accompagnement par petit orchestre brésilien.  Combre : C06576.

Cette musique typiquement brésilienne est écrite pour un instrument mélodique ou harmonique et une guitare d’accompagnement, mais le CD joint montre bien les différentes possibilités d’interprétation, ne serait-ce que par l’ajout du « pandeiro », sorte de tambourin.  Tous instruments mélodiques seront les bienvenus et dialogueront sans difficulté : le matériel est fourni pour les instruments en ut, sib et mib. Voilà une source aussi intéressante que copieuse pour musique d’ensemble.

 

CHANSONS

Renan LUCE, CALI, The DØ, DIONYSOS, LUKE, Yaël NAÏM, Emily LOIZEAU, DA SILVA, KAOLIN, ROSE, PAULINE, Benjamin BIOLAY : Nouvelle scène.fr / 12 titres pour piano, chant, guitare, tablatures. Vol. 4.  Hit-Diffusion.

Cette remarquable collection, présentée de façon luxueuse mais tout à fait fonctionnelle, regroupe donc des chansons contemporaines d’auteurs variés.  On appréciera particulièrement la qualité des relevés et des partitions ainsi proposées. Ce recueil comporte douze titres, un par auteur, dans une présentation qui doit permettre à tous les musiciens de se les approprier sans difficulté, mais non sans travail…

Daniel Blackstone

 

GUITARE

Éric PÉNICAUD : Two easy pieces for Giovanni : Sicilian Dance / DaydreamBèrben Edizioni musicale (Ancona, Italia. www.berben.it) : E.5607B.

Par l’excellent guitariste Éric Pénicaud, il s’agit là de fort plaisantes partitions pédagogiques, visant à l’initiation des élèves à la « notation proportionnelle » (groupes rapides ou peu rapides / temps d’arrêt ou de résonance – long, moyen, bref).

 

Raymond MESPLÉ (Coordonné par) : Une année au concert.  Les aventures musicales de Léna et Tom au Cycle 1.  Scérén /CRDP des Pays-de-la-Loire : 440B3440. Librairie de l’Éducation (13, rue du Four, Paris VIe. www.cndp.fr).  Avec CD.  17 €.

Cette joyeuse publication vise à développer une activité d’écoute structurée et ce, dès la petite section de Maternelle.  Ainsi - par identification - les enfants sont-ils amenés à vivre les aventures de Tom et Léna – à parler, imiter, mimer, manipuler, expérimenter, bouger, danser…  Pour les enseignants, d’intelligentes pistes pédagogiques sont, en outre, tracées – avec brefs topos sur les compositeurs, les éléments chorégraphiques, l’organologie, les genres, les notions musicales… Ouvrage auquel sont associés un CD de 36 extraits musicaux (avec leurs fiches) et six lotos sonores (afin d’évaluer, de manière ludique, l’acquisition des connaissances).

Francis Gérimont

 

 

 



Pierre Albert CASTANET : Quand le sonore cherche noise.  Pour une philosophie du bruitPréface de Daniel Charles : « Pour les noiseux ».  Michel de Maule (www.micheldemaule.com).  Schémas, index, table. 495 p.  30€

À la suite de Tout est bruit pour qui a peur (1999, rééd. 2007), cet ouvrage vient combler un réel manque dans les études en musicologie générale en enrichissant nos connaissances sur le statut musical du bruit.  Ce livre était donc du pain bénit pour les candidats au Capes et à l’agrégation de musique en 2007 et 2008, tant il abreuve d’informations sur le bruit & la musique et agite de réflexions aussi nouvelles qu’inattendues.  Inattendues ? C’est tout l’enjeu de cette bible : établir que cette attirance pour l’expérimentation du « son-bruit » anime les arts dès l’aube du XXe siècle et qu’aujourd’hui encore, sa « dramaturgie » met plus que jamais les créateurs, tous horizons confondus, sous tension.  Avec, à l’appui, des descriptions précises de scènes de confusions sonores et du son conçu comme « abjection », Pierre Albert Castanet n’hésite pas à s’engager sur les chemins escarpés d’une pensée érudite sur la « parasitose ».  Il fait également une synthèse remarquable d’influences variées, depuis les futuristes italiens, jusqu’à Duchamp en passant par Varèse ou Cage, ces maîtres-empêcheurs de tourner en rond...  Parfois secoué d’accès de fièvre en raison du sujet traité, ce livre pense le « bruit qui pense », et la vie sonore qui raisonne ici à pleins mots fait de cet ouvrage, par ailleurs savamment préfacée par le regretté Daniel Charles, un incontournable.

Sophie Stévance

 

Emmanuel GORGE : La musique et l’altérité. Miroirs d’un style.  « Épistémologie et philosophie des sciences », L’Harmattan.  364 p., ex. mus., bibliographies, discographie, index.  33 €.

À travers le primitivisme, « terrain d’invention et d’exploration » pour l’art et la musique au XXe siècle, et vrai sujet de ce livre, l’altérité « se révèle être un facteur d’identité complexe » de la conscience occidentale.  Brassant un imposant corpus de références - au premier rang desquelles Lévi-Strauss, Guiomar ou Tarasti -, E. Gorge traite ces questions en un essai pluridisciplinaire : histoire, esthétique, épistémologie, sémiotique, éthique…

 

Gérard GRISEY : Écrits ou l’invention de la musique spectrale.  « Répercussions », MF (www.editions-mf.com).  Édition établie et préfacée par G. Lelong. 376 p., ex. mus., photos.  Catalogue des œuvres, discographie, bibliographie, filmographie, radiophonie.  22 €.

Dix ans après sa mort, G. Grisey (1946-1998) apparaît plus que jamais comme l’un des créateurs essentiels du XXe siècle.  C’est dire l’intérêt de ces écrits, auparavant dispersés ou inédits, ici impeccablement édités.  Le compositeur y expose avec une clarté remarquable ses principes de composition où l’obsession du temps et de sa perception précède les questions relatives à l’écriture spectrale dont il fut pourtant l’un des initiateurs.  Entretiens, lettres et extraits de journal, souvent fort émouvants, complètent judicieusement ce volume important.

 

Paul Gontcharoff

 

François BAYLE & Jean-Christophe THOMAS : Diabolus in Musica.  Magison (31, rue de la Harpe, Paris Ve, www.magison.org).  14 x 24 cm, 174 p., ill. n&b et couleurs.  En français et en anglais.  Avec un DVD-Rom.  17 €.

Ouvert sous le signe d’une question qui hante toutes les consciences musicales depuis le second XXe siècle (« Observer l’écoute, qu’est-ce que cela veut dire ? »), cet ouvrage du grand compositeur, assisté par l’excellent Jean-Christophe Thomas, présente – chaque mot pesé – un intérêt capital, vital pour l’éventualité d’une écoute contemporaine, c’est-à-dire généreuse et sensiblement transversale.  Mi-livre mi écran, telle qu’elle est présentée par ses propres concepteurs, cette contribution superlativement inédite, sollicite le lecteur, l’auditeur, le regardeur… tous navigateurs de l’immensité sensible.  La méthode, d’une rigueur confondante et source d’un total inquantifiable de découvertes, moins inouïes qu’ouïes de façon jusque là impensée, vaut d’en être notée.  D’un côté, le compositeur probablement le plus emblématique d’une certaine modernité souveraine, de l’autre un auditeur méticuleusement, scrupuleusement attentif, Jean-Christophe Thomas.  Sur les pas de ce stratège émérite d’une introspection consentie, le lecteur s’engage dans un labyrinthe aussi ingénieux que ses lointains aînés crétois, gothiques ou versaillais : 53 thèmes en balisent le cours (d’Acousmatique à Utopie de l’apesanteur…  ultime écho pour « horizon chimérique »…), illustrés par 151 exemples qui génèrent une intelligence immédiate de ces mystères tout en créant l’illusion d’ouvrir eux-mêmes sur l’infini d’autres labyrinthes analogiques, dans la trajectoire desquels la dynamique serait seule à nourrir et à affermir l’expérience d’entendre.  Du côté du compositeur, la stratégie de l’évitement reste fondée sur la permanence d’une invention, notamment formelle, qui dénouerait, dans l’instant de la captation auditive, le paradoxe de la synthèse analytique.  Il ne me souvient pas d’avoir, ailleurs, rencontré une si parfaite volonté de refus d’un certain confort associée à une si impérieuse nécessité de braver l’altérité, dont le diabolus in musica renvoie ici la très symbolique image passée au crible de l’affrontement dialectique.  Qui me citera un autre ouvrage conduisant à envier les mélomanes du XXIIe siècle ?

Gérard Denizeau

 

Thierry BENARDEAU & Marcel PINEAU : La musique.  « Repères pratiques », Nathan (www.nathan.fr/reperes-pratiques).  15 x 21 cm, 160 p., ex. mus., ill. couleurs.  11,40 €.

Divisé en 6 parties (Histoire / Instruments / Solfège / Formes & œuvres / Musiques du monde / Métiers), cet ouvrage d’intelligente vulgarisation s’organise en doubles pages, celle de gauche synthétisant toutes les informations sur le thème étudié, celle de droite développant un point particulier.  Choix d’œuvres, index.  Lumineux !

 

Kathryn MARSH : The Musical Playground.  Global Tradition and Change in Children’s Songs and Games.  Oxford University Press (www.oup.com).  15,5 x 23,5 cm, 434 p., ex. mus.  Paperback : £15.99.  Hardback : £54.00

Il s’agit là d’une passionnante synthèse ethnomusicologique et pédagogique d’activités musicales ludiques dans divers contextes socio-culturels, en Australie, Norvège, États-Unis, Royaume-Uni et Corée du Sud.  En cinq grandes parties : Children’s musical play & creativity (adult views) / Into the field / Transmission process in the playground / Composition in performance / Conclusions & pedagogical implications.  Plus dix annexes.  Kathryn Marsh a, en outre, recensé plus de 300 sortes de jeux musicaux dont on peut retrouver les transcriptions sur le site : www.oup.com/us/themusicalplayground (rubrique « Appendices »).  Quelle mine pour tout enseignant !

 

Yehudi MENUHIN : La Légende du violon.  Flammarion.  Album relié sous jaquette, 22 x 28 cm, 304 p., 200 illustrations n&b et couleurs, 1CD (50’).  49 €.

Il s’agit là de la réédition actualisée du magnifique ouvrage paru en 1996.  Dont voici les principaux chapitres : L’objet qui crée les sons / Du vide à la vibration / L’homme qui fait le violon / L’homme qui joue du violon / L’homme qui enseigne le violon / L’homme qui écrit pour le violon / Les partenaires / L’écoute / Les violons du monde.  Somptueuse iconographie.  Illustrant la prodigieuse diversité du talent de Yehudi Menuhin, le CD comporte des œuvres de Lalo, J.S. Bach, Cole Porter, Grappelli, Schumann, Brahms, Shankar, Mendelssohn.

 

Jean-Yves TADIÉ : Le songe musical. Claude Debussy.  « L’un et l’autre », Gallimard.  12 x 20,5 cm, 234 p., 21 €.

Professeur à la Sorbonne, spécialiste de l’œuvre de Proust, Jean-Yves Tadié dessine, cette fois,  un portrait plus ou moins onirique du musicien – manière aussi de s’auto-portraiturer… « Parlant de lui, je parle de moi », reconnaît-il volontiers (chacun de nous ne pourrait-il d’ailleurs se reconnaître dans cette démarche ?).  Admirable est, au demeurant, cet essai - de fusionnelle sensibilité et d’ouverture vers de toujours plus larges horizons.  En vingt-trois chapitres, parmi lesquels notamment : Enfance, Mélancolie, Le compositeur au travail, Esthétique, L’histoire de la musique vue par Debussy, Inconscient, La musique a-t-elle une sens ?, Musicien et écrivain, Femmes, Proust et Debussy, Humour…  Un enchantement !

 

Thierry MARTIN-SCHERRER : L’Exil musical.  Encre marine (www.encre-marine.com).  Diff. : Les Belles Lettres.  Livre non massicoté, 16 x 22,5 cm, 280 p., 35 €.

Il s’agit là d’un centaine de brefs chapitres, dont sont poétiquement commentés les exergues musicaux.  Empruntés aux meilleurs auteurs : Debussy, Alain, Cage, Bloom, Steiner, Confucius, Chirico, Baudelaire, Messiaen, Dufourt, Schubert, Claudel, Cioran, Ansermet, Barthes…  Variations sur un motif unique : l’échec du verbe à rendre compte du mystère de la musique.  Un livre de chevet - auquel s’ajoute le trop rare plaisir de devoir découper des pages non massicotées…

 

Philippe DELAVEAU : Son nom secret d’une musique.  Poèmes.  NRF/Gallimard.  140 p., 20 €.

« Dans la petite rue, je m’arrête.  La nuit tombe.  On entend un piano.  [Partout l’ombre se recueille dans sa propre unité, les réverbères sont immobiles.  Leurs ailes repliées, papillons sur les murs.  […] » (Schubert SW7).  Ce recueil de quelque 70 poèmes en prose comporte trois parties : Instables voix du monde / Son nom secret d’une musique / Verbe haut.  À savourer - jour après jour…

 

Dominique JAMEUX : Radio.  Fayard.  12 x 18,5 cm, 190 p., 14 €.

Musicologue, journaliste, conférencier et producteur, Dominique Jameux nous livre les réflexions de l’homme de radio qu’il fut longtemps – notamment sur France Musique, de 1972 à 2008.  Ainsi prophétise-t-il qu’à la radio, « art du futur », la parole sera de plus en plus prisée - la demande de lien & de savoir élaboré l’emportant sur la demande de flux, lequel n’est plus guère désormais que d’ameublement.  Écrit dans un style désinvolte,ce petit ouvrage vise à mettre à bas bien des idées reçues.

 

Georges SNYDERS : J’ai voulu qu’apprendre soit une joie.  Institut de recherches de la FSU/Éditions Syllepse (tél. : 01 44 62 08 89.  www.syllepse.net).  15 x 21,5 cm, 270 p., 18 €.

Quel formidable message d’espoir nous délivre ici Georges Snyders !  À 91 ans, ayant connu l’effroyable expérience d’Auschwitz, puis longtemps cheminé avec le parti communiste avant de se découvrir la passion d’enseigner la philosophie (il avait été khâgneux à Henri IV puis normalien rue d’Ulm) et les sciences de l’éducation (qu’il professa à Paris V), mais surtout de communiquer son amour de la musique (ne publia-t-il pas notamment : Le goût musical en France aux XVIIe et XVIIIe siècles, Vrin, 1968 / L’école peut-elle enseigner les joies de la musique ? EAP, 1989…), voilà qu’il nous livre aujourd’hui ses mémoires.  Premier moment : Ma vie / Ma thèse principale : La pédagogie en France aux XVIIe et XVIIIe siècles / Trois penseurs m’aident à rester communiste : Brecht, Gramsci, Jaurès.  Deuxième moment : À la recherche de la joie à l’école / Ceux qui visent les œuvres capitales, et les autres… Troisième moment : La musique.  D’une lecture roborative, en ces temps moroses…

 

Guillaume de SARDES : La Dernière Passion de Son Éminence.  Roman.  Hermann (6, rue de la Sorbonne, Paris Ve. www.editions-hermann.fr).  14 x 21 cm, 130 p., 19 €.

Écrit dans une langue d’un parfait classicisme, voilà un bref roman autour des mœurs dépravées et criminelles d’un haut prélat du Vatican.  Cet ouvrage de l’historien de l’art Guillaume de Sardes [www.guillaumedesardes.com] – auteur notamment de Nijinski, sa vie, son geste, sa pensée (Hermann, 2006) et de Serge Diaghilev, Mémoires (Hermann, 2008), auteur également de différents articles parus dans notre revue (dont récemment « La Parade d’Erik Satie », L’EM, n°559.) - ne laisse pas d’évoquer quelques stupéfiantes « affaires » romaines jamais vraiment élucidées.

 

Maurice G. DANTEC : Comme le fantôme d’un jazzman dans la station Mir en déroute.  Roman.  Albin Michel.  14,5 x 27,5 cm, 214 p.,

Enfant de Céline et de Bukowski, le très prolifique romancier français Maurice G. Dantec (aujourd’hui montréalais) cultive décidément sa sulfurosité… En témoigne d’abondance ce nouvel opus, où prend force et vigueur - « le long d’une autoroute qui file vers le Sud, au son d’un saxophone kamikase » - la cavale d’un couple braqueur de banque atteint par un neurovirus qui connecte leurs cerveaux à la station spatiale Mir et à son ange gardien le free-jazzman Albert Ayler.  Dans l’attente fiévreuse d’Armageddon…  Réjouissant !

 

Christine QUEFFÉLEC : L’Esthétique de Gustave Flaubert et d’Oscar Wilde.  Les rapports de l’art et de la vie.  « Babeliana », Honoré Champion (tél. : 01 46 34 16 24. www.honorechampion.com).  Relié toile.  15,5 x 22,5 cm, 360 p., 65 €.

Oscar Wilde considérait Flaubert comme son maître.  Admiration paradoxale puisque, pour l’écrivain français, importante était la phase documentaire avant l’écriture, cependant que, pour son brillant « disciple », la vie imite l’art – et non l’inverse…  Ayant confronté textes littéraires & théoriques des deux écrivains, Christine Queffélec, professeur de Littérature comparée, met en lumière leurs contradictions internes : pièces et romans de Wilde accordant plus de place à l’imitation de la vie qu’il ne le prétend ; Flaubert se souciant davantage de perfection formelle que d’exactitude référentielle.  Les deux écrivains se rejoignent toutefois dans le culte de la beauté et de l’artifice, remparts contre l’utilitarisme et la vulgarité de leur temps [que diraient-ils du nôtre ?]…  Huit parties : Flaubert et Wilde critiques / La tour d’ivoire / Faire de sa vie une œuvre d’art / Impasses de l’esthétisme / La réconciliation de l’art et de la vie / L’art en haine de la vie / Littérature et langage / Du classicisme à la modernité.

 

René GIRARD.  Un livre : La conversion de l’art (244 p.).  Un DVD : Le sens de l’histoire (70’).  Carnets Nord (10-12, villa Cœur-de-Vey, Paris XIVe. Tél. : 01 56 53 56 81.  www.carnetsnord.fr).  25 €.

Qui ne connaît René Girard, père de la « théorie mimétique », membre de l’Académie française et professeur émérite à Stanford University ?  À l’occasion de la réalisation d’un film d’entretiens avec Benoît Chantre (novembre 2007, Centre Pompidou), ont été rassemblés huit de ses « exercices d’admiration » sur Saint-John Perse et Malraux, Valéry et Stendhal, Freud et Proust, Nietzsche et Wagner.  Où l’accent est notamment mis sur les logiques qui relièrent Nietzsche et Wagner (se méfier ici, écrit-il, et des nietzschéens et des wagnériens).  Volume assorti de riches annexes sur la conversion romanesque, littérature & anthropologie, le religieux…  Six chapitres composent le DVD.  Partie de Clausewitz, Hegel et Hölderlin, en passant par Baudelaire, Dostoïevski, Nietzsche et Wagner, la discussion s’achève sur Nijinski, Proust (Le Temps retrouvé) et Stravinsky (Le Sacre du printemps).

          

Francis Cousté

 

Les affrontements religieux en Europe (1500-1650).  Préface de Lucien Bély.  PUPS (Sophie.Linon-Chipon@paris-sorbonne.fr).  2009.  246 p.  12 €.

La question proposée au Concours de l’agrégation et du Capes d’Histoire moderne - abordée lors de la réunion de l’Association des historiens modernistes des universités françaises (AHMUF) -, objet du présent ouvrage, préfacé par Lucien Bély, professeur à l’Université Paris-Sorbonne peut aussi concerner les agrégatifs d’Éducation musicale.  Les guerres de religion ont suscité des conflits à propos, entre autres, des dogmes, de la liturgie, de la morale, de l’aspect sociologique et des pressions sociales. Elles concernent les réformés français (Hugues Daussy), les affrontements en Angleterre (Jean-François Ruggiu), les luthériens du Saint-Empire romain germanique (Naïma Ghermani, Christophe Duhamelle) ; sans oublier les écoles et universités au service de la politique confessionnelle, ni les prises de position pédagogiques de M. Luther et Ph. Melanchthon (Jean-Luc Le Cam).  Il est évident que les historiens de la musique ne doivent pas passer à côté de ces événements.  Cet excellent complément est structuré en 3 parties : « Approches historiographiques » ; « Faire la guerre, faire la paix » ; « Les affrontements dans le Saint-Empire ».  La deuxième partie met l’accent sur la société divisée, sur la fracture politique aux Pays-Bas espagnols (Alain Lottin) et, d’une manière générale, l’Europe aux prises avec des conflits confessionnels, mais aussi la perspective de la réconciliation (Jérémie Foa) et de la coexistence (Christophe Duhamelle).  Cette excellente synthèse allant du milieu du XVIe aux Traités de Westphalie (1648) illustre combien et comment « une partie de la chrétienté prend ses distances avec Rome », comme le précise L. Bély dans sa Préface.  Ces aspects multiples permettront aux candidats à l’agrégation d’Éducation musicale (2009) de mieux cerner la question : Musique et réformes religieuses aux XVIe et XVIIe siècles.  Statuts, fonctions, pratiques.

 

Turcs et turqueries (XVIe-XVIIIe siècles), Paris, PUPS (Sophie.Linon-Chipon@paris-sorbonne.fr), 222 p. 12 €.

Le titre n’implique pas nécessairement une connotation musicale. Cet ouvrage collectif - outre son apport à l’histoire des mentalités religieuses et des civilisations - concerne aussi les divertissements : opéras, ballets, danses, sans oublier le théâtre de foire. Il repose sur des solides sources historiques - relations de voyageurs reflétant deux univers, l’Occident gagné au christianisme et l’Europe ottomane, dans le sillage du « Turc » et par le biais des relations diplomatiques du XVIe au XVIIIe siècle. Les auteurs soulignent la domination politique de Constantinople et celle de Rome, évoquent différents thèmes : colonisation turque, « représentation du Turc en Europe » (Italie, Espagne), relations franco-ottomanes... Ce dernier point qui intéressera les historiens de la musique illustre « L’image des Turcs » à travers divers spectacles et drames, et essentiellement les « Turqueries » dans les représentations en musique. Ultérieurement, l’orientalisme en musique se manifestera encore avec G. Rossini (Il Turco in Italia) et, dans la perspective folklorique, B. Bartók relancera la musique populaire turque. Les candidats à l’agrégation de Musique trouveront un complément iconographique et discographique rappelant que les compositeurs français (J.-B. Lully, Molière, Fr.-A. D. Philidor, A. Campra, J.-Ph. Rameau, etc.), l’exotisme scénique, les personnages (esclaves, héros, sultans…), décors, costumes (turban avec aigrette, grande culotte bouffante) sont tous tributaires de la « turcomanie ».

 

Ève MENK-BERTRAND : L’image de Vienne et de Prague à l’époque baroque (1650-1740). Essai d’histoire des représentations. « Les mondes germaniques », Presses universitaires de Strasbourg (pus@umb.u-strasbg.fr) 2008.  463 p. + xxxii. 32 €.

Sous-titré : « Essai d’histoire des représentations », ce livre est issu d’une thèse soutenue en 2004, à Strasbourg, à l’Université Robert-Schuman.  De nombreux ouvrages paraissent actuellement sur les villes, notamment leurs activités artistiques, situées dans leurs divers contextes historiques.  È. Menk-Bertrand, au cours de ses nombreux voyages, a procédé à de nombreux dépouillements d’archives à la Bibliothèque de l’Académie des sciences de la République tchèque, à Prague, ainsi qu’à Vienne, exploité des sources très solides, et été confrontée à de nombreuses citations en langues étrangères : latin, allemand, surtout tchèque, ou encore anglais et italien, qu’elle a traduites en français.  Pour évoquer « l’image de Vienne et de Prague entre ténèbres et gloire baroque » et « les conditions d’apparition de l’image » entre 1650 et 1740, elle rappelle judicieusement l’héritage de l’Antiquité et de la Renaissance, définit le rôle de la monarchie des Habsbourg en Europe, puis en Bohême et en Autriche en particulier, sans oublier les « espaces mystiques », églises, saints, souverains, le martyrologe pragois, la peste à Vienne... La présence de la musique est attestée par des musiciens récemment redécouverts : Adam Michna (ca 1600-1676), célèbre par 3 Cycles d’Hymnes, et Jan Dismas Zelenka (1679-1745), se rattachant au baroque tardif, auteur de Messes avec grand orchestre, de Litanies, aussi fêté à la Cour de Dresde.  Alberic Mazac (1609-1661) dont le Cultus harmonicus a été publié à Vienne, et Johann Christoph Kridel (1672-1733), organiste, professeur et compositeur.  En Autriche, succédant aux maîtres italiens : Johann Josef Fux (1660-1741), théoricien et pédagogue, compositeur à la cour de Charles VI, et Heinrich Ignaz Biber (1644-1704), maître de chapelle de l’archevêque de Salzbourg, violoniste et auteur de 15 Sonates du Rosaire : autant de musiciens baroques qui ont contribué à « l’image de Vienne et de Prague ».

 

Giordano FERRARI (dir.) : La parole sur scène. Voix, texte, signifié« Arts 8 », L’Harmattan (diffusion.harmattan@wanadoo.fr).  218 p.  21 €.

En notre siècle médiatisé privilégiant l’audiovisuel, l’importance de l’élocution et de la prononciation correcte, lors de cours, conférences, émissions radiophoniques, opéras… est bien connue.  Le présent volume résulte des actes du colloque concernant les représentations théâtrales, le glissement de la « conception d’un théâtre centré sur le texte - et ses multiples interprétations - à celle d’un théâtre fondé sur le rapport son-image ».  La voix, tant parlée que chantée, joue un rôle primordial car, en aucune manière, prosodie et pause de la voix ne doivent être négligées.  La préface de cet ouvrage, placé sous la direction de Giordano Ferrari, rend compte de cette rencontre de spécialistes universitaires français, anglais, grec, suisse, espagnol et italien.  À l’aide d’exemples précis d’opéras contemporains, ils présentent les relations entre musique, texte et drame ; la rédaction des livrets ; les techniques ; les allégories et mutations vocales ; les problématiques de la construction de l’identité du personnage en face de la réalité sociale du XXIe siècle, du « théâtre musical et d’art ».  Orateurs, chanteurs, chefs de chœur, librettistes, compositeurs, régisseurs apprendront beaucoup de ces approches de la voix, « instrument porteur de la parole » assumant des fonctions dramatiques et expérimentations actuelles.  Incontournable.

Édith Weber

 

Véronique PUCHALA : Pierre Boulez à voix nue. Symétrie.  263 p.  29 €.

C’est un ouvrage essentiel sur l’une des personnalités les plus marquantes du monde musical français que nous propose la journaliste Véronique Puchala.  Écrit dans le prolongement d’entretiens avec le musicien en avril 2005 (reproduits sur deux CDs annexés au livre), il se veut une approche contextualisée de ceux-ci, se déclinant sur les cinq thèmes abordés : l'écoute, le regard, le geste, la voix, l’autre.  Compositeur, théoricien, souvent polémiste, chef d’orchestre, Pierre Boulez fascine.  C’est peu de dire qu’il tient le devant de la scène musicale depuis plus de cinquante ans.  Celui qui livrait, en 1963, un ouvrage qui fit sensation Penser la musique aujourd’hui, et qui se plaisait à décocher moult flèches assassines contre l’establishment du moment, s’est-il assagi ?  En apparence oui ; mais au fond le militant reste fidèle à lui-même.  « Pas de fuite en avant, s’il vous plaît » lance-t-il. Voilà une forme de credo que traverse l’exigence de rigueur d’un homme de conviction qui se dit « tout à fait sectaire » lorsqu'il s'agit de défendre ce qu'il estime être juste, avec l'énergie d'un infatigable bâtisseur.  Homme de conviction, mais aussi de communication. Comme peu, il a saisi très tôt le pouvoir du mot, forgé à l’analyse rigoureuse, à la dialectique de l’évidence et de l’émotion.  Celle qui caractérise ses interprétations comme chef d’orchestre, qu’on a trop longtemps considérées comme empreintes de froideur analytique.

Au fil des pages, enrichies de citations du maître, l'auteur saisit bien des aspects de la pensée boulézienne, sa passion pour la peinture d'un Paul Klee, sa dette envers Messiaen, le maître célébré mais pas de manière inconditionnelle – car c'est un trait chez Boulez que de garder raison même dans le registre de l'admiration -, ses premières expériences à l'Opéra, à Garnier avec Jean-LouisBarrault – qui l’amena au théâtre - pour un Wozzeck mémorable qu'ils sortaient du purgatoire.  Du Ring à Bayreuth avec le complice Chéreau, on mesure à peine ce qu'il lui coûta d'efforts - ne serait-ce que pour amener les musiciens à ses vues en matière d’allégement de la texture orchestrale. Écrire lui-même pour la scène ? Un projet esquissé, avec Genet, fera long feu.  Une occasion manquée sans doute.  Mais il saura composer pour la voix des pages pénétrantes. Véronique Puchala ne néglige rien, investigue patiemment et scrute finement les multiples facettes de ce qu'il faut bien appeler un génie protéiforme, une légende vivante même - ce que l'intéressé dénierait bien sûr.  Son étude est remarquablement écrite, chose suffisamment rare en ces temps pour être soulignée.

 

Dominique FERNANDEZ : La Rose des Tudors.  Actes Sud.  143 p. 16 €.

L’auteur de Porporino ou les Mystères de Naples revient à un sujet qui lui tient à cœur : le phénomène que constitue la voix de contre-ténor.  Ces voies blanches pour lesquelles notre époque éprouve un vrai engouement, des voix masculines en quête de l’androgynie perdue.  Le parcours romanesque va nous mener dans ces fameux collèges britanniques, à Cambridge, où nous assistons aux concerts mythiques du King's ou de St John's.  Séances où tout est mis en place selon un savant cérémonial. Depuis que Alfred Deller a, dans les années 70, redonné à ce chant sublime ses lettres de noblesse, bien des choses ont changé : ces voix nous accompagnent naturellement aujourd’hui, grâce au disque bien sûr, mais surtout à l’opéra.  Dominique Fernandez trace l’histoire passionnante de ces compositeurs qui ont tant écrit pour ce type de voix, les Tavener, Tye, Tallis, musiciens du siècle des Tudors, Byrd aussi, et d’autres encore méconnus tel Richard Nicholson (1570-1639).  Ce furent ensuite Purcell et plus près de nous Benjamin Britten dont on n’a pas toujours compris l’accent mis dans sa musique sur les voix d’enfants.  Une analyse perspicace nous fait saisir combien le phénomène est perçu différemment en Angleterre et en France. Alors qu’ici on parle de mue, outre-Manche c’est par le mot « break » qu’on le définit.  Pour décrire ce qui, selon Fernandez, est accident, perte, cassure.  Non que le renouveau soit uniquement britannique : la Catalogne, la Belle Florence livrent aussi actuellement leur lot de voix blanches.  À travers cette analyse cursive, nous est dévoilé en des mots justes pourquoi on se sent attiré par ce type de vocalité qui voit s'épanouir des interprètes de choix, les Andreas Scholl et autres Philippe Jaroussky, des voix célestes, aériennes, qui nous envoûtent parce qu’elles sont l'émanation de quelque chose d’exceptionnel, de l’ordre du transcendant.

 

Marie DELOS : L'Immédiat. Roman.  Seuil.  142 p. 16 €.

Pour son premier roman, Marie Delos fait un coup de maître !  Si la musique en est la trame – une jeune femme, professeur de français dans un lycée sévillan, vit le Deuxième Concerto de Prokofiev au point de le jouer sur une table en guise du piano qu’elle ne parvient pas trouver – l’aventure de la vie en est le sujet, hasard des rencontres.  Autobiographie, à n’en pas douter, de cette jeune Belge qui nous fait vivre de l’intérieur une passion amoureuse à peine ébauchée, une passion musicale en tout cas qui la hante.  La ville de Séville en est la toile de fond, belle à l’aune de la quête esthétique secrète de l’héroïne, miroir aussi de ses obsessions, de ses tourments poussés jusqu’au non supportable.  L’écriture est dense, le vocabulaire riche et la maîtrise de la langue sûre.  Et quel art de la formule qui sonne juste ! La violence contenue y voisine avec le sombre lyrisme.  Tout ici concourt au bonheur d’un récit fort.

 

Claude HERMANN : Henry Purcell« Classica », Actes Sud.  192 p.  17,10 €.

Les ouvrages sur Henry Purcell sont rares.  Raison de plus pour saluer la belle monographie de Claude Hermann, spécialiste de la musique anglaise.  Car on sait peu de choses de l'Orphée britannique de ce côté du Channel. Nombreux sont encore à le considérer comme un « musicien pour spécialistes ».  À travers le parcours cursif de la vie et de la carrière du compositeur, nous est retracé le destin de celui qui, mort à 36 ans, avec 18 ans de période créatrice, sut atteindre les sommets et gagner de son vivant l'admiration de ses pairs et du public.  C'est qu'il a occupé une position très particulière de charnière en des années de transition politique, sociale et musicale.  Musicien de cour, Purcell fut avant tout homme de théâtre. La rencontre avec le poète John Dryden sera déterminante, qui nous vaudra deux chefs-d'œuvre, Didon et Énée et Le Roi Arthur.  Il aura aussi l'occasion de se frotter à Shakespeare et au Songe d'une nuit d'été, dans sa merveilleuse Fairy Queen.  La confrontation avec les épreuves de la vie (personnelles, mais aussi la Peste de 1665 et le grand incendie de Londres, en septembre 1666, qui y mit fin) marqueront la « rhétorique de la mort et du deuil » qui marque nombre de ses compositions, les Anthems notamment.  Non qu'il n'aimât pas la vie : des chansons plus que gaillardes émaillent sa production. L'auteur nous rappelle aussi « son extrême sens mélodique, son souci constant de la fluidité du discours » comme « la force vitale et la vérité affective inaltérable » qu'il a « su insuffler à sa musique ».

Jean-Pierre Robert

 

Anton WEBERN : Le chemin vers la nouvelle musique et autres écrits.  Édition de Ph. Albèra & G. Starobinski. Traduction : V. Barras, A. Carruzzo, G. Starobinski, Br. Boccadoro.  Contrechamps (www.contrechamps.ch), Genève.  187 p.  19 €.

Ce livre correspond à l’édition française de deux cycles de conférences données par Webern dans un appartement privé à Vienne en 1932 et 1933 ; ce sont les célèbres « Chemin vers la composition en douze sons » et « Chemin vers la nouvelle musique », suivis d’autres textes écrits par le compositeur tout au long de sa vie, consacrés à Schönberg, à Heinrich Isaac (à qui Webern a consacré sa thèse de musicologie en 1906), et un hommage à Adolf Loos.  En ce qui concerne les « Chemins », le texte initial a été reconstitué par Willi Reich à partir de notes sténographiées d’un auditeur, Rudolf Ploderer.  La priorité accordée à l’intuition par les membres de l’École de Vienne était à la fois sincère et inévitable, car - entre abandon de la tonalité et formulation des principes dodécaphoniques - la musique se trouvait dans un vide vertigineux.  Webern adopta, pour ses conférences, le titre suggéré par Schönberg ainsi que son plan en forme de généalogie de la modernité.  Ce que le compositeur doit rechercher, c’est une correspondance entre l’idée musicale et la forme saisie par l’auditeur, entre le « je » et le « nous ».  Ce qui fonde la compréhensibilité, c’est la présentation cohérente de l’idée.  La menace planant sur cette nouvelle musique étant évidemment l’isolement et la perte de communication avec le public.  Pour éviter ce piège, Webern fera appel à son maitre Schönberg, mais aussi à Goethe et sa théorie de la plante originelle : d’un unique germe peut naître une œuvre à la fois multiple et unifiée ; cette pensée peut s’appliquer à l’écriture dodécaphonique, la série est le germe omniprésent mais caché à partir duquel se déploient les variations qui donnent vie à la musique.  Pour Schönberg et ses élèves, le dodécaphonisme représentait un idéal de cohérence absolue souhaitée par des générations de compositeurs antérieurs - que cette cohérence soit verticale (contrepoint) ou horizontale (mélodie), le but ultime étant de déployer harmonieusement la pensée musicale dans l’espace.

Patrice Imbaud

 

***

 

 

 



Haut

Hélène de MONTGEROULT.  Vol. 1 : La Marquise et la Marseillaise (9 Études, Sonate en fa# mineur, Fantaisie en sol mineur, Fugue en sol mineur).  Vol. 2 : À la Source du piano romantique (8 Études, Sonate en fa mineur).  Bruno Robillard (Vol. 1), Nicolas Stavy (Vol. 2), piano.  Hortus : 048 + 058.

Sauvée de la guillotine de l’oubli par l’excellent musicologue Jérôme Dorival, auteur d'un livre chez Symétrie et des notices des présents disques, la marquise de Montgeroult échappa à la vraie guillotine en improvisant d’étourdissantes variations sur La Marseillaise devant le Comité de Salut public, ce qui lui valut d’être catapultée professeur de piano lorsque fut bientôt créé le Conservatoire de Paris ; elle est donc précurseur de Louise Farrenc, autre pédagogue-compositrice qui s’illustra dans le même établissement.  Jérôme Dorival n’exagère pas en voyant des anticipations de Chopin, de Schumann, et même de Brahms (Étude n°104), dans les plus modernes des études composées de 1788 à 1810 à destination du Cours complet pour l'enseignement du fortepiano.  Même les Sonates, s’inscrivant plus dans leur logique position historique, entre Mozart et Beethoven, ne sont pas épigonales.  Il y a chez cette audacieuse femme un art de l'imprévu, un dynamisme rythmique, mais aussi une densité (Étude n°110, aussi émouvante qu'un adagio beethovenien), qui font que l’on ne s'ennuie pas un instant à l'écoute de ces disques. Les Britanniques seraient-ils meilleurs « vendeurs », eux qui ont réussi à propulser l’insipide John Field comme précurseur de Chopin, alors que demeurait celé, de ce côté-ci de la Manche, un trésor musical infiniment plus irrigué de sève expressive ?  Les pianistes Bruno Robillard et Nicolas Stavy rivalisent de talent pour nous faire goûter tous les versants de l'inspiration dispensée par une musicienne à la vie romanesque, laquelle s'éleva très au-dessus de ce qui se pratiquait dans la musique française de ce temps.

 

Sylviane Falcinelli

 

Marc-Antoine CHARPENTIER (1643-1704) : Motets pour le Grand Dauphin. Alpha (Outher S.A. 27, rue du Chêne, B-1000 Bruxelles. stephanie.flament@alpha-prod.com) : 138.  TT : 67’31.

Ce disque - très bien présenté, avec un remarquable livret tant pour le contenu que pour l’illustration, avec traductions des textes latins en français et en anglais - regroupe des Motets pour le Grand Dauphin de Marc-Antoine Charpentier interprétés par l’Ensemble Pierre Robert, sous la direction de Frédéric Désenclos.  D. Grenier rappelle que, « fait Officier de l’Ordre du Saint-Esprit fondé par Henri III, en raison de l’importance de la Pentecôte dans la vie de ce roi, le Grand Dauphin était d’office associé à la gloire et à la lumière royales célébrées en musique par le compositeur. »  Ces motets comprennent tout d’abord la Precatio pro filio Regis (H. 166) s’inspirant du psaume Deus judicium Regi da attribué au Roi David.  Ce psaume prédit le Royaume futur du Christ comme « devant être juste, pacifique, florissant et heureux », comme celui du Grand Dauphin.  Un motet particulièrement douloureux célèbre Marie-Madeleine, un autre est une supplication pour les défunts adressé à la Vierge ; enfin, le Psaume 42 Quem admodum desiderat cervus, baigne à la fois dans la douleur et l’espoir.  Une autre pièce évoque la guérison du Dauphin.  Les pièces d’orgue : Fugue sur les anches, Fond d’Orgue, Tierce en taille, Fugue de L. Marchand, interprétées à l’orgue Le Picard/Thomas de la Basilique de Tongres (Belgique) - par Frédéric Désenclos - assurent une pause instrumentale très bienvenue entre les divers motets.

 

Johann Sebastian Bach : Wo Gott der Herr nicht bei uns hält. Das neu gefundene Orgelwerk : Choralfantasie BWV 1128Rondeau Production (mail@rondeau.de) : ROP 6023.  TT : 49’50.

Ce disque comprend des œuvres pour orgue et vocales, toutes reposant sur des thèmes de chorals luthériens et interprétées à Leipzig par l’organiste Ullrich Böhme et le célèbre Thomanerchor, l’Orchestre du Gewandhaus et des solistes du Chœur de St Thomas, tous placés sous la direction du Cantor, Georg Christoph Biller.  Le programme a la particularité de révéler une Fantaisie chorale (BWV 1128) de J. S. Bach, composée vers 1707-1708 à Mühlhausen et jusqu’ici inconnue, sur le cantus firmus du Choral : Wo Gott der Herr nicht bei uns hält.  Il est d’abord interprété à l’orgue d’après la tablature de Elias Nicolaus Ammerbach (1530-1597) - ancien organiste de St Thomas -, suivie de la version vocale de Johann Hermann Schein (1586-1630) - Cantor à cette même église —, puis de celle de J. S. Bach, récemment découverte. Parmi d’autres œuvres associées à l’église St Thomas, figurent notamment le célèbre « Choral » dit « de Luther » (en fait, Psaume 46), donnant lieu à des imitations, entrées successives…  Wilhelm Rust (1822-1892) - organiste et Cantor de St Thomas - est également représenté.  La Cantate éponyme de J. S. Bach (BWV 178) pour chœur, deux hautbois, deux violons, alto et basse continue, figure à la fin de ce disque, commençant par le chœur : Wo Gott der Herr nicht bei uns hält, faisant alterner des chœurs, récitatifs, airs, et le choral conclusif : Die Feind sind all in deiner Hand.  Le succès de cette réalisation exceptionnelle en revient au travail vocal très précis du Thomanerchor, sous la direction avisée de G. Chr. Biller, et à l’excellent organiste de St Thomas, Ullrich Böhme qui a, entre autres, le mérite de créer cette œuvre : un événement discographique.

 

Hélène de MONTGEROULT (1764-1836) : À la source du piano romantique.  Études, Sonate.  Hortus (2, rue Diderot, 92600 Asnières. editionshortus@wanadoo.fr) : 058. Distr. Codaex.  TT : 57’31.

Voici un programme pédagogique rédigé par Hélène de Montgeroult pour l’enseignement du fortepiano.  Elle traite les deux formes en usage à l’époque romantique : Études et Sonate.  Née à Lyon en 1764, elle est connue comme étant « la merveille de son âge ». Si elle ne se produisait pas en public, elle jouait néanmoins pour ses amis, à Paris où elle passait l’hiver.  Elle avait un réel talent pour l’enseignement, et B. Sarrette la considérait comme « le plus grand professeur de piano » en France.  Elle est la seule femme nommée professeur de première classe au Conservatoire chargée de la classe de piano hommes.  À l’instar des Études de Stephen Heller (pour le piano), elle mise sur les difficultés techniques et musicales, la grande maturité des interprètes et spécule sur la valeur expressive des silences.  Chacune des Études est particulièrement instructive pour des tempi divers, le rubato, le passage du pouce, le jeu perlé, la conduite de la basse, mais aussi la mélodie expressive, la structure et les thèmes…, le tout baignant dans une atmosphère romantique naissante.  Toutes ses exigences sont fidèlement remplies par le pianiste Nicolas Stavy qui a signé un beau document pédagogique et artistique mettant en valeur les sonorités du fortepiano. Excellente initiative des éditions Hortus.

 

Der junge Ludwig van Beethoven in Wien 1795-1800.  Charisma Musikproduktion (info@charisma-cd.de) : Clavier 4.  TT : 79’05.

Sous le titre : Le jeune Ludwig van Beethoven à Vienne, Gerrit Zitterbart - soliste et chambriste, professeur de piano au Conservatoire supérieur de musique et de théâtre de Hanovre -, présente, au pianoforte Heinrich Ernst Fessel (Dresde, ca 1795-1800), une sélection de quinze œuvres assez brèves composées par Beethoven entre 1795 et 1800, accompagnée de commentaires allemands, avec traduction anglaise et française, comprenant des analyses très détaillées de chaque pièce et de ses particularités stylistiques.  Il propose des Variations, une Bagatelle, des Sonates en deux mouvements, des Capriccio, et des pièces intitulées : Allegretto ou encore Andante cantabile, Rondo : Allegro.  Ce disque s’impose par l’intelligence de la partition, la virtuosité, la précision des attaques, le sens de l’expression juste, et révèle avec bonheur des pages peu connues du jeune Beethoven.

 

Hymnen, Schlachten und Gewitter aus drei Jahrhunderten für orgelMusikszene Schweiz, Migros : MGB 6104.  TT : 58’29.

Ce disque, de contenu thématique original, représente trois siècles d’Hymnes, de Batailles et d’Orages pour orgue.  Il regroupe des pages des XVIIe au XXe siècles, et a pour finalité de révéler la vie musicale suisse dans sa diversité et ses contrastes.  Se produisant sur trois orgues suisses différents, André Manz précise qu’il a réalisé ce disque de musique patriotique « pour le plaisir de jouer des œuvres brillantes, colorées, généralement oubliées », et il ajoute : « Je garde mes distances vis-à-vis du patriotisme en tant que tel, ce qu’explique d’ailleurs le mélange de musique sérieuse et de musique amusante. » Ce programme s’ouvre sur le cantique suisse (Schweizer Psalm) en dialecte alémanique, de caractère assez populaire, écrit sous la forme d’une Fantaisie par J. G. E. Stehle (1839-1915) pour le cinquantième anniversaire de la mort d’A. Zwyssig.  Le futur hymne national suisse est suivi de la Sinfonia col tanto applaudito inno popolare du Padre Davide da Bergamo (1791-1863), d’après l’hymne national autrichien bien connu (Fr. J. Haydn), proche de l’esthétique de l’orgue de Barbarie.  L’ardeur des combats retentit dans La Bataille de Trenton (pour orgue et récitant - Howard Nelson) de James Hewitt (1770-1827) : cette page particulièrement puissante évoque l’armée qui se met en marche, l’appel aux armes, la marche du général Washington, le rassemblement par les trompettes, puis la bataille jusqu’au Traité de capitulation.  Après l’Amérique, l’Hymne des tsars russes fait l’objet de variations composées par Ernst Köhler (1799-1847).  La Fête de la Victoire op.145 n°7 de Max Reger (1873-1916), datant de 1916, n’a pas eu lieu.  En fait, elle combinait l’hymne national allemand Deutschland über alles avec les louanges à Dieu.  Et pour terminer, une page particulièrement descriptive de Basilius Breitenbach (1855-1920) : Fantaisie pastorale et tempête dans les Alpes interprétée à l’orgue de la Hofkirche de Lucerne, avec clavier d’écho, tuyaux de 32 pieds parfaitement indiqué pour évoquer en force une tempête dans les Alpes.  Le remarquable organiste André Manz a réussi une évocation tonitruante, réaliste et impressionnante.

 

GOUDIMEL, SWEELINCK, MARESCHAL : Psaumes de la Réforme.  Hortus (2, rue Diderot, 92600 Asnières. editionshortus@wanadoo.fr) : 064.  TT : 50’24.

Réalisé dans le cadre du 5e centenaire de la naissance de J. Calvin, ce CD arrive à point nommé, grâce à l’initiative de D. Maes et la contribution suisse de D. Meylan, organiste, chef du chœur La Camerata Baroque et de La Tromboncina (cornets et sacqueboutes).  Des 13 psaumes enregistrés, certains - sortant des sentiers battus, et signés Th. Champion et Cl. Janequin - voisinent avec les grands noms de la Réforme en France : Cl. Goudimel, en Hollande : J. P. Sweelinck et en Suisse : S. Mareschal. Tous exploitent des mélodies traditionnelles (Genève, 1562), encore chantées de nos jours : véritable idiome musical, signe de ralliement des protestants.  Ce disque représente, en fait, une synthèse du point de vue de l’interprétation : chœur, orgue, chœur et instruments ; des styles en usage : contrepoint, note contre note et traitement syllabique ; entrées successives, ornementation.  Deux œuvres instrumentales, en prélude et postlude, encadrent les psaumes.  Un livret du signataire (68 p.), accompagné d’une traduction anglaise de K. Lueders, retrace la genèse du Psautier, la problématique littéraire et musicale des paraphrases, les divers contextes historiques.  Les atmosphères sont très variées : méditation implorante (Ps. 51, Goudimel) ; élan (Ps. 138, Sweelinck). Le Ps. 25 : À toi, mon Dieu, mon cœur monte, présente une intéressante confrontation : d’abord présenté en sa version ornementée pour orgue de S. Mareschal, puis du chœur à l’unisson, enfin en sa version polyphonique plus élaborée par P. de L’Estocart.  Ce florilège démontre la qualité fonctionnelle et la diversité esthétique de Psaumes, à peu près contemporains du Concile de Trente, pouvant donc aussi intéresser les agrégatifs.

 

Johann Sebastian BACH : Intégrale de l’œuvre d’orgue (vol. 6).  Syrius (scam06@wanadoo.fr) : 141421.  Disponible en version 5 canaux.  TT : 78’35.

Helga Schauerte, titulaire de l’orgue de l’Église allemande à Paris, avec les talents qu’on lui connaît, poursuit avec tenacité son intégrale de l’œuvre d’orgue. Elle a judicieusement sélectionné le nouvel orgue André Thomas de l’Église réformée du Bouclier, à Strasbourg : à deux claviers et pédale, totalisant 30 jeux.  Cette manufacture belge a déjà plus de 117 orgues et une quarantaine de restaurations à son actif. L’instrument convient parfaitement à l’interprétation des œuvres du Cantor. Le programme éclectique comprend plusieurs volets : Préludes, Fantaisies, Pastorella, Chorals allemands et a le grand mérite de présenter au grand public une nouvelle œuvre : la « Fantaisie sur le choral Wo Gott der Herr nicht bei uns hält » (aussi révélée récemment par Rondeau Production).  H. Schauerte rappelle que, lors d’une vente aux enchères, les musicologues S. Blaut et M. Pacholke ont acquis une partie de la collection de Wilhelm Rust, ancien Cantor de St Thomas.  Dans le lot, se trouvait un manuscrit certifié authentique, datant de 1705/1710.  Le BWV 1128 lui a été attribué. La plage 3 reproduit, comme il se doit, d’abord le choral harmonisé, puis, plus animée, la Fantaisie éponyme mettant particulièrement en valeur les anches. Le thème apparaît légèrement orné ; le cantus firmus, très affirmé, est accompagné de commentaires décoratifs suivi d’entrées successives bien marquées.  Pour conclure, après un déploiement de virtuosité, cette pièce se termine dans l’apaisement. La célèbre Toccata et Fugue en fa majeur BWV 540 conclusive rehausse encore l’intérêt de ce 6e volume, avec la redécouverte d’une œuvre et la découverte d’un nouvel orgue strasbourgeois.

Édith Weber

 

Claudio MONTEVERDI : Teatro d'Amore.  Nuria Rial, Philippe Jaroussky, Cyril Autivy, Jan van Elsacker, Joao Fernandes.  L'Arpeggiata, dir. Christina Pluhar.  Virgin Classics : 099923 614000.  TT : 59'46.

C'est un formidable disque que signe Christina Pluhar pour son nouveau contrat chez Virgin. La mode est aux compilations, ce qui a ses limites.  Pas ici, devant programme aussi imaginatif. Des pièces vocales ingénieusement choisies traversées par des morceaux instrumentaux significatifs composent le plus beau des parcours monteverdiens.  L'entrain communicatif, la beauté plastique intense de pages comme le duo final du Couronnement de Poppée ou de riches séquences de madrigaux sont transfigurées par un orchestre dont on sent qu'il est composé de solistes. Le plus étonnant - et c'est une découverte de taille - est la modernité que cèlent ces musiques.  Dans une pièce vénitienne de 1664, « Ohimé ch'io cado », on est saisi d'une interrogation, d'un doute : s'agit-il bien du stile monteverdien ou de quelques rythmes jazzy ?  C.Pluhar nous explique que, pour peu qu'on y regarde de près, les « basses obstinées » du Père de l'opéra sonnent résolument moderne et s'écartent des canons de l'ostinato de l'époque, dans l'harmonie et dans l'articulation.  Les jazzmen des années 40 n'ont donc rien inventé dans leurs improvisations libres ! Cela se ressent dans ces rythmes de danses furieuses, vraiment endiablées. L' intervention de la voix ajoute encore à cette adorable fusion des genres. Alors même qu'ici deux voix d'exception brillent, fascinantes : Philippe Jaroussky, timbre céleste qui comble de bonheur de ces notes retenues, de ces inflexions inouïes comme pur envoûtement ; et Nuria Rial ou les tendres affects d'une voix de velours. Lorsqu'elles s'unissent, cela confine à une fête presque sensuelle. Plus que des morceaux d'anthologie, la musique dans ce qu'elle a de plus vrai !

 

Jean Sébastien BACH : Concertos pour clavecin BWW 1052, 1058, 1055, 1056.  Bertrand Cuiller, clavecin.  Ensemble Stradivaria, dir. Daniel Cuiller.  Mirare : MIR 085. TT : 58'29.

Le Cantor est le premier à avoir révélé le concerto pour clavier, ouvrant la voie à d'autres chefs-d'œuvre du genre. On pense bien sûr à Mozart. Certes, il y a chez Bach du recyclage de matériau connu dans d'autres configurations.  Mais le propre du génie n'est-il pas de transcender tout ce qu'il touche ?  L'impression d'entendre quelque chose déjà inscrit dans la mémoire décuple l'intérêt. Ces pièces, construites sur le même mode - deux mouvements rapides encadrant un plus lent - déploient énergie, véhémence presque, en tout cas joyeux bondissement, ou mélodie sereine, épanchement profond.  La partie soliste est traitée avec affection. Le concerto BWV 1052, conçu pour le violon, est paré d'un souffle immense et de vivacité. Adaptation d'un des concertos pour violon, le concerto BWV 1058 vit tout aussi bien au clavier qui se fond idéalement dans l'ensemble instrumental.  Les deux autres pièces sont tout aussi attrayantes. Il faut dire que l'interprétation de Bertrand Cuiller, formé à l'école des Hantaï et des Rousset, est empreinte de fluidité, d'articulation rigoureuse qui sait n'être pas métronomique. La formation de chambre qui l'entoure - cinq musiciens seulement, menés de son violon par Daniel Cuiller - offre des sonorités riches et vivantes, comme dégraissées. L'intégration du soliste parmi eux est à l'image de ce travail en famille, d'une parfaite harmonie, comme chez les Bach.

 

Jean Sébastien BACH : Messe en Si. Lucy Crowe, Joanne Lunn, Julia Lezhneva, Blandine Staskiewicz, Nathalie Stutzmann, Terry Wey, Colin Balzer, Markus Brutscher, Christian Immler, Luca Tittolo. Les Musiciens du Louvre-Grenoble, dir. Marc Minkowski.  Naïve : V 5145. TT : 101'.

Le Cantor de Leipzig a mis le meilleur de lui-même dans cette messe, même s'il y a recyclé des pages antérieures, tirées de cantates. Il y manie des styles musicaux divers, voire des approches différentes au long des deux parties qui la composent : relativement intimiste et sombre dans le Kyrie et le Gloria, où alternent interventions chorales et morceaux solistes, arias avec accompagnement d'instruments obligés ou duos expressifs empreints de spiritualité. À partir du Credo, l'atmosphère est souvent plus éclatante, de par la prépondérance donnée à l'écriture chorale. Pour Marc Minkoswki c'est « un miracle de construction... Comme la Création divine : le souffle unique donne vie à un univers polymorphe et imprévisible ».  Belle sentence ! Le chef opte pour le parti de confier le chant choral aux solistes eux-mêmes. Il en résulte transparence bien sûr, mais aussi approfondissement ; car ils sont traités soit en tutti, soit de manière différenciée, comme dans le « Et incarnatus est ».  Cette approche, partagée par d'autres chefs, fait suite aux recherches musicologiques récentes. On se rend compte que l'exécution pour grand effectif choral n'est peut-être pas la plus adaptée au climat général de l'œuvre. En tout cas, les choses étaient à l'origine claires : la Messe était conçue pour un ensemble de seulement 15 chanteurs.  On s'en approche donc ici. Aux dix solistes, émérites, fait écho un ensemble de 25 musiciens. L'impression générale est de discrétion sans contrastes trop marqués, de recueillement serein, « proche de la prière » dit encore le chef. Les enchaînements sont conçus de manière vivante. Ainsi en est-il de la liaison immédiate entre les séquences « Quoniam tu solus sanctus » et « Cum Sancto Spiritu » à la fin du Gloria. L'Agnus Dei frôle le génie, déploration d'une douleur assumée, chantée à la perfection par Nathalie Stutzmann. La fugue finale, prise dans un tempo retenu et développant un ample crescendo, couronne une exécution qui sort du lot - loin des versions grandioses des Kapellmeisters et autres stars de la baguette.

 

Felix MENDELSSOHN : Concerto pour violon et orchestre, op.64.  Trio n°1 avec piano, op.49. Sonate pour violon et piano (1838).  Anne-Sophie Mutter, violon, André Prévin, piano, Lynn Harrell, violoncelle.  Gewandhaus Orchester Leipzig, dir. Kurt Masur. Universal/DG : 477 8001. TT : 77'39.

Anne-Sophie Mutter revient à Mendelssohn, un compositeur auquel elle voue un véritable culte. Pour son deuxième enregistrement du concerto pour violon (le premier remonte à 1980, avec Karajan) elle a pour partenaires Kurt Masur, et surtout l'illustre Gewandhaus de Leipzig qui créa l'œuvre en 1845. Interprétation passionnée s'il en est, à l'aune du molto appassionato initial, pris dans un tempo fort allant, dont on sent qu'il est juste. La glorieuse maestria de la violoniste est là, avec ces ralentis qui lui sont coutumiers et auxquels il est difficile de résister. La fin prestissime confine à l'euphorie, terme qu'elle ne dénie pas. L'andante, une des pages les plus pénétrantes de l'auteur, est porté par une sûre dynamique interne. Et le finale, sorte de danse des elfes, a légèreté et brillance, rendues encore plus palpables par le tempo endiablé adopté : une sorte de course-poursuite entre soliste et orchestre, primesautière ou affirmée. A.S.Mutter a eu la bonne idée de joindre au CD deux pièces de musique de chambre.  Dans le Trio pour piano n°1, c'est ce dernier qui mène les débats face aux cordes. Non que l'intégration ne soit pas réussie, de par l'équilibre des couleurs qu'apportent les présents interprètes.  Et cette exécution n'est en rien inférieure à celle d'un ensemble, comme feu le Beaux Arts Trio.  L'agitato initial établit le climat animé. Le mouvement lent se vit comme un lied souvent fiévreux. Le scherzo « à la virtuosité étincelante, à la fois élégant et badin », selon Mutter, est dans l'esprit de celui, fameux, du Songe d'une nuit d'été, en forme de mouvement perpétuel. Quant au final « appassionato », il est enflammé avec ses curieuses scansions et son large ambitus dans le développement. La Sonate pour violon - datée de 1838 – est une rareté : insatisfait de la partie de violon, Mendelssohn s'était attaqué à une révision qu'il ne put mener à son terme. Ce n'est qu'en 1953 que Yehudi Menuhin en fit une reconstruction. Deux mouvements vivace bien marqués encadrent un adagio déclamatoire, voire là aussi enflammé. Il faut saluer l'initiative de A.S.Mutter de s'être attachée à cette redécouverte qu'elle pare de sa musicalité légendaire.

 

Anton BRUCKNER : Symphonie n°7.  Symphonieorchester des Bayerischen Rundfunks, dir. Karl Böhm.  Audite : 95.494.  TT : 64'34.

Cette exécution mérite de figurer au nombre des trésors d'archives. Tirée de celles de la Radio bavaroise, cette captation de concert (avril 1977) à Munich est un grand moment.  Troisième et dernière version enregistrée du maître et adornée d'une prise de son aérée, elle se distingue par un phrasé lyrique soutenu et une battue ample qui ne sombre pas dans le massif ou le grandiloquent. En grand chef d'opéra, Böhm sait ce que construction veut dire. Il laisse son orchestre se déployer naturellement, non sans précipiter le rythme çà et là comme pour renouveler l'intérêt. On pense à ses Wagner à Bayreuth.  L'allegro moderato est pris dans un allant certain et le finale offre cette variété de climats qui font tout le prix de cette musique qu'on a trop souvent tendance à bouder pour défaut d'imagination et sens exacerbé de la répétition.  Böhm ne s'abandonne pas aux plaisirs du beau son, et sa propension à booster le discours rend celui-ci plus directement assimilable.  Certes, il s'agit là de la vision d'un Kapellmeister, au clacissisme indéniable, mais la force de cette vaste pièce d'orchestre n'en ressort que plus évidente. Les adjectifs de « boursouflé, morbide », lancés par le terrible Hanslick sont vite balayés devant une exécution qui, comme celle-ci, resplendit d'une joie intérieure. L'adagio, une des plus belles pages du maître de Saint-Florian, est grandiose. L'hymne à Wagner (dont Bruckner venait d'apprende la mort alors qu'il composait ce mouvement) est sensible, avec ses grandes ascensions chromatiques, son climat solennel mais non pesant. Le scherzo a fière allure, un ostinato cher au musicien, articulé par Böhm sans rigidité. L'orchestre bavarois fête le chef, pour une de ses rares apparitions, de sonorités amples et marbrées.

 

Centenaire de Joseph HAYDN

Joseph HAYDN : Trios pour piano et cordes, Hob. X : 18-23.  Patrick Cohen, Erich Höbarth, Christophe Coin.  2CDs Harmonia Mundi : HMX 2968298.99.  TT : 114'.

« Les sonates pour le pianoforte avec accompagnement de violon et de violoncelle » jouées sur ce disque ont été composées en 1794-1795, lors d'un séjour de Haydn en Angleterre ; période d'intense production qui verra naître, entre autres, six des dernières symphonies dites « londoniennes »  et les quatuors à cordes op.71 et op.74. Plus que des sonates en trio, ce sont des musiques de divertissement qui mettent en valeur les trois instruments et pas seulement le clavier, encore que celui-ci s'émancipe lui aussi. Il n'est pas rare d'y rencontrer une large mélodie du violon. L'écriture est complexe mais toujours originale quant au choix des thèmes, eux-mêmes constamment renouvelés. Ces interprétations – qui reviennent sur le devant de la scène puisque gravées dans les années 1990 – frappent par une grande finesse du jeu, les deux cordes se fondant avec le pianoforte dans une grande rigueur, que ce soit dans le registre grave ou dans le domaine brillant. Les envolées mélodiques y sont légion, notamment dans les adagios, et l'esprit – tel rondo alla Ungarese – ne se fait pas prier. La démarche alerte et chantante annonce le préromantisme (le n°35 offre un grand lied qui préfigure presque la manière d'un Schubert avec un climat pensif). Le dernier trio de la série, le n°36, est peut-être le plus achevé de son écriture savante et fait moduler le clavier à l'envi. Sous un apparent académisme, le poco adagio est métamorphosé par une authentique inventivité.

 

Joseph HAYDN : Concertos pour pianoforte, Hob. XVIII : n°4, 6 et 11.  Andreas Staier, Freiburger Barockorchester, dir. Gottfried von der Goltz.  Harmonia Mundi : HMX 2961854. TT : 61'.

Le genre du concerto pour clavier a été créé par Bach, et deux de ses fils, Wilhelm Friedrich et Carl Philipp Emmanuel, l'ont aussi célébré. Avant que Mozart ne lui donne ses lettres de noblesse, il sera pourvu par Haydn de quelques pièces intéressantes. Quoiqu'ils figurent comme genre relativement mineur dans sa production et aient été composés sur une période brève, les années 1750-60, on en dénombre neuf dont six seront authentifiés.  Il s'agit de pièces de genre facile qui répondent au canon du morceau de divertissement. Le 4e, dont la première édition a vu le jour à Paris où l'œuvre fut jouée au Concert Spirituel, offre une belle cadence à l'adagio et un finale rondo presto paré de curieux effets de balayage instrumental. Le n°6, pour piano et violon, est vivant et se distingue, là aussi, par un adagio à la douce scansion, les deux solistes dialoguant finement. Mais le 11e, le mieux connu, et qui de ce fait s'est maintenu au répertoire, force autrement l'admiration. Le vivace par lequel débute l'œuvre montre une réelle fluidité du discours. Tandis que l'adagio a une allure certaine. Le clou reste cependant le rondo all'Ungrese, d'une vivacité enthousiasmante, surtout lorsque joué très preste comme ici. Le thème, qu'on connaît de bien d'autres pièces de Haydn, subit ici de multiples transformations jusqu'à une courte cadence qui détonne presque dans sa sauvagerie soudaine.  On ne saurait imaginer meilleur avocat que Andreas Staier. Son jeu agile est pur bonheur et l'instrument joué sonne beau.  L'Orchestre de Freiburg l'entoure affectueusement.

Jean-Pierre Robert

 

Johann Sebastian BACH : Concerto pour deux violons BWV 1043.  Concerto pour violon BWV 1041.  Concerto pour violon BWV 1042, Concerto pour violon et hautbois BWV 1060.  Camerata de Lausanne.  Pierre Amoyal (violon & direction).  Maurice Bourgue (hautbois), Tedu Papavrami (2nd violon).  Cascavelle (www.disquesoffice.ch) : VEL 3121.

Quel joie de retrouver, dans ce répertoire qui lui est cher, le grand violoniste Pierre Amoyal, jouant son Stradivarius « Kochansky », miraculeusement retrouvé en 1991 après qu’il lui fut volé en 1987.  Et qui plus est, à la tête de l’excellente Camerata de Lausanne, entouré de solistes de la qualité de Maurice Bourgue et Tedu Papavrami…

 

Johannes BRAHMS : Les trois Sonates pour violon.  Patrice Fontanarosa (violon), Émile Naoumoff (piano).  Saphir (www.saphirproductions.net) : LVC 1100.  TT : 64’57.

Par le violoniste Patrice Fontanarosa, éminent héritier d’une dynastie d’artistes, et le pianiste Émile Naoumoff, ultime disciple de Nadia Boulanger, voici les trois Sonates op.78, 100 et 108 pour violon de Brahms – œuvres de la maturité du compositeur, étonnamment proches de l’esprit de la ballade ou du lied.  Une heureuse conjonction, à tous égards !

 

Guillaume LEKEU (1870-1894) : Sonate pour violoncelle et piano (1888).  Alain Meunier (violoncelle), Philippe Guilhon-Herbert (piano).  Saphir (www.saphirproductions.net)  LVC 1086.  TT : 50’29.

Compositeur belge rattaché à l’école française, mort à l’âge de 24 ans, Guillaume Lekeu n’a laissé que peu d’œuvres.  Composée par un tout jeune homme encore lycéen, cette Sonate – d’une densité étonnamment tragique et aux dimensions impressionnantes (plus de 50 minutes) - fut achevée par Vincent d’Indy (les 3 dernières minutes).  Elle est ici - dans tout son romantisme - superbement restituée.

 

Erik SATIE : Avant-dernières pensées.  Alexandre Tharaud, piano.  Avec la participation de : Éric Le Sage (piano), Juliette (chant), Jean Delescluse (ténor), Isabelle Faust (violon), David Guerrier (trompette).  Coffret de 2CDs Harmonia Mundi (www.harmoniamundi.com/satie2009) : HMC 902017.18.  TT : 2h07.

Avec ce coffret – comprenant l’essentiel de l’œuvre pour piano & de la musique de chambre de Satie, interprété par le merveilleux Alexandre Tharaud et quelques amis choisis – vous avez un nouvel « indispensable » pour votre discothèque.  Articulé autour des six Gnossiennes, le 1er disque (« Solo ») ne comporte pas moins de quarante-deux pièces - dont Le Piège de Méduse, sept pièces pour piano préparé Le 2nd disque (« Duos ») comprend, notamment, pour piano à quatre mains : Trois morceaux en forme de poire et La Belle Excentrique ; pour trompette & piano : La Statue retrouvée ; pour la voix : Chez le docteur, Allons-y Chochotte, Ludions, La Diva de l’Empire et l’inoubliable Je te veux !  Précipitez-vous !

 

Dark was the night. 2CDs.  Production : Aaron & Bryce Dessner.  A Red Hot Compilation (www.redhot.com) : DAD 2835CD.

Après 20 ans et la parution de 20 albums, cette belle compilation s’inscrit dans la tradition « out of business » de disques dédiés à la lutte contre le sida, au combat notamment en faveur du « safe sex ».  Le 1er album de la collection était dédié au « gay American songwriter » Cole Porter.  Dark was the night (titre emprunté au thème du bluesman Blind Willie Johnson, ici interprété par le Kronos Quartet) réunit une cinquantaine d’artistes indépendants de la nouvelle génération, mettant l’accent sur des thèmes traditionnels (blues de la Dépression, country, gospel…), arrangés et joués de manière contemporaine.

 

Klezmerola.  Jewish Music from rare piano rolls.  Pianola interpretations by Bob Berkman.  Klezmerola (www.klezmerola.com) : PE 101.

Naguère enregistrés sur rouleaux, 21 thèmes – pour la plupart fort célèbres - du répertoire klezmer sont ici réunis pour notre plus grand bonheur.

 

Café 1930.  Tangos.  Ensemble Contraste : Geneviève Laurenceau (violon), Arnaud Thorette (alto), Raphaël Merlin (violoncelle), Johan Farjot (piano, direction musicale). Zig-Zag Territoires (www.zigzag-territoires.com) : ZZT 090103.

Pour cette merveilleuse anthologie tanguera, les solistes & le Chœur de Paris-Sorbonne (dir. Denis Rouger), Raphaël Imbert (saxophone) et André Ceccarelli (batterie) se sont joints aux virtuoses du juvénile ensemble Contraste.  Savants arrangements, par Johan Farjot (www.johanfarjot.com), nouveau chef de l’Orchestre Paris-Sorbonne [notre photo], de tangos historiques : La Paloma, La Cumparsita, Adiós Muchachos, El día que me quieras, mais aussi de plus récents, d’Astor Piazzolla : Adiós Nonino, Oblivion, Café 1930, Contraste, La Misma Pena, Milonga del ángel, Invierno Porteño, Tangata, Saint-Louis-en-l’Île…  Une réalisation qui fera date !

 

MAGMA : Üdü Ŵüdü.  Coffret de l’œuvre intégrale, 11 volumes.  2009, Le Chant du Monde. 

Groupe mythique s’il en fut - créé en 1969 par le percussionniste et chanteur Christian Vander– Magma (que l’auteur de ces lignes avait eu le bonheur de convaincre naguère de venir se produire au lycée Jean-Baptiste Say où il enseignait) aura certes connu de fabuleux avatars.  Dans ses plus récents volumes - où jouent, autour de Christian Vander & Jannick Top, une dizaine de nouveaux musiciens -, nous retrouvons la stupéfiante énergie d’un groupe assurément unique en son genre, éructant plus furieusement que jamais le kobaïen, idiome de Kobaïa, leur planète originaire.

Francis Gérimont

 

POUR LES PLUS JEUNES

ROBINSON : Ailleurs sera demain.  Les Robinsonades, vol.4 (www.robinson.fr).  Récré-Actions.  L’Autre Distribution : JPCB-3111315.

Ravissant ensemble de 13 chansons, dont certaines en duo, avec Adaëlle ou Henri Dès, et le concours des neuf musiciens de l’excellent groupe caennais Gadjologie.  Séduira petits et grands.

 

DVD

Piano Scores Unlimited.  DVD-Rom.  IPE Music (Tél. : 02 51 32 20 35 . www.ipemusic.com).  59 €.

Il s’agit là – offre sans précédent - d’un ensemble de partitions utilisables, écoutables, imprimables, libres de droits, sans restriction aucune.  Soit 630 œuvres majeures (du domaine public), soigneusement doigtées et classées par niveau de difficulté, 2 500 pages de musique à imprimer et 26 heures d’écoute au format MP3.  Extraordinaire !

Maya. Portrait de Maya Plisetskaya.  Film de Dominique Delouche.  Video Artists International (www.vaimusic.com) : 4489.  TT : 84’.

Tourné en 1999 pour Les Films du Prieuré, ce magnifique portrait de Maya Plisetskaya vient - grâce à une firme new-yorkaise - de paraître en DVD.  Où la grande danseuse relate son parcours : enfance tumultueuse (exécution de son père, déportation de sa mère sous Staline), sa rebellion et son combat jusqu’à devenir, en son pays – puis dans le monde – la prima ballerina assoluta.  Dans ce film, sont bien sûr exaltées la danseuse mais aussi la femme et la pédagogue.  Interventions de Maurice Béjart et de Vladimir Vasiliev.  Avec extraits de ballets : Don Quichotte, Roméo et Juliette, Le Lac des cygnes, Boléro, La Rose malade, Léda

Francis Gérimont

 

Georges BIZET : Carmen. AC.Antonacci, J.Kaufmann, N.Amsellem, I.D'Arcangelo. Chœurs et Orchestre du Royal Opera, dir. A.Pappano.  Universal/Decca : 074 3312.  TT : 152'.

Si Carmen est l'un des opéras les plus populaires du répertoire, c'est parce qu'il s'en dégage une émotion théâtrale intense. La production du Royal Opera possède des atouts déterminants.  À commencer par un couple de chanteurs-acteurs hors du commun.  Elle, fonctionnant comme un aimant, incarne une héroïne déterminée, féminine, mais pas effrontée. Une composition frappée au coin de l'intelligence et du goût. Et quel métal incandescent, que caractérisent un superbe medium, un grave bien timbré et un aigu facile ! Lui, beau comme un dieu, nanti d'une voix solaire, vit l'inexorable parcours d'enfer d'un homme peu à peu broyé par un infernal destin.  L'air de la fleur en est le moment décisif, à partir duquel tout bascule, qui s'achève en sanglots, expression d'un véritable déchirement. D'évidence, la régie de Francesca Zambello place au centre le personnage de Don José.  Elle sonne vraie dans sa sobriété, avec juste ce qu'il faut d'emphase sur les instants essentiels. La décoration mise sur la couleur, tons ocres et rouges toujours rayonnants, sur lesquels se détachent idéalement des personnages typés - habilement filmés. Le premier acte est un modèle de dramaturgie bien comprise, sensation de chaleur accablante que vient rompre une bataille rangée. Le geste est toujours efficace et des touches tout en finesse pimentent une belle animation que n'aurait pas désapprouvée Mérimée : le défilé des enfants, telle une volée de moineaux, les réjouissances qui ouvrent le dernier acte pour saluer l'entrée de Carmen au bras d'Escamillo implorant du regard la protection d'une immense madone en cortège.  À l'heure de l'ultime duo, la lutte frontale est bouleversante : deux êtres ruinés qui se déchirent un destin enamouré, sans doute réel.  La direction musicale, très articulée, mêle savamment brillance et nuances délicates.

 

Jean-Baptiste LULLY : Cadmus et Hermione. A.Morsch, Cl.Lefilliâtre, A.Marzorati, I.Druet. Le Cercle de l'Harmonie, dir. V.Dumestre. Alpha : 701. TT : 123'.

Pour Cadmus et Hermione, filmé à l'Opéra Comique, Benjamin Lazar a choisi le parti d'une reconstitution scrupuleuse de la tragédie de Lully : décoration figurative léchée, avec ciel mousseux, effets de symétrie, costumes chamarrés et recherchés aux couvre-chefs enplumés, usage de masques, apparitions du dessus ou du dessous (fantastique dragon crachant ses humeurs). Le tout fort colorié est éclairé à la seule bougie. La gestuelle sophistiquée décalque le langage parlé. Bien qu'empruntée elle est rapidement appropriée. L'expression emphatique des mains complète la noblesse des attitudes que la caméra de Martin Fraudreau – à qui l'on doit un étonnant Bourgeois Gentilhomme – se plaît à détailler. Les intermèdes dansés, galants ou espiègles, exhalent une subtile harmonie. Dommage que le texte soit délivré en vieux français, parti pris curieux. La direction joue au maximum le bondissement de la musique de Lully, la fine couleur orchestrale faisant écho à la déclamation vocale suggestive. Si le sujet allégorique paraît d'un autre temps, le plaisir de yeux lui n'est pas mince !

 

Neujahrkonzert 2009 : Œuvres de Johann Strauss IIJoseph Hellmesberger, Joseph Haydn.  Wiener Philharmoniker, dir. Daniel Baremboim. Universal/Decca : 0743317. TT : 112'.

Le concert du Nouvel An des Wiener Philharmoniker est toujours un événement ! Il l'était d'autant plus, ce 1er janvier 2009, que la direction en était dévolue à Daniel Barenboim - une première.  L'interprétation favorise une tonalité grave conférant à des ouvertures comme celle d'Une nuit à Venise ou du Baron tzigane une intensité insoupçonnée.  Quelle maestria ! Le chic viennois est là très présent - tel rallentando ou de fulgurantes accélérations.  Que dire de l'art de la transition délicate et surtout de la manière de conclure glorieux sur un accord tranchant.  Le sens du rythme dans la polka schnell ou autre gallop montre une flexibilité innée que les Viennois possèdent d'évidence sur le bout de l'archet. Et dans la valse, le tout est de savoir retenir le premier temps. Le programme concocte quelques joyaux du genre (Annen-Polka, Unter Donner und Blitz) et son lot de premières : Märchen aus dem Orient, ou le dernier mouvement de la symphonie Les Adieux de Haydn, qui trouvera sa vraie mise en scène, les musiciens quittant l'estrade les uns après les autres ! Comme toujours, la prise de vues de Brian Large est un régal : tel clin d'œil complice entre pupitres, tel sourire de bonheur du chef, ou encore ce visage de la dame « seconde » premier violon, montré à l'envi ; sans parler de ces images obligées, mais si agréables, d'une salle fastueuse enluminée de monceaux de fleurs, voire de la radieuse campagne autrichienne...  Tout ici est proprement irrésistible.

Neujahrskonzert 2009,

Jean-Pierre Robert

 

 

 

 

 


Haut


Dossiers déjà parus dans L'Éducation Musicale

  • Percussions, n°549/550
  • Le bruit, n°551/552
  • Activités vocales et instrumentales à l’école, n°553/554
  • Femmes compositrices (1), n° 555/556
  • Paris et la musique à l’époque des Ballets russes
Dossiers à paraître

  • Musique et cinéma (1)
  • Musique et cinéma (2)
  • Femmes compositrices (2)

     

Le supplément Baccalauréat 2009. Comme chaque année, L’éducation musicale propose le supplément indispensable aux professeurs d’Éducation musicale et aux élèves de Terminale qui préparent l’épreuve de spécialité « série L » ou l’épreuve facultative « Toutes séries générales et technologiques du baccalauréat ».

Le supplément Baccalauréat 2009 réunit les connaissances culturelles et techniques nécessaires à une préparation réussie de l’épreuve ; il ouvre également sur tous les univers sonores qui nous entourent.

Il peut être commandé aux éditions Beauchesne : 7, cité du Cardinal-Lemoine, 75005 Paris.
Tél : 01 53 10 08 18. Fax : 01 53 10 85 19. heuresdefrance@wanadoo.fr


 

 

 

Notre numéro de janvier/février est à découvrir sans attendre! au sommaire de ce numéro vous trouverez un dossier spécial sur Paris et la musique à l'époque des Ballets russes" (programme de l’agrégation) et aussi un article sur John Zorn ou l'abolition des frontières musicales ainsi que toute l’actualité de l’édition, des CDs et DVDs.

 

 

 

Passer une publicité. Si vous souhaitez promouvoir votre activité, votre programme éditorial ou votre saison musicale dans L’éducation musicale, dans notre Lettre d’information ou sur notre site Internet, n’hésitez pas à me contacter au 01 53 10 08 18 pour connaître les tarifs publicitaires.





 

Laëtitia Girard