Dans le contexte de la musique de l’après-guerre, Karlheinz Stockhausen (1928-2007) est parmi les premiers à redécouvrir pour la musique du XXè siècle le nouveau paramètre de la matière du son, le lieu de sa production et, par conséquent, l’espace musical : d’une part, l’espace musical inscrit, incorporé à l’œuvre écrite, et, d’autre part, l’espace mobile de la diffusion du son dans la salle du concert. Pour le premier, il agit en héritier de la grande tradition occidentale de la polyphonie, de Varèse et de l’École de Vienne ; pour le second, il est l’inventeur de nouvelles matières – électroniques et mixtes – et de nouvelles formes, modelables dans l’espace de la salle ou en pleine nature. Soulignons tout de suite que ces deux espaces font partie pour lui d’un même raisonnement compositionnel.
En fait, toute composition de Stockhausen témoigne pratiquement, toujours différemment, d’une préoccupation d’ordre architectonique et se définit comme composition spatiale. Concevoir le travail du compositeur en tant qu’architecture sonore et expérimentation spatiale et faire évoluer les auditeurs à l’intérieur d’une musique spatiale est une de ses préoccupations essentielles depuis les années cinquante. Son sens inné d’architectonique musicale a toujours trouvé des confirmations par des expériences dans différents domaines extramusicaux. Ainsi : « En 1968, quand j’ai visité le Mexique, je suis resté parfois durant des heures dans les ruines des temples aztèques et maya, uniquement pour avoir la sensation de l’espace et pour reconstruire mentalement tout le temple. Parce que, partout où je suis, moi, je remarque les dimensions, où sont les ouvertures, quelles sont les proportions des hauteurs et des arcades par rapport aux surfaces. […] C’est une sorte de sixième sens chez moi qui me fait toujours mesurer l’architecture, parce que je vois qu’un temple détient, dans toutes ses dimensions, un profond secret d’harmonie mathématiquement juste. Et la bonne musique est aussi comme ça. » (1).
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Marqué, de toute évidence, par l’expérience auditive des avions dès sa plus tendre enfance, dans l’espace aérien d’une Allemagne en guerre ensuite, le jeune compositeur conçoit le son en tant que son en mouvement dans l’espace. « Une chose fabuleuse qui arrive dans ma vie, c’est que j’appartiens à une génération qui a pour la première fois à sa disposition des avions, qui a pour la première fois la chance de faire une expérience avec les planètes comme avec quelque chose de proche.» (2)
Parallèlement à sa recherche de compositeur, Stockhausen théorise sur la problématique de l’espace dans la création musicale : Son article « Musik im Raum » (Musique dans l’espace) (3), paraît pour la première fois en 1959 dans la célèbre revue Die Reihe et se propose de faire la lumière sur la nécessité de la recherche spatiale dans le contexte d’une remise en question totale de la notion même de matériau musical. Une bonne partie des textes théoriques de Stockhausen réunis dans le 10e volume de ses Textes est consacrée à sa « musique astronique », c’est-à-dire à sa musique spatiale(4), domaine dans lequel il expérimentera jusqu’à la fin de sa vie.
Déjà dans une de ses premières œuvres, Kreuzspiel (1951), pour hautbois, clarinette basse, piano et trois percussionnistes, Stockhausen cherche à rendre présente et facilement perceptible la composition spatiale de la matière sonore. Il ne s’agit pas simplement d’écriture spécifique et d’amplification, mais de balance et de modelage de la matière sonore dans l’espace de la salle. L’emplacement des instruments et des musiciens sur scène à des distances précises, sur des podiums à hauteurs différentes, l’utilisation de microphones et de microphones de contact pour les instruments, puis la console de mixage et les haut-parleurs pour la projection sonore témoignent de l’importance de l’aspect proprement spatial de la composition.
L’inscription de la dimension spatiale à l’intérieur de la partition écrite implique pour lui, depuis les années cinquante et jusqu’à ses dernières œuvres, la multiplication et l’individualisation des couches superposées qui constituent la texture multiple de ses œuvres. Stockhausen réinvente l’espace musical à partir de la grande tradition polyphonique – de l’écriture mélodique linéaire multipliée –, en attribuant le rôle conducteur prépondérant non pas à la mélodie et donc au paramètre de la hauteur du son, comme c’est le cas chez les maîtres de la polyphonie ancienne, mais à la dimension temporelle, aux différentes possibilités de mesurer le temps et donc à la structuration de la durée. Ainsi, Zeitmasze /Mesures du temps, )1955-56), pour 5 instruments – hautbois, flûte, cor anglais, clarinette et basson – est fondée sur une série de 5 types différents de mesure du temps : 12 tempi dans une échelle chromatique entre MM = 60 et MM = 120, le plus rapide possible, le plus lent possible, commencer dans un tempo très rapide et ralentir au presque 4 fois plus lent, et l’inverse, commencer par le tempo lent pour arriver au plus rapide possible(5). La structuration formelle évolue entre deux extrêmes : ou bien tous les musiciens doivent jouer de façon synchrone, ou bien ils jouent tous des couches temporelles individualisées et indépendantes. Entre les deux extrêmes, il y a, bien sûr, des degrés de dépendance mutuelle et de liberté individuelle qui définissent, précisément, le modelage de l’espace musical mobilisé de l’intérieur par les évolutions temporelles dans chaque partie instrumentale.
La polyphonie des couches temporelles individualisées est développée par la suite dans Gruppen (1955) pour 3 orchestres, dans la musique électronique Gesang der Jünglinge(1955), où le compositeur utilise aussi la directionnalité et le mouvement des sons dans l’espace de la salle, dans Carré (1959) pour 4 orchestres et 4 chœurs, et Momente (1962/64) pour soprano solo, 4 chœurs et 13 instrumentistes. La technique polyphonique des strates individualisées, formatrice d’espaces mouvants à l’intérieur de la matière composée, restera la technique principale de génération de complexités de texture et de projection spatiale dans le travail de Stockhausen jusqu’à la fin de sa vie. Elle sera développée dans le contexte de la Formelkomposition / Composition avec formule(s) et donc dans tout le cycle de sept opéras intitulé Licht / Lumière (1977-2003), Les Sept jours de la semaine, ainsi que dans son dernier cycle Klang / Sonorité (2004/07) qui renvoie au 24 heures de la journée.
L’idée d’une diffusion spatiale lors du concert est présente chez Stockhausen aussi depuis les années cinquante. Déjà pour les premières exécutions de Zyklus (1959), pour un percussionniste, le compositeur prévoit la projection spatiale de tous les instruments : il utilise 4 microphones placés en carré autour des instruments et les diffuse à l’aide de régulateurs panoramiques par 4 x 2 haut-parleurs placés dans les quatre coins de la salle, comme pour Kontakte (1958-1960) pour sons électroniques, piano et percussions . Le but est de rapprocher l’expérience auditive du public de celle du percussionniste lors du jeu. Le son des haut-parleurs n’a pas autant de relief que celui qu’entend le percussionniste. Par contre, des sons très faibles, joués p - ppp et pratiquement inaudibles sans amplification, deviennent audibles grâce à la projection-interprétation qui peut parfaitement « doser » l’intensité en fonction de la prestation instrumentale concrète et de la spécificité acoustique de la salle.
Gruppen(6) (1955/57) pour trois orchestres est, très probablement, le premier cas dans l’histoire de la musique occidentale d’une composition très complexe de musique orchestrale dans l’espace. Pour cette pièce pensée comme synthèse de musique orchestrale, musique de chambre et musique pour solistes, la superposition de couches temporelles individualisées, jouées avec différents tempi, rend indispensable la présence de trois chefs.
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Carré (1959) pour 4 orchestres et 4 chœurs (avec 4 chefs) (8) continue l’expérimentation dans le domaine de la musique spatiale en multipliant les sources et en complexifiant la matière sonore. Les 4 orchestres et les 4 chœurs engendrent un espace sonore carré, en partant des quatre points cardinaux, « aus den 4 Himmelsrichtungen », à partir des quatre directions du ciel, en traduction littérale(9). Les premières esquisses de cette œuvre sont nées en novembre-décembre 1958, lors d’une tournée de six semaines en Amérique, pendant laquelle le compositeur passe beaucoup de temps dans les avions et fait l’expérience, au-dessus des nuages, des temps les plus lents de changement et des espaces les plus vastes que l’on puisse imaginer. L’œuvre, d’une durée de 36 minutes, évoluant en flux continuel, demande une concentration considérable lors de l’écoute : la plupart des changements s’effectuent imperceptiblement à l’intérieur de la matière du son complexe et cherchent à transmettre cette évolution fascinante excessivement lente, cette perception du temps ralenti que l’on peut éprouver « suspendu » au-dessus des nuages.
L’orchestre de 80 musiciens dans Carré est divisé en 4 groupes homogènes qui comportent presque les mêmes instruments. À chaque groupe orchestral se joint un chœur mixte de 8, 12 ou 16 chanteurs. Les voix et les instruments forment une matière mixte unifiée. Le texte – une matière d’origine verbale constituée de bruits-sons ou de phonèmes hors signification – est composé par Stockhausen d’après une échelle de différences phoniques et selon des exigences d’ordre purement musical. Les 4 sources sonores mixtes (orchestres + chœurs) sont placées à distance l’une par rapport à l’autre contre les 4 murs de la salle (carrée ou rectangulaire). Les 4 chefs dirigent dos au mur, face aux interprètes qui entourent pratiquement le public : « L’emplacement des 4 orchestres et chœurs tout autour du public est inhabituel. On est tenté de regarder autour. Mais le mieux c’est de fermer les yeux par moments pour pouvoir écouter mieux(10). »
Si important dans le catalogue de Stockhausen, Momente (1961-65) (11) pour soprano, 4 chœurs et 13 instruments, est une composition multiple et variable, constituée de composantes formelles (des moments et des groupes de moments) indépendantes. Dans cette œuvre, le compositeur amplifie son travail de recherche à l’intérieur de la matière sonore en annulant toute opposition entre musique vocale et musique instrumentale, entre son et silence, entre son et bruit d’origine vocale ou instrumentale par l’intégration d’une multitude illimitée de modalités d’articulation. Chacun des 4 groupes comporte au moins 3 soprani, 3 alti, 3 ténors et 3 basses. Les instruments utilisés sont 4 trompettes, 4 trombones, 2 orgues électriques ou synthétiseurs et des percussions jouées par 3 musiciens. Les chanteurs disposent aussi d’instruments de percussion assez simples et insolites : des tubes en cartons, des baguettes en caoutchouc, des claves à hauteurs différentes, des boîtes de conserve, des grains de plomb, des tuyaux métalliques, etc. Les choristes participent aussi avec des bruits de pied, de main, de bouche ou de langue qui ponctuent le discours ou se fondent dans la matière sonore-bruiteuse en mouvement.
L’expérience de Stockhausen dans le domaine de la musique vocale-instrumentale en tant que « musique spatiale fonctionnelle » (12) est fortement influencée par l’expérience de sa musique électronique. Parmi les compositeurs de l’avant-garde des années 1950/60, il est le premier à se lancer avec une profonde conviction dans le domaine de la nouvelle musique électronique. Rappelons que Boulez qualifiera longtemps de « bricoleurs » les pères de la musique concrète et électro-acoustique en France et se tournera vers l’électronique seulement au cours des années 1970 avec la création de l’Ircam. Boulez, Berio, Ligeti, Pousseur et même Nono accorderont beaucoup moins d’importance à l’électronique dans leurs recherches compositionnelles et seront toujours fortement assistés par des collaborateurs spécialistes en technologie. Stockhausen semble être le seul de sa génération à avoir su mener de front, et à partir des années 1950 avec le succès que l’on connaît, la véritable conversion technologique du métier du compositeur.
Déjà dans sa pièce électronique Gesang der Jünglinge / Chant des adolescents (1955/56) (13), devenue jalon d’orientation dans l’histoire de la musique électronique, Stockhausen cherche à mettre en œuvre la directivité des sources sonores et le mouvement des sons dans l’espace pour élargir et enrichir la perception musicale. L’œuvre utilisant des fragments de la Bible, notamment du 3e livre de Daniel, est composée pour 5 groupes de haut-parleurs disposés de façon circulaire autour et au-dessus des auditeurs. L’emplacement des sources sonores, le lieu de production des sons et des groupes, le nombre de haut-parleurs en action simultanément, le degré de fixité ou de mobilité des sons, la rotation vers la droite ou vers la gauche sont des aspects essentiels de la composition électronique. Elle exige un nouveau type d’écoute : plus attentive, plus curieuse, plus apte à suivre les mouvements des sons et à s’orienter dans un espace de perception devenu multidimensionnel et mobile.
Gesang der Jünglinge est la première composition pour des groupes de haut-parleurs distribués tout autour et au-dessus du public de telle façon que le son puisse être dirigé de partout vers les auditeurs, en s’éloignant ou en passant à côté d’eux. La position spatiale des sons qui n’avait joué pratiquement aucun rôle actif dans la musique antérieure s’y trouve revalorisée : elle est même devenue au moins aussi formatrice que les paramètres considérés traditionnellement comme prépondérants (la hauteur, la durée). Il s’agit, en réalité, du début historique de la « Raum-Musik », de la musique spatiale. Pour la première fois, l’emplacement de la source, la direction de l’émission sonore et les mouvements des sons dans l’espace sont composés en tant que nouvelle dimension de l’œuvre et, avec elle, de l’expérience auditive. Il s’agit d’une sextuple stéréophonie utilisant 6 haut-parleurs (ou groupes de haut-parleurs) (14), qui invente une nouvelle forme vivante de la composition et de l’écoute.
Stockhausen en 2004 / DR
En 1958/60, Stockhausen compose Kontakte, musique électronique avec piano et percussions(15), en 4 pistes, pour 4 groupes de haut-parleurs. Le compositeur prévoit 4 fois 2 haut-parleurs placés en cercle ou en carré dans les quatre coins de la salle. Il réalise les premières rotations du son autour du public, les « marées, les flots, les flux sonores » (Flutklänge) (16), les mouvements en spirales, confrontés aux sons fixes des instruments acoustiques. Les haut-parleurs sont situés de telle façon que l’on puisse percevoir au mieux toutes les rotations, les mouvements diagonaux, les alternances, les déluges sonores, les sons filant au-dessus des têtes de l’arrière vers l’avant ou d’un côté à l’autre. À chacun des 4 haut-parleurs situés dans les 4 coins de la salle est confiée une couche sonore. Les 4 haut-parleurs émettent la même musique, mais le son voyage d’un haut-parleur à l’autre en alternance. Soit les sons se déplacent vers la droite ou vers la gauche (tandis que, simultanément, un ou deux haut-parleurs émettent de façon fixe) ; soit des mouvements rotatoires en boucles (I – III – II – IV, I – III – II – IV, etc.) sont effectués ; ou bien le son provient d’abord d’un seul haut-parleur, au bout d’un certain temps, les deux autres interviennent, enfin le quatrième, ce qui créée l’effet « marée sonore » (Flutklang), l’envahissement progressif de l’espace par le son.
Déjà au cours des années 1950, Stockhausen se rend à l’évidence que, si l’on conçoit le lieu de production du son en tant que paramètre indépendant, 3 ou 4 sources sonores, comme dans Gruppen ou Carré, sont insuffisantes et que l’on doit chercher à élaborer la continuité de la diffusion en cercle(17). L’idée du mouvement continu de la matière sonore en cercle mène le compositeur vers la conception d’une salle sphérique dotée d’une multitude de haut-parleurs en plusieurs cercles : le rêve des années 1950/60 deviendra réalité lors de l’exposition universelle d’Osaka, au Japon, en 1970, dans le pavillon sphérique construit par l’architecte F. Bornemann d’après les suggestions de Stockhausen. Parallèlement aux nouvelles stratégies compositionnelles dans les œuvres ouvertes de l’époque et en relation avec elles, il cherchera à sortir de la salle de concert et des espaces toujours nouveaux pour des expériences en pleine nature et dans des lieux insolites.
Le parcours de Stockhausen dans les années 1960/70 avec sa Raummusik/ musique spatiale est jalonné par des œuvres clés dans l’histoire de la musique de la seconde moitié du xxe siècle. À partir de 1964, il compose plusieurs œuvres électroniques et mixtes avec une projection en multipiste par des haut-parleurs des sons électroniquement transformés (mehrkanalige Lautsprecherwiedergabe), et il élabore un nouveau type de pratique d’exécution en concert avec une projection spatiale du son (räumliche Klangsteuerung) : c’est le cas dans Mikrophonie I (1964), pour 6 musiciens, Mikrophonie II (1965), pour 12 chanteurs, orgue Hammond ou synthétiseur, 4 modulateurs en anneau et bande, dans la pièce électronique Telemusik (1966), dans Prozession (1967), pour 6 musiciens, Kurzwellen(1968), pour 6 musiciens, Stimmung (1968), pour 6 chanteurs, ainsi que dans les quinze Textkompositionen, compositions textuelles pour musique intuitive Aus den sieben Tagen / Des sept jours (1968).
Réalisée en 1966 au Studio de musique électronique de la radio japonaise NHK à Tokyo, la pièce électronique Telemusik inaugure une nouvelle phase importante dans l’exploration spatiale de Stockhausen : il s’agit, d’une part, d’une ouverture théoriquement illimitée aux temps antérieurs et aux espaces extérieurs à l’œuvre et, d’autre part, d’une projection spatiale avec les outils de la diffusion panoramique de l’époque. Telemusik est la première pièce importante de Stockhausen dans sa recherche d’une « musique universelle » (18). Suite à ses multiples voyages, surtout en Asie, le compositeur vit un changement profond de conscience : « Le monde devient un monde. […] C’est le début de l’universalisme. La force qui effectue l’intégration s’exprime par les outils techniques que nous utilisons(19). » Et il se propose de « faire encore un pas en avant », vers « une musique de toute la terre, de tous les pays et races » (20). C’est la raison pour laquelle on entend dans Telemusikdes références à la musique du Gagaku japonais, à la musique balinaise, à une fête villageoise espagnole, à la musique hongroise, aux chants Shipobo de l’Amazonie, à la cérémonie Omizutori à Nara (à laquelle Stockhausen participe, fasciné pendant trois jours et nuits), à la musique chinoise, à la musique de montagnards vietnamiens, aux offices des moines bouddhistes du temple Jakushiji, aux drames du Nô japonais, etc. Il ouvre la musique électronique de Telemusik à toutes les cultures fort différentes qui y participent, parfois simultanément, en s’influençant et en se transformant mutuellement. Tout en utilisant des références explicites à des traditions musicales historiquement et géographiquement éloignées, Stockhausen renonce à la technique citationnelle, typique de la première moitié du xxe siècle, au profit d’une véritable « intermodulation »(21) entre les « objets trouvés » et les sons électroniques produits en studio : il module et transforme le rythme d’un événement sonore avec la courbe dynamique d’un autre ; ou bien il module des accords électroniques par la courbe dynamique d’un chant de moines, puis soumet le résultat à une nouvelle modulation, par la ligne mélodique d’un chant Chipobo, par exemple, et ainsi de suite(22). Le propos n’est plus l’observation « de l’extérieur » d’un espace intertextuel jouant sur le contraste statique producteur de sens, comme c’est le cas dans la technique de la citation, mais l’exploration matérielle accueillante : l’expérience composée de donner et de recevoir, de communiquer en échangeant des qualités, au nom d’une unité supérieure des opposés, démontrée auditivement et proposée à l’exploration de l’auditeur.
Lors de la création de Sirius à Aix-en-Provence, 8/8/1977 / DR
Pour Stockhausen, il s’agit d’inventer et de produire de nouvelles relations entre ces matériaux disparates, étant donné que « les distances dans le temps sont artificielles et [que] tout existe simultanément dans notre conscience »(23). « Et si nous pensons cosmiquement, au-delà de la terre, alors, je crois que nous vivrons d’autres surprises de cet ordre, à savoir que des tranches de notre propre histoire existent simultanément ailleurs dans le cosmos(24). » Stockhausen conçoit déjà l’ouverture cosmique de ses projets compositionnels.
L’élaboration spatiale en relation avec l’idée d’une musique universelle, une musique du monde, est aussi très importante dans Hymnen (1966/69), musique électronique et concrète avec diffusion sur 4 canaux et avec 4 solistes. Cette version a été complétée en 1969 par Dritte Region / Troisième Région avec orchestre et diffusion sur 4 canaux(25). L’œuvre est constituée donc de quatre Régions d’une durée globale d’environ 113 minutes. Chaque Région comporte certains hymnes en tant que « centres » auxquels se réfèrent plusieurs autres hymnes nationaux avec leurs débuts facilement reconnaissables. La Première Région a deux centres : L’Internationale et La Marseillaise ; la Deuxième en comporte quatre : l’hymne de la République fédérale d’Allemagne, un groupe d’hymnes africains en alternance avec l’hymne de l’URSS et un centre « subjectif », moment original du travail en studio ; la Troisième Région (dédiée à John Cage) a trois centres : l’hymne de l’URSS, l’hymne des États-Unis et l’hymne espagnol. Enfin la Quatrième Région (dédiée à Luciano Berio) est centrée autour de deux hymnes : l’hymne suisse et un hymne « appartenant au royaume utopique Hymunion en Harmondie sous Pluramon »(26). Stockhausen rêve déjà de sa musique cosmique dont les lieux utopiques trouveront « confirmation » sur les pages du livre Urantia qui nourrira par la suite l’univers imaginaire du cycle des Sept jours de la semaine Licht(27).
À l’ouverture au monde correspond aussi l’ouverture de la pratique du concert : « Hymnen pour radio, télévision, opéra, ballet, disque, salle de concert, église, plein air… L’œuvre est composée de telle façon que l’on peut écrire différents scénarios ou libretti pour des films, des opéras ou des ballets avec cette musique(28). »
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Dans la lignée de Hymnen, où le compositeur intègre des hymnes nationaux à la musique électronique, et de Prozession, où les musiciens transforment en direct des fragments d’œuvres antérieures, Kurzwellen / Ondes courtes (1968) pour 6 musiciens(29) élargit l’espace musical en jeu aux événements sonores imprévisibles, produits par des récepteurs d’ondes courtes auxquels les musiciens réagissent immédiatement. L’espace musical flexible de Kurzwellen résulte de l’imitation, de la transformation, de la modulation et de l’intermodulation des événements sonores qui s’inscrivent dans une nouvelle pratique de « tradition orale » et de jeu intuitif. Et le compositeur formule déjà la possibilité d’ouverture à d’autres espaces : « Les temps et les espaces auxquels nous étions habitués en faisant de la musique jusqu’à présent sont suspendus et il se profile la possibilité de nous mettre en relation avec des couches de la conscience qui étaient fermées pour nous jusqu’à maintenant ou bien qui nous étaient accessibles uniquement aux moments très courts d’inspiration intuitive(30). »
La recherche spatiale de Stockhausen le mène aussi vers plusieurs projets architecturaux de salles, restés, malheureusement sans suite, et l’invention d’outils spécifiques. Pour Sirius (1975/77), musique électronique avec trompette, soprano, clarinette basse et basse, il conçoit une table rotative, réalisation exceptionnelle du Studio de la WDR selon ses indications. Au milieu de la table ronde se trouve fixé un haut-parleur. Commandée à distance, la table tourne vers la gauche ou vers la droite, de la position de repos jusqu’à 12 tours par seconde. Les sons émis par le haut-parleur sont captés par 8 microphones qui entourent la table et sont enregistrés par un magnétophone 8 pistes. Ces 8 pistes sont projetées dans la salle par 8 haut-parleurs disposés en cercle autour du public. Les sons obtenus avec la table rotative ont été utilisés pour le début et la fin de Sirius où des sons impressionnants en spirale simulent l’arrivée et le décollage d’un engin intersidéral. La même idée sera présente, réalisée avec des moyens différents, dans le Helikopter-Streichquartett (1992/93), pour quatuor à cordes, 4 hélicoptères avec pilotes et 4 caméras), faisant partie de Mittwoch aus Licht / Mercredi de Lumière.
Pour ses performances dans l’auditorium sphérique à Osaka en 1970, Stockhausen imaginera des « moulins rotatifs ». Naturellement, il suit avec intérêt et utilise dans ses œuvres toutes les innovations technologiques dans le domaine. Inspiré par le QUEG (quardophonic effect generator) qu’il utilise pour la spatialisation dans Oktophonie (1990/91), la musique électronique de Dienstag aus Licht / Mardi de lumière, Stockhausen imagine lui-même et fait réaliser par le Studio d’art acoustique de Fribourg-en-Brisgau le système OKTEG (octophonic effect generator) pour la spatialisation à 8 pistes dans son œuvre la plus sophistiquée pour la spatialisation, la musique électronique Cosmic Pulses (2006/07), la 13e Heure de Klang. Les possibilités de spatialisation en sont pour Stockhausen à leurs débuts. Et il est convaincu que l’on construira de plus en plus d’appareils nécessaires à la projection du son. « Les sons seront projetés dans l’espace par un régisseur du son et même par chacun des interprètes. Dans ce domaine, il y aura de nouvelles découvertes pour rendre le son de chaque musicien mobile dans l’espace, pour que le son ne reste pas toujours à l’endroit où se trouve le musicien(31). »
Oktophonie (1990/91) – la musique électronique du deuxième acte de Dienstag aus Licht / Mardi de lumière comportant Invasion – Explosion avec Abschied / Adieu – témoigne d’une nouvelle étape dans la recherche spatiale de Stockhausen(32). « Oktophonie est le témoin de mon expérience cosmique des années 90-91 », précise le compositeur(33). Cette musique, composée en 8 pistes et projetée par 8 groupes de haut-parleurs, fait suite aux expériences sur 8 canaux dans la musique électronique de Sirius, dans Unsichtbare Chöre / Chœurs invisibles de Donnerstag, dans Chormusik mit Tonszenen / Musique pour chœurs avec Scènes sonores de Montag. Mais, contrairement à toutes ces œuvres où les 8 (ou bien 8 x 2) haut-parleurs sont disposés en cercle autour du public, Oktophonie nécessite une distribution des haut-parleurs en cube qui enveloppe pratiquement les auditeurs et rend encore plus audibles les mouvements simultanés des 8 couches.
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Helikopter-Streichquartett (1992/93)(34), intégré par la suite en tant que troisième scène à Mittwoch aus Licht / Mercredi de lumière, est la réalisation impressionnante d’un autre rêve de musique spatiale fonctionnelle qui supprime, en utilisant les technologies actuelles, les frontières entre l’espace de la salle et le plein air et, de ce fait, bouleverse complètement la pratique habituelle du concert. Suite à la commande d’une œuvre pour quatuor à cordes de la part du Festival de Salzbourg, Stockhausen fait un rêve : « Je vis et entendis les musiciens du Quatuor jouant en plein vol dans quatre hélicoptères. Je vis simultanément des gens au sol, assis dans la salle équipée de matériel audiovisuel, et d’autres à l’extérieur, debout sur une grande place. Devant eux, on avait érigé quatre tours de téléviseurs et de haut-parleurs : à gauche, à mi-gauche, à droite, à mi-droite. Dans chacune des quatre directions, on pouvait entendre et voir en gros plan l’un des quatre musiciens. Les musiciens exécutaient la plupart du temps des tremolos qui s’harmonisaient si bien avec les timbres et les rythmes des pales des rotors que les hélicoptères devenaient comme des instruments de musique(35). » Helikopter-Streichquartett est en fait la réalisation concrète du même rêve.
La performance des musiciens et des pilotes en hélicoptères prévoit la présence de deux publics : installé dans la salle, le premier entendra la version musicale optimale et suivra les hélicoptères et les musiciens sur des écrans ; le second, en plein air, observera en direct l’arrivée des musiciens, le vol des hélicoptères, leurs tours au-dessus de la ville et atterrissage, avant de prendre place à son tour dans la salle. Stockhausen parvient à réaliser la fusion de la musique acoustique du quatuor, théoriquement chargée d’histoire, mais rapprochée ici du bruit-son des hélicoptères, et de la musique concrète du vrombissement des moteurs. La retransmission à partir de chaque hélicoptère doit être réalisée de telle sorte que le bruit des rotors se mélange bien avec les sons produits par les musiciens, le son instrumental devant être légèrement plus audible. Pour cela, le compositeur se trouve obligé d’utiliser au moins 3 microphones par hélicoptère : un microphone de contact au niveau du chevalet de chaque instrument, un microphone devant la bouche du musicien pour les sons-bruits produits par celui-ci et un microphone placé à l’extérieur de l’appareil pour faciliter une retransmission claire des sons et des rythmes des pales du rotor (particulièrement variables lors du décollage et de l’atterrissage des appareils selon la vitesse). La performance spatiale unique de Helikopter-Streichquartett met en évidence, une fois de plus, l’imagination inépuisable de Stockhausen dans le domaine de la musique spatiale en mouvement qui invente une nouvelle matière musicale mixte. Simultanément, le rite sédentaire du concert-office fermé, issu des rituels à l’église, devient vol, mouvement et exploration : un voyage dans l’espace.
Cosmic Pulses / Pulsations cosmiques (2007)(36), 13e heure du cycle Klang, est certainement la pièce électronique la plus complexe en ce qui concerne la spatialisation de sa matière sonore. L’œuvre est constituée de 24 boucles mélodiques – 24 couches – dont chacune comporte un nombre différent de sons allant de 1 à 24. Les boucles tournent avec 24 tempi et dans 24 registres sur un ambitus global d’approximativement 8 octaves. Il s’agit d’une spatialisation polyphonique inédite : chaque séquence des 24 couches superposées a son mouvement spatial individualisé entre les 8 haut-parleurs. Pour cela, Stockhausen a composé 241 itinéraires spatiaux qui se superposent en mouvements continuels dans le lieu multiple, dense et vertigineux de cet univers sonore « cosmique ». L’idée lui est suggérée par l’univers de Saturne : « J’ai expérimenté pour la première fois la superposition de 24 couches, comme si j’avais à composer les rotations de 24 lunes ou de 24 planètes (la planète Saturne a, par exemple, 48 lunes)(37). » En ce qui concerne l’audibilité des cheminements spatiaux multiples, Stockhausen concède : « Je ne sais pas encore si l’on peut entendre tout. Cela dépend de l’expérience que l’on a d’écouter sur 8 canaux. En tout cas, l’expérience est extrêmement excitante(38). »
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La forme globale de Cosmic Pulses est fondée sur la densification progressive, puis sur la dégression continuelle des couches superposées. D’abord, elles se superposent progressivement en partant du grave et en évoluant vers l’aigu, du tempo le plus lent vers le tempo le plus rapide ; puis elles s’arrêtent l’une après l’autre dans l’ordre inverse. Des accélérations et des ralentissements autour du tempo défini, ainsi que des glissandi ascendants et descendants dans un ambitus restreint autour des mélodies précises, sont effectués à la main selon 10 modèles de mouvement donnés dans la partition et valables pour trois couches simultanément, ce qui rend la matière sonore plus flexible et plus vivante (39). Le nombre de changements dans chaque séquence est libre, mais la métrique et les mélodies des boucles sont variables grâce aux modèles des mouvements.
Fils de l’époque « astronique » et inventeur infatigable de l’espace cosmique sonore avec les moyens acoustiques et électroniques, Karlheinz Stockhausen a su proposer, avec ses œuvres, de nombreuses pistes pour la recherche spatiale en musique, à explorer et à développer par les générations futures.
Ivanka Stoianova.
(1) K. Stockhausen - « Licht-Blicke », in Texte zur Musik 1977-1984, vol. 6, p. 192.
(2) « Eine neue Interpretationskunst », in Texte zur Musik 1984-1991, vol. 10, p. 146.
(3) « Musik und Raum », Die Reihe, no 5, 1959 ; in Texte zur elektronischen und instrumentalen Musik, vol. 1, p. 152-175 ; « Musique dans l’espace », Contrechamps, no 9, 1988, p. 78-100.
(4) Cf. Texte zur Musik, Band 10, Stockhausen Verlag, Kürten, 1998, pp. 15-256.
(5) Cf. « Zeitmasze (1955/56) », in Texte zu eigenen Werken zur Kunst Anderer, vol. 2, p. 46-48.
(6) Kontakte (1958/60), pour sons électroniques no 12, et Kontakte (1958/60), pour sons électroniques, piano et percussions no 12 ½.
(7) Gruppen : création le 24 mars 1958 à Cologne par l’Orchestre symphonique de la Radio de Cologne sous la direction de K. Stockhausen, B. Maderna et P. Boulez.
(8) Carré : création le 28 octobre 1960 à Hambourg par le chœur et l’orchestre de la NDR, sous la direction d’A. Markowski, M. Gielen, K. Stockhausen et M. Kagel.
(9) Cf. K. Stockhausen - « Sternklang, Parkmusik für 5 Gruppen », in Texte zur Musik 1970-1977, vol. 4, p. 172.
(10) Ibid.
(11) Momente : création le 21 mai 1962 dans la grande salle de la WDR à Cologne, sous la direction de K. Stockhausen, chanteuse : M. Arroyo.
(12) Dans la « musique spatiale fonctionnelle » / « funktionnelle Raummusik », l’organisation spatiale a un rôle considérable dans la structuration formelle de l’œuvre.
(13) L’œuvre a été créée le 30 mai 1956 dans le grand auditorium de la Radio de Cologne.
(14) . « Aktuelles », in Texte zu eigenen Werken zur Kunst Anderer, vol. 2, p. 56.
(15) L’œuvre existe en deux versions : Kontakte (1958), no 12, pour sons électroniques, et Kontakte (1958), no 12 ½, pour sons élecrtroniques, piano et percussions.
(16) « Dans Kontakte, j’ai découvert la manière de réaliser des “marées sonores”. Des sons démarrent dans des haut-parleurs situés derrière le public ; juste après, les mêmes sons démarrent à nouveau à gauche et à droite ; et encore après, en face. Cela doit durer à peu près un tiers de seconde. Si le mouvement est continu (le même son sans arrêt décalé), il crée l’impression de projecteurs qui se déplacent. Le son est comme une vague qui vous submerge et qui roule de l’arrière vers l’avant », J. Cott, Conversations avec Stockhausen, Paris, J.-C. Lattès, 1979, p. 167.
(17) Cf. « Musik im Raum », in Texte zur elektronischen und instrumentalen Musik, vol. 1, p. 172-175.
(18) Interview über Telemusik », in Texte zur Musik 1963-1970, vol. 3, p. 80.
(19) Ibid., p. 83.
(20) « Telemusik (1966) », in Texte zur Musik 1963-1970, vol. 3, p. 75.
(21) « Telemusik (1966) », in Texte zur Musik 1963-1970, vol. 3, p. 76.
(22) La notion ancienne de modulation implique le passage d’une tonalité à une autre dans le système tonal. Chez Stockhausen, la notion d’intermodulation s’applique aux styles : aux passages d’un style à un autre, à leur interaction simultanée et leurs influences réciproques.
(23) « Interview über Telemusik », in Texte zur Musik 1963-1970, vol. 3, p. 80.
(24) Ibid., p. 81.
(25) Hymnen connaît trois versions : Hymnen (1966), musique électronique et concrète ; Hymnen (1966/67), musique électronique et concrète avec 4 solistes (jouée depuis 1967 des centaines de fois, actuellement retiré du catalogue), et Hymnen (Dritte Region) (1969), musique électronique avec orchestre.
(26) « Hymnen. Elektronische und konkrete Musik mit Solisten », in Texte zur Musik 1963-1970, vol. 3, p. 97.
(27) The Urantia Book, Chicago, Urantia Foundation, 1955.
(28) « Hymnen mit Solisten und Orchester », in Texte zur Musik 1984-1991, vol. 7, p. 97.
(29) Création en 1968 à Brême par A. Kontarsky (piano et KW), A. Alings et R. Gehlhaar (tam-tam et KW), J. Fritsch (alto et KW), H. Bojé (électronium et KW) et K. Stockhausen (filtres et potentiomètres).
(30) « Kurzwellen (68) für sechs Spieler », in Texte zur Musik 1963-1970, vol. 3, p. 114.
(31) « Astronische Epoche », in Texte zur Musik 1984-1991, vol. 10, p. 25.
(32) Oktophonie a été réalisée en 1990/91 par Stockhausen et son fils Simon qui produisent d’abord les 8 couches sonores en utilisant leurs propres instruments et matériels, puis réalisent la pièce au Studio de musique électronique de la WDR
(33) « Oktophonie » (1990/91), in Texte zur Musik 1984-1991, vol. 8, p. 339.
(34) Helikopter-Streichquartett, pour quatuor à cordes, 4 hélicoptères, 4 caméras, 4 moniteurs télé, 4 x 3 microphones, 4 x 3 émetteurs de son), créé le 26 juin 1995 par le Quatuor Arditti à la Westergasfabriek d’Amsterdam, dans le cadre du Holland Festival.
(35) K. Stockhausen, Helikopter-Quartett / Arditti String Quartett, Arditti Quartett édition 35, Montaigne Auvidis, WDR, MO 782097, texte de la pochette du CD, p. 18.
(36) Création le 7 mai 2007 à l’auditorium Parco della Musica (salle Sinopoli) à Rome.
(37) « Cosmic Pulses, Elektronische Musik (2007) », texte de la pochette du CD 91, p. 5.
(38) Ibid., p. 5.
(39) Ce travail de réglage manuel a été confié à K. Pasveer. Les boucles ont été réalisées et synchronisées par A. P. Abellán. La pièce a été réalisée au Studio expérimental d’art acoustique à Fribourg-en-Brisgau.