Anthony GIRARD : Œuvres pour violon. AZUR Classical (distribution : SOCADISC). AZC148. 2019. TT : 56’ 21. (Premier enregistrement mondial).

Anthony GIRARD (né en 1959 à New York, formé au CNSMDP — 5 Premiers Prix harmonie, contrepoint, analyse, orchestration et composition — et à la Sorbonne : DEA d’Histoire de la musique). Pensionnaire de la Casa Velasquez, lauréat de plusieurs Concours, a composé environ 150 œuvres et enseigne l’orchestration et l’analyse musicale au CRR de Paris et l’orchestration au CNSMDP depuis 2012.
La proximité artistique entre l’interprète : Jean-Luc Richardoz (violon) et le compositeur est palpable. Les Quatre Saisons (Printemps, Juillet l’espiègle, L’Automne en rêve, Vent de neige), 4 caprices pour violon (à la mémoire de Boris Pasternak) exigent une grande virtuosité en raison des doubles cordes, harmoniques doubles, pizzicati… Un autre Caprice : Partons, ô mon âme ! repose sur un poème de Walt Whitman (1819-1892), l’auteur des Leaves of Grass), et propage une oscillation lancinante. L’Étoile Aldébaran, pour 2 violons, est dédiée à Isabelle Flory et Nicolas Risler. Patricia Reibaud rejoint Jean-Luc Richardoz pour accomplir avec une grande sensibilité cette déambulation perpétuelle où l’amarre du temps s’enlève. Dans Lucky ways, 4 études pour violon, les violonistes chevronnés trouveront de quoi développer encore l’appropriation totale de leur instrument. L’écriture très personnelle d’Anthony GIRARD, quelque peu influencée par la musique médiévale, les musiques de l’Inde et le minimalisme, est marquée par une facture mélodique très soignée, une libre utilisation des consonances au service de profondes aspirations spirituelles.
Le discours violonistique, déployé au long du CD, plonge l’auditeur dans un état second, comme rapproché des intentions du compositeur et toujours plus à l’écoute des variations spirituelles subtiles. Expérience intime assurée.

Édith Weber
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Joanna BRUZDOWICZ : À la tombée du jour. ACTE PRÉALABLE (www.actepréalable.com ). AP0467. 2020. TT : 36’ 20.

Artiste fidèle du Label polonais ACTE PRÉALABLE, Joanna Bruzdowicz (née en 1943 à Varsovie) a étudié au Conservatoire de sa ville natale, puis à Paris, auprès de Nadia Boulanger, Pierre Schaeffer et d’Olivier Messiaen. Elle a soutenu en Sorbonne sa Thèse portant sur le thème « Mathématiques et logique dans la musique contemporaine ». Elle s’installera en Belgique, puis en France. Compositrice engagée, elle a été considérée comme dissidente dans le mouvement d’émancipation polonaise des années 1970. Son catalogue s’étend de l’opéra (La Colonie pénitentiaire, Les Femmes de Troyes, Les Portes du Paradis), à la musique symphonique et de chambre, en passant par des pièces pour enfants, la musique de film et de télévision.
Ce bref CD reproduit les versions française et polonaise du poème À la tombée du jour (2017) de Jean SOREL (1933-2019) — philosophe des monothéismes, diplomate —, mis en musique et traduit dans sa langue par la compositrice. Yves Daoudal-Soler est le narrateur pour la version française ; Catherine Dagois (contralto) et Edgar Teufel (claviers) du Duo Canticel, se partagent l’aspect musical. Dans la version polonaise : A schylku dnia, le narrateur est Jerzy Raziwilowicz, le chanteur est le baryton-basse Jaroslaw Brek, qu’accompagne au piano Tomasz Jocz.
La pièce débute par un long monologue dressant l’état d’esprit du vieillard au soir de sa vie, puis la musique prend le relais. La voix de contralto accentue le caractère dramatique, soutenue aux claviers numériques par l’accompagnateur attentif. En fait, la version polonaise nous semble mieux correspondre : l’accompagnement au piano du baryton-basse au timbre plus précis est du meilleur effet. Édith Weber
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François-Bernard MÂCHE : Pluie d’or. Musicatreize. EMPREINTE DIGITALE (www.musicatreize.org) ED 13257. 2019. TT : 53’ 53.

Pluie d’or : titre quelque peu étrange qui prend tout son sens après une indispensable lecture préalable de l’interview très ciblée et éclairante et des Propos recueillis par Maxime Kaprieljan. Il s’agit d’un retour en arrière sur la vie et l’œuvre de François-Bernard MÂCHE (né en 1935) grâce à l’ensemble Musicatreize, à géométrie variable, fondé en 1987 par Roland Hayrabedian.
Le compositeur a effectué un parcours polyvalent exceptionnel : prix de piano et harmonie (Conservatoire de Clermont), DES en archéologie grecque, Agrégation de Lettres (1958), Doctorat d’État en Esthétique, Prix de Philosophie de la musique (CNSMP). Il évolue dans le sillage de Pierre Schaeffer et d’Olivier Messiaen, et s’intéresse aussi aux films expérimentaux.
Fr.-B. MÂCHE exploite les données sensorielles, est obsédé par les références grecques (« papyrus égyptien rédigé en grec »,
cf. Invocations pour 6 voix et 2 percussionnistes). Il utilise l’aulos pour restituer la couleur sonore de la langue grecque, le tambourin pour opposer tons aigus et tons graves ; la prosodie quantitative de la langue grecque… Son objectif consiste à relier l’humain, la musique et l’univers, dépassant l’espace sonore et chronologique en associant Sappho de Mytilène (v.-630 ; v.-580) et Novalis (1772-1801), cf. p. 12 : Heol Dall (Soleil aveugle, en breton) pour 12 voix et 2 pianos.
Grâce, d’une part, à sa formation polyvalente et pluridisciplinaire, à son inlassable recherche expérimentale et à son inventivité et à sa curiosité hors normes et, d’autre part, au travail acharné du vaillant ensemble Musicatreize et de son chef R. Hayrabedian si motivé, les mélomanes découvriront les multiples facettes du génie de François-Bernard MÂCHE. Pluie d’or : titre riche en expérimentations, en associations philosophiques et littéraires, en sonorités opposées : une confrontation exceptionnelle. Édith Weber
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HARU Kara : Voyage dans nos états d’âmes à travers les saisons. TRIHORT 572. (www.disques-triton.com ). 2020. TT : 79’ 15.

Chaque changement de saison suscite un autre état d’âme, comme le démontrent le violoniste français Laurent Houque — formé à Paris et au Conservatoire de Mons — et la pianiste japonaise née en Californie, Misa Kakumoto — après sa formation en Angleterre et en Belgique. Ils apportent une démonstration de plus à la théorie de l’« Effet de vie » élaborée par Marc-Mathieu Münch. Dans cette perspective, ils ont retenu Winter Fairy (Fée de l’Hiver) de Serge PROKOFIEV, la Sonate n°5 Le Printemps de Ludwig van BEETHOVEN, Diptychon (op. 11) de Per NOGÄRD (né en 1932) évoquant un paysage nordique, étoilé, calme lors d’une nuit d’Été. Laurent HOUQUE (né en 1985) a intitulé sa pièce En Haut D’un(e) des Arbres (2018), inspirée par les bois dans les dunes, selon ses commentaires : « d’une explosion jaillit l’inattendu, le chant d’un oiseau dont le regard embrasse la forêt qui l’a vu naître, au milieu des dunes » (p. 7). L’auditeur peut « suivre le coucher de soleil dans la mer, derrière la ligne d’horizon… » ; la lune réfléchissant « la lumière que nous ne pouvons plus voir directement » et qui « devient la veilleuse de nos nuits ». Quant à l’Automne, il est traduit par les feuilles prenant des couleurs en forêt, dans la Sonate pour violon et piano n°2, en mi mineur de Gabriel FAURÉ, page de la maturité, tour à tour nonchalante, lumineuse puis fascinante. En guise de conclusion, ce duo hors pair fait découvrir La Poupée valsante du Hongrois Ede POLDINI (1869-1957), arrangée par Fritz KREISLER (1875-1962), qui pose un point d’orgue marquant sur ce récital original, à la fois descriptif, psychologique et introspectif, portant sur le cycle des Saisons et celui de la Vie. À entendre et à méditer. Édith Weber
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Paul PARAY : Œuvres pour cordes et piano. AZUR CLASSICAL. Collection du Festival International Albert Roussel (CIAR) (Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.). AZC155. TT : 77’ 06.

Paul PARAY (né au Tréport en 1886 et mort à Monte Carlo en 1978) a assumé une brillante carrière de chef d’orchestre dès 1920 — après avoir été prisonnier de guerre — pour le plus grand plaisir des mélomanes, mais ses activités de compositeur avaient cependant quelque peu été occultées. Ce disque vient à point nommé pour en dévoiler la notoriété que lui a valu le Grand Prix de Rome, après avoir été l’élève au Conservatoire de Paris de Xavier Leroux et Georges Caussade.
Cette réalisation discographique propose la Sonate pour violon et piano (1908), une Sonate tripartite pour violoncelle et piano et, en conclusion, une Romance pour violon, violoncelle et piano (adaptation). Sa recherche du raffinement est typique de l’École française ; il s’impose également par sa riche invention mélodique. Ces compositions, en premier enregistrement mondial réalisé par Eliot Lawson (violon), Samuel Magill (violoncelle) et Diane Anderson (piano), bénéficient d’une remarquable introduction par Damien Top. Une « corde de plus » à son arc… Révélation à ne pas manquer. Édith Weber
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Roselyne MARTEL : Reflets solaires. BONNAL, CHAUSSON, MASSENET. CALLIOPE (www.calliope-records.fr ). Distribution : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.. CAL2074. 2020. TT : 57’ 05.

Arrière-petite-fille de (Joseph-)Ermend BONNAL (1880-1944), la soprano Roselyne Martel-Bonnal, au timbre généreux, propose un récital lyrique associant des compositeurs français de mélodies des XIXe et XXe siècle : Jules MASSENET (1842-1912) avec 3 chants — dont la poignante Élégie —, Ernest CHAUSSON (1855-1899) avec 2, Charles GOUNOD aussi avec 2 (dont Le Colibri, extrait de ses 7 Mélodies, op. 2), Cécile CHAMINADE, Hector BERLIOZ… (Joseph-)Ermend BONNAL (1880-1944) — le plus proche de nous — figure avec 5 chants : Sur le lac triste, Petit Poème (op. 19), Improvisation (op. 23), Bosphore et Chêne gaulois (arrangé par l’organiste et compositeur David Maw pour voix, violon, violoncelle et piano). Le violoniste Guillaume Latour, la violoncelliste Juliana Laska et la pianiste Flore Merlin se sont associés avec infiniment de sensibilité à ce noble projet filial.
Édith Weber
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Max REGER : String Trios. Il Furibondo. SOCADISC. Distribution : Laurent WORMS (Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser. ) SM323. 2017. TT : 50’ 54.

Max REGER (1873-1916) est à l’honneur dans la production discographique. Après l’intégrale de ses œuvres pour orgue qui ont assuré sa réputation, voici 2 Trios à cordes (violon, alto, violoncelle) : n°1 (op. 77 b, en la mineur et n°2 (op. 141 b) en ré mineur, par l’intrépide ensemble Il Furibondo, fondé en 2011, exploitant des instruments historiques. En fait, Giuseppe Tartini (1692-1770) a jadis utilisé furibondo pour qualifier le jeu du violoniste Francesco Geminiani, ce qui n’est pas un mince mérite pour Liana Rosa (violon), Gianni de Rosa (alto) et Marcello Scandelli (violoncelle). Les précisions des divers mouvements justifient à elles seules cette exigence « furibonde » : Sostenuto – Allegro agitato ; Larghetto ; Scherzo vivace contrastant avec Allegro con moto. Un mélange de rigueur néoclassique, d’esprit baroque, de tendresse romantique. Totale adéquation entre le titre de ce Trio et les exigences de sensibilité d’un Max REGER si estimé par Hans von Bülow.


Édith Weber
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René de BOISDEFFRE : Works for Clarinet or Cello and Piano. ACTE PRÉALABLE (www.acteprealable.com). AP0464. 2020. TT : 63’ 55.

René de BOISDEFFRE bénéficie depuis plusieurs années de la volonté d’exhumation de son œuvre injustement oubliée. Dès 2016, la production pour violon, flûte et alto de R. de BOISDEFFRE était relancée par le Label polonais ; en 2018, sa musique chorale. Cette année, c’est de nouveau la musique de chambre qui retient son attention avec des duos pour clarinette ou violoncelle et piano. Né à Vesoul en 1838 et mort à Vézelise (Lorraine) en 1906, René de BOISDEFFRE a étudié la musique auprès de Charles Wagner et la composition avec Auguste Barbereau. Il obtient le Prix Chartier en 1883. Son esthétique néoromantique s’inscrit dans la mouvance de Charles Gounod, Édouard Lalo et Camille Saint-Saëns... En premier enregistrement mondial, Anna Mikolon (piano), Andrzej Wojciechowski (clarinette) et Anne Sawicka (violoncelle) s’associent au gré des opus : que ce soit dans l’imposante Sonate pour clarinette et piano (op. 12) quadripartite — arrangée par Romuald Twardowoski —, dans les deux jeux de Trois Pièces pour clarinette et piano (op. 20 et op. 40) ou dans La Prière ou encore La Berceuse, pages plus intériorisées, pour violoncelle et piano (op. 26 n°2 et op. 34), les musiciens restituent à merveille cette écriture chatoyante mettant en valeur le dialogue instrumental. Ce CD attachant s’achève avec la Suite Orientale (op. 42) où l’inspiration s’exotise. Une réussite.
Édith Weber
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Robert SCHUMANN : Symphonies nos 2 & 4. PHI (www.outhere-music.com ). LPH 032. 2019. TT : 64’ 47.

Les Symphonies de Robert SCHUMANN (1810-1856) servent d’une certaine manière de « baromètre » de ses états d’âme psychiques, bref de confession troublante. Il était, en effet, atteint de dépression et de mélancolie à partir de 1820, avait tenté de se suicider et été placé dans un asile en 1854. Il était cyclothimique, souvent abattu et souffrait d’insomnies, d’hallucinations et de vertiges qui ont profondément imprégné ses Symphonies II en Do Majeur (op.61, composée en 1845-1846) et IV en ré mineur (op.120, commencée dès 1841, dans la foulée de la Première), enregistrées avec passion et ferveur par Philippe Herreweghe et l’Orchestre Symphonique d’Anvers. Une belle révélation de plus à son brillant actif.
Édith Weber
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BEETHOVEN : Concerto n°5 « Emperor ». Cyprien Katsaris/Sir Neville Marriner. PIANO 21 (www.cyprienkatsaris.net ), P21 051-N. 2014. TT : 75’ 35.

Confrontation très constructive qui retiendra l’attention en cette commémoration beethovénienne : la version (originale) du Concerto n°5 dit L’Empereur [Napoléon Ier] grâce à Cyprien Katsaris accompagné par Sir Neville Marriner à la tête de l’Academy of St Martin in the Fields et surtout, en première mondiale, son arrangement pour piano solo, qui — même sans les sonorités de l’orchestre — va droit à l’essence même du célèbre Concerto parfois galvaudé. Une belle « leçon de fidélité », d’adaptation à l’actif de l’inégalable Cyprien Katsaris. Une émouvante plongée dans l’univers comme volontairement quelque peu assourdi, lointain du compositeur, dont la richesse de la vie musicale intérieure pallia toujours davantage la surdité progressive, à la frontière entre imagination et réalisation musicale. Incontournable pour les pianistes. Démarche au cœur du sensible.
Édith Weber
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André JOLIVET (1905-1974) : Complete Works for Flûte 1-2. Hélène Boulègue. NAXOS. 8.573885(2019)- 8.574079(2020). Distribution : Laurent Worms (Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.). TT : 68’ 29 ; 76’ 19.

Hélène Boulègue, née en 1990, formée au CNSM et à la Hochschule für Musik de Karlsruhe, titulaire de Prix internationaux, est déjà à 19 ans 2e Flûte à l’Orchestre Philharmonique du Luxembourg. Dans la Collection « Laureate Series : Flute » du Label NAXOS, elle a signé l’Intégrale des œuvres pour flûte d’André JOLIVET (1905-1974), est accompagnée au piano par François Dumont, en parfaite connivence (CD 1). Les mélomanes apprécieront, entre autres, l’Incantation pour que l’image devienne symbole (1937, flûte alto) et les Cinq Incantations (1936, flûte solo) très élaborées ou encore le célèbre Chant de Linos (1944), pièce de concours CNSM avec mode inventé et mode dorien. Le CD 2 concerne, entre autres, la Suite en concert n°2 (1965) avec 4 percussions ; le Concerto pour flûte et orchestre à cordes (1949) avec notamment l’Orchestre Philharmonique du Luxembourg. Le compositeur y favorise le lyrisme, la mélodie fluide, la bravoure frisant la virtuosité. D’une manière générale, André JOLIVET, disciple de Paul Le Flem et d’Edgar Varèse, exploite la résonance naturelle et les harmoniques, le dynamisme sonore, les rythmes irrationnels, le phénomène incantatoire et le lyrisme débouchant sur l’émotion.
Édith Weber
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DUSSAUT : Musique de chambre. Symphonie n°1 et 3 pièces. AZUR Classical (Laurent WORMS, attaché de presse : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.). AZC123. TT : 73’ 57.

Robert DUSSAUT (Paris, 1896-Paris, 1969), formé au Conservatoire de Paris, sera Premier Grand Prix de Rome (1924) et enseignera au Conservatoire à partir de 1936. Il est aussi à l’aise dans les musiques de théâtre, pour orchestre, de chambre ou vocale. Le CD s’ouvre sur sa Symphonie n°1 pour cordes qui n’est autres que l’extension d’un Quatuor à cordes (Premier Grand Prix Jacques Durand de l’Académie des Beaux-Arts). Structurée en 4 mouvements contrastés : au poignant Preludio ed allegro succède le frémissant Intermezzo ; le 3e mouvement Cantabile, tout en délicatesse, cède la place au Finale le plus développé. L’œuvre est interprétée en 1967 par l’Orchestre de chambre de l’ORTF, sous la direction d’André Girard, que les discophiles auront plaisir à retrouver. Les œuvres suivantes sont enregistrées en première mondiale. Y prend une part active la pianiste Thérèse Dussaut, fille de Robert et Hélène Dussaut.
Hélène COVATTI-DUSSAUT (1910-2005), élève puis enseignante au CNSM, compositrice, est l’épouse de Robert DUSSAUT. Sa Sonate pour piano et violon (qui lui vaudra le Prix Halphen de Composition avec les félicitations d’Arthur Honegger) est tripartite : Allegro, Andante, Finale : Animato. Elle figure également avec Apollon, 4 pièces pour violon et piano
Le CD comprend encore, de Robert DUSSAUT, la version pour piano du Prélude d’Altanima et Deux pièces : Élégie et Printemps pour violon et piano (adaptation de deux mélodies éponymes). Agréable découverte de l’univers musical des Dussaut.
Édith Weber
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Paul PARAY : Œuvres pour cordes et piano. AZUR Classical. Distribution : CIAR (ciar.e-monsite.com ). AZC155. 2019. TT : 66’ 29.

Deux Sonates, l’une pour violon et piano, l’autre pour violoncelle et piano, constituent les pièces maîtresses de cette réalisation consacrée à la production pour cordes et piano de Paul PARAY (Tréport, 1886 - Monte-Carlo, 1979), musicien précoce, ayant suivi des cours de chant, piano, d’orgue, violoncelle, timbales, ami de Marcel Dupré, puis s’étant perfectionné au Conservatoire auprès de X. Leroux, G. Caussade et P. Vidal… Grand Prix de Rome (1911), il est pianiste accompagnateur et surtout, après guerre, chef d’orchestre (Colonne, notamment) et ardent défenseur de la musique française.
Sa Sonate pour violon et piano (1908), dédiée à Hélène Jourdan-Morhange, appartient à sa « période parisienne ». En 3 mouvements : Allegro moderato ; Allegretto amabile ; Molto vivo, elle fait montre d’une belle inventivité mélodique alliée à une solide maîtrise compositionnelle. Eliot Lawson (violoniste belge et luso-américain), diplômé des Conservatoires de Bruxelles et Rotterdam, et Diane Andersen (pianiste belge d’origine danoise) s’en acquittent brillamment.
Sa Sonate pour violoncelle et piano (1921), également tripartite, interprétée par Samuel Magill (violoncelliste, membre du Met Orchestra depuis 1991) et Diane Andersen qui font pleinement vibrer les cordes émotionnelles de cette musique pleine de charme.
Le CD prend fin avec la Romance faisant chaleureusement dialoguer les trois instruments (dans une adaptation d’Eduard Perrone), en premier enregistrement mondial. Musique attachante.


Édith Weber
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Louis AUBERT : Œuvres pour violon et piano. AZUR Classical. Distribution : CIAR (ciar.e-monsite.com ). AZC166. 2019. TT : 74’ 59.

Louis AUBERT (Paramé, 1877 - Paris, 1968), formé au Conservatoire de Paris, a été notamment l’élève de G. Fauré. Dans cette intégrale pour violon et piano du pianiste et compositeur presque oublié, 6 œuvres sont enregistrées en première mondiale, 2 pour piano seul et une est inédite. Il est possible de suivre l’évolution de l’écriture de Louis Aubert en écoutant les plages selon l’ordre chronologique des œuvres. De la grandiose Romance (op. 2, 1897, harmonisée alla Wagner) et du mélodieux Madrigal (op. 9 n°1, 1901 ?), en passant par Trois Esquisses (op. 7, 1900) et son chef-d’œuvre Sillages (op. 27, 1908-1912), le Caprice aux accents hongrois (1924), la Sonate en ré mineur (1926) — dédiée « à la mémoire de mon maître Gabriel Fauré » : Animé, Lent et très expressif ; Assez animé , toute de « passion et de lyrisme » (selon Stéphanie Moraly) —, le parcours du CD s’achève par la pièce douce et mélancolique Sur deux noms (1947, inédite). Stéphanie Moraly — violoniste concertiste née en 1980, musicologue (Thèse sur les Sonates françaises) et pédagogue — et Romain David — pianiste d’une grande curiosité, lauréat de nombreux concours internationaux — conjuguent leurs talents au service d’un musicien français très raffiné dont l’œuvre gagne à être plus largement diffusée.
Édith Weber
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Inception. SAINT-SAËNS – MOSS – MAKSYMIUK – WESOLOWSKI. ACTE PRÉALABLE (www.acteprealable.com ). AP0471. 2019. TT : 73’ 44.

Sous le titre Inception (terme popularisé par le film éponyme, signifiant début, commencement), est regroupé un choix d’œuvres française et polonaises (à découvrir).
La Zoo-Suite de Piotr MOSS (né en 1949) — compositeur polonais naturalisé français, vivant à Paris, élève de Kr. Penderecki et Nadia Boulanger, diplômé de l’Académie de Katowice et de l’École Normale (Paris), toujours à l’affût de nouveaux paysages sonores — est structurée en 5 mouvements tour à tour luxuriant/exubérant, mystérieux, percutant, lyrique (avec allusion au Cygne du Carnaval des Animaux), drôlatique… très exigeants sur le plan technique.
L’œuvre Vers per archi de Jerzy MAKSYMIUK (né en1936) — formé à Varsovie, auteur de musiques de film, chef d’orchestre (Orchestre Philharmonique de Cracovie) — s’inspire d’un fait divers pendant la Seconde Guerre mondiale : une jeune scout arrêtée, torturée puis exécutée en 1944 par la Gestapo, n’ayant pas donné son réseau. Ombre et lumière planent sur cette musique très émouvante créée en 2014.
Le CD se termine avec deux œuvres d’Adam WESOLOWSKI, formé en piano, composition et théorie musicale à Katowice, membre de l’Union des Compositeurs Polonais, ayant organisé des festivals. Son généreux Silver Concerto en 4 mouvements très contrastés (dont l’époustouflant Presto), s’achève sur un Allegro con bravura particulièrement enlevé et dansant. L’Euphory Concerto pour euphonium et orchestre à cordes fait preuve de la même énergie vitale. Pour, si besoin était, rehausser encore la valeur de cette réalisation exceptionnelle, c’est une magistrale interprétation du Carnaval des Animaux de Camille SAINT-SAËNS (1835-1921) qui ouvre le bal… À déguster sans hésiter.
Édith Weber
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Jacques de LA PRESLE, Paul PARAY, Claude DELVINCOURT : Sonates de la Côte d’Albâtre.AZUR Classical AZC 164. Distribution : CIAR (ciar.e-monsite.com ). TT : 74’ 33.

Ce CD illustre l’atmosphère autour de la Grande Guerre dans les villégiatures sur la Côte d’Albâtre (entre Dieppe et Fécamp), avec un trio de compositeurs contemporains Grand Prix de Rome et leur Sonate pour violon et piano respective.
Jacques (Guillaume de Sauville) de LA PRESLE (Versailles, 1888-Paris, 1969), élève au CNSM en harmonie, contrepoint et composition, organiste à Notre-Dame de Versailles (1910-1920), Grand Prix de Rome (1921), enseigne l’harmonie au Conservatoire (1937-1958). Après la guerre, il sera notamment inspecteur principal de l’enseignement musical.
Sa Sonate pour violon et piano (1913-14), dédiée à Léonie Lapié, tripartite : Lent-Assez animé ; Lent ; Animé spécule sur les contrastes.
Paul PARAY (Tréport, 1886 - Monte-Carlo, 1979), musicien précoce, a suivi des cours de chant, piano, d’orgue, violoncelle, timbales, ami de Marcel Dupré, puis se perfectionne au Conservatoire auprès de X. Leroux, G. Caussade et puis P. Vidal… Grand Prix de Rome (1911), il est pianiste accompagnateur et surtout, après guerre, chef d’orchestre (Colonne, notamment) et ardent défenseur de la musique française. Sa Sonate pour violon et piano (1908), dédiée à Hélène Jourdan-Morhange, appartient à sa « période parisienne ». Également en 3 mouvements : Allegro moderato ; Allegretto amabile ; Molto vivo, elle fait montre d’une belle inventivité mélodique alliée à une solide maîtrise compositionnelle.
Claude DELVINCOURT (né à Paris en 1888, mort à Ortebello (Italie) en 1954), élève de Léon Boëllmann, Henri Busser, Georges Caussade et Charles-Marie Widor. Grand Prix de Rome (1913), éborgné fin 1915 en Argonne, il sera organiste titulaire de l’Église St-Jacques, à Dieppe (1926). En 1941, directeur du Conservatoire de Paris, il y modernise les méthodes pédagogiques. Sa Sonate pour violon et piano (1919), dédiée à la pianiste Jeanne Zimmermann, spécule sur les contrastes d’atmosphère au cours des 3 parties : Largement-souple et sans lenteur ; Vif et gai. Le vaste mouvement conclusif suit tout un parcours émotionnel allant de Calme, mystérieux et lointain vers Animé, avec une impétuosité joyeuse.
Gautier Dooghe (violon) — violon solo de l’Orchestre symphonique de Douai-Région Hauts de France, professeur au CRR de Douai, membre du Trio Johanna — et Alain Raës (piano) — concertiste, professeur aux Conservatoires de Lille, Douai, Roubaix — ont conjugué leurs talents pour élaborer cette carte postale sonore à la fois sophistiquée et pleine de sève.
Édith Weber
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Jozef WIENIAWSKI : Complete Chamber Works 1 & 2. ACTE PRÉALABLE (www.acteprealable.com). AP0468-AP0469. 2020. 2 CD : TT : 80’ 19 ; 79’ 29.

Ce disque illustre l’évolution de la musique de chambre polonaise pendant la deuxième moitié du XIXe siècle, encore dans la mouvance romantique mais avec un apport original et créatif.
Jozef WIENIAWSKI est né à Lublin (Pologne) en 1837 et mort à Bruxelles en 1912. Après ses études dans son pays natal, il a été, en 1847, élève, entre autres d’A.-Fr. Marmontel et Ch.-V. Alkan en piano et de F. Le Couppey en composition à Paris, ainsi que d’A. B. Marx en théorie musicale, à Berlin. Après une tournée de concerts en Europe, il rencontre à Paris notamment Gounod, Berlioz et Wagner. Napoléon III le considérera comme l’un de ses musiciens favoris. Il enseignera au Conservatoire de Moscou, puis s’installera à Bruxelles. Il affectionne les titres français : Grand Duo Polonais en mi mineur pour violon et piano (op. 5) — interprété par Iwona Kallinowska-Grohs (violon) et Barbara Pakura (piano) —, Pensée fugitive (op. 8) et cultive les formes classiques : Quatuor à cordes en la mineur (op. 32) et Sonate pour violoncelle en Mi Majeur (op. 26) interprétés respectivement par Szczepan Konczal (piano) et le Tono Quartet, en belle symbiose. Tous ces instrumentistes mettent leur dynamisme et leurs talents au service de la redécouverte du musicien cosmopolite si bien introduit dans les hautes sphères parisiennes.
Le CD 2 est consacré à 2 œuvres très amples : le Trio avec piano en Sol majeur (op. 40), en 4 mouvements : Allegro souple et charmant ; Andante molto cantabile très expressif ; Allegro con fuoco bouillonnant ; Allegro risoluto et non troppo presto aux accents héroïques puissamment servis par N. Frankiewicz (violon), L. Tudzierz (violoncelle) et Sz. Konczal (piano) ; la Sonate pour violon en Ré majeur (op. 24) également quadripartite, magistralement restituée par I. Kallinowska-Grohs et B. Pakura. La programmation s’achève sur l’Allegro de Sonate en sol mineur pour violon et piano (op. 2), page de jeunesse d’abord pleine de tension puis plus tendre, somptueusement rendu par le duo précédent.
Nouvelle démonstration de la valeur de l’école polonaise, hier et aujourd’hui.
Édith Weber
© L'ÉDUCATION MUSICALE 2020

Jozef WIENIAWSKI : Complete Chamber Works 1 & 2. ACTE PRÉALABLE (www.acteprealable.com). AP0468-AP0469. 2020. 2 CD : TT : 80’ 19 ; 79’ 29.

Ce disque illustre l’évolution de la musique de chambre polonaise pendant la deuxième moitié du XIXe siècle, encore dans la mouvance romantique mais avec un apport original et créatif.
Jozef WIENIAWSKI est né à Lublin (Pologne) en 1837 et mort à Bruxelles en 1912. Après ses études dans son pays natal, il a été, en 1847, élève, entre autres d’A.-Fr. Marmontel et Ch.-V. Alkan en piano et de F. Le Couppey en composition à Paris, ainsi que d’A. B. Marx en théorie musicale, à Berlin. Après une tournée de concerts en Europe, il rencontre à Paris notamment Gounod, Berlioz et Wagner. Napoléon III le considérera comme l’un de ses musiciens favoris. Il enseignera au Conservatoire de Moscou, puis s’installera à Bruxelles. Il affectionne les titres français : Grand Duo Polonais en mi mineur pour violon et piano (op. 5) — interprété par Iwona Kallinowska-Grohs (violon) et Barbara Pakura (piano) —, Pensée fugitive (op. 8) et cultive les formes classiques : Quatuor à cordes en la mineur (op. 32) et Sonate pour violoncelle en Mi Majeur (op. 26) interprétés respectivement par Szczepan Konczal (piano) et le Tono Quartet, en belle symbiose. Tous ces instrumentistes mettent leur dynamisme et leurs talents au service de la redécouverte du musicien cosmopolite si bien introduit dans les hautes sphères parisiennes.
Le CD 2 est consacré à 2 œuvres très amples : le Trio avec piano en Sol majeur (op. 40), en 4 mouvements : Allegro souple et charmant ; Andante molto cantabile très expressif ; Allegro con fuoco bouillonnant ; Allegro risoluto et non troppo presto aux accents héroïques puissamment servis par N. Frankiewicz (violon), L. Tudzierz (violoncelle) et Sz. Konczal (piano) ; la Sonate pour violon en Ré majeur (op. 24) également quadripartite, magistralement restituée par I. Kallinowska-Grohs et B. Pakura. La programmation s’achève sur l’Allegro de Sonate en sol mineur pour violon et piano (op. 2), page de jeunesse d’abord pleine de tension puis plus tendre, somptueusement rendu par le duo précédent.
Nouvelle démonstration de la valeur de l’école polonaise, hier et aujourd’hui.
Édith Weber
© L'ÉDUCATION MUSICALE 2020

SCHUBERT : Winterreise. Transcription pour baryton et quatuor à cordes par Gilone Gaubert. MUSO (Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.). mu 035. 2019. TT : 73’ 47.

L’interprétation du Voyage d’Hiver par Dietrich Fischer-Dieskau (1925-2012) restera gravée dans toutes les mémoires, toutefois la transcription de Gilone Gaubert (pour baryton et quatuor à cordes) enregistrée en 2018 retiendra l’attention des mélomanes à plus d’un titre : sur le plan de la couleur, du paysage sonore et du phrasé obtenu par les cordes. Le Quatuor Les Heures du jour comprend Gilone Gaubert et David Schivers (violons), Sophie Cerf (alto) et Emmanuel Jacques (violoncelle), formant — avec Alain Buet (baryton), élève du CNSMDP puis professeur à partir de 2007 — une merveilleuse équipe.
Ils misent sur l’authenticité en préconisant les instruments historiques en vogue à l’époque de Franz SCHUBERT (1797-1828), avec un diapason plus bas. Les poèmes de Wilhelm Müller (1794-1882) sélectionnés par le compositeur abordent des thèmes variés : la solitude (Einsamkeit) qui affecte l’étranger (Fremd) ; la nature (le tilleul/der Lindenbaum) ; le rêve du printemps (Frühlingstraum), l’hiver avec la neige/Ich such im Schnee ou les larmes gelées (gefror’ne Tränen) et le torrent (Wasserflut), mais aussi les corbeaux (Die Krähe), le repos du voyageur (Rast) ou encore la parhélie (Die Nebensonnen, faux soleils, illusion atmosphérique). Le joueur de vielle (Der Leiermann) qui tourne inlassablement la manivelle conclut avec grande retenue (bourdon à peine esquissé) ce cycle que Schubert affectionnait tout particulièrement. En lieu et place du piano, le quatuor se fonde en un seul instrument accompagnateur. Alain Buet soutient la comparaison avec son prestigieux aîné. Paradoxalement : dépaysement et pourtant authenticité (le processus de transcription étant courant au début du XIXe siècle).
Édith Weber
© L'ÉDUCATION MUSICALE 2020

 

 

VIVALDI : Jupiter. ALPHA (www.alpha-classics.com). ALPHA550. 2019. TT : 78’ 07.

Attention : démarche audacieuse ! Comme l’affirme Erik Orsenna dans son texte introductif : « la musique est la patrie du possible, ou si vous préférez de la liberté, du temps sublimé. Préparez-vous : Jupiter va vous tourner la tête. » À la manœuvre : le jeune chef Thomas Dunford s’est entouré de quelques musiciens réputés de sa génération pour, avec son ensemble Jupiter, faire la fête à Antonio, c’est-à-dire mettre leurs incroyables talents au service d’extraits particulièrement enivrants du répertoire du Prêtre roux et donner le tournis aux auditeurs qui n’en demandent pas mieux… Alternent tempi, humeurs, au travers des Airs (Juditha triumphans, L’Olimpiade, Giustino, Griselda ; Nisi Dominus) — dont l’interprétation par la mezzo-soprano franco-italienne Lea Desandre est éblouissante — et Concertos tripartites très contrastants (pour basson, violoncelle, luth) qui plongent les discophiles dans un bain de jouvence au cœur de l’océan vivaldien. Antidote à la morosité !
Édith Weber
© L'ÉDUCATION MUSICALE 2020

 

Adolphe BLANC : Œuvres pour alto et piano. Vol. 1. ACTE PRÉALABLE (www.acteprealable.com ). AP 0458. 2019. TT : 57’ 56.

Le Label polonais multiplie les premiers enregistrements mondiaux et s’attache à diffuser des œuvres de compositeurs polonais et étrangers injustement oubliés. Après les enregistrements récents de René de BOISDEFFRE (1838-1906), voici Adolphe BLANC (né à Manosque en 1828, mort à Paris en 1885). Après ses études (violon, composition, histoire de la musique) au Conservatoire de Paris, il a beaucoup écrit essentiellement pour la musique de chambre voire de salon, cultivant les formes classiques : sonate, sonatine, romances, duo, trio, quatuor, quintette, septuor, valse, barcarolle…, pages publiées chez Richault et Lemoine... Marcin Murawski — altiste, chef et enseignant, interprète attitré du Label Acte Préalable — propose ses arrangements de la Barcarolle (op. 11) ; de la Romance (op. 10) pour alto et piano ; de la Sonate (op. 12, n°1) tripartite (avec Scherzo central, au lieu d’un mouvement lent habituel) et de la Sonate (op. 13, n°2). Avec la pianiste géorgienne Nino Jvania — titulaire de nombreux Prix internationaux, dont la maîtrise technique et le grand pouvoir de concentration ont fait l’admiration unanime des critiques — ils s’adonnent à cette musique agréable et élégante, non dépourvue de virtuosité et nous replongent dans l’univers des salons parisiens. Révélation à ne pas manquer.


Édith Weber
© L'ÉDUCATION MUSICALE 2020

 

 

Tassis Christoyannis, Jeff Cohen : Reynaldo Hahn - Complete Songs piano -2019 BZ2002

Voici un coffret qui n’a pas son pareil : au-delà des sempiternelles rééditions et des œuvres « du répertoire », il nous plonge dans l’inconnu sans pour autant nous perdre totalement ; il met en effet à notre disposition toutes les mélodies de Reynaldo Hahn, compositeur que nous connaissons peut-être, mais seulement par touches. La discographie le concernant est pourtant très riche (Cf. le site reynaldo-hahn.net pour nous en convaincre). Cette édition est réalisée par la Fondation du Palazetto Bru Zane qui nous enchante depuis des années par des parutions discographiques mettant à notre portée des œuvres jusque-là introuvables. La Fondation met cette fois à notre disposition l’intégrale des mélodies qui ont fait le succès de Reynaldo Hahn. Au-delà des œuvres les plus célèbres comme D’une prison, Seule, Infidélité, À Chloris, ou Sur l’eau… on peut découvrir les recueils des Études latines, des Chansons grises (dont L’heure exquise) ; tout cela s’accompagne d’autres chefs d’œuvre du genre : les recueils des Feuilles blessées, des Five Little Songs, trois étonnantes chansons de la « Dame aux camélias », les Rondels… Cent sept mélodies pour notre plus grand plaisir ! Le baryton Tassis Christoyannis, d’une voix généreuse et large, aborde cet immense corpus avec une subtilité qui épate. A chaque cycle, chaque recueil, il donne une couleur et une singularité qui leur confèrent une unité stylistique en évitant ainsi une lecture redondante et uniforme. Ce lourd défi est relevé également par une prononciation quasi parfaite, en français comme en vénitien et en anglais : un régal pour une compréhension directe et limpide de ces pièces si courtes qui ne souffrent pas l’à-peu-près. Jeff Cohen, accompagnateur qu’on ne présente plus, est au service du chanteur – cela se devine -; il applique une rigueur dans la lecture de la partition pour en faire briller les subtiles déclinaisons du jeu pianistique. Chacune des mélodies est un monde en soi, et ces deux artistes nous en font goûter toutes les particularités. Les quatre disques regroupent adroitement les différents volumes et recueils, ce qui en rend l’écoute globale très agréable. Un livret à la hauteur qui satisfait les plus exigeants. La discographie de la mélodie française au tournant du XXe se trouve enfin enrichi de ce corpus qui lui manquait cruellement. Merci donc à Bru Zane pour cette heureuse initiative que les spécialistes et tous les musiciens ne manqueront pas de saluer.
Émile Lyon
© L'ÉDUCATION MUSICALE 2020