À l’automne d’un engagement réflexif édifiant, poussé par l’Agathodaïmon de la théorie, le Professeur Serge Gut, d’origine bâloise, fervent partisan, à la suite de Vincent d’Indy de la méthode riemanienne d’analyse harmonique soumet, – à l’appréciation des initiés –, un ouvrage testamentaire de 431 pages immergé dans le ferment musicologique d’une vie de recherche. En vérité, le maître d’oeuvre de « cette période retenue comme champ d’investigation », s’attelle à une permanente confrontation d’idées ; d’où, un titre, au potentiel si intimidant : Les principes fondamentaux de la musique occidentale - Un demi-millénaire de polyphonie (1400-1900). En assumant pleinement le recours aux considérations savantes qui surviennent tout au long de ces pages, le musicologue, – bien qu’il ne soit pas l’inventeur, à proprement parler, d’une théorie –, appréhende des facteurs déterminants du langage musical destinés à s’intégrer dans l’architecture rigoureuse d’un livre structuré en quatre grands chapitres : I. Les données de base. II. La première grande floraison (XVe et XVIe siècle). III. L’épanouissement (XVIIe et XIXe siècle). IV. Réflexion et synthèse.



Les spécialistes qui auront en main ces chapitres se rendront compte de la difficulté de l’exercice, ne serait-ce que pour échapper à l’écriture d’une histoire de la musique en raccourci. De même, si des exemples musicaux étayent le déroulement de la démonstration, cette réflexion ne s’obstine pas à entrer dans les arcanes d’un traité d’harmonie. En revanche, Serge Gut, se veut le dépositaire d’un savoir dont il faut extirper tous les secrets ; il anime les exemples musicaux de ses analyses en y incluant des perspectives appliquées à sa démonstration. Une fois établie cette rigueur architecturale propice à une insertion maîtrisée d’un ensemble de références destinées à être soumises au feu de son esprit critique, l’ancien directeur de l’UFR de musicologie à Paris-Sorbonne (Paris IV) – qui nous a quittés le 31 mars 2014 – a eu l’habilité de recycler, à bon escient, un chapitre de sa première thèse sur La tierce harmonique dans la musique occidentale et d’inclure, de brefs extraits d’articles, déjà publiés. L’érudition plurilingue affermit une donnée immédiate, actualisée, à la fois, en français, en allemand, en anglais et parsemée de nombreuses notes auxquelles elle renvoie le lecteur. Son constant usage ajoute une force indiscutable à la longévité d’un parcours musicologique en quête d’élucidation théorique de haut vol. L’investissement dû à de telles contraintes de lectures reste à l’image de la motivation que le locuteur réclame pour nouer, non seulement un dialogue fécond avec des théoriciens librement choisis qui ont un lien étroit avec le sujet abordé mais encore, à ferrailler avec eux, et ce, à la moindre occasion.
Défi théorique d’autant plus délicat que, l’esprit de contradiction aidant, Serge Gut, s’élève contre des positions habituellement admises. À l’origine de certaines considérations qui révèlent, au fil des pages, des affinités électives avec Friedrich Blume, Sigfrid Karg-Elert, Hans Kayser, une pensée dont l’accent, à la suite de Karg-Elert, a été mis sur l’essence de l’évolution des accords et leur nature profonde. À dire vrai, le Wesen, (monde nouménal) hérité de l’organiste allemand, joueur d’harmonium et théoricien de la musique, – à l’épreuve d’un surcroît de questionnement tel que le chercheur infatigable l’entend –, façonne l’esprit de son ultime message ce qui ne signifie pas que l’Erscheinung (la réalisation concrète de l’harmonie) a été minorée. Le projet du théoricien-musicologue s’avère très ambitieux. Il veut faire la lumière sur ce qui le taraude de manière à reconquérir un territoire qui pourrait lui échapper et s’acquitte de la redite, en dressant, au passage, des panoramas rétrospectifs aussi clairs que pédagogiques. Conscient de cet écueil, il réécrit des synthèses où la mémoire ne déborde pas dans l’à-peu-près. Sa parole d’expert, il l’a défend avec des arguments qui donneraient, lors d’une soutenance de thèse, un maximum de consistance à un débat contradictoire. Les choix, opérés au gré de la progression d’un plan aux substantielles informations, lui ont permis de s’affranchir des rites du colloque universitaire, en adoptant, suivant les circonstances, le ton d’une oralité plus familière, transcrite, le plus souvent, à la première personne.

En guise de considérations préliminaires, les noms de Gioseffo Zarlino, Jean Philippe Rameau, Sigfrid Karg-Elert, Hans Kayser, Jacques Chailley, Auguste Sérieyx, Ernest Ansermet, Rudolph Haase sonnent le rappel de sources théoriques incontournables et concaténées en strates mémorielles. La réminiscence commune, étant de reconnaître, le travail considérable sur la formation des échelles de Jacques Chailley et de saluer qu’il « y fait montre d’ingéniosité, d’habileté et d’une grande étendue de connaissances qui force l’admiration ». Avant de jeter les bases d’une étude très pointue sur les fondements du langage musical occidental, le rédacteur de ce travail d’érudit a sélectionné, en diverses langues, des sources primordiales pour nourrir les discussions à venir avec le discernement qui s’impose. Visiblement, ce spécialiste de Franz Liszt qui a su traquer, dans une Thèse d’État, les moindres recoins d’une oeuvre prolixe éprouve le besoin de se penser comme un explorateur désirant de la consonance et de la dissonance ; de les théoriser, toutes deux, différemment, et surtout, encore mieux que les autres. Le jugement est prompt si bien que, les coups de griffe, aux allures de pomme de discorde, libèrent la parole sur l’usage que font les théoriciens de leurs propres formulations; le sectateur de la théorie des autres ne cesse de soumettre le lecteur à la causticité de son appréciation. À ce titre, Jacques Chailley, figure tutélaire de la musicologie française du XXe siècle est suspecté d’avoir « interprété, avec beaucoup trop de rigidité le phénomène de la résonance sonore, en déduisant des généralisations inflexibles. » En pénétrant au coeur de l’exigeante réflexion, le troisième chapitre assure le temps fort qui scande et détermine l’organisation de chacune des douze parties numérotées. Son organisation interne délimite le propos et le fixe « sur la nature profonde et l’évolution des accords utilisés ainsi que sur les problèmes de syntaxe musicale ». La capacité à infuser de la documentation spécialisée permet de recenser des théories existantes ; pour mieux les décortiquer en vue d’y façonner l’art de l’explication technique distanciée.

En hommage aux splendides réussites musicales qui ont jalonné une période, répartie sur deux siècles, allant du début du XVIIIe siècle à la fin du XIXe siècle, la centralité du troisième chapitre s’affirme à l’aide d’un titre très évocateur : « L’épanouissement ». Passer en revue une panoplie d’accords ne suffirait pas si les conditions théoriques de retrouver l’échantillonnage d’un itinéraire obligé ne figuraient pas au programme ; à condition d’attirer l’attention sur une méthode qui mentionne, d’une manière chronologique, des textes allant de Jean Philippe Rameau à Vincent Arlettaz ; d’en extraire des citations et de les contextualiser ; bref, de voir au-delà des preuves usuellement colportées et de préciser la terminologie. De cette juxtaposition d’éléments naît l’esprit de déduction qui entraîne, parfois, à vif, quelques transparentes saillies. Dans l’ordre de lecture : l’accord de septième de dominante ; l’accord de septième de sensible ; l’accord de septième diminuée ; les autres accords de septième ; l’accord de neuvième de dominante ; les accords altérés et la tension exacerbée. Puis, l’harmonie dissonante dite « naturelle » ; les fonctions tonales ; les notions de consonance et de dissonance ; la tension harmonique et syntaxique ; les phénomènes de stabilité et d’instabilité en harmonie. D’un tel assemblage, patiemment réuni, il en résulte un puzzle de commentaires qui fait de ce troisième chapitre, - tant sont nombreuses les remarques auxquelles il a donné lieu -, un ensemble aussi pertinent que subtil.
Prenons l’examen de la nature profonde de deux accords : la septième de dominante puis, la septième diminuée, ce dernier accord qui « a fait à la fois les tourments des théoriciens et les délices des compositeurs ». Le problème soulevé par la préparation ou non de l’accord de septième de dominante suscite un jugement professoral sur les écrits, à réception, de Jean Philippe Rameau, Jean le Rond D’Alembert, Jean-Jacques Rousseau, Charles Simon Catel, François Joseph Fétis, Rudolf Louis, Ludwig Thuile et Auguste Sérieyx. Il se trouve que les Anciens, - figures instituées de la théorie -, du point de vue de la critique, sont quelque peu étrillés : « les explications de Rameau sont assez alambiquées et fort peu claires ». Se tournant vers un autre théoricien français du siècle passé, il note que Jacques Chailley dans son Traité historique d’analyse harmonique, en donne un « historique sommaire insuffisant pour avoir quelque valeur scientifique ». De même, une trentaine de pages plus loin, quand il envisage l’agencement de la septième diminuée, il fait à nouveau appel aux Anciens, muséifiés autant que défiés : « Il suffit de ce que Rameau tente de démontrer dans son Traité de l’harmonie pour justifier sa structure si particulière ou les élucubrations de D’Alembert. Avouons que – malgré leur renom – ces auteurs se fourvoient passablement ». Parmi les multiples remarques révélées au grand jour, des sujets de friction théorique entre Serge Gut et Jacques Chailley apparaissent. Animé d’une volonté d’aller jusqu’au bout de sa logique et loin de se soustraire aux conceptions de Jacques Chailley qui, dans la lignée de Charles Koechlin, considérait l’accord de septième diminuée « comme l’analogie d’une 9e de dominante mineure dont l’accord de 7e diminuée n’était par avance que l’expression tronquée », Serge Gut décide, pour finir, de s’en démarquer. Une réplique bien troussée suffit à manifester une certaine gêne : « c’est un joli tour de passe-passe qui ne va pas au fond du problème ». De cette manière, il porte le fer sur la nature profonde de l’accord et sur l’orientation de la recherche qu’il faut mener ensuite, sans faiblir, au niveau du tronc dominantique : tel un rai de lumière, seule, la profondeur l’accapare. Tout concourt à faire place aux diverses acceptions d’un terme qui fait problème ; le placer ensuite, sur le terrain de la confrontation n’exclut pas de tisser des liens, en chemin, avec le soubassement d’une filiation textuelle. En effet, pour faire feu de tout bois, tutoyer les cogitations des théoriciens français réclame une autonomisation de la parole qui s’adresse, aussi, aux ruminations des théoriciens d’Outre-Rhin.

Puisque le désir d’aller plus loin se heurte à sa propre énigme, se pose la question de savoir de quel côté infléchir la filiation textuelle. Déjà, au milieu des années cinquante, époque du 19° congrès international de psychanalyse, qui refuse la Société française de psychanalyse fondée par Daniel Lagache en 1953, Serge Gut avait pensé à publier un livre axé sur la psychanalyse. De ce projet, selon ses dires, trop « présomptueux » qui se serait intitulé Psychanalyse du langage musical, il en ressort une prédisposition pour le symbolisme des nombres ainsi que des dualités fondamentales telles que le masculin/féminin, le statisme/dynamisme, notions qu’il tentera d’élucider par la suite. Les intuitions du musicologue laissent entrevoir une curiosité qui le porte à citer un compatriote, le zurichois Carl Gustav Jung plutôt que Sigmund Freud ; en outre, il s’inspire de certaines options héritées de Sigfrid Karl-Elert, de Hans Kayser, d’Auguste Sérieyx, et même, du fondateur de l’orchestre de la Suisse romande, Ernest Ansermet. Sans éluder la charge immense que prendrait cette investigation, il faudrait que l’on se crût spécialiste d’une pluridisciplinarité menée à bras-le-corps pour aboutir à des résultats tangibles. Il est vrai que, « vouloir aborder un sujet presque toujours passé sous silence : celui de la confrontation masculino-féminine », relève d’un pari très risqué qui ne peut que susciter l’ire des féministes. Réellement en conversation avec cette filiation textuelle, Serge Gut surcommente le caché-dévoilé en une sorte de rendez-vous avec l’acception vitale du quinaire, la double nature de l’intervalle de tierce, la double symétrie reliée à l’arrière-plan de l’accord parfait ; il y adjoint, les présupposés de l’extraversion de l’accord majeur et de l’introversion de l’accord mineur ainsi que la double attraction, imposée, selon sa perception, par l’accord de la quinte diminuée. Face à cette ramification d’énoncés, l’interprétation s’escrime à vouloir entrer dans les zones profondes de la psyché. Le théoricien fait sienne, un aspect de la pensée de Sigfrid Karl-Elert ainsi contractée : « l’accord parfait majeur est masculin, ascendant extraverti et se déploie tout naturellement dans le monde des phénomènes, l’accord mineur féminin, descendant, introverti et trouve sa source dans le monde de l’âme » et de se remémorer, au passage, Novalis « c’est vers l’intérieur que passe le chemin mystérieux ». De ces références, saisies à brûle-pourpoint, émerge une explication, étonnamment subjective, qui rattache l’accord de quinte diminuée à deux demi-tons issus de la gamme heptatonique subissant une attraction de nature opposée dont l’une serait prépondérante, masculine, extravertie et l’autre, féminine, introvertie. Cela revient à faire apparaître, hélas, une armature de domination : celle qui perpétue les dissymétries maîtrise/passivité et domination/soumission. Plutôt que d’éprouver que l’on est en mesure de partager toutes les arguties factices référées à la sexualisation intervallique, ce qui signifierait, l’acceptation, sans sourciller, d’une conception s’égarant dans le confinement d’un chemin de traverse, il est préférable, face à un corpus d’oeuvres, de redécouvrir une terminologie analytique, distinctive, clairement revendiquée par Serge Gut. Les mots : dissonance, instabilité, tension et même tension explosive s’appliquent à la morphologie des accords, à leur qualité intrinsèque et de nouveau à leur nature profonde. Tension harmonique/tension syntaxique précèdent un chapitre caractéristique sur les phénomènes de stabilité et d’instabilité en harmonie. À la différence d’Ernest Ansermet qui applique cette notion au déroulement linéaire, le musicologue la fait appartenir à l’harmonie, aux accords classés ; en lien direct avec l’instabilité qui en résulte ; de fait, il instaure un coefficient de tension de 1 à 3 (tension propre à l’accord lui-même), en fixant le coefficient 1 pour chaque triton ou accord de quinte augmentée, selon une règle ainsi rédigée : « tout accord comportant un intervalle de triton ou un accord de quinte augmentée provoque une impression d’instabilité ». Maintenant, sous l’angle de la stabilité des accords, il s’ensuit cinq exemples musicaux : le premier s’applique à Roland de Lassus (Libro de Villanelle, 1581. Matona mia cara); le deuxième est attribué à Jean Sébastien Bach avec un extrait relatif à l’instabilité neutralisée (Chromatische Fantasie und Fugue. Fantasie); le troisième met à l’épreuve Richard Wagner et l’alternance de tension 1 2 1 (Tristan, Prélude); le quatrième s’applique à Claude Debussy avec d’une part, un conglomérat de tension 3 (Préludes. Voiles) et d’autre part, en opposition, un effet de tension nulle (La Cathédrale engloutie); le cinquième incorpore Béla Bartók à cause d’une tension neutralisée par des dissonances contrariantes (Mikrokosmos, vol. VI, n° 147). En prolongeant la discussion sur la terminologie, ce qui intéresse le destinataire, à propos de Pelléas et Mélisande, c’est la réinsertion d’une section appartenant à un article intitulé « Le langage harmonique de Pelléas et Mélisande : Tradition et modernisme », publiée dans la revue de la Suisse romande en juin 2002. L’évident intérêt pour Debussy n’a de sens que dans le registre du statisme harmonique. Aller plus loin que le philosophe-esthéticien Vladimir Jankélévitch revient à entrer, techniquement parlant, dans l’analyse musicale pour y introduire, le statisme immobile et le statisme mouvant, à condition, de les différencier, subtilement. La tension, lorsqu’elle introduit l’instabilité, à l’intérieur de la stabilité, permettant de soumettre le dynamisme à l’épreuve du statisme, devient un sujet de spéculation. Dans cette perspective, la scène II de l’acte III de Pelléas et Mélisande s’intègre à une distinction ; le choix de l’exemple s’ouvre à la singularité d’une terminologie qui appartient à un processus « d’alternances globales ». Indissociable de Claude Debussy, la terminologie, défendue avec zèle, s’installe dans une certitude puisée chez monsieur Croche antidilettante. Sur cet arrière-plan fondamental, un hommage est rendu à un compositeur qui a « su trouver une position équilibrée entre tradition et modernisme ». Peu enclin à suivre les démarches compositionnelles qui corrodent les acquis de la musique savante occidentale, Serge Gut, s’interroge sur la dissolution d’un langage demimillénaire au XXe siècle avec « la coupure barbaro-primitive de Stravinski » ou encore, attribuées au Pierrot lunaire, « les harmonies totalement anarchiques de Schönberg ». Sa lucidité lui impose de rédiger une conclusion méditative enracinée dans une culture germanique qu’il affectionne. Le Beethoven de Wagner prend la mesure de Schopenhauer et c’est l’occasion rêvée d’inclure trois citations : l’harmonie des sons, ce composant le plus spécifique de la musique qui n’appartient ni à l’espace ni au temps ; le rapport rythmeharmonie incarné dans l’écoute d’une célèbre oeuvre religieuse de Palestrina, image presque dégagée du temps et de l’espace ; l’affaiblissement de l’esprit interne de la musique dû à l’ordonnance des coupes rythmiques qui ne nous apporte plus la révélation de l’essence des choses. Placée au centre d’une tripartition héritée du dernier verset de la Première Epître adressée aux Thessaloniciens (1 Th 5, 23) de l’apôtre Paul, l’harmonie, qu’il place au centre de la tripartition, lui suggère l’âme entourée du rythme qui serait le corps et la mélodie, l’esprit. Au moment où s’achève la lecture de ces dernières pages, le musicologue – théoricien ne fait pas mystère de ses inquiétudes. Il se demande comment expliquer, de manière satisfaisante, la naissance de la polyphonie ou le passage du mouvement descendant au mouvement ascendant d’une mélodie ; il s’étonne de la poussée de la polyphonie jusqu’à son épuisement au début du XVIIe siècle et souligne l’importante césure qui s’opère au premier tiers du XVe siècle ; et, tels les éclats d’un miroir en morceaux, la rapide désagrégation d’un langage demi-millénaire, au début du XXe siècle, le laisse dubitatif. Mais le moment n’est plus aux joutes paradoxales et le fait de s’être ainsi, arc-bouté, - sur le socle savamment préparé d’explications pointues destinées à surplomber les prédécesseurs -, n’exclut pas une certaine écriture de soi, une assurance verbale qui ne maquille, en rien, ses convictions. L’extrait d’une lettre de Serge Gut, adressée à Vincent Arlettaz, rédacteur en chef de la Revue musicale de Suisse Romande, datée du 3 juin 2010, montre que l’entreprise était périlleuse. Alors, c’est dans la part d’une vérité sans fard que, cette dernière réalisation doit être lue comme « ce testament d’un demi-siècle de pensée, de réflexion, et de méditation sur la musique ». Le regretté musicologue et universitaire, spécialiste de Liszt et Wagner, à l’heure où, il avait mis la dernière main à ses considérations, n’avait plus rien à prouver si ce n’est, d’exister, au fil de la force de sa croyance. Sur la petite musique nostalgique de l’essor, de l’épanouissement et du déclin de l’Europe, il se surprend à écouter les derniers flamboiements de Mahler et de Debussy pour mieux les regretter. Si bien que l’auteur de cet essai sur Les principes fondamentaux de la musique occidentale pourrait reprendre ce jugement catégorique, hérité du Cours de composition musicale de Vincent d’Indy/Sérieyx, 1ere partie, IV, La sonate de Beethoven 2 « Le développement et la modulation » (1899-1900) : « La structure tonale est le principe fondamental et vital de toute oeuvre de musique ».
Michel FISCHER