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Novembre - Décembre 2011 - n° 573
A PARAITRE
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SUPPLEMENT BACCALAUREAT 2012
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L'éducation musicale n'a rien contre les étudiants...
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Aratrum ante boves
Une fois enseigné le maniement
des outils de base (lecture, expression écrite et calcul), est-il plus
noble objectif pour l’École que de former les esprits ? Et c’est assurément
là que se fourvoie notre système éducatif, éhonté pourvoyeur d’une société ne
visant plus que la compétition, le sprint, la performance mercatique… Et
malheur aux traînards, fussent-ils majoritaires !
Au nécessaire mépris, bien sûr, de
toute transcendance (notion entendue ici au sens laïque)… La transcendance
n’est-elle pas, en effet, ce qui élève l’homme au-dessus de sa condition, expression
du « sublime » - ce concept qui semble tant intimider une université que
l’on disait pourtant naguère Alma mater…
Or la pratique des arts n’est-elle pas indissociable de toute formation humaniste ? Au lieu de quoi, l’on voit la Rue de
Grenelle privilégier l’histoire de ces
disciplines, hissant ainsi au pavois mondanités et bavardages d’esthètes, mettant
sans vergogne aucune… « la charrue avant les bœufs » !
Francis
B. Cousté.
BOEN n°37 du 13 octobre 2011. Brevet
de technicien « Métiers de la
musique », session 2012. Programme préparatoire à l’épreuve
A2 :
·
La mélodie et le lied accompagnés par l’orchestre, de
Mahler à Messiaen
·
La chaconne, la passacaille et le ground, de Monteverdi à
Chostakovitch
Cf. : www.education.gouv.fr/pid25535/bulletin_officiel.html?cid_bo=57910
Ministère de l’Éducation nationale ©DR
Le Bulletin officiel
de l’Éducation nationale est librement consultable sur :
www.education.gouv.fr/pid285/le-bulletin-officiel.html
« Casanova, la passion de la Liberté », tel est l’intitulé de l’exposition que la
BnF (site François Mitterrand)
consacre, du 15 novembre 2011 au 19 février 2012, à l’illustre aventurier,
violoniste, homme des Lumières et franc-maçon. Renseignements : 01 53 79 59 59. www.bnf.fr/fr/evenements_et_culture/anx_expositions/f.casanova.html
Pietro
Longhi : Il ridotto (ca 1757) ©DR
The Juilliard School – Dance, Drama, Music –
communique ses programmes & cursus. Renseignements : 60, Lincoln Center Plaza, New York,
NY 10023-6588. www.juilliard.edu/degrees-programs/music/index.php
© The Juilliard School
Euh… La
« Haute Autorité pour la diffusion
des œuvres & la protection des droits sur Internet » (Hadopi)
communique son bilan : depuis octobre 2010, cet organisme a reçu
22 millions de relevés d’infractions, 580 000 internautes ont
reçu un premier avertissement, 35 000 ont fait l’objet d’un second
avertissement, 20 dossiers ont été transmis au parquet… Pour 2011, le budget prévisionnel de la
Hadopi s’élève à 13,79 millions d’euros. Informations : www.hadopi.fr
©Hadopi
Philippe Meirieu : « La pratique des arts permet de désengluer la conscience de la frénésie
consommatrice. »
©DR
La création d’un « Centre national de la musique », telle est la préconisation du
rapport Création & diversité musicale
à l’ère numérique remis à Frédéric Mitterrand, ministre de la Culture,
le 30 septembre 2011. Indispensable mutualisation des moyens pour pallier
l’effondrement de la filière musicale (4 000 emplois détruits en
10 ans)…
©DR
« Écouter, agir : musique & plasticité
cérébrale ». Faisant heureux écho à notre dossier « Le
cerveau musicien » (L’éducation musicale n°572, septembre/octobre 2011), ce colloque international se déroulera les
vendredi 18 et samedi 19 novembre 2011, à l’Université de
Paris Ouest-Nanterre-La Défense. Demi-tarif pour étudiants,
personnels de l’Éducation nationale et de l’Enseignement supérieur. Renseignements : 01 41 44 31
22. www.inshea.fr
TM + en chiffres. Créé en
décembre 1986, cet ensemble compte 26 musiciens permanents, 15 artistes
invités, un répertoire de plus de 280 œuvres, plus de
100 compositeurs joués (de tous pays, de toutes époques), de 3 à
6 créations musicales par an, de 25 à 35 concerts par saison (en
France et à l’étranger). Saison 2011-2012 : Chanson de geste. Renseignements : 8, rue
des Anciennes-Mairies, 92000 Nanterre. Tél. : 01 41 37 52 18. www.tmplus.org
Bibliothèque publique d’information du Centre Pompidou.
Son catalogue musical (quelque 1 285 documents) est désormais accessible
sur :
www.bpi.fr/recherche_documentaire.jsp?terme=musique
©Centre
Pompidou
« Le théâtre de Luciano Berio : Opera et La vera storia ». Ce colloque se tiendra les 17 et 18 novembre 2011, au Centre de
documentation de la musique contemporaine. Entrée libre. Renseignements : CDMC – 16,
place de la Fontaine-aux-Lions, Paris XIXe. Tél. : 01 47 15 49 86. www.cdmc.asso.fr
Le « 9e Concours international de chœurs de
Miltenberg » se
déroulera du 12 au 16 juillet 2012. Inscriptions avant le 15
décembre 2011.
Renseignements : www.chorwettbewerb-miltenberg.de
Au CNSM de Lyon : «Venise en musique, du Moyen Âge au XXIe siècle » (10 novembre-14 décembre
2011). Entrée libre. Renseignements : 3, quai Chauveau, 69000 Lyon. Tél. : 04 72 19 26 61. www.cnsmd-lyon.fr
Cité de la musique : « Paul Klee Polyphonies ». Consacrée
au peintre et musicien suisse Paul Klee (1879-1940), cette exposition
propose 130 tableaux & 70 documents, accompagnés de l’audition de quelque 80 œuvres
entendues ou interprétées par l’artiste (à droite sur la photo). Avec atelier pédagogique pour les 4-11 ans. Renseignements : 221, avenue
Jean-Jaurès, Paris XIXe. Tél. : 01 44 84 44 84. www.cite-musique.fr
©Berne, Zentrum Paul Klee
Georges Snyders, éminent
musicien & chercheur en Sciences de l’éducation, est mort le 27 septembre
2011, à l’âge de 94 ans. Depuis
son retour d’Auschwitz, il s’était fait l’apôtre de « La musique comme joie à l’école » (L’Harmattan, 2000).
Tristesse de perdre l’un de nos plus fidèles collaborateurs – mais dont, assurément,
la pensée survivra…
©DR
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Au CRÉA d’Aulnay-sous-Bois : Les 2 et 3 novembre 2011, à 20h30, sera créé Lady Godiva, opéra pour un
flipper. Ce spectacle sera notamment
repris à Paris, au Théâtre du Châtelet, les 29 et 30 avril 2012. Renseignements : 85, rue Anatole-France, 93600 Aulnay-sous-Bois. Tél. : 01 48 79 66 27. www.lecrea.fr (vidéo de
présentation).
©CRÉA
L’Institut de Musique chorale Christian Pariot a pour objectif la création
d’écoles de chefs de chœur dans divers pays d’Afrique centrale et de l’Ouest. Renseignements : http://vocesintimae.centerblog.net
Le « Concours
Étienne Vatelot 2011 » – lutherie et archèterie – se déroulera, à Paris, du 12 au 21 novembre 2011. Renseignements : 01 40 33 45
35. www.civp.com ou info.lutherie@civp.com
Le CRR 93, Conservatoire à rayonnement régional, propose – en novembre &
décembre - nombre d’événements à vocation internationale : « Dialogue
des Arts », « Suona Italiano »,
« Kansas State University », « Villes des musiques du
monde », « Autour du groupe Magma »… Renseignements : 13, rue Réchossière,
93300 Aubervilliers. Tél. : 01 48 11 04 60. www.conservatoireregional93.fr
©Willy Vainqueur
« L’art
sonore est-il un art des bruits ? » Tel est le thème de la conférence
que prononcera - dans le cadre du cycle « L’expérience de l’expérimentation »
- le philosophe, producteur & écrivain Bastien Gallet
(notre photo), le lundi 5 décembre 2011, à 19h00, dans la Petite salle du
Centre Pompidou (niveau -1). Renseignements : 01 44 78 12 33. www.bpi.fr ou www.instantschavires.com
©DR
19th Jeunesses International Violin Competition se déroulera du 12 au 19 mai 2012, à Bucarest
(Roumanie). Inscriptions jusqu’au 1er mars 2012. Renseignements : +40 722 383 542. www.jmevents.ro/regulament-s53-ro.htm
« La Semaine du Son
2012 », 9e édition, se déroulera à Paris, du lundi 16 au samedi 21 janvier – et, la
semaine suivante, partout en France et à l’étranger. Renseignements : www.lasemaineduson.org
« Flashmob at Copenhagen Central Station » :
www.classicalarchives.com/feature/dont_miss_this.html
Under the clock ©DR
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Le trio du célèbre contrebassiste Ron Carter se produira, le 6 novembre 2011, à 16h30, en
la Maison de la musique de Nanterre. En
première partie, Benoît Delbecq & Andy Milne dialogueront à
deux pianos. Renseignements : 8,
rue des Anciennes mairies, 92000 Nanterre. Tél. : 01 41 37 94
20. www.nanterre.fr
©DR
Madame Curie, opéra d’Elżbieta Sikora, sur un livret d’Agata Miklaszewska
(commande & réalisation de l’Opéra de Gdansk), sera créé dans le Grand
Auditorium de l’Unesco (7, place de Fontenoy, Paris VIIe), le
15 novembre 2011. Basé sur la vie et la personnalité de Marie
Curie-Skłodowska, deux fois Prix Nobel, cet ouvrage met en œuvre
11 chanteurs solistes, 5 voix parlées, un chœur, un orchestre complet
(plus guitare électrique, accordéon & dispositif électronique) et
danseurs. Éditions PWM, Krakow (Pologne). Renseignements : www.elzbietasikora.com ou www.operabaltycka.pl/pl/spektakl/madame-curie
©DR
Le 9e Festival Mino, organisé par les Jeunesses musicales de
France, se déroulera du 5 au 8 novembre, à l’Espace Cardin (1, avenue Gabriel,
Paris VIIIe), et du 9 au 12 novembre, au Centre
Wallonie-Bruxelles (46, rue Quicampoix, Paris IVe). Pas
moins de 18 concerts pour toute la famille. Renseignements : 01 44 61 86 93. www.mino.fr
Le Musée de l’Armée présente un
cycle de concerts exceptionnel intitulé « Viva V.E.R.D.I. ! » (Viva
Vittorio Emmanuele, Re d’Italia) sur le thème de l’opéra italien, mettant
particulièrement à l’honneur la musique & l’œuvre de Giuseppe Verdi. Du 4 novembre au 8 décembre 2011,
en le Grand Salon ou la Cathédrale Saint-Louis-des-Invalides. Renseignements : 129, rue de Grenelle, Paris VIIe. Tél. : 01 44 42 38 67 / 35 07.
www.invalides.org/pages/program.html
Le Fifre ©Musée de l’Armée
Pôle Sup’ 93 propose : « Parcours Musique mixte », le jeudi 10 novembre 2011, 19h30, à
l’auditorium du CRR de La Courneuve. En partenariat avec l’Ircam… Entrée libre. Renseignements : 41, avenue Gabriel-Péri, 93200 La Courneuve. Tél. : 01 43 11 25
04. www.polesup93.fr
Le trio du pianiste finlandais Joonas Haavisto se produira le jeudi 10 novembre 2011, à
20h00, à l’Institut hongrois (92, rue Bonaparte, Paris VIe). Renseignements : 01 43 26 06 44. www.jazzycolors.net
©Maarit
Kytöharju
Actualité d’Édith Lejet. Le dimanche 6 novembre, à 17h00, en
l’Orangerie du Château de Castel Novel, à Varetz (Corrèze) : L’herbier de Colette, avec
Dorothée Lorthois (soprano) & Delphine Bardin (piano). Le vendredi 18 novembre, à 12h15, en
l’Hôtel de Ville de Rouen : Trois
petits préludes, avec Marc Sieffert (saxophone) &
Christine Marchais (piano). Le
vendredi 25 novembre (19h00), en l’Auditorium du CRR de Paris (14, rue de
Madrid, Paris VIIIe) : Musique
pour trompette & quintette de cuivres, avec des étudiants de la classe
de Philippe Ferro. Renseignements : 06 12 41 57 02. www.edith-lejet.com
©André
Nisak
Concerts aux Bouffes du Nord. Le lundi 7 novembre, à 20h30 :
l’« Orchestre français des jeunes baroque », dir.
Reinhard Goebel, interprète Jean-Féry Rebel, André Campra,
Georg Friedrich Haendel & Jean-Sébastien Bach. Le lundi
28 novembre, à 20h30, la pianiste Simone Dinnerstein interprète
R. Schumann, J.-S. Bach et Fr. Schubert. Renseignements : 37bis,
bd de la Chapelle, Paris Xe. Tél. : 01 46 07 34 50. www.bouffesdunord.com
©Leigh
Hatwell
Notes d’automne, « 3es Rencontres musicales & littéraires en bords de Marne » (directeur
artistique : Pascal Amoyel), se déroulera au Perreux-sur-Marne, du 7
au 13 novembre 2011. Renseignements : 01 43 24 54 28.
www.festivalnotesdautomne.fr
Hommage à Franz Liszt. Dans le cadre des « Concerts de midi & demi » de la
Salle Cortot, Françoise Masset (soprano) et Thérèse Diette
(piano) interpréteront, le mardi 15 novembre, à 12h30, des mélodies et des
pièces pour piano de ce compositeur. Renseignements : 78, rue Cardinet, Paris XVIIe.
www.lesmomentsmusicaux.com/programme_proch.htm
Françoise Masset ©Frédéric Jean
« O
Mensch ! » de Pascal Dusapin (musique & mise en scène), sera donné en création mondiale à Paris, au
Théâtre des Bouffes du Nord, du mardi 15 au samedi 19 novembre
2011, à 21h00 (relâche le jeudi 17 novembre). Cycle de 27 pièces & 4 interludes pour piano, sur
des poèmes de Fr. Nietzsche. Livret en allemand, spectacle surtitré. Avec le baryton autrichien Georg Nigl et la pianiste
Vanessa Wagner. Renseignements : 37bis, bd de la Chapelle,
Paris Xe. Tél. : 01 46 07 34 50. www.bouffesdunord.com
Pascal Dusapin ©DR
Bartókiades 1. Cette manifestation se déroulera du 16 au 20 novembre 2011, au
Grand Théâtre de Dijon. Avec le
concours, notamment, des artistes de la compagnie de danse Lanabel, des
violonistes David Grimal et Pierre Fouchenneret, des violoncellistes
Victor Julien-Lafferrière, Miklós Perényi, des pianistes
Dénes Várjon, Igor Tchetuev et du Quatuor Keller. Renseignements : 03 80 48 82 82. www.opera-dijon.fr
Béla Bartók ©DR
« Les inédits de la BnF » : Le pianiste Nicolas Stavy (notre photo)
se produira, le jeudi 17 novembre 2011, dans des œuvres d’Hélène de Montgeroult
(1764-1836), compositrice sous la Révolution et l’Empire. Entrée libre. Renseignements : Grand
Auditorium de la Bibliothèque nationale de France, site François-Mitterrand
(quai François-Mauriac, Paris XIIIe). www.bnf.fr
Le Chœur du Campus d’Orsay, dir. Adam Vidović,
se produira le vendredi 18 novembre (21h00) en l’église Saint-Louis-en-l’Île
& le dimanche 20 novembre (17h00) sur le Campus d’Orsay. Dvořák
et ses disciples (œuvres d’Antonín Dvořák, Josef Suk,
Aaron Copland et George Gershwin). Renseignements : www.scm.espci.fr
©DR
L’Ensemble « Mei Li De Dao », musiques
chinoise & ethnique taïwanaise, se produira à l’auditorium du musée Guimet,
le vendredi 18 novembre 2011, à 20h30. Avec Lin Chin Ping (yangqin), Miu Qing Ling (dizi), Zhang Pei
Ling (pipa), Ma Xin Yu (liuqin, zhongruan), Zhuang Pei Jing (erhu), Zheng Qian
Na (sheng), Damien Bernard (kaval, daf, percussions). Renseignements : 6, place
d’Iéna, Paris XVIe. Tél. : 01 40 73 88 18. www.guimet.fr
©DR
Natalie Dessay (soprano) & Philippe Cassard (pianiste) se produiront en concert, le samedi
19 novembre 2011, à 20h30, au Corum de Montpellier, dans des œuvres de
Debussy, Duparc, Chabrier, Chausson et Fauré. Renseignements : 04
67 60 19 99. www.opera-orchestre-montpellier.com
©DR
La 2e édition de « L’Esprit du
Piano » se déroulera à l’Opéra de Bordeaux, du 22 au 29
novembre 2011. Sous l’égide du grand pianiste espagnol
Joaquín Achúcarro, se produiront Alessio Bax, Yuri Favorin,
Bertrand Chamayou, Mu Ye Wu, David Bismuth,
Florian Noack & Jacky Terrasson. Renseignements : 05
56 00 85 95. www.espritdupiano.fr
« La Folle Nuit à Gaveau », 26 et 27 novembre 2011. Avec,
notamment, les pianistes Emmanuel Strosser, Claire Désert,
Adam Laloum, Abdel Rahman El Bacha, Etsuko Hirose,
Shani Diluka, Claire-Marie Le Guay, Jean-Claude Pennetier,
Anne Queffélec… Renseignements : 01 49 53 05
07. www.sallegaveau.com
L’Orchestre symphonique « Les Concerts
d’Athalie », dir.
Léonard Ganvert, les chanteurs Charlotte Dellion, Xavier
de Lignerolles, Laurent Laberdesque & le Chœur Marie-Jo Gaborit
se produiront, le dimanche 27 novembre 2011, à 17h00, en l’église luthérienne
Saint-Paul-de-Montmartre (90, bd Barbès, Paris XVIIIe).
Au programme : Ouverture de La
Clémence de Titus de Mozart et Harmoniemesse de Haydn. Entrée libre. Renseignements : 01 42 23 13
06. http://lesconcertsdathalie.free.fr
Léonard Ganvert ©DR
La pianiste Yuja Wang (°1987, Pékin) se produira Salle Pleyel, le jeudi 1er décembre 2011, à 20h00, dans des œuvres de Beethoven, Rachmaninov, Albéniz,
Debussy, Ravel, Scriabine, Fauré et Dukas. Renseignements : 252, fg Saint-Honoré, Paris VIIIe. Tél. : 01 44 17 93 25. www.piano4etoiles.com
©DR
« Vision Sérénissime », manifestation dédiée à la ville de Venise,
se déroulera au CNSMD de Lyon, du 10 novembre au 14 décembre
2011. Renseignements : 04 72 19 26 26. www.cnsmd-lyon.fr
Venise par Canaletto (1697-1768) ©DR
Le pianiste Ziad Kreidy interprétera les quatre
premiers cahiers (op. 12, 38, 43, 47) des Pièces lyriques de Grieg, le mercredi 7 décembre 2011, à 20h00, à la Maison de la Norvège
(7 N, bd Jourdan, Paris XIVe). Entrée libre. Renseignements : 01 40 78 55 00. www.ziadkreidy.com
©DR
Hommage à Elsa Barraine (1910-1999). Jusqu’au 7 janvier 2012, exposition permanente au département Musique de la
Bibliothèque nationale de France (2, rue Louvois, Paris IIe). Renseignements : 01 53 79 59
59. www.bnf.fr ou www.femmesetmusique.com
Elsa à la machine à écrire ©DR
Présences 2012, Festival de création musicale de Radio France (22e édition),
se déroulera à Paris, au Théâtre du Châtelet, du 13 au 22 janvier.
14 concerts, 6 créations mondiales (commandes de Radio France),
1 création française. Invité d’honneur :
Oscar Strasnoy. Renseignements : 01 56 40 15 16. www.concerts.radiofrance.fr
Oscar Strasnoy ©Guy Vivien
6th Bucharest International Jazz
Competition 2012, for
instrumentalists and vocalists. Date :
12-19 mai 2012. Âge limite : 35 ans (nés après le 1er mai
1977). Prix : 7 000 €. Inscriptions avant le 10
février 2012. Renseignements : www.jmevents.ro
Francis Cousté.
***
Haut
L’immortel Franz étant né le 22
octobre 1811, on atteignait en cette semaine les célébrations réservées aux
monuments de l’œuvre lisztienne. Le 21
octobre, Radio France lançait dans l’arène les forces de l’Orchestre
philharmonique et les hommes du Chœur pour la Faust-Symphonie confiée à la baguette d’Eliahu Inbal. Les
solistes des premiers pupitres se montrèrent exemplaires dans l’écriture
chambriste du volet central (Marguerite),
le très efficace chef fit crépiter le méphistophélique finale, le ténor
Steve Davislim (excellent pilote dans l’enregistrement du Vaisseau fantôme par Marek Janowski) projeta admirablement son chant depuis la tribune du Chorus mysticus. Mais où était l’esprit goethéen ? On s’irritait d’une lecture trop extérieure
du premier mouvement (Faust), privée
de tout questionnement métaphysique. Et qu’en fut-il des replis introspectifs
(1er et 2e mouvements), balayés par une palette
dynamique uniformément contenue entre mf et ff ? N’y aurait-t-il, dans cette fluviale
partition, ni p ni pp pour ménager les profondeurs de
champ autour des méandres d’une âme égarée ? La lecture philosophique de ce triptyque faisait cruellement
défaut, sacrifiée sur l’autel d’un symphonisme brillant.
Et puis,
quelle idée de faire précéder une telle partition du navrant Concerto pour violon de Schumann, si ce
n’est le voisinage chronologique des deux œuvres... ou la malice (involontaire ?) d’inviter la
violoniste allemande Isabelle Faust à figurer au même programme que la Faust-Symphonie ! Ce concerto au déroulement laborieux, jonché
de maladresses d’harmonie et d’une orchestration exsangue, date de l’automne
1853 : son dédicataire consterné, le fidèle Joachim, eut la lucidité de
l’écarter toute sa vie durant. Il y a
presque un voyeurisme malséant à exhiber ainsi les témoignages d’un cerveau
diminué par une pathologie en train de l’anéantir. Or, prenons le pari : si l’on présentait ce concerto sous le
nom de Duschmoll, et non plus de Schumann, que de voix s’élèveraient pour en dénoncer
le criant manque d’intérêt !
Eliahu Inbal ©K. Miura
Mais revenons à Liszt, lequel
devait au même Matthias Brauer qui prépara le chœur de la Faust-Symphonie, une des rares
incursions de l’année dans ses grandes pages religieuses avec la Missa Choralis, au cours d’un
programme (le 21 septembre dernier) dont on retint également les magnifiques Laudes organi de
Zoltán Kodály. En effet, la
commémoration, qui moulina à satiété tant de chefs-d’œuvre pianistiques, passa
sous silence la Messe de Gran (dont
on eût espéré qu’elle retrouvât le cadre de Saint-Eustache qui l’accueillit en
1866 !), ou La Légende de
Sainte Élisabeth. Par miracle, Christus fut désigné pour être joué dans une dizaine de villes du monde
(dont Bayreuth !) le jour anniversaire de Liszt. Ce 22 octobre, fruit de la coopération
franco-hongroise, vit converger à Paris le Chœur et l’Orchestre symphonique de
la Radio hongroise, sous la direction de Zoltán Peskó, ainsi qu’une
brochette de chanteurs magyars. Toute
exécution publique de l’immense oratorio évangélique (près de 3 heures) de
Liszt constitue un événement que l’on ne réentendra qu’une fois toutes les x...
décennies. L’écrin acoustique de Saint-Louis des Invalides, lieu de concert
propice à de tels effectifs, s’avérait idéal pour l’ouvrage né en 1872. La synthèse sonore entre l’orchestre (devant
l’autel), audible de partout dans ses moindres détails, et le grand orgue (à la
tribune diamétralement opposée) judicieusement registré par son titulaire
Philippe Brandeis (seul Français de ce casting hongrois), s’effectuait harmonieusement au-dessus de nos têtes, emplissant le
vaisseau d’une onde à la majestueuse plénitude qui jamais ne roulait en magma
indéfini comme c’eût été le cas sous des voûtes gothiques. Certes les chanteurs
solistes détonnaient de plus en plus au fil de la soirée, l’air froid de
l’église leur chatouillant le gosier, certes on entendit quelques
« pains » émaner d’un orchestre moins performant que notre
Philharmonique, mais cette fois, l’esprit lisztien le plus pur régnait. Zoltán Peskó (né en 1937), éminent chef
d’orchestre que l’on entendit beaucoup autrefois en Italie (ses interprétations
d’Oberto de Verdi, ainsi que des
œuvres de son maître de composition Goffredo Petrassi sont restées dans
nos mémoires) et en Allemagne, dégageait les multiples facettes de Liszt que
révèle la succession des quatorze morceaux de Christus.
Zoltán Peskó ©DR
Le Liszt du poème symphonique
est omniprésent : la première partie (consacrée à la Nativité) s’avère
d’ailleurs aux deux tiers purement orchestrale ; le Liszt épris de
chant grégorien laisse planer dans tout leur dépouillement éthéré certaines
hymnes latines ; le Liszt ultime se profile par de fugaces préfigurations
d’enchaînements à venir, par exemple au détour Du Berceau jusqu’à la tombe (écrit quelque onze ans plus
tard) ; le Liszt audacieux harmoniste captive au gré d’une démarche
procédant par paliers de tierces, par enharmonies, par retournements inopinés
sur des pas déjà franchis, toutes choses qui colorent l’apparent respect d’une
polyphonie chorale « classicisée » par rapport à ses déferlements
instrumentaux. Ainsi se dessine un
parcours complexe, transgressant les formes convenues, cumulant une
incontestable puissance évocatrice (le Jeu
des bergers, Le miracle) et un refus
du dramatisme facile : il n’est que de voir comme la troisième partie (Passion et Résurrection) élude les
passages obligés du Chemin de croix (le Via crucis y pourvoira une
demi-douzaine d’années plus tard, mais sur le mode de la méditation la plus dénudée)
pour se concentrer sur la douleur intime (Tristis
est anima mea, puis Stabat mater
dolorosa comme en écho au Stabat
mater speciosa de la première partie) avant d’enchaîner directement sur
l’espérance de la Résurrection. Toutes
ces affirmations de foi et ces identités du polymorphe créateur, nous les
parcourûmes d’un même élan unificateur grâce à la hauteur de vue d’un
Zoltán Peskó profondément investi du sujet. Cette soirée anniversaire devait être une date-clé de l’année
commémorative, elle s’imposa en effet comme un grand moment d’émotion. Remercions Jean-Yves Clément, qui
« décentralisait » pour l’occasion son festival des Lisztomanias de Châteauroux, d’avoir
fédéré tant de partenaires pour réussir cette fête autour d’un chef-d’œuvre qui
lui tient suprêmement à cœur.
Sylviane Falcinelli.
***
Une "nouvelle" Salomé
Richard STRAUSS : Salomé,
drame lyrique en un acte. Livret de
l'auteur tiré de la pièce éponyme d'Oscar Wilde dans une traduction
allemande d’Hedwig Lachmann. Angela
Denoke, Uha Uusitalo, Stig Andersen, Doris Soffel, Stanislas de Barbeyrac, Isabelle
Druet, Dietmar Kerscbaum, Éric Huchet, François Piolino, Andreas Jäggi, Antoine
Garcin, Scott Wild, Damien Pass. Orchestre de l'Opéra national de Paris, dir. Pinchas Steinberg. Mise en scène : André Engel.
Nicolas Joel a choisi de
reprendre Salomé dans la production confiée en 1994 à André Engel,
la préférant à celle présentée en 2003 dans la régie de Lev Dodin. Le choix est clair : ne pas se départir
de l'atmosphère orientaliste décadente du drame d'Oscar Wilde qui a directement
servi de trame à Richard Strauss. La
plastique du spectacle impose, en effet, le décor construit d'un vaste palais
aux murs sombres et aux verrières ajourées que les éclairages vont peu à peu
différencier en une suite de tableaux à la manière de Gustave Moreau. La volonté de côtoyer un univers de luxe
moyen-oriental se manifeste tout autant dans les costumes, qui tentent la
reconstitution avec leurs étoffes chatoyantes. La dramaturgie s'attache à
retracer le portrait d'une héroïne gagnante, focalisant lors des dernières
pages sur l'aspect jouissif de sa victoire plus que sur le sort d'une femme
condamnée elle-même par la nature morbide de sa démarche. Salomé a vaincu le mal et en profite. Elle ne tombera pas sous les coups des sbires
d'Hérode mais sera égorgée par le page d'Hérodias ; une des touches
intéressantes de la mise en scène qui, pour le surplus, reste bien académique,
voire au premier degré dans son approche naturaliste. Du moins est-elle parfaitement lisible et ne
glisse pas dans le travers de la « re-création ». On regrette juste
un manque d'acuité, telle l'apparition de la fille de Judée, en fond de scène,
peu propice à une bonne perception de ses premières phrases, ou l'entrée
d'Hérode, pas assez soulignée, et surtout le manque d'effroi de celui-ci lors
de l'étonnante demande de sa fille à l'endroit du prophète Jochanaan. La danse des sept voiles donne lieu, en sa
phase introductive, à une valse en forme de face-à-face muet entre père et fille. Elle développe ensuite une séance de
mime plus qu'une chorégraphie sensuelle, voire érotique.
©ONP/Elisa
Haberer
Mais tout cela ne distrait
aucunement d'une exécution musicale irréprochable. Angela Denoke, aux
antipodes de sa prestation il y a peu au festival de Baden-Baden, est, de par
le parti pris de la régie - une Salomé bien sage, presque bridée dans ses
élans. On soupçonne à peine le formidable potentiel d'incarnation de cette
grande figure straussienne, en particulier l'obsession, voire l'hystérie
passionnelle qui l'animent. La voix est,
bien sûr, incandescente. Le
Jochanaan de Juha Uusitalo est solide comme un roc, même si, là encore, peu
mis en valeur. Doris Soffel est en
meilleure voix que dans sa récente prestation allemande et justement moins
hystérique. C'est aussi le cas du
personnage d'Hérode. On a fait le choix,
non d'un ténor de composition, mais d'un heldentenor wagnérien, encore que
vocalement souple. Le rôle gagne
assurément en conduite et solidité vocales. Il est dommage que la régie lui fasse perdre en profondeur :
gommée la lubricité du tétrarque pour une vision bien rangée d'un homme
seulement distrait dans ses habitudes de luxure. Une voix se détache encore, celle de Stanislas de Barbeyrac,
Narraboth, superbe timbre de ténor clair et bien conduit. Sur cet immense crescendo, Pinchas Steinberg
porte un regard objectif, ne réservant la passion dévorante qu'aux
moments clés. Sa direction ne cherche pas l'effet et est frappée au coin
de la lisibilité. L'Orchestre de l'Opéra
répond avec brillance.
Faust : retour au drame bourgeois ?
Charles GOUNOD : Faust. Opéra en cinq actes. Livret de Jules Barbier & Michel Carré. Roberto Alagna, Paul Gay, Inva Mula, Tassis
Christoyannis, Angélique Noldus, Marie-Ange Todorovitch, Alexandre Duhamel,
Rémy Corrazza. Orchestre et Chœur de
l'Opéra national de Paris, dir. Alain Altinoglu. Mise en scène : Jean-Louis Martinoty.
©ONP/Charles Duprat
Est-il opéra plus emblématique
dans le répertoire français ! Dans leur adaptation du mythe goethéen, Gounod et ses librettistes ont cherché à
satisfaire le goût d'une époque plus préoccupée de divertissement que de
profondeur psychologique. Comme le souligne un commentateur, « l'opéra se
livre moins à un affadissement qu'à une acculturation du mythe »
(Emmanuel Reibel) car ses auteurs français ont cherché à « modeler le
personnage éponyme sur leurs propres valeurs ». Le décalage est donc certain entre l'opéra et la pièce de Goethe. Le drame bourgeois n'est pas loin. Est-ce une raison pour s'y engouffrer comme
le fait Jean-Louis Martinoty dans cette nouvelle production ? Succédant à celle, légendaire, de Jorge Lavelli
(1975) qui avait enfin sorti la pièce de ses connotations pompiéristes et
transcendé le cliché d'une affaire de détournement de mineure, la surprise est de taille. Alors que les présupposés participent chez
Martinoty d'une fine analyse, la réalisation ne laisse pas d'interroger. Sa lecture qu'il définit comme « scrupuleuse
à l'excès », s'empêtre dans l'imagerie réaliste. Dès lors que, selon lui, « Faust ne
connaît de la vie que ce qui vient de sa bibliothèque », il impose une
décoration unique : vaste salle de bibliothèque circulaire flanquée
d'escaliers en colimaçon et de mille objets hétéroclites. Encombrant, lourdé d'un luxe de détails,
enrichi encore de scénettes comme incrustées (le jardin de Marguerite, le
banquet des égéries de la nuit de Walpurgis), ce dispositif ne facilite pas
l'appréhension des destins individuels. Ils sont peu servis par une direction
d'acteurs au mieux banale, au pire indigente. Les masses chorales ne sont pas mieux traitées, défilés mécaniques
et disposition convenue. On croule sous une avalanche de symboles souvent
croisés : allégorie de la mort fauchant ses victimes, poignards présentés en forme de croix latine,
blanche chemise tachée de sang, processions des corps constitués, magistrats,
universitaires, académiciens et autres dames de l'Armée du Salut ; sans
parler d'un brelan de Miss Monde en maillots de bain, lutinées lors de la
kermesse par un incorrigible Faust. Et
que dire de Méphisto accoutré en haut dignitaire ecclésiastique revanchard lors
de la scène de la prison ! Un
passage poétique entre tous comme la première rencontre entre Faust et
Marguerite passe presque inaperçu au milieu du plateau embarrassé. Le joli trait qui voit Marguerite parée de
mirifiques bijoux, par Méphisto lui-même, avant qu'il ne l'emporte dans un
tourbillon à la fin de son air fameux, est peu de chose à côté de moult propos
creux (l'attitude nonchalante de Faust durant la kermesse) ou trop explicites
(le duo de la chambre). Le parti de
situer l'action à l'époque du Second Empire n'est en soi pas dérangeant. La vue de tous ces soldats calamistrés et
pantalon garance est même originale. C'est
la volonté de souligner toute chose qui devient lassante. Pourquoi tant charger au risque d'affaiblir
la dramaturgie ?
©ONP/Charles Duprat
L'exécution musicale est d'une
toute autre trempe. Grâce d'abord à la
direction très pensée d’Alain Altinoglu qui privilégie les accents sombres
mais aussi les contrastes. La prolixité
de l'invention mélodique est mise en exergue, sans jamais sombrer dans le banal
routinier, le déjà entendu. Au
contraire, la justesse de l'expression rend pleine justice à la hardiesse de
l'harmonie et aux vertus de l'orchestration, ce que l'Orchestre de l'Opéra défend avec brio. La distribution est de belle tenue - mis à
part un Siebel insuffisant. Elle est
dominée par la voix de stentor de Paul Gay qui, bien que ne possédant pas
un timbre naturel de basse mais plutôt une tessiture de baryton grave, possède
cette qualité rare de pouvoir chanter forte sans gêne. On pense au jeune José van Dam. Le portrait confère à ce Satan une force de
conviction peu commune. La voix et la
présence d’Inva Mula l'identifient à Marguerite : émouvante dans
cette fragilité, plus poche de la Gretchen de Goethe que de la grande héroïne
lyrique trop souvent représentée. L'air
des bijoux est justement replacé dans son contexte de découverte émerveillée et
non de ridicule cupidité. La scène de
la prison comme l'ultime message sont emplis d'une émotion vraie. Tassis Christoyannis
propose un Valentin convaincu et superbement chanté. Enfin Roberto Alagna, dans un de ses rôles favoris, est fidèle à
lui-même : distinction de phrasé, refus du pathos quand bien même la régie
semble lui laisser la bride sur le cou, poétisation de ses interventions. Si la voix n'a plus la manière de sonner de
naguère, elle n'en reste pas moins superbement cuivrée. « Salut, demeure chaste et pure »
demeure bien l'un des plus beaux airs
de ténor dont peut s'enorgueillir l'opéra français. Curieusement, le public lui fera un accueil chaleureux, mais sans
plus, comparé au feu nourri des applaudissements réservés à l'interprète de
Méphisto.
« Convergences » : des concerts
pour l'amateur
En parallèle aux diverses
productions données dans la grande salle, l'Opéra Bastille présente une
série de concerts de musique de chambre dans le cadre intime de l’amphithéâtre. Son concepteur, Christophe Ghristi,
dramaturge maison, a conçu une programmation raffinée et originale mêlant
œuvres rares de compositeurs français au tournant du XXe siècle et
grandes pages du répertoire de la mélodie ou de la musique instrumentale. La troisième séance de la série réunissait la
pianiste Elisabeth Leonskaja, si rare en France, et le Quatuor Aron. En première partie, la pianiste donnait la Sonate pour piano n°1, op. 24 de
George Enescu, créée en 1924. D'un
modernisme tout relatif, elle rassemble tout ce qui fait l'originalité du
langage de l'auteur : un mélange de folklore roumain réinventé, comme le
fera Bartók en Hongrie, de romantisme allemand et d'impressionnisme français. C'est peut-être cette dernière influence qui
se signale le plus immédiatement. Complexe, la pièce est exigeante mais il s'en dégage un bonheur
musical intense : l'alliance d'une pensée méditative et d'un tempérament
déchaîné. Ses trois mouvements
s'ordonnent de manière peu orthodoxe puisque on passe de l'allegro au presto
pour conclure sur un andante. Le grave
sombre du premier mouvement est adouci par l'effet de transparence française.
Le presto vivace, à la manière d'un scherzo débridé, requiert de l'exécutant
une panoplie de jeux différenciés. Enfin
l'andante molto espressivo se rapproche encore plus des climats irisés, comme
raréfiés, favorisés par les musiciens français au début du XXe siècle, Debussy notamment. Leonskaja
fait sienne cette musique de l'âme. On
comprend vite pourquoi elle a enchâssé cette perle entre Ravel et Debussy. Les Valses nobles et sentimentales introduisent presque naturellement les climats dont est chargée la pièce d’Enescu. Et les trois Préludes de Debussy qu'elle distille ensuite en sont le
prolongement légitime. Cette pianiste,
dont on ne soupçonnait pas l'empathie avec l'idiome gallique, en livre les
sortilèges infinis. En seconde partie
elle fait alliance avec le magnifique Quatuor Aron de Vienne pour une
interprétation puissante du Quintette
pour piano & cordes de Franck. Bien
sûr le système cyclique cher à l'organiste peut devenir entêtant. Mais quel attrait dans les courbes dessinées
avec grâce, les thèmes qui reviennent en boucle, passant du piano aux cordes et
vice versa. L'exécution est
soutenue, passionnée, ce que l'acoustique très présente de l'amphithéâtre
accentue sans doute. Le lyrisme
échevelé y fait florès, en particulier au lento central marqué « con molto
sentimento ». C'est dire !
©Jean
Mayerat
Les futures étapes de cette
passionnante série seront consacrées au chant : récitals de Karine Deshayes
pour dire Gounod, Berlioz, Bizet et Delibes (11/I), de la belle Sophie Karthäuser
accompagnée du pianiste Cédric Tiberghien qui convoqueront Reynaldo Hahn,
Ernest Chausson, Benoît Mernier et Bernard Foccroulle (8/II), du
ténor Topi Lehtipuu qui illustrera aussi bien Fauré et Duparc que Sibelius
et Webern (15/II), de Yann Beuron offrant, entre autres, les rares Clairières du ciel de
Lili Boulanger (18/IV), de Soile Isokoski et de sa fidèle pianiste
Marita Viitasalo pour chanter Strauss (2/VI). Une séance de musique de chambre réunira Jean-Efflam Bavouzet et
le Quatuor Danel pour un programme Debussy-Fauré le 31/V. Une absolue rareté, l'oratorio Le miroir de Jésus, sortira sans doute
d'un oubli coupable son auteur André Caplet (19/V). Enfin deux soirées des solistes de l'Atelier
lyrique de l'Opéra de Paris seront consacrées à Liszt (2/XII) et à Massenet
(20/I). Le prix de ces concerts est
fort attractif. À fréquenter pour qui
veut se sortir du convenu.
Formidable reprise de Tannhäuser
Richard WAGNER : Tannhäuser. Opéra en trois actes. Livret du compositeur. Christopher Ventris, Nina Stemme, Sophie
Koch, Stéphane Degout, Christof Fischesser, Stanislas Barbeyrac, Eric Huchet,
Wojtek Smilek, Tomasz Konieczny. Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris, dir. Sir Mark Elder. Mise en scène : Robert Carsen.
© ONP/Elisa Haberer
Le bonheur de cette reprise de Tannhäuser, on le doit à l'exécution musicale et avant tout à une
distribution dont peut s'enorgueillir l'Opéra de Paris. À faire pâlir le prestigieux Festival de
Bayreuth qui, au demeurant, n'a guère brillé dans sa nouvelle production de
l'œuvre, l'été dernier (cf. NL d'octobre 2011). Pas la moindre réserve
ne vient troubler l'harmonie de l'ensemble. Le Tannhäuser de Christopher Ventris ne cède pas au timbre
barytonnant de bien des interprètes du rôle. Son émission claire et percutante le rapproche de la voix
italienne. Le rôle gagne en juvénilité.
La tension, qui jamais ne se relâche, monte même en puissance pour culminer
dans le récit de Rome du IIIe acte, terrible narration par le
pécheur d'une tentative manquée de rachat de ses fautes. Tout l'art est ici de savoir s'économiser
durant les deux précédents actes sans donner l'impression de trop se réserver. Le chanteur fait sien un des rôles de ténor
les plus délicats à distribuer du théâtre wagnérien. Vénus se voit assigner elle aussi une partie difficile, comme le
seront les grandes héroïnes à venir confiées aux mezzo-sopranos, les Ortrude et
autres Kundry. Sophie Koch, pour sa prise de rôle, est l'une des
révélations de la soirée. Outre un port
royal et séduisant, elle possède le vrai galbe wagnérien, le legato souverain,
la fine musicalité lui permettant de si bien « coller au texte », la
vaillance dans l'aigu, rare chez une mezzo. Nina Stemme est une habituée du rôle d'Elisabeth. On pense à sa prestation à l'Opernhaus de
Zürich la saison passée (cf. NL de
mars 2011). Cette série marque ses
débuts à l'Opéra de Paris : un soprano dramatique comme on en rêve. Telle
sa compatriote et aînée Birgit Nilsson, elle possède l'ambitus d'une voix
idéalement placée, medium ample, grave timbré et, bien sûr, quinte aiguë
glorieuse, qui idéalisent une héroïne attachante. Certes, la fréquentation de parties plus lourdes (Isolde,
Brünnhilde) a développé l'organe et sans doute étoffé le timbre de soprano lyrique
requis pour ce « Wagner blond » dont parlait en connaissance de
cause Régine Crespin. Mais on ne
saurait s'en plaindre devant pareilles jeunesse rayonnante et si intense réflexion. Autre prise de rôle, le Wolfram de
Stéphane Degout : son habitude du répertoire de la mélodie (comme il
en est de beaucoup d'interprètes du personnage), son timbre de baryton lyrique
l'y prédestinaient. Il lui imprime
une simple plénitude que parachève un
sûr talent dramatique : une tendresse non mièvre, une douceur émue. Christof Fischesser est un Landgrave
noble, doté d'une voix de basse claire. Et le quatuor des Chevaliers du tournoi de la Wartburg aligne des
premiers rôles en puissance, tel l'excellent Stanislas de Barbeyrac. La contribution des chœurs est valeureuse
quoique affectée par quelques décalages chez les ténors. Mark Elder dirige très lentement une
version de Paris qui prend parfois des allures « tristanesques ». Wagner ne se satisfera jamais de cette pièce
qu'il remettra à plusieurs reprises sur le métier. Pour sa présentation parisienne en 1861, il l'affectera de
proportions comme agrandies, développant en particulier la scène du Venusberg
au Ier acte. La lenteur
bride parfois la spontanéité du discours. Mais la sonorité de l'Orchestre de
l'Opéra est d'une rare opulence. C'est
là l'exécution d'un vrai Kapellmeister toujours attentif à ses chanteurs.
© ONP/Elisa Haberer
Robert Carsen, comme bien
d'autres régisseurs, voit dans cet opéra le drame de l'artiste solitaire. On a
même avancé, à juste titre, que Wagner y avait projeté ses propres
interrogations artistiques et que les relatives faiblesses de construction caractérisant
la pièce reflétaient des préoccupations autobiographiques. Curieusement, l'artiste chanteur qu'est
Tannhäuser est saisi ici sous les traits d'un peintre dans quelque atelier où
il tente vainement de cueillir les traits d'un modèle si parfait qu'il en est
insaisissable, celui de l'idéale Vénus. C'est là qu'on le retrouvera moribond au dernier acte, de retour
de sa quête d'« espérance, grâce et pardon », après qu'Elisabeth y a osé
cette « Prière » où elle s'offre en holocauste pour le rachat de
l'artiste chéri. L'acte II qui voit se
dérouler le tournoi de la Wartburg, transporte dans quelque galerie chic,
fréquentée par un public féru de mondanités. La scénographie réduite à quelques pans de murs sombres ou blancs
et le jeu se développant sur une aire restreinte sont, par la mise en exergue
des personnages, aptes à faciliter la progression dramatique. On aime moins les scènes fastidieuses de
déménagement fébrile de châssis de toiles de maîtres. La direction d'acteurs très pensée dessine
des portraits en relief. Quelques
morceaux d'anthologie vont l'enrichir, telle l'entrée d'Elisabeth au début du
IIe acte : l'interprète déboule du fond de la salle
brillamment éclairée, pour cheminer parmi les spectateurs comme enivrée de
bonheur. Elle lancera son air
« Dich, teure Halle » (Salut à toi noble demeure) fièrement devant la
fosse d'orchestre, côté salle. Bel
hommage à la magie du lieu même du spectacle ! Le procédé sera encore utilisé peu après, quoique avec un moindre
impact, pour le défilé des invités. Un
des modes cher au régisseur est l'effet en miroir. Ainsi Vénus et Elisabeth sont-elles pour Tannhäuser les deux faces
d'un même Janus. Aussi cherche-t-il à
brosser chez celui-ci « l'artiste en perpétuel conflit intérieur, essayant
de tirer de ces forces complémentaires une œuvre d'art nouvelle ». L'imagination dramaturgique tourne cependant
court à la dernière scène qui décidément n'inspire pas les metteurs en
scène ; du moins ceux qui ne se résolvent pas à regarder le texte en face. Un happy end factice va clore un
cheminement devenu fort banal lors
qu'il réunit Vénus et Elisabeth, se donnant la main même, tandis que Tannhäuser
voit son Art enfin reconnu par l'accrochage de son grand œuvre auprès de
chefs-d'œuvre de l'art pictural. C'est
pour le moins en décalage avec le texte, plus encore avec l'idée même que
l'auteur se faisait de la rédemption de l'artiste maudit. Quoi qu'il en soit, l'essentiel du message
restera bien dans la sublime facture de l'exécution musicale transcendée par
ses interprètes.
Lulu ou le chemin de déchéance d'une libertine
Alban BERG : Lulu. Opéra en un prologue et trois actes. Livret du compositeur d'après les drames de
Frank Wedekind « Erdgeist » et « Die Büchse der Pandora ». Orchestration du IIIe acte
complétée par Friedrich Cehra. Laura
Aikin, Jennifer Larmore, Andrea Hill, Wolfgang Schöne, Kurt Streit, Scott
Wilde, Franz Grundheber, Robert Wörle, Victor von Halem, Marie-Thérèse
Keller, Johannes Koegel-Dorfs, Marlin Miller. Orchestre de l'Opéra
national de Paris, dir. Michael Schönwandt. Mise en scène : Willy Decker.
©ONP/Éric Mahoudeau
Cette production, initiée en
1998, du second opéra de Berg n'a rien perdu de sa puissance évocatrice. Elle
réside dans son concept même : inscrire la carrière de libertine qu'est Lulu dans une sorte d'arène
dont le cœur figure cette même Boîte de Pandore, titre
d'une des « pièces monstres » de Wedekind dont s'est inspiré Berg, et
le pourtour de sombres gradins d'où la cohorte des mâles, redingote noire,
chapeau Mossant, contrôle l'ascension et de la déchéance de celle-ci. Une suite de combats souvent cruels, opposant
le masculin au féminin. Outre qu'il
autorise au jeu de se situer, au propre, sur deux niveaux, le dispositif permet,
au figuré, une approche saisissante des diverses péripéties d'un drame d'une
rare concision où la symétrie des situations est érigée en système. N'oublions pas que Jack l'Éventreur qui
va poignarder Lulu, n'est autre que ce Dr Schön qui lui porta tant de
passion. À cet instant, déchirant entre
tous, c'est même la masse des mâles descendus dans l'arène, qui, entourant le
couple maudit d'un soir, va comme démultiplier ce geste de désespoir. Et Lulu restera crucifiée sur la toile peinte
de son propre portrait tandis que Jack, satisfait du geste accompli, trucide à
son tour la pauvre Comtesse Geschwitz. Vision d'une force inouïe. Mais peu de traits auront avant échappé à la sagacité de la régie
de Willy Decker qui discerne
combien est vive la tension entre deux pôles. Car Lulu aimante les hommes aussi profondément qu'elle s'en
détache rapidement. Tel un Don Juan au
féminin. L'unité stylistique est
porteuse de signification et ce lieu unique rassembleur d'émotions, alors que
sans cesse métamorphosé par des éclairages spectraux. La mise en scène possède cette vraie
lisibilité qui fait accéder immédiatement au cœur même du drame. Le va-et-vient des personnages, du dessus
vers le bas, moyennant de longues et étroites échelles, les fait pénétrer dans
cet improbable cirque comme téléguidés par quelque force centrifuge. Ainsi des incursions de Schilgolch, figure
énigmatique, à la fois protecteur et fort intéressé aux gains. Un des maillons de cette galerie de
caractères croqués de main de maître par Decker.
©ONP/Éric Mahoudeau
Car chacun prend un relief tout
sauf caricatural. Là encore il faut
saluer l'homogénéité d'une distribution vraiment immergée dans une dramaturgie
quintessenciée. Familière du rôle pour
l'avoir chanté presque partout, Laura Aikin est ici une Lulu plus
sensuelle et féminine que femme fatale. Un ange sans doute, déchu certainement. La vocalité est souveraine. Wolfgang Schöne possède lui aussi comme peu le personnage du
Dr Schön/Jack, presque une seconde nature. Les prétendants ténors rivalisent d'acuité vocale et
dramatique : Kurt Streit, Alwa de grande allure, Marlin Miller,
peintre et nègre généreux. Pour ses
débuts dans la partie étrange de la Gräfin Geschwitz, Jennifer Larmore
en vient presque à tenir la vedette, de par sa totale identification avec le
drame intime de cette femme si attachée à Lulu qu'elle n'hésite pas à épouser
sa maladie pour se rapprocher d'elle. Dans
les multiples personnages de l'habilleuse de théâtre, du gymnaste et du groom,
Andrea Hill prouve un sûr talent. Deux basses, Scott Wilde, détonnant dresseur d'animaux et athlète
non moins vigoureux, et Victor von Halem, tour à tour directeur de
théâtre infatué et banquier frénétique, tiennent eux aussi le haut du pavé. Michael Schönwandt livre du texte
musical complexe de Berg une vision très liée, misant sur son aspect
chambriste. S'il ne cherche pas à
accuser les contrastes, il dévoile la souplesse du discours qu'encore une fois
l'Orchestre de l'Opéra restitue avec un rare brio. Et si un moment tel que le retour de Lulu après son passage en
prison manque son ultime émotion, c'est nul doute par volonté de discrétion et
de recherche d'objectivité. Un
spectacle dont la dramaturgie essentielle vous poursuit longtemps après la
dernière note.
Jean-Pierre Robert.
***
Ondes américaines...
La programmation 2011-12 de
Radio France, à travers ses divers cycles, rend hommage à la période américaine
de Stravinsky : on ne peut que s’en féliciter tant cela nous permet de
réentendre maints chefs-d’œuvre parfois sous-estimés, répartis entre les
saisons des deux orchestres et un week-end, au 104. De surcroît, l’intelligence de cette programmation rejaillit sur
la musique des États-Unis qui s’y trouve associée en un panorama objectif
traversant tout les courants esthétiques. Ainsi le pianiste Jay Gottlieb, infatigable explorateur et
merveilleux ciseleur de répertoires originaux, s’associait-il récemment à
Wilhem Latchoumia pour proposer, au 104, de délectables pièces pour
2 pianos de George Antheil et Aaron Copland aux côtés de pages
de Stravinsky (inspirateur de tant d’Américains). Ainsi l’Orchestre national de France vient-il de nous offrir deux
jeudis de suite (13 et 20 octobre 2011) des programmes enthousiasmants
dont on se désole qu’ils n’aient attiré qu’un public clairsemé ! Le manque de curiosité des mélomanes
parisiens demeure un motif de perplexité, de déception, pour ne pas dire de
colère. Dans le même temps, on constate
que Lyon, avec la riche saison très « XXe siècle »
concoctée à l’Opéra par Serge Dorny et Kazushi Ono, et la première
saison « américaine » du nouveau chef de son Orchestre national,
Leonard Slatkin, draine l’adhésion d’un public autrement plus
éveillé ! On rentra il y a peu
d’un instructif week-end Chostakovitch-Szymanowski (autour de l’imaginative production
du Nez) dans la capitale des
Gaules en ayant honte d’être parisienne...
Mais revenons à ces jeudis de
l’Orchestre national de France où les absents eurent bien tort : le 13, le
chef néerlandais Jaap van Zweden, baguette précise et sens aigu du travail
orchestral, offrait pourtant comme su-sucre au grand public une 4e Symphonie de Tchaïkovski
enflammée et dessinée dans ses moindres détails (ah, les accents subits et les
inflexions dynamiques du Scherzo,
pizzicato ostinato !). Mais le
versant moderne occupait la première partie : l’effectif réduit du Concerto « Dumbarton Oaks » de Stravinsky fit malheureusement
ressortir combien manque actuellement un travail au quotidien sur la matière
sonore des cordes, et aussi groupe par groupe (ce qui accuse cruellement la
différence avec la splendeur des timbres cultivée par Myung-Whun Chung au
Philharmonique). Puis la Sérénade (d’après Le Banquet de Platon), grand « classique » du
catalogue de Leonard Bernstein, nous révélait une talentueuse violoniste
néerlandaise, Simone Lamsma, encore inconnue sous nos cieux, laquelle
déploya une sonorité pure et des enlacements affettuosi dans cette partition optimiste.
Jaap van Zweden ©Bert Hulselmans
*
On gravissait un palier supplémentaire
avec le concert du 20 octobre où l’expérience communicative de David Zinman
empoignait les musiciens du National et les entraînait à se dépasser. Le chef new-yorkais est de ces meneurs
d’hommes qui impriment instantanément leur « patte » sur le son d’un
orchestre (ses cycles du répertoire allemand – Beethoven, Schumann,
Richard Strauss – à la Tonhalle de Zürich restent dans nos mémoires). Que nos autorités ne savent-elles attacher au
National les baguettes capables de le magnifier : Marc Albrecht la
saison passée, David Zinman cet automne ! Ainsi dirigé, son potentiel éclate quand d’autres occurrences ne
font ressortir qu’irrégularités et négligences. La Symphonie en trois
mouvements de Stravinsky atteignait des couleurs de bronze autant que des
luminosités tranchantes. La copieuse
partie américaine du programme balayait des tendances antagonistes à travers
trois œuvres que l’on peut retrouver au sein de la discographie du Maestro avec
le Baltimore Symphony Orchestra (Argo et Decca) : dans les volets extrêmes
de Three Places in New England de Charles Ives, David Zinman traitait les cordes avec des
atmosphères soyeuses dignes des pages les plus chatoyantes du répertoire
symphonique. Le Purple (« Pourpre ») de Michael Torke, pièce
répétitive heureusement brève, virait au vermillon le plus éclatant. Entre le joyeux anarchisme de Ives et le
minimalisme coloré de Torke s’insérait le visage néo-romantique de Samuel Barber. Radio France semble être saisie de
frénésie barberienne envers le Concerto
pour violon op. 14 : probablement fut-il négligé pendant des
années puis soudain, on l’entendit le 1er avril dernier par
Nemanja Radulovic (né en 1985) avec l’Orchestre philharmonique sous la
direction de Steuart Bedford et ce 20 octobre par Lisa Batiashvili (née en
1979) avec le National et David Zinman (la concertation d’un bureau à l’autre
du 6e étage existe-t-elle dans le Palais Gruyère ?). Les uns préféreront le côté rhapsode
improvisateur du Serbe, les autres la plénitude et la pensée construite de la
Géorgienne, toujours est-il que ce conjoint intérêt des jeunes virtuoses venus
de l’est apparaît porteur d’espérance quant à l’abolition des frontières. Ne
boudons pas le plaisir d’avoir entendu deux radieuses interprétations de ce Concerto en sept mois, au cas où une
nouvelle traversée du désert adviendrait !
David Zinman ©DR
...et vent de sable
argentin
Mais n’oublions pas l’Amérique
du Sud : le Festival d’Île-de-France nous conviait, le 6 octobre, à une
création mondiale, La Rosa... de
Martin Matalon qui marque le retour du compositeur argentin à son poète de
prédilection, Jorge Luis Borges. Œuvre merveilleusement indéfinissable, associant tous les vecteurs
pour convoyer l’émotion poétique : déclamation parlée, avec le comédien
Rodolfo De Souza, chant avec la mezzo-soprano Isabel Soccoja – partenaires attachants évoluant dans la mise
en scène discrète de Diana Teocharidis –, sons réels d’un effectif
original d’une dizaine d’instrumentistes (l’excellent Ensemble Ars Nova de
Philippe Nahon), traitement électronique (réalisé grâce à La Muse en circuit) au raffinement
humain tel que Martin Matalon sait si bien le concevoir. On se laissait ensorceler par des fragments
littéraires (malheureusement traduits avec décalage par le surtitrage) dont la
résonance intime nous atteignait grâce au prolongement imaginatif et spontané
qu’en délivrait une musique toujours impalpablement allusive, jamais
envahissante. L’arrière-plan
philosophique des réflexions ainsi serties nous renvoyait finalement à des
thématiques antérieures de l’œuvre de Matalon, car il s’agit bien, dans les
bribes poétiques comme dans la transformation en temps réel du son, de Dos formas del tiempo (titre d’une pièce
pour piano de Matalon écrite en 2000), et de Formas de arena (une pièce pour flûte, harpe & alto de 2001),
ce que le clin d’œil d’une cascade de sable depuis les cintres venait confirmer
à la fin du présent spectacle. Un
onirisme par fines touches au fil d’une œuvre longue occupant d’un seul tenant
toute la soirée, le sentiment d’un voyage intérieur jamais résolu, un kaléidoscope
de couleurs subtiles en constantes mutations : l’enchantement naît de
l’adhésion profonde du compositeur à des valeurs sensibles que sa musique
intègre avec un bonheur sans cesse renouvelé.
Martin Matalon ©Patricia Dietzi
Sylviane Falcinelli.
***
À l'Opéra de Lyon, Le Nez se dévergonde
Dimitri Chostakovitch : Le
Nez. Opéra en trois actes et un
épilogue. Livret du compositeur,
d’Alexandre Preis, Gueorgui Ionine & Evgueni Zamiatine. Vladimir
Samsonov, Alexandre Kravets, Andrey Popov, Vladimir Ognovenko, Claudia Waite,
Vasily Efimov, Yuri Kissin, Gennady Bezzubenkov, Margarita Nekrasova, Tehmine
Yeghiazaryan. Orchestre et Chœurs de
l'Opéra de Lyon, dir. Kazushi Ono. Mise en scène : William Kentridge.
©Opéra
de Lyon/Stofleth
Chostakovitch a puisé le sujet
de son premier opéra chez Nicolas Gogol, dans Nos, nouvelle
satirique tirée du recueil des Nouvelles pétersbourgeoises. Il l'a enrichie d'autres textes du poète pour
illustrer les aventures fantastiques et improbables du nez du major Platon
Kouzmitch Kovaliov. Au fil de
trois actes et dix tableaux on verra comment le pauvre homme qui perd son nez
après être passé chez le barbier, va se mettre à la recherche de cette protubérance
essentielle (acte I), puis mener une quête de plus en plus désespérée de
l'appendice devenu lui-même incontrôlable (acte II) avant que ledit
attribut, lynché en règle par une foule gagnée par le délire de la rumeur, ne
soit arrêté et retrouve son légitime propriétaire pour reprendre sa juste
place. Un tour de force que cette suite
de scènes reliées les unes aux autres par des intermèdes selon le principe du
montage cinématographique ! Créé en 1930, l'opéra déchaînera les passions. On mesure combien sa modernité a dû
frapper les esprits. Il n'a pas perdu
une once de son acuité. La caricature
de la société bourgeoise à la Daumier rejoint la fresque expressionniste
d'Eisenstein. Quelque 80 personnages,
plus ou moins développés, se partagent cette satire féroce. « Pris séparément, les gens n'ont pas
l'air trop méchants ; ils sont simplement bizarres. Mais lorsqu'ils sont tous réunis, c'est une
meute capable de venir à bout de n'importe quoi » dira Chostakovitch dans
ses Mémoires. Avec une étonnante lucidité il saisit comment
cette improbable histoire évolue entre dérision et compassion. On reste malgré tout ému par l'aventure d'un
homme « à qui cela peut bien arriver vraiment », morale effrayante
aussi bien que malicieuse. Comment
représenter ce qui a priori paraît peu représentable ? William Kentridge le fait avec un rare
flair, s'adonnant à l'illustration des décalages théâtraux qui traversent les
scènes et s'étendent bien au-delà, durant les intermèdes. Sa patte ne vous lâche pas un instant. Il joue de plusieurs registres et de divers
médiums : la vidéo projetant des images façon bande dessinée
illustrative, l'incrustation de délicieuses scénettes çà et là sur le plateau. Une précision d'horloger dans la direction
d'acteurs permet de passer d'un registre à l'autre, du comique au poétique, du
littéral à l'imaginaire le plus débridé, quasi allégorique. C'est une course permanente, une fuite
d'êtres traqués malgré eux. Et le temps
de l'image rencontre celui de la musique comme d'évidence. La dramaturgie pourtant chargée de signifiants,
devient d'une légèreté prodigieuse grâce au galbe svelte du dessin. Les morceaux d'anthologie foisonnent. Ainsi de ce Nez encombrant enveloppé dans du
papier journal qui se balade en ville en sautillant ou, marionnette, se
balançant nonchalamment tandis que le
pauvre major se lamente et émet cette remarque existentielle : « Sans
son nez, un homme n'est rien ». L'irrévérencieux
le dispute au tragique, le fragile à l'hilarant. Comme Chostakovitch épouse Gogol, Kentridge fait sien, par la métaphore,
l'insolite d'un réel irréel sans jamais forcer le trait.
©Opéra
de Lyon/Stofleth
L'interprétation est d'une rare
perfection. Une brochette de chanteurs
sachant manier à l'envi l'hyperbole russe qu'ils connaissent bien, donne vie au
jeu expressionniste et au discours musical basé sur le récitatif exacerbé,
parsemé à l'occasion d'interjections et autres onomatopées. Ainsi du major Kovaliov, Vladimir Samsonov,
type même du petit fonctionnaire étriqué, pusillanime mais touchant dans sa
quête maladroite du nez perdu. La
vocalise qui fonde son discours est défendue avec panache. Du Nez devenu personnage, Alexandre Kravets,
formidable ténor de composition, se joue de la tessiture terriblement tendue,
exigeant un port de voix stable dans l'extrême aigu. Dans la scène de la cathédrale de Kazan, le metteur en scène aura
l'idée de l'incarner en bedeau tout de componction. Il sera encore un sergent de police veule, hystérique et
inquiétant tel le Mime de Siegfried. Des basses aussi sonores que bouffonnes, les Bezzubenkov, Ognovenko,
forgées à l'école du Théâtre Mariinsky, chez Valery Gergiev, tracent
les portraits du barbier peu scrupuleux, du docteur intéressé plus par l'argent
que par le réconfort de ses malades. Les
dames sont tout aussi prolixes. Parmi
ses diverses métamorphoses, Claudia Waite se joue avec aplomb d'un
physique enrobé et d'un timbre grasseyant pour camper une faconde marchande
ayant plus à offrir que ses bretzels. La
scène où elle est courtisée par une meute de policiers déchaînés préfigure
celle du viol de Lady Macbeth de Mzensk. Kazushi Ono et l'Orchestre de l'Opéra de Lyon s'immergent
sans façon dans la verve décapante de la musique, ses incroyables innovations,
tel l'intermède entre les scènes 1 et 2 confié aux seules percussions. Et que dire des combinaisons instrumentales
inédites confinant à la loufoquerie et du recours à des instruments
inaccoutumés tels que le célesta ou la balalaïka ! Malgré la
complexité du langage, souvent en rupture avec la tonalité, la transparence est
là. Cette exécution magistrale conserve
à la musique son potentiel de modernité, sa charge émotionnelle, sa faconde insolente,
son élan irrépressible.
À Caen, William Christie exhume La Didone.
Francesco CAVALLI : La
Didone. Opéra en un prologue et
trois actes. Livret de Francesco
Busenello. Kresimir Spicer, Anna
Bonitatibus, Claire Debono, Xavier Sabata, Maria Streijffert, Terry Wey,
Katherine Watson, Victor Torres, Valerio Contaldo, Mathias Vidal. Les Arts Florissants, dir. William Christie. Mise en scène : Clément Hervieu-Léger.
Si Monteverdi est considéré
comme l'inventeur de l'opéra, c'est à Cavalli que l’on doit d'en avoir assuré
la pérennité. Fort prolixe, Cavalli
(1602-1676), à partir de 1639, n’écrira pas moins de 42 opéras. La Didone (1641) en est le
deuxième. Il doit pour beaucoup son
succès au livret de Francesco Busenello qui prêta aussi sa plume à
Monteverdi pour Le Couronnement de Poppée. Le texte est d'une vraie richesse littéraire,
à en juger par la noblesse du style et des associations de mots d'une beauté
étrange. À cette époque, en effet,
l'opéra reste très proche du théâtre parlé. Dans le fond tragique du parcours des deux héros, on trouve aussi
des personnages comiques. La
théâtralité du livret a, nul doute, inspiré l'auteur de cette production,
Clément Hervieu-Léger, lui-même acteur, pensionnaire de la Comédie-Française. Il signe là sa première mise en scène et un
coup de maître. Le tragique destin de
Didon, si ramassé chez Purcell, développé à outrance par Berlioz, est conçue
par Cavalli de manière pragmatique. C'est
en revenant aux sources de Virgile que sont contés les amours contrariés de la
reine de Carthage. Énée est pourtant au
centre de l'action. Le régisseur y voit
« l'odyssée d'un héros qui ne sait pas où se situe son héroïsme ». Didon ne meurt pas. Dans un lieto fine inattendu,
elle décide d'épouser le pressant roi Iarbas. « Si l'on peut mourir par amour, peut-on mourir de ne pas
aimer ? » Car c'est contre
son cœur que Didon agit de la sorte : « elle meurt sans mourir ». La direction d'acteurs délaisse ce qui est
emphatique au profit d'un naturel constant où le temps théâtral épouse au plus
près le temps musical. Formé à l'école
de Patrice Chéreau dont il fut l'assistant pour son Cosí d'Aix et le Tristan de La Scala, il sait qu'il faut « raconter une histoire sans
jamais trahir l'esprit du texte ». Une sentence que bien de ses confrères devraient méditer. Dans ce qui est une succession de monologues
et de rencontres pas toujours amènes, la dramaturgie s'attache à l'essentiel : aucun pathos, une
gestuelle spectrale, des groupements signifiants. Tout dans le choix de la couleur des étoffes, de la décoration
sobre, des éclairages poétiques contribue à la beauté de l'environnement
dramatique. Quelques symboles aussi,
tel ce grand cerf mort, dans les entrailles duquel Didon plongera la main à
l'heure du choix final.
Pour leur première incursion
dans l'œuvre de Cavalli, William Christie et ses Arts Florissants offrent,
une fois de plus, la quintessence de leur art. La musique y est sans doute statique mais combien habitée dans
cette exécution. Basée sur le mode du
lamento, faite de longs passages enchaînant diverses façons de chanter, mêlant
de substantiels récitatifs à l'arioso, voire à l'aria, elle découvre dans son
aspect instrumental des accents expressifs insoupçonnés et une vraie densité
d'émotion. La formation instrumentale
est réduite où théorbes et cornets enrichissent le discours des cordes. Tous les interprètes vocaux vivent une prise
de rôle. Devant pareil résultat, on
mesure le formidable travail accompli par Christie. Les plus aguerris dans le genre, Kresimir Spicer,
bouleversant Énée, aux nuances infinitésimales, Anna Bonitatibus,
majestueuse Didon, voix grave veloutée d'une simplicité impressionnante,
rencontrent les nouveaux venus du Jardin des voix, cher au cœur du chef d'orchestre :
Xavier Sabata, merveilleux contre-ténor prêtant à l'amant infortuné Iarbas
des accents déchirants, Claire Debono, délicate Vénus, Mathias Vidal,
facétieux Mercure. Sans parler de tous
les autres... Le naturel de leur
prestation, la pureté stylistique de leur chant confèrent à ce spectacle une
aura de bonheur théâtral rare. Il sera
donné au Théâtre des Champs-Élysées au printemps 2012 (les 12, 14, 16, 18
et 20 avril). Une occasion de découvrir
un chef-d'œuvre !
Boulez dirige Boulez à Pleyel
©A. Warme-Janville
Devant une salle comble, Pierre
Boulez a dirigé Pli selon Pli, sous-titré « Portrait de Mallarmé
pour soprano et orchestre ». Composé
entre 1957 et 1962 puis révisé en certaines de ses parties en 1984 et 1989,
cette pièce interroge la poétique mallarméenne. Le titre en est emprunté à un poème Remémoration d'amis belges et ces mots à propos de Bruges et de ses
murs enveloppés de brume : « Je sens que se dévêt pli selon pli la
pierre veuve ». Mais le texte est puisé
au Livre publié par Stéphane Mallarmé
en 1877, sa « seule tâche spirituelle » dira-t-il. Ce travail littéraire singulier, conçu comme
une œuvre d'art totale, s'articule en « feuillets », autant de
poèmes denses et elliptiques. Cette
bizarre musique des mots, la rareté de la langue du poète, l'obsession de
celui-ci par la pureté formelle, Boulez les fait siennes. À la dislocation des phrases, des césures et
des ponctuations d'un poète qui repense la syntaxe, correspondent les mêmes
phénomènes de scission et d'éclatement du texte musical en des formes libres et
improvisées. Car, selon le musicien,
« l'ésotérisme qu'on a presque toujours lié au nom de Mallarmé n'est autre
chose que cette adéquation parfaite du langage à la pensée, n'admettant aucune
déperdition d'énergie ». La
transposition, la transmutation plutôt, vise non pas la compréhension littérale
immédiate du texte poétique mais une approche abstraite qui « suppose acquis
par la lecture le sens direct du poème ». La chose n'est sans doute pas évidente pour l'auditeur de concert,
souvent peu ou pas assez préparé. Cinq
parties la composent. Une sorte de
prélude, « Don » et un postlude « Tombeau », pour
l'essentiel instrumentaux, enchâssent trois « improvisations » où la
voix est mêlée intimement à la texture orchestrale. Cette dernière est singulière puisque, outre les cordes, on y
rencontre 4 harpes, une mandoline et un contingent sérieux de percussions
dont plusieurs xylophones et des cloches. Mais elle agit comme une formation restreinte. Car, passée l'explosion initiale tel un
big-bang et l'éclatement ultime, le climat sonore reste mezza voce le plus
souvent, quasi chambriste dans bien des cas, mettant en valeur un agrégat
de petites cellules motiviques. C'est
aussi un exercice sur le silence. La
voix soliste est traitée de manière tout aussi originale, du soupir aux larges
inflexions, voire à l'interjection explosive (par exemple, lors du Tombeau final sur les mots : « Un peu profond ruisseau calomnié la
mort »). L'écriture pour la
soprano requiert une tessiture tendue. Barbara Hannigan maîtrise assurément le dire boulézien et la
prouesse est certaine, même si l’on ne saisit pas grand chose du texte. La
maître est, bien sûr, chez lui à la tête d'une formation d'élite :
l'Académie du Festival de Lucerne et l'Ensemble Intercontemporain. Une immense ovation saluera cette exécution,
sans doute de référence par la précision légendaire du chef.
Week-end Schubert/Korngold à Pleyel
©Julien Mignot
Deux jeunes compositeurs adoptés
par Vienne en 1797, puis 1897, y auront connu des sorts différents. L'un ne se verra accorder de son vivant qu'un
succès modéré, l'autre n'attendra pas longtemps pour se voir consacrer comme un
« nouveau Mozart ». Mêler au
sein d'un même concert, de musique de chambre qui plus est, morceaux fort
connus et pièces qui ne le sont qu'à peine peut passer pour téméraire. Et pourtant la foule était au rendez-vous. Preuve que l'idée n'était pas
illégitime ! Bonheur de ces temps
qui voit le public affluer, apprécier et manifester sa joie en telle occasion,
quand bien même la célébrité des instigateurs, les frères Capuçon, y est pour
quelque chose. Mais celle-ci ne se
mesure-t-elle pas à leur immense talent ? La première séance vespérale d'une série de trois proposait le Mouvement de trio pour piano de
Schubert, vraisemblablement contemporain du Premier
Trio op. 99, paré d'une mélancolique beauté dans sa partie lente. Le Trio op. 100
est d'une autre envergure. Il est, tout
comme son double, l'op. 99, un fleuron de sa production. L'inspiration y est jaillissante à chaque
mesure : thème engageant du premier mouvement, profondeur somptueuse de
l'andante, légèreté du scherzando et de
son trio sautillant. L'interprétation
des frères Capuçon et de Frank Braley rejoint les plus grandes. Au milieu, la Sonate pour piano & violon de Korngold - ou plutôt pour piano
et violon tant le clavier se tire la part du lion - a quelque chose de
straussien dans l'harmonie. Celui-ci se
disait d'ailleurs fort impressionné par la maestria de son jeune confrère. Dotée de quatre mouvements, la pièce alterne
l'élan et la tension irrépressible de sorte de chevauchées fantastiques, le
violon devant se frayer un dur chemin dans une marée de notes martelées, mais
aussi le plus beau des cantabile. Chose curieuse, les deux premiers mouvements chutent sur une note
filée ppp du violon. Le
modernisme est étonnant pour l'époque (1913). Le dernier mot revient au violoniste qui se voir offrir une longue
courbe extatique. L'exécution de Renaud
Capuçon et de Jérôme Ducros est grandiose.
©Julien Mignot
Le concert du soir débutait par
la Suite pour deux violons, violoncelle
& piano (main gauche) op. 23. Une des compositions écrites par Korngold à l'attention du
pianiste Paul Wittgenstein qui perdit l'usage de la main droite durant la
Première Guerre mondiale. Il sera dédicataire de plusieurs concertos pour
cette seule main, de Ravel en particulier. Là encore, quelle maîtrise et quelle exécution ! La composition instrumentale est
inhabituelle. L'agencement des séquences ne l'est pas moins. C'est le piano qui se voit l'honneur d'ouvrir
le bal en une sorte de vaste cadence. Il
fera ensuite souvent équipe avec le celliste. Tension sonore quasi paroxystique, humour au deuxième degré
(un esprit de valse, en lambeaux, qui va s'évanouissant), sonorités grotesques
du mouvement pareillement titré, sorte de course poursuite à l'abîme aux traits
arrachés, mais aussi lyrisme éperdu (Lied) et joie communicative d'un rondo
final subissant mille transformations - tels sont quelques-uns des attraits
d'une pièce décidément peu ordinaire. S'agissant du Quintette dit La Truite, il est vain de
se lancer dans quelque description. Mais le propre des grandes interprétations est d'en renouveler
l'intérêt. Les Capuçon,
Gérard Caussé, Alina Ibragimova, Frank Braley et le
contrebassiste du Berliner Phil, Alois Posch, montrent un tel plaisir de jouer que le miracle se produit à
nouveau : franche émotion, passion contrôlée, fine poésie nimbent leur
jeu. Au sein du concert, se nichait un
mini-récital de Lieder de la belle chanteuse viennoise Angela Kirschlager
accompagnée par Ducros. Elle offrait un
bouquet de Lieder de Schubert parmi les plus rabâchés, dont La Truite et Le Roi des Aulnes. Mais, là
encore, pour des interprétations à faire pleurer, tant la tension y paraît
presque insoutenable. Un vrai talent de
diseuse. Les Cinq Lieder op. 38 de Korngold (1848), qui réutilise ses
musiques de film créées pour les studios d'Hollywood, sont d'une inspiration
sensible. Ce long concert acclamé par
le public ne laisse pas de doute quant à la vitalité de la musique de chambre.
Jean-Pierre Robert.
D’un Faust à l’autre, Salle Pleyel. Orchestre
philharmonique et Chœur d’hommes de Radio France, dir. Eliahu Inbal. Isabelle Faust (violon). Steve Davislim (ténor).
Un programme original associant
deux œuvres peu données dans les salles de concert. Le Concerto pour violon & orchestre de Robert Schumann composé en
1853, dédié au violoniste Joseph Joachim, œuvre mal aimée qui connut des
revers de fortune jusqu’à sa création en 1937, date à laquelle elle apparaît
dans le répertoire violonistique, défendue, alors, par les plus grands, tels
Menuhin, Szeryng et Kremer. Isabelle Faust en donna, ici, une vision intelligente, claire
et engagée associant, tour à tour, la rudesse et la majesté tragique du premier
mouvement, le lyrisme du deuxième et la virtuosité du troisième. Une belle
prestation.
©Felix
Broede
En seconde partie, le
« Philhar » proposait la Faust-Symphonie de Franz Liszt. Là encore, une
œuvre magnifique et moderne par sa structure, emblématique du XIXe siècle,
années marquées par l’omniprésence du mythe de Faust en musique (Symphonie fantastique et Damnation de Faust de Berlioz, Scènes de Faust de Schumann, opéra Faust de Spohr), comme en littérature
(Marlowe, Goethe et Nerval). La Faust-Symphonie, en trois portraits
psychologiques fut composée en 1854, complétée par le chœur final en 1857,
créée la même année à Weimar sous la direction du compositeur, dédiée à
Hector Berlioz. Sa structure en
trois mouvements nous montre une
métamorphose des différents thèmes, tour à tour ambigus (Faust), amoureux
(Marguerite) ou diaboliques (Méphistophélès). Eliahu Inbal en donna une lecture particulièrement claire, d’une
grande précision, articulant parfaitement les différents plans musicaux,
évitant toute confusion pour mettre en avant la richesse des timbres
orchestraux, favorisant les nombreux dialogues entre bois & vents ou, plus
surprenant, entre cor & harpe. Une vision extravertie au premier mouvement,
intériorisée et amoureuse au deuxième, grinçante au troisième, avant de conclure par le chœur final dans une quête
rédemptrice et un chant d’une sublime beauté. Une œuvre initiatique et une
interprétation juste, pour une très belle soirée.
Patrice Imbaud.
***
FORMATION MUSICALE
Divers auteurs : Tour de chants. Livre de mélodies recueillies par Jean-Clément Jollet.
Volume 5, cycle 2 – 1re année. 1 CD. Billaudot : G 8630 B.
L’originalité de ce volume ne
réside pas seulement dans le choix aussi éclectique que judicieux des textes
musicaux (Schubert et Fauré y côtoient des traditionnels aussi bien que
Brassens et François Vellard), mais aussi dans les mises en voix qui
précèdent les chants. L’ensemble des accompagnements aussi bien des mélodies
que des mises en voix se retrouvent sur le CD, interprétés avec le talent qu’on
lui connait par le pianiste Philippe Lefèvre. Cet ouvrage est à vivement
recommander.
Marguerite LABROUSSE & Benoît MENUT : Permis de chanter. Volume 1. 1 CD. Lemoine :
28860 HL.
Bien qu’il s’agisse du volume 1,
ce n’est nullement un volume pour débutants. On pourrait le situer à la fin du
premier cycle ou au début du second. Le
choix des textes proposés est aussi varié qu’intéressant. De Machaut à…
Benoît Menut, en passant par Gounod, Grieg, Saint-Saëns, Copland, nous
sommes entrainés dans un bien agréable voyage. Signalons au passage que la Danse macabre de Saint-Saëns figure
sur le CD également dans sa version orchestrale, en plus de l’ensemble des
« play-back », fort agréablement interprétés, souvent dans plusieurs
versions.
Freddy ROUX : Rhythm’n Jazz. Rythmes à lire et à jouer pour instrumentistes et chanteurs.
Volume 2. Billaudot :
G 8669 B.
Cette étude en quatre volumes
progressifs aborde l’étude du rythme et du phrasé jazz. Si elle s’adresse aux
débutants en jazz, elle suppose néanmoins quatre années de formation musicale
pour en tirer vraiment profit. Vocalistes comme instrumentistes y trouveront de quoi s’initier aux
différents styles et s’y perfectionner. On notera que l’auteur rappelle une vérité trop souvent
oubliée : c’est seulement à partir de l’écoute attentive du patrimoine du
jazz que son rythme peut s’acquérir.
Joëlle ZARCO : L’oreille harmonique. Harmonie, improvisation, composition. Volume 3 :
Composition. Lemoine : 28938HL.
Supposant les acquis des deux
précédents, ce volume en deux parties s’efforce de conduire à la composition en
orientant le travail d’abord vers la construction de la phrase mélodique, la
structure harmonique, les modulations puis, dans un deuxième temps, en
présentant des modèles de « formats » (jingle, chanson française,
musique à danser…). On ne répètera jamais assez que sans une audition
intérieure solide et précise, rien ne sera possible en ce domaine. Une petite taquinerie : dans le
deuxième exemple, pourquoi être allé chercher dans Stravinsky ce que lui-même
avait, sans le savoir, emprunté à Dranem et surtout à Émile Spencer (Elle avait une jambe de bois…) ?
CHANT
Divers auteurs : Vocales d’aujourd’hui. Édition conçue, préparée et coordonnée par Jean-Christophe
Dijoux & Paolo Zelda. 1 CD. Billaudot : G 8848 B.
Voici un ouvrage fondamental
pour permettre aux élèves chanteurs (et même aux chanteurs, tout simplement)
d’aborder sans peur le répertoire contemporain. Outre présentation et explication, chaque œuvre est précédée
d’une copieuse notice qui permet à la fois de la comprendre et de
l’interpréter. Le CD contient à la fois l’enregistrement intégral des œuvres et
le play-back. Tout cela permettra de découvrir combien il n’y a pas une musique
contemporaine mais des styles et des compositeurs aussi divers
qu’Isabelle Aboulker, Guillaume Connesson, Betsy Jolas… Ce
panorama, remarquablement interprété sur le CD, devrait faire cesser bien des
réticences en ce qui concerne les musiques d’aujourd’hui.
François COUPERIN : Trois leçons de Ténèbres à une & deux voix pour le
Mercredi saint. Réalisation de la
basse continue par Odile Pierre. Delatour : DLT0475.
Est-il utile de rappeler qu’il
s’agit de lectures (chantées) des Lamentations,
texte biblique autrefois attribué à Jérémie qui figurent dans ces très beaux
offices appelés Ténèbres qui scandent
la Semaine sainte ? Leur
chant en grégorien est poignant. Il se trouve en écho dans les vocalises des
lettres hébraïques qui introduisent les différents versets. À partir du XVIe siècle,
ces « leçons » donnent lieu à de nombreuses compositions. C’est avec
grand plaisir qu’on trouve ici celles de Couperin avec une réalisation d’un
goût parfait.
PIANO
Pianissimo, volume 2. Morceaux originaux choisis & doigtés par Béatrice Quoniam, Beata
Suranyi et Marie-Josée Saladin de Nuglar. Lemoine : 28787 H.L.
Voilà un louable effort pour
renouveler le répertoire du jeune pianiste. Du XVIIIe au XXIe siècle,
ces soixante courtes pièces devraient permettre d’ouvrir les oreilles des
élèves à des sonorités pas toutes « classiques », même si le
répertoire reste, dans ce domaine, bien équilibré. L’entreprise n’était pas
facile, elle nous semble réussie.
Stéphane DELPLACE : Fugue selon Fugue. Delatour : DLT1872.
Quatorze fugues en fa majeur sur un thème unique et ses
transformations : il fallait oser. Renvoyant explicitement à l’Art de la Fugue, l’auteur, qui explore
systématiquement le système tonal en le poussant dans ses derniers
retranchements nous offre ici une œuvre passionnante dont on aura du mal à
épuiser la richesse. À mettre sur son
pupitre, sans modération !
Alain A. ABBOTT : 24 petits préludes dans tous les tons pour piano. Delatour : DLT1086.
Ces préludes destinés aux
pianistes de petit niveau se veulent à la fois pédagogiques mais n’oublient pas
de développer, outre l’habileté technique, le sens musical des élèves. Ils se
réfèrent bien entendu à la longue lignée des prédécesseurs de l’auteur dans cet
exercice et, à leur niveau, ne déméritent pas.
Alain A. ABBOTT : Mes exercices pour piano. 4 volumes. Delatour :
DLT 1208, 1614, 1615 et 1616.
Le « Mes » est important : l’auteur n’a pas cherché à faire
une nouvelle méthode de piano mais à composer des exercices qu’il ne trouvait
nulle part et lui semblaient importants pour aborder telle ou telle œuvre.
Donc, il ne faut pas chercher de progression systématique. Ces études sont
courtes et permettent de varier le travail. Ajoutons que si certains doigtés peuvent paraître curieux, c’est que ces
études sont faites pour être transposées et exécutées dans tous les tons avec
les mêmes doigtés. C’était la pratique de Liszt qui « préconisait
l’absolue interchangeabilité des doigts ».
ORGUE
Claude BALBASTRE : Concerto en ré majeur. Trio à trois mains. Restitution pour l’orgue par Marie-Agnès
Grall-Menet. 1 CD. Delatour : DLT1279
Précisons tout de suite que ces
deux œuvres ont bien été écrites originellement pour orgue. Marie-Agnès
Grall-Menet suppose, vraisemblablement à juste titre, que si le trio a été
écrit « à trois mains », c’est à cause de l’impossibilité de jouer la
troisième partie sur un petit pédalier à la française entièrement en
tirasse. Voilà pourquoi elle nous en
offre cette version pour un seul organiste, mais avec pédalier complet…
Ces deux pièces inédites sont
tirées du manuscrit original qui se trouve à la Bibliothèque municipale de
Versailles. On lira avec profit les
notices concernant Claude Balbastre ainsi que chacune des deux œuvres
ainsi restituées. L’enregistrement intégral a été fait par M.-A. Grall-Menet
elle-même, aux orgues de Saint-Nicolas-du-Chardonnet dont elle est titulaire.
GUITARE
Yves CARLIN : Souvenirs nostalgiques. Niveau élémentaire. Lafitan : P.L.2088.
L’auteur présente avec humour
cette pièce à 4, 5/4 et quartolet… qu’un subtil rubato permettra
d’assouplir ! Légère et fraîche, elle ne contient aucune indication de
nuances pour laisser toute liberté à l’interprète.
Jean-Émile COLLON : Vignette. Niveau élémentaire. Lafitan : P.L.2275.
En forme de valse un peu
mélancolique, cette très courte pièce d’une grande simplicité d’écriture dégage
un charme un peu désuet et nonchalant de bon aloi.
Alain VÉRITÉ : Amandines. 26
petites études progressives. Débutant. Delatour :
DLT1810.
Conçues comme complémentaires
aux méthodes de guitare pour débutants, ces petites études aux noms évocateurs
et au style varié permettent de donner aux jeunes guitaristes de véritables
œuvres miniatures, tout en développant en eux les incontournables acquis
techniques.
Johann Sebastian BACH : 15 Inventions à deux voix. Transcription pour guitare de Didier Renouvin. Delatour : DLT1874.
Comment ne pas se réjouir que
les guitaristes puissent, à leur tour, posséder ce qui, pour les pianistes,
constitue une étape essentielle de leur apprentissage à la fois technique et
musical ? Le travail de transcription mérite tous les éloges :
respect, chaque fois que faire se peut, des tonalités originales (indiquées
pour les autres), indication pièce par pièce de l’interprétation de chaque
ornement dans l’esprit du clavecin. Bien sûr, les difficultés sont variables
suivant les pièces, mais il en est de même au clavier. Quoiqu’il en soit, cette
transcription devrait devenir un passage obligé pour les guitaristes.
HAUTBOIS
Claude-Henry JOUBERT : Sérénade orientale pour hautbois avec accompagnement de piano. Niveau fin du 1er cycle. Lafitan : P.L.2130.
La série « Sérénade »
présente une écriture contemporaine avec des essais d’improvisation simple. La Sérénade orientale de Claude-Henry
Joubert répond tout à fait à ce programme avec, en prime, l’humour dévastateur
bien connu du compositeur. Si les
jeunes instrumentistes jouent le jeu, ils devraient y prendre beaucoup de
plaisir.
CLARINETTE
Éric FISCHER : Papiers. 12
trios pour clarinette. Dhalmann (www.dhalmann.fr) : FD0240.
Ces douze trios, considérés
comme faciles, n’en font pas moins appel, au fil des pages, aux techniques
contemporaines. Si la technique n’en est pas trop ardue, les frottements divers
mettront l’oreille des exécutants à l’épreuve : la justesse n’est jamais
donnée !
Claude-Henry JOUBERT : Sérénade marine pour clarinette sib avec
accompagnement de piano. Niveau fin du
1er cycle. Lafitan : P.L.2125.
La collection
« Sérénade » propose une écriture contemporaine avec des essais
d’improvisation simple et avec accompagnement de piano simple écrit sur une
portée. Claude-Henry Joubert en a écrit treize, pour divers instruments. Bien
sûr, les consignes d’interprétation sont détaillées, et l’humour du compositeur
à la hauteur de la situation !
Hervé POULIQUEN : Suspense pour
clarinette sib & piano. Niveau Préparatoire. Lafitan :
P.L.2149.
Le titre indique le caractère un
peu inquiétant et même obsédant de cette pièce qui, partie du grave, culmine
dans l’aigu des deux instruments. Clarinette & piano dialoguent et se
répondent à l’envi.
Jacky THÉROND : Valse tranquille pour clarinette sib &
piano. Niveau débutant. Lafitan :
P.L.2184.
Voici une bien charmante valse
un peu mélancolique qui permettra aux interprètes de s’initier aux joies de la
musique d’ensemble.
Jean-Michel TROTOUX : Raconte-moi une histoire ! pour clarinette solo. Niveau supérieur. Lafitan : P.L.2060.
Voilà une histoire certes
passionnante, mais qui donnera bien du fil à retordre à celui qui voudra la
raconter. Toutes les techniques
contemporaines de la clarinette sont ici présentes avec, en plus, des
onomatopées rythmées… Bref, cette
histoire demande un investissement total de l’interprète. Mais n’est-ce pas le
cas de toute musique ?
Jean-Paul HOLSTEIN : Sonate pour un ami pour clarinette sib &
piano. Delatour : DLT1007.
Écrite en trois mouvements,
cette sonate est dédiée au clarinettiste Jean-Louis Bergerard. Après une longue cadence de clarinette, le
premier mouvement expose deux thèmes, l’un mélodique, l’autre rythmique. Un second mouvement, lyrique, débouche sur
un final à la fois rapide et souple en forme de rondo. On y retrouve toutes les
qualités de ce compositeur, élève de Messiaen et de Jolivet, qui - tout en
ayant un langage très personnel - n’a point renié ses maîtres.
SAXOPHONE
Éric PIGEON : Blues 4 sax pour
quatuor de saxophones. Niveau 1er cycle.
Lafitan : P.L.2309.
Précisons tout de suite que
cette pièce, contrairement aux autres de la même collection, est écrite pour
quatre saxophones altos. Construite sur
l’harmonie d’une grille de blues, elle reprend un certain nombre des formes du
jazz comme le phrasé, la walking bass… : il faudra, pour la jouer
correctement, non seulement respecter strictement le phrasé indiqué, mais
surtout… écouter du jazz !
Jean-Louis PETIT : Pauv’ p’tit pour
saxophone alto mib & piano. Niveau préparatoire. Lafitan :
P.L.2073.
Élève de Messiaen, Markevitch et
Boulez, Jean-Louis Petit n’en néglige pas pour autant l’écriture pour les
jeunes. Et cette pièce aux allures de
tango devrait séduire les jeunes interprètes. Comme toujours dans cette collection, la partie de piano n’est pas d’une
difficulté telle qu’elle ne puisse être jouée par un élève. Ce Pauv’ p’tit devrait rencontrer un succès mérité.
André GUIGOU : Chromatica pour
saxophone alto mib & piano. Niveau préparatoire. Lafitan :
P.L.1962.
Deux parties contrastées
s’enchaînent, séparées par une cadence : une partie moderato qui met en
valeur la musicalité de l’interprète et une partie plus rythmée et plus
« chromatique », comme l’indique le titre de la pièce. Beaucoup de variété donc, et de charme dans
cette œuvre qui se termine brillamment en fanfare.
Jean-Jacques FLAMENT : À la manière de ? pour saxophone alto mib & piano. Niveau élémentaire. Lafitan : P.L.2000.
À chacun de trouver ce que cache
le titre. Mais cet À la manière de ? recèle bien des richesses et une grande
variété d’expression et de styles. Il y
a là matière, à la fois, à beaucoup de plaisir et à un travail de fond, tant
pour la sonorité que pour le rythme : les passages constants croche =
croche demandent un sens de la pulsation qui n’est pas acquis pour tous…
PERCUSSIONS
Daniel GOYONE : Mermaids pour
deux marimbas. Dhalmann : FD0271.
De difficulté moyenne, cette
pièce est une version raccourcie et adaptée pour percussion du thème original.
Thème construit à partir de permutations métriques empruntées à la musique
indienne.
Alain A. ABBOTT : Œuvres pour percussions. Delatour : DLT1085
Écrites essentiellement pour
vibraphone et certaines avec marimba, ces pièces faciles sont nombreuses et
variées. L’une d’elles requiert un accompagnement de piano. Toutes demandent
beaucoup de sensibilité et de délicatesse, même les plus rythmées. Ce sera une
mine pour les pédagogues.
ORCHESTRE
MENDELSSOHN-BARTHOLDY : Symphonie en la mineur « Écossaise » op. 56 (1842-1843). Bärenreiter Urtext :
BA 9093.
On sait qu’entre le voyage en
Écosse de 1829 et l’achèvement de 1842, Mendelssohn mûrit longuement cette
œuvre. Donnée pour la première fois en
mars 1842, la symphonie fut encore révisée pour le concert qu’il dirigea à
Londres en juin de la même année. Outre
les qualités qu’on connaît aux éditions Urtext de Bärenreiter, s’ajoute ici le
fait que, pour le premier et le dernier mouvement, nous sont données
intégralement les deux versions. On
lira avec passion la préface qui nous explique en détail les différentes phases
de composition de l’œuvre. Bien sûr,
l’ensemble du matériel d’orchestre est disponible.
Francis COITEUX : Florence et Florèle pour orchestre junior à vents ou/et cordes & percussions. Delatour : DLT188.
Sous-titré « Plaisanterie
musicale », ce divertissement comporte quatre parties aussi contrastées
que le sont, paraît-il, les dédicataires qui ont donné leur nom à la
pièce. De niveau moyen, il peut devenir
un « tube » pour nos orchestres de jeunes.
CHANT CHORAL
Pascal JUGY : Il pleure dans mon cœur pour chœur à 4 voix mixtes & piano. Poème de Paul Verlaine. Lafitan : P.L.2119.
Pascal Jugy, qui a travaillé à
l’Ircam mais aussi avec François Rauber, nous offre ici une musique qu’il
dit lui-même « de style néo-romantique » qui convient à merveille au
texte de Verlaine. Sans être facile, ce
chœur est abordable par toute chorale d’amateurs un peu experte. Beaucoup de charme s’en dégage, comme d’une
chanson populaire fredonnée à mi-voix.
Daniel Blackstone.
ORGUE
Bestiaire. Trois pièces pour grand-orgue. Le Chant du
Monde (31-33, rue Vandrezanne, 75013 Paris) : OR 4523. 27 p. 16 €.
Généralement, le répertoire organistique possède une finalité
liturgique mais, notamment au XXe siècle, des compositeurs — comme
A. Cellier et, plus proche de nous, J.-D. Pasquet — se plaisent aussi à
évoquer des paysages, des atmosphères ou des thèmes particuliers. C’est le cas de deux pièces de cette
publication au nouveau « look » accrocheur, bien présentée, avec
indications de registrations, claviers et nuances. Sous le titre Bestiaire,
elle regroupe : Bast (déesse
égyptienne à tête de chat) de François-Henri Houbart (°1952), redoutable par
des « coups de patte » à la pédale suivis de sextolets de
doubles croches, contrastant
avec La licorne de Pierre Cholley (1962-), page plus
calme et plus mystique, dédiée à son éditeur Hervé Désarbre. En revanche, La valse des colombes de Julien Bret (°1974), de caractère
plus léger, avec citation (en valeurs longues, à la partie médiane) du cantus
firmus Veni sancte Spiritus,
symbolisant l’Esprit Saint à l’instar de la colombe, se rattache à
l’objectif cultuel.
Guy MORANÇON : 13 Variations sur l’hymne « Veni
Creator ». Le Chant du Monde : OR 4789. 16 p. 13 €.
Guy Morançon (1927-), renouant avec la tradition liturgique, a
composé en 2010 ces 13 Variations.
D’entrée de jeu, la main droite (jeu de hautbois) énonce le thème grégorien
bien connu, en croches égales. Dans les
différentes Variations, il est
présenté en valeurs plus longues, avec une légère ornementation donnant lieu à
des triolets de croches (2e Variation),
devenant des dactyles (3e)
alors que, dans la 4e, le
thème est de nouveau présent à la partie supérieure harmonisé avec quelques
notes de passage. La 5e Variation est un
bicinium au rythme plus complexe, le thème y est plus trituré. Dans la 12e, sur un trille (ostinato)
de pédale, il apparaît en imitation aux claviers. Enfin, la dernière, fortississimo et dans un tempo agité, aboutit — après un rubato et un rallentando — à
l’accord conclusif à 8 voix. Judicieuse exploitation moderne d’un thème de Raban Maur (IXe siècle).
Édith Weber.
FLÛTE TRAVERSIÈRE
Scott JOPLIN (1868-1917) : The Chrysanthemum, arrangé pour flûte & piano par Cathrin Ambach. Schott (www.schott-music.com) :
ED 09878. 12 p.
Il s’agit ici de la joyeuse transcription
d’un célèbre ragtime. Conducteur +
partition de flûte.
Étienne GILBERT : Mosaïque, pour flûte & piano. Schott (www.schott-music.com) :
SF 1002. 28 p.
Cette pièce difficile - mais fort
poétique - du flûtiste belge Étienne Gilbert était imposée, en 1968, au
Koninklijke Conservatorium van Antwerpen.
Alexander GOEHR : Ariel, Sing, pour flûte alto solo. Schott (www.schott-music.com) :
ED 13308. 4 p.
Pièce variée, mais rythmiquement
difficile - d’une durée d’environ 4’.
Irmhild BEUTLER &
Sylvia Corinna ROSIN : Advent, Advent ! Breitkopf Pädagogik (www.breitkopf.com) : EB 8826.
Déjà parues dans des éditions pour
flûte à bec (EB 8762) & pour violon (EB 8827), ces 17 mélodies
pour le temps de Noël (en allemand), arrangées par Ulrike Philippi pour la
flûte traversière (sur 2, 3 ou 4 notes), feront la joie de tout flûtiste
débutant. Avec possible accompagnement par une seconde flûte, une guitare
ou un piano…
VIOLON
Pablo de SARASATE : Les plus belles pièces pour violon & piano. Schott (www.schott-music.com) :
ED 20933. 100 p.
Au sommaire : Malagueña, Habanera, Romanza andaluza, Jota navarra, Playera, Zapateado, Nocturne op. 9
n°2 de Chopin (transcription), Guitarre op. 45
n°2 de Moszkowski (transcription). Pour
violonistes aguerris.
Piotr Ilitch TCHAÏKOVSKI (1840-1893) : Concerto pour violon op. 35. Partition d’orchestre. Breitkopf Urtext
(www.breitkopf.com) : 15115. 25 x 32 cm, 106 p.
54 €.
Composé en quelque 20 jours
(mars 1878) - avec le concours, pour les phrasés solistes, de son ami le
violoniste Iosif Kotek – ce concerto permit à Tchaïkovski de sortir d’une
longue période dépressive, consécutive à la séparation d’avec son épouse,
Antonina Miliukova. La partition ne fut toutefois publiée qu’en 1888. Superbe édition Urtext, réalisée par le
musicologue Ernst Herttrich.
VIOLONCELLE
Gerhard MANTEL : La pratique des études,
vol. 1. Schott (www.schott-music.com) :
ED 20701. 104 p.
Présentant les bases de la
technique du violoncelle à l’aide d’études choisies, ce premier de trois volumes
couvre les aspects de l’orientation sur la touche & des changements de
position, du vibrato & des trilles aux changements de cordes &
doubles cordes. De moyenne
difficulté.
Gabriel KOEPPEN : Blues Time. Niveau : Intermédiaire.
Schott (www.schott-music.com) :
ED 21243. 8 p.
Trois pièces pour violoncelle
seul (jouables à la suite ou séparément) composent cette petite suite : Groovy Blues, Blues con variazioni, Busy Blues. Toute latitude d’improvisation étant laissée
à l’instrumentiste…
PIANO
Johann Sebastian BACH : Inventions. Alfred
Kreutz, éditeur. Schott (www.schott-music.com) :
ED 9002. 40 p.
Doigtés & ornements de ce
célèbre recueil ont été attentivement révisés par Alfred Kreutz. Il comporte, en outre, une variante rythmique
de la première de ces quinze Inventions.
John C. SKIBA : Peace. Schott (www.schott-music.com) :
ED 13453. 4 p.
De niveau « intermédiaire à
avancé », cette pièce évoque un vol en montgolfière que fit naguère
l’auteur au-dessus des Alpes : sentiment de paix, mélodies planantes et
harmonies fantasques…
Kenneth HESKETH : Poetic Conceits. Schott (www.schott-music.com) :
ED 13185. 44 p.
Conceit (concetto en italien) définit « une démarche métaphorique appliquée à une œuvre
poétique ». Tout au long des
six mouvements (en quelque 20’) que comporte Poetic Conceits, il est fait appel à toute une série de thèmes
en permanente évolution, au matériau harmonique commun – sorte d’arc continu… Passionnant mais techniquement difficile.
Karl JENKINS : Benedictus (from The Armed Man). Piano à 4 mains. Boosey & Hawkes (www.boosey.com) :
BH 12375. 8 p.
Sur le thème de L’Homme armé, « A mass for peace »
nous dit le compositeur, cette pièce en lents accords sur le haut du clavier,
soutenus par des arpèges, fera assurément le bonheur de moult duos de
pianistes.
Brad MEHLDAU : Elegiac Cycle. Édition bilingue. Outre Mesure
(www.outre-mesure.net).
23 x 30,5 cm, 224 p. 28 €.
Il s’agit là, par Philippe
André, de la transcription complète et de l’analyse d’un célèbre cycle du
pianiste de jazz américain Bradford Alexander Mehldau (°1970). Participant
à la constitution d’un patrimoine écrit des musiques improvisées, cette
réalisation permet de pénétrer au cœur même d’un processus créatif… Quatre parties composent l’ouvrage : Un
album-concept (L’élégie et le cycle comme points de départ / De
l’influence de la musique classique / De l’influence de la
littérature / Le motif mélodique & rythmique), Techniques & styles (Une écriture polyphonique / L’importance de la forme / Un jeu
pianistique complet), Entretien avec Brad Mehldau (par Ludovic Florin), Relevés des thèmes & improvisations (Bard, Resignation, Memory’s Tricks,
Elegy for W. Burroughs & A. Ginsberg, Lament for Linus, Trailor
Park Ghost, Goodbye Storyteller, Rückblick, The Bard Returns), Postface (Genèse d’une rencontre impossible). Pour tout musicien, un outil remarquable…
ORGUE
Richard WAGNER : Siegfried-Idyll. Transcription par Edwin H.
Lemare. Schott (www.schott-music.com) :
ED 13472. 16 p.
Faisant appel au jeu d’anches
(solo), plein jeu, chœur & pédalier, fort habile est cette transcription.
GUITARE
Jean-Denis CROUHY : La méthode du professeur Krooks. Hit Diffusion (www.editions-hit-diffusion.fr) :
PCKROO 01. Album couleurs,
96 p., 1 CD. 33,50 €.
Simple est le concept : un
morceau célèbre sur chaque double page - avec tablatures, grilles, diagrammes
d’accords, paroles, accompagnement, conseils pédagogiques, biographies… Vingt titres
(de progressive difficulté) signés : Radiohead, M, John Lennon, Jimi Hendrix,
Nirvana, The Rolling Stones, AC/DC, Iggy Pop, Leonard Cohen,
Georges Brassens, Amy Winehouse, Eagled-Eyed-Cherry,
The Kinks… Disque
comportant les play-back.
FLÛTE & GUITARE
Antonio VIVALDI, Alessandro MARCELLO, Georg Philipp TELEMANN : Adagios baroques. Gilgenreiner (www.gilgenreiner-verlag.ch) : RV 106. 15 €.
Pour flûte (traversière ou à
bec) & guitare (ou clavier, une octave plus bas), ces quatre mouvements
lents extraits de concertos - arrangés par Jean Cassignol, pour la flûte,
et Michel Démarez, pour la guitare – séduiront, n’en doutons pas, force duos…
non moins que leurs auditeurs. Conducteur
& partitions séparées. Niveau :
moyen.
PARTITION D’ORCHESTRE
Wolfgang Amadeus MOZART : Symphonie en mib majeur, K. 543. Breitkopf
Urtext (www.breitkopf.com) :
PB 5296. 28 €.
Cette édition Urtext se fonde
sur la partition autographe que possède la Bibliotheka Jagiellónska de
Cracovie. Publication réalisée sous la
haute compétence du musicologue Cliff Eisen - qui dut toutefois corriger,
çà et là, diverses négligences d’écriture du compositeur. Parties séparées disponibles : OB 5296.
ANALYSE MUSICALE
Anthony GIRARD : Le langage musical de Stravinsky dans L’Histoire du soldat. « Les Cahiers d’analyse musicale », Billaudot (www.billaudot.com). 21 x 27 cm, 64 p.,
ex. mus. 26 €.
Déjà auteur d’une fort appréciée Analyse du langage musical (Billaudot, 2005), Anthony Girard se penche, cette fois, sur l’une des
partitions de Stravinsky les plus complexes à analyser – bien plus, selon lui,
que celle du Sacre du printemps… Rien de moins convenu, en effet, que cette Histoire du soldat : discours
musical fragmenté, procédant par juxtapositions, foisonnements mélodique &
rythmique. Éléments de l’étude : Une
élaboration formelle originale : Les groupes de motifs /
Développement & variation / Techniques de juxtaposition /
Imbrications / Symétries thématiques. Les éléments du langage musical : Aspects mélodiques,
harmoniques, rythmiques / L’orchestration. Considérations stylistiques.
Francis Gérimont.
***
Franck BESINGRAND : Louis Vierne. « Horizons »,
Bleu Nuit, 2011. 176 p. 20 €.
Avec cette nouvelle
parution, les entreprenantes éditions Bleu Nuit enrichissent leur
collection « Horizons » d’une monographie que nous étions sûrement
innombrables à attendre depuis des décennies, celle de Louis Vierne
(1870-1937), organiste hors pair et compositeur majeur. Disciple parmi les
plus doués de César Franck et de Charles Marie Widor, il comptera
lui-même Lili Boulanger ou Maurice Duruflé au rang de ses plus
illustres élèves. Tout au long de cet ouvrage intelligemment et
abondamment illustré, l’auteur rappelle cependant, avec force et conviction,
que la contribution de Vierne à l’histoire de son art ne se limite nullement au
répertoire de l’orgue, mais enrichit tout aussi brillamment la littérature pour
orchestre, pour voix, pour piano, voire pour formation de chambre. Les
commentaires d’œuvres se signalent par leur clarté, les principaux caractères
esthétiques de Louis Vierne étant, pour leur part, soumis au crible d’une
analyse concise. Un seul regret, peut-être, l’absence de toute référence à
Hector Berlioz (hors la citation homonyme d’une salle de concert, p. 48 !)
dont maintes pages épiques de Louis Vierne semblent pourtant transmettre
l’enthousiaste leçon de liberté. En complément, selon l’usage de la
collection, le lecteur trouvera un tableau synchronique lui permettant de
situer l’artiste dans son temps, le catalogue des œuvres, une bibliographie et
une discographie sélectives ainsi que l’index des noms.
Gérard Denizeau.
Alexis GALPÉRINE : Carlos Roqué Alsina : entretiens, témoignages, documents. Delatour France (infos@editions-delatour.com), 2011, 317 p.
Alexis Galpérine — violoniste, concertiste,
professeur, entre autres, au CNSM de Paris, auquel on doit notamment la
monographie de son grand-père, Édouard Souberbielle, parue chez le même
éditeur — rend, à l’occasion de ses 70 ans, un vibrant hommage au pianiste
et compositeur argentin Carlos Roqué Alsina. Leur première collaboration
musicale remonte à l’été 1990, au « Festival-Académie des
Arcs », puis au sein de « Musicavanti », et — comme le
précise l’auteur — « jamais je n’ai pu le prendre en défaut, en tant
qu’interprète ou en tant que compositeur, d’une quelconque entorse à son
éthique artistique. » Éthique et esthétique, indissociables sont les
leitmotive de ce livre. Carlos est replacé dans son environnement
artistique : O. Klemperer, M. Rosenthal, G. Ligeti,
L. Berio, H. von Karajan, Ernest Bour… « Figure
majeure de la scène contemporaine, dont la pensée ouvre sur les grands
questionnements de l’avenir », son rayonnement international (festivals de
Darmstadt, Donaueschingen, Royan, La Rochelle, Metz… ; Allemagne,
États-Unis et France où il s’est installé) est indéniable. L’Orchestre de Paris
lui a d’ailleurs commandé une symphonie. Les Entretiens commencent en
2010. L’auteur ne dispose pas d’archives sur l’enfance de
« Carlitos » (°1941) et sur sa jeunesse en Argentine, mais il a quand
même réussi à aborder le stade « où le langage musical devenait le sujet
principal » de leurs entretiens. Cette première partie est étayée de
renseignements particulièrement significatifs : programmes (du
« Mozart argentino »), critiques (Argentine, Hongrie,
notamment), création de sa première œuvre pour grand orchestre Symptom (1969,
radio de Hambourg par Br. Maderna, reprise au Festival de Venise). Son itinéraire se précise au fil des pages,
en fonction des bourses obtenues (Fondation Ford…) ; engagement à Buffalo,
au Center of the Creative and Performing Arts, en liaison avec l’Université de
New York ; puis Berlin, la France (Lyon, CNSM, 1989 ; Royan ; Paris,
concert à la Salle Cortot, 25 avril 2002… ; Nancy, Salle Poirel, en
2006)… jusqu’à Taiwan. Les Témoignages très éloquents émanent, entre
autres, de Renaud François, Vinko Globokar, Michel Portal,
David Simpson, Gaston Sylvestre, Bernard de Vienne… et
projettent des éclairages très variés sur l’amitié, la musicalité, mais aussi sur
des événements (création du Studio électronique du SWR, Baden-Baden), concerts
mémorables et sur ses qualités personnelles : « clarté des idées, rigueur
intellectuelle, énergie inépuisable, sens de l’architecture, incroyable
maîtrise technique au service de l’expression musicale, économie des moyens,
très haute exigence envers lui-même mais tolérance envers les faiblesses de ses
amis… » (selon le violoncelliste D. Simpson), ou encore « être
généreux, musicien jusqu’au bout des ongles, être ouvert à toutes les
expériences » (selon le percussionniste G. Sylvestre). Les Documents comprennent des lettres (M. Kagel, Südwestfunk, ministère (français) de la
Culture, Radio France…). Trois articles très détaillés en espagnol
et un article de Jean-Louis Leuleu : « Quand jouer c’est
composer » (1987), ainsi qu’une « Étude sur l’œuvre de Carlos
Roqué Alsina » par Xavier Aymonod (2003), permettent de
découvrir la personnalité et l’œuvre du compositeur argentin publiée à Milan,
de 1967 à 2010 (cf. Catalogue, p. 307-309). Une telle diversité
d’informations, de réactions, de documents et témoignages d’horizons divers ne
peut que susciter l’envie de lire cet ouvrage d’A. Galpérine, si bien
conçu et documenté, et d’entendre non seulement le pianiste, mais aussi
« l’œuvre polymorphe » de Carlos Roqué Alsina « dont on n’a
pas fini de mesurer la portée ».
Suzy SCHWENKEDEL : En classe chez Pachelbel, Bach… et les autres. Précis de pédagogie. Anfol (51, rue Principale,
67530 Ottrott. contact@anfol.org),
2011. 106 p. 38,92 €.
En pédagogue avertie & fin
connaisseur de l’orgue, l’auteur livre aux organistes improvisateurs,
accompagnateurs et enseignants le résultat de sa vaste expérience dans le
sillage de Pachelbel, Bach, J.-Fr. Dandrieu, Johann Christian Kittel (1732-1809)… Un volet important concerne la théorie
— harmonie, harmonisation, divers accords (sixte ajoutée, triton,
septièmes), modes d’église (transposition et harmonisation) —, et débouche sur
la technique et la pratique organistiques. L’ensemble est étayé d’exemples musicaux (XVIe-XVIIIe siècles)
judicieusement sélectionnés — dont certains sont empruntés à la Tablature de Weimar éditée
(1994) par S. Schwenkedel ; d’autres, à des chorals luthériens ou psaumes réformés. Les chapitres interpellent directement l’élève qui apprendra ainsi à
mieux analyser, comprendre et interpréter le répertoire. Les commentaires sont explicites ; les
termes étrangers, signalés. Il faudrait
toutefois, par exemple au chapitre 19, préciser que le cantus firmus
— s’inspirant de la séquence Victimae
paschali laudes (puis repris par P. Davantès pour le Psaume 80 O pasteur d’Israel escoute) — est exposé au ténor. Ce constat n’enlève rien à la valeur de ce
livre pratique rendant aussi hommage
à Harald Vogel qui, depuis 30 ans, a donné une nouvelle impulsion à
l’enseignement de l’orgue. L’utilité
d’un tel manuel n’est pas à démontrer.
David DUPIRE : Pour un art poétique
de l’orgue. Pensées détachées. Delatour (infos@editions-delatour.com). 35 p. 5 €.
Ce fascicule n’appartient pas à
un genre littéraire classé. Il se présente comme une juxtaposition de
réflexions, de pensées, de judicieux conseils, fruits de la vaste expérience de
David Dupire, organiste, pianiste, littéraire et docteur de l’Université
Paris-Sorbonne. Il a retenu trois
angles d’attaque : musicien, interprète (organiste, pianiste) et littéraire.
L’orgue est abordé comme un objet sonore « loin des auditeurs »,
« immobile et statique » ; il est tributaire de plusieurs
facteurs : diction, ornementation, vocal, rythmique, technique de jeu,
position du corps, poids des jambes, coudes stables… - calme et
spontanéité étant indispensables à l’interprétation. Après avoir évoqué
« la danse ancienne »…, la plastique symphonique…, en guise d’épilogue,
l’auteur s’adresse à l’interprète ayant pour mission de « faire
revivre » — tout en respectant l’esprit de l’œuvre —, grâce à une
registration s’apparentant à une orchestration. L’interprétation vraie est un
avènement… : « c’est l’indicible qui vient ». « Pensées
détachées », mais conseils attachants.
Pascale ROUET &
Christophe MARCHAND : Enquêtes sur le Sacré dans la musique d’aujourd’hui. Hommes,
Œuvres, Horizons. Delatour (infos@editions-delatour.com). 296 p. 22 €.
Des musiciens contemporains, connus ou inconnus,
exploitant le langage musical du XXIe siècle, apportent des
réponses au problème de fond dégagé dans la Préface de
Gilles Cantagrel : que doit-on entendre par « religieux : confessionnel,
mystique, spirituel, transcendant » ? et à l’interrogation : « où se situerait la mystérieuse
frontière entre le religieux, le sacré et le profane ? » C’est le mérite de P. Rouet (organiste)
et de Chr. Marchand d’avoir regroupé 13 entretiens autour de
« la recherche de la transcendance », soulignant les motivations de
divers compositeurs tels que Ch. Chaynes, M. Radulescu,
Cl. Ballif, le regretté J.-L. Florentz, R. Campo.
P. A. Castanet, A. Mabit... Cette réflexion - pratique, théorique et esthétique autour de la
musique d’orgue contemporaine - se situe dans une perspective analytique
avec, entre autres, le rôle du silence, le traitement du temps musical,
l’économie des moyens, l’attitude hédoniste dans la vie… La conclusion se présente comme un bilan dégageant
des horizons, à partir de messes, de dramaturgies à sujet religieux et de
« fresques profanes à force sacrée ». Ces questionnements sur le geste compositionnel, philosophique et
esthétique, et ces démonstrations percutantes susciteront réactions et
réflexions.
Édith Weber.
Catherine KINTZLER : Jean-Philippe Rameau (1683-1764). Splendeur et
naufrage de l’esthétique du plaisir à l’âge classique. 3e édition
revue & augmentée. « Musique ouverte », Minerve (www.editionsminerve.com). 15,5 x 23 cm, 240 p.
23 €.
Cette 3e édition d’un
ouvrage classique a été notamment augmentée de l’annexe « Les opéras de
Rameau et la question du merveilleux maçonnique », dans laquelle est donnée
la liste des ouvrages où l’on peut découvrir - à des degrés divers – pareilles
références : l’acte des Incas dans Les Indes galantes (1735), Zoroastre (1749), Les Fêtes de l’Hymen (1747), Zaïs (1748), Naïs (1749), Les Boréades (1764)… Et
Catherine Kintzler de noter, dans sa nouvelle préface : « Finalement
jamais Rameau n’a été aussi actuel, dans son art comme dans sa science.
Hautain, insolent, herculéen, admirablement obstiné, méditatif, hyperactif,
magnifiquement dissonant et magnifiquement silencieux, il vous râpe les oreilles
tout en vous enchantant ».
Benoît DRATWICKI : Antoine Dauvergne
(1713-1797). Une
carrière tourmentée dans la France musicale des Lumières. Mardaga/Centre de musique baroque de
Versailles (www.mardaga.be).
17 x 24 cm, 480 p., ex. mus., ill. n&b et couleurs. 39 €.
Superbe est cette monographie
consacrée au violoniste et compositeur Antoine Dauvergne, auteur d’opéras
et de grands motets - où il apparaît comme le digne continuateur de Rameau et
de Mondonville. N’est-il pas, en outre,
l’inventeur de genres scéniques qui feront les riches heures du siècle suivant :
opéra-comique, comédie légère,
ballet-pantomime ? Il occupa aussi
de prestigieuses fonctions à la cour et dans la capitale : directeur du
Concert spirituel et de l’Académie royale de musique… Une juste réhabilitation.
Francis POULENC (1899-1963) : J’écris ce qui me chante. Textes et
entretiens réunis, présentés & annotés par Nicolas Southon. Fayard. 15 x
23,5 cm, 990 p. 32 €.
À tout le moins bienvenue est
cette somme réunissant quasiment tous les écrits disponibles d’un musicien qui toujours
aima les mots - comme en témoignent éloquemment les textes de ses ouvrages
lyriques et innombrables mélodies. Ont été ici réunis : Articles de
presse / Critiques & comptes rendus / Contributions à des
ouvrages / Hommages / Réponses à des enquêtes / Conférences / Entretiens.
Hyacinthe RAVET : Musiciennes. Enquête sur
les femmes & la musique. « Mutations/Sexes
en tous genres », Autrement (www.autrement.com).
15 x 23 cm, 336 p. 22 €.
Sous prénom épicène, Mme Ravet,
sociologue et musicienne, apporte une nouvelle « pierre » à la
théorie des genres. Les femmes
peuvent-elles être reconnues comme créatrices au même titre que les
hommes ? s’interroge-t-elle. Certes,
sauf peut-être – du moins jusqu’à présent - dans les seuls domaines
de la mathématique pure et de la composition musicale… Mais tout cela devrait changer estime notre
auteur(e)… Entre prologue et épilogue,
neuf parties composent ce bel essai : À la recherche des
musiciennes / Le sexe des instruments / À l’école de la
musique / La clarinette : un instrument traditionnellement
« masculin » / Genre & carrières musicales / La lente
ouverture des orchestres aux femmes / L’orchestre, un microcosme
hiérarchisé / Diriger / Créer. En annexes : L’enquête en chiffres, Aspects méthodologiques,
Glossaire, Sources & références bibliographiques, Index.
Odile BOURIN, Pierrette GERMAIN-DAVID, Catherine MASSIP & Raffi
OURGANDJIAN : Elsa Barraine (1910-1999), une compositrice au XXe siècle. Delatour (www.editions-delatour.com). 14,5 x 20,5 cm, cahier
n&b et couleurs. 13 €.
En heureux écho à la belle exposition
que le département Musique de la BnF (2, rue de Louvois, Paris IIe)
consacre aujourd’hui à Elsa Barraine, cette monographie rend un juste
hommage à celle qui fut l’une des premières compositrices à obtenir le Grand Prix
de Rome. Ouvrage comportant le portrait d’une musicienne d’exception, l’analyse
de quelques-unes de ses œuvres, l’historique de son action pédagogique au
Conservatoire de Paris (de 1952 à 1974) mais aussi textes d’analyse, par Elsa
Barraine elle-même, du 5e Quatuor
à cordes de Béla Bartók et du Concerto
de violon d’Alban Berg. En annexes : Catalogue des
œuvres, Liste des élèves, Bibliographie, Index.
Bernard GIRARD : Conversations avec Tom Johnson. « Musiques XXe-XXIe siècles », Aedam Musicae (www.musicae.fr).
14, 5 x 20,5 cm, 164 p., ex. mus., schémas,
ill. n&b. 16 €.
Compositeur américain vivant à
Paris, Tom Johnson (°1939) est l’un des pionniers du minimalisme -
mouvement dont, selon lui, l’humour constitue l’élément indispensable… Au sommaire de cette fort éclairante monographie :
« L’homme qui compte » / Un parcours New York-Paris /
Minimalismes / Mathématiques & musique / Opéra : la trace du
théâtre expérimental / Le Bonhoeffer Oratorium /
Une vie de compositeur / La musique de Tom Johnson, une négation du
temps vécu / Tom Johnson a renouvelé le minimalisme / Les œuvres
principales / Index.
Antoine OUELLETTE : Musique autiste.
Vivre et composer avec le syndrome d’Asperger. Essai/témoignage.
Préface du Dr. Laurent Mottron. Triptyque (www.triptyque.qc.ca). Distr. DNM (www.librairieduquebec.fr). 15,5 x
23 cm, 313 p. 27,90 €.
« Altération sévère et prolongée de l’interaction sociale », tel
est le principal symptôme du syndrome d’Asperger. C’est en 2007 que le compositeur et musicologue
Antoine Ouellette se vit diagnostiquer ces troubles du comportement. Sur lesquels sa formation, également scientifique,
lui permit d’entreprendre une autoanalyse dont il publie ici les résultats. Quant à, notamment, l’influence de ce
syndrome autistique sur sa propre création musicale (refus, par exemple, du
principe de non-répétition)… De lecture
aisée, cette passionnante autobiographie est, en même temps, riche
d’informations sur l’autisme - pseudo-folie, à propos de laquelle tant de
sottises auront été proférées. Il
s’agit là, en outre, d’une manière d’essai philosophique, traitant - non sans
une saine virulence – de la science, de l’éthique et de la création artistique.
Pierre GUINGAMP : Michel Warlop (1911-1947). Génie du violon swing. Préface de Jean-Luc
Ponty. « Univers musical »,
L’Harmattan. 15,5 x 24 cm, 308 p.
photos n&b. 29,50 €.
Condisciple de Stéphane
Grappelli – et probablement aussi doué que lui -, le violoniste
Michel Warlop mourut trop jeune pour connaître la même gloire que son
ami. Merci à Pierre Guingamp
d’avoir ainsi réparé un injuste oubli. En annexes :
« Une histoire de violons » (Jacques Gay), Le violon de
Michel Warlop, Liste de ses compositions et CDs, Bibliographie, Séances
d’enregistrement, Index rerum & nominum.
Philippe GUESPIN : Aux armes et cætera. La chanson comme expression populaire & relais démocratique depuis
les années 50. L’Harmattan. 164 p. 16 €.
De Gainsbourg à Zebda, de
Brassens à MC Solaar, d’Aznavour à Renaud, de Sardou à Calogero, sont
passés en revue – dans leur traitement par la chanson – la plupart des sujets
sociaux et événements politiques ou techniques de ces dernières décennies :
racisme, sexisme, homosexualité, nationalisme, désindustrialisation, MP3,
écologie… Trois grandes parties :
Reflet des évolutions & tendances, miroir de la société / Relais
d’opinion, voies alternatives / Mutations de l’industrie musicale :
musique mutante, société vivante. Index
des chansons citées.
François JOLLAT (Sous la direction de) : La formation des enseignants en musique. État de la recherche
& vision des formateurs. « Sciences de l’éducation
musicale », L’Harmattan. 15,5 x
24 cm, 250 p., schémas. 24,50 €.
Rendre compte des nouveaux
paradigmes de formation à l’enseignement - général & spécialisé - de la
musique, en Suisse romande, France et Canada, tel est le propos de cet essai. Cinq parties : Le mémoire professionnel dans la formation
des enseignants de musique (Angelika Güsewell, Pascal Terrien,
François Jolliat), Éléments de
formation professionnelle & de formation musicale scolaire (Christiane Baume, Dominique Jacquod, Josée Vaillancourt,
Jean Duvillard), Les représentations
des enseignants sur leurs compétences à enseigner la musique (Sylvie Jahier, Sylvain Jaccard), Démocratisation
& approches interculturelles de la musique (Gérald Guillot,
Chrystel Marchand), Varia (Pierre Zurcher,
Jean-Luc Leroy, Laurent Guirard).
Dick RIVERS : Mister D. Entretiens avec Sam Bernett. Éditions Florent Massot (www.florentmassot.com). 15,5 x 24 cm, 190 p., album
de photos n&b. 19,90 €.
Pour ses 50 ans de
carrière, le rocker Hervé Fornéri, alias Dick Rivers (Nice, 1946), s’est
ici entretenu – en guise de bilan provisoire - avec Sam Bernett. Le ton est manifestement décontracté et
toujours sincères les propos – parfois « vachards » pour d’autres
artistes, non moins d’ailleurs que pour soi-même (carrière, vie privée, amours,
défauts, erreurs, ratages, etc.). Sympathique
et sans esbroufe (www.dick-rivers.com).
Jean-Michel OULLION : Led Zeppelin. Même les dragons ont une fin. Les Carnets de l’Info (www.lescarnetsdelinfo.com).
14,5 x 24 cm, 290 p., cahier de photos n&b. 19 €.
Où nous est contée la saga d’un
groupe légendaire, depuis ses débuts (1968) jusqu’à sa dissolution
« officielle » (1980) – fébrilité des sessions d’enregistrement,
coulisses sulfureuses des tournées aux quatre coins de la planète… mais aussi
analyse de son univers d’influence et critique de ses différentes publications
(300 millions d’albums vendus, CDs et DVDs). Webographie, bibliographie sélective.
The Beatles. Un phénomène en mots, en images & en musique. Fort
volume. 25 x 31 cm, 500 p., ill. n&b et couleurs,
partitions. Éditions White Star (www.whitestar.fr). Diffusion : Flammarion. 35 €.
Magnifique album dédié aux Fab’ Four : chronologie
détaillée des concerts, lieux, citations & événements significatifs de leur
histoire (de 1933, naissance de Yoko Ono, à nos jours), photographies rares,
et surtout - pour nous, musiciens - partitions de 100 célébrissimes chansons
(textes, mélodies, chiffrages, tablatures). Inespéré !
Olivier CACHIN : Soul for one. L’aventure de la soul. La Martinière (www.editionsdelamartiniere.fr). Relié. 22 x 22,5 cm, 208 p., ill. n&b et
couleurs. 35 €.
Éminent spécialiste de la chose,
Olivier Cachin nous livre ici une superbe monographie où - des pères fondateurs
(James Brown & Otis Redding) à leurs plus récents avatars
(Erykah Badu & la nu soul),
on retrouve quelques incontournables célébrités (Barry White, Stevie Wonder,
Aretha Franklin, Isaac Hayes, Curtis Mayfield,
Michael Jackson & autres Prince). Superbe iconographie.
Kim GOTTLIEB-WALKER (Photographies
de) : Bob
Marley. Portrait inédit en photos (1975-1976). Textes :
Cameron Crowe, Roger Steffens, Jeff Walker. Hors Collection (www.horscollection.com). Relié sous jaquette. 25,5 x
30,5 cm, 160 p., photos n&b et couleurs. 27 €.
Pour les innombrables fidèles du dieu de la culture rasta,
voilà – richement enluminée – une nouvelle bible ! Plus de 200 photos prises, le plus souvent,
dans l’intimité de l’artiste - et c’est cela qui fait la valeur humaine d’un
tel album. Ensemble assorti d’un récit
fort bien documenté sur l’émergence du mouvement reggae.
Francis Cousté.
POUR LES PLUS JEUNES
Laure URGIN : Aimata et le secret des tambours. Livre-CD. Illustrations :
Élise Mansot. « Les contes du Musée de la musique », Actes Sud
Junior / Cité de la musique (www.actes-sud-junior.fr). Album relié. 20,5 x 20,5 cm,
41 p. illustrées couleurs. 19 €.
Ce charmant conte « pour
découvrir les tambours de Tahiti », met en scène la princesse Aimata Pomaré
(personnage historique) qui, souhaitant être une bonne souveraine, écoute
les conseils du sage du village. Ainsi apprendra-t-elle à assembler les éléments
du pahu a te ari’i,
mystérieux tambour de chef (instrument haut de 6 mètres, désormais exposé
au Musée de la musique). Dès
6 ans.
Henri SALVADOR : Une chanson douce. Le loup, la biche et le chevalier. Illustrations : Éric Puybaret.
« Tralalère », éditions Casterman. Relié, couverture carrée,
23 x 23 cm, 14 p. couleurs. CD inclus.
9,95 €.
Dans sa collection
« Tralalère », les éditions Casterman nous proposent un nouveau livre
musical autour du « tube » d’Henri Salvador. Séduisant en
diable…
Trois contes du Père Castor : Roule
galette / Poule rousse / La plus mignonne des petites souris. « Père Castor », Flammarion
(www.editions.flammarion.com). Couverture cartonnée mousse. 21,5 x 18 cm, 80 p. couleurs. CD inclus (22’00). 13 €.
Trois contes tendres &
malicieux - illustrés de musiques originales, signées Hugues Le Bars (pour
les deux premiers) et Christian Chevallier (pour le troisième). Dès 3 ans.
Petites histoires du Père Castor, pour Noël. « Père Castor », Flammarion (www.editions.flammarion.com). Couverture cartonnée mousse. 17 x 21 cm, 80 p. couleurs. CD
inclus (22’00). 15 €.
Dix histoires (classiques ou
récentes) composent ce plaisant recueil, assorti d’un CD reprenant
l’intégralité des textes interprétés par des comédiens. Tristounettes musiques d’ambiance, toutefois.
Francis Gérimont.
***
Jean-Sébastien BACH : Passion selon saint-Jean. Version française de Maurice Bouchor. 2 CDs Musicaleo Productions (musicaleo@musicaleo.com). TT : 35’50 + 75’43.
À l’époque de la
Réforme, puis du piétisme, dans le sillage de Martin Luther, à côté du
latin, l’allemand — langue vernaculaire accessible à tous — s’impose, elle
permet de faire revivre le récit de l’Évangéliste, de réagir aux divers
commentaires des airs, au sens profond des chorals et aux réactions de la foule
(turba). Une adaptation française,
permettant de revivre ces moments dramatiques au détriment, parfois, des
sonorités et inflexions de la langue originale, a été réalisée en 1902 par
Maurice Bouchor. Christophe Martin-Maëder mise sur « la
compréhension immédiate du texte, qui ramène au premier plan sa force et sa
signification, et conduit chanteurs et musiciens à ne pas se contenter de le
dire ou de le jouer, mais à véritablement l’habiter ». Il précise :
« Quant à l’auditoire, il en reçoit la charge spirituelle ou émotionnelle
de façon beaucoup plus directe, comme s’il était en quelque sorte soustrait à
cette fascination trop exclusive pour la perfection esthétique de l’œuvre de
Bach qui peut aller jusqu’à faire oublier le texte dont il est
question… ». Il a donc repris la version de M. Bouchor, mais en
l’améliorant parfois du point de vue de l’adéquation entre prosodie verbale et
prosodie musicale. Dans la mesure du possible, il tient à respecter des
sonorités de la langue allemande comme pour le passage : « Les Juifs
lui dirent alors : Wir haben ein
Gesetz… », au lieu de traduire : Gesetz par « loi », il l’a remplacé par
« précepte » : Nous avons
un précepte : d’après ce précepte, il faut qu’il meure, ce qui produit
une assonance plus proche de l’original allemand. L’organiste titulaire
de l’église Saint-Augustin, à la tête du Chœur liturgique de cette église et de
l’Ensemble Confitebor, propose une version certes destinée aux
non-germanophones, ce qui n’empêchera peut-être certains « puristes »
de regretter la langue d’origine. Quoi qu’il en soit, cette version se situe
dans une certaine tradition en usage en France au XXe siècle,
éloignée des conceptions luthériennes bien plus sensibles et
intériorisées ; Henri Mandeng (Pilate, Pierre) s’impose,
contrairement à David Faggionato (l’Évangéliste). Quant aux interventions
des chœurs, même énergiques et bien méritoires, elles gagneraient à plus de
justesse et à une meilleure articulation. Démarche intéressante, efforts
louables, résultat discutable…
24 Préludes pour
orgue. Jacques Kauffmann. Orgues Cavaillé-Coll de St-Étienne
de Mulhouse. Skarbo (skarbo.music@orange.fr) :
DSK 1103. TT : 77’50.
Ce CD propose 24
pièces de longueur inégale, illustrant les caractéristiques de la musique
d’orgue du XXe siècle. Pourquoi 24 ?
Jacques Kauffmann précise qu’il « obéit à un double fil
conducteur : d’une part, le chiffre 24, mythique dans l’histoire de
la musique depuis Jean-Sébastien Bach, d’autre part l’adéquation entre l’orgue
de l’église catholique St-Étienne de Mulhouse et les œuvres de L. Vierne,
A. Fleury et G. Litaize. » L’excellent titulaire de l’orgue du
Couvent des Dominicains à Paris se réfère aux 24 Préludes et Fugues du Clavier bien tempéré de J.-S.
Bach ; aux 24 Préludes et 24 Études de Fr. Chopin. Le
premier volet de ce triptyque propose 7 extraits des 24 Pièces en style libre, op. 31 (1913) de L. Vierne, aux titres évocateurs : Cortège, Arabesque, Carillon…, de
caractère, tour à tour, méditatif, nostalgique, énigmatique, massif. Le
deuxième volet fait entendre 9 des 24 Pièces (1930-1933) d’A. Fleury, avec des mouvements traditionnels et
contrastés : Allegro moderato, Très lent, Allegretto, Comme une marche (incisive
et très rythmée), Modéré et expressif… dans
lesquels le compositeur privilégie le facteur mélodique, les divers plans
sonores, encore mis en valeur par une registration remarquable. Le troisième
volet comporte 7 des 24 Préludes
liturgiques (1953-1955) de G. Litaize, par exemple Sur un Cantique breton, de facture mélodique modale et très colorée ; Allegro (plage 21), très allant,
nécessitant une certaine virtuosité ; Andante,
très dépouillé et recueilli, contrastant avec l’Allegretto bien enlevé. Ce programme typique est réalisé au
grand orgue Aristide Cavaillé-Coll, 1863 (40 jeux, 3 claviers,
1 pédalier) de l’église St-Étienne à Mulhouse, revu et augmenté en 1963
par le facteur strasbourgeois Max Roethinger (avec 12 jeux
supplémentaires — dont 5 au pédalier — et une nouvelle console à
4 claviers). L’instrument permet d’obtenir, entre autres, des
registrations très diversifiées, des effets et coloris postromantiques,
impressionnistes. Jacques Kauffmann a réalisé une rare symbiose entre
facture organistique, programme et interprétation.
Georg BÖHM : Orgelwerke. Ricercar (stephanie@outhere-music.com) :
RIC 319. TT : 69’56.
Georg Böhm, né à
Hohenkirchen (Thuringe) en 1661 — donc dans le fief de la famille Bach — a été
formé par son père, organiste, avant de faire ses études à Iena, puis à
Hambourg, dans l’entourage du célèbre J. A. Reinken. Il est
organiste, claveciniste et compositeur. Il est titulaire à l’église St-Jean de
Lunebourg jusqu’à sa mort, le 18 mai 1733. Il connaît à la fois les traditions
musicales d’Allemagne du Nord et du Sud, d’Italie et de France dont il réalise
la synthèse et a d’ailleurs fortement influencé Jean-Sébastien Bach —
occasionnellement choriste dans cette ville. Bernard Foccroulle a
retenu l’orgue Van Hagerbeer de la Grote Sint Laurenskerk (Alkmaar),
parfaitement adapté à ce répertoire de 3 Préludes (en introduction, en transition et en conclusion) et de
15 Chorals luthériens très
connus. Le Prélude (et Fugue) en do majeur, incisif, avec ses solos de
pédale traditionnels, donne le ton massif. Le choral Vom Himmel hoch da komm ich her (pour le temps de Noël), avec son
cantus firmus bien affirmé, puis orné, bénéficie d’un contrepoint en
imitation. L’excellent organiste en fait clairement ressortir les différents
plans sonores. Le programme comprend, entre autres, pour le temps de la
Passion, le choral Christ lag in
Todesbanden ; pour celui de Pentecôte, Nun bitten wir den Heiligen Geist. La paraphrase du Notre Père commentée
par Martin Luther : Vater unser
im Himmelreich comporte trois versions : la première, très méditative,
à 2 claviers ; la deuxième, à 1 clavier et pédalier ; et la
troisième, plus développée, à 2 claviers et pédalier dans laquelle G. Böhm ponctue le cantus firmus à la
pédale, associé à des commentaires décoratifs aux claviers. Elle contraste avec
le choral Auf meinen Lieben Gott trau’ ich in Angst und Not, conçu comme
une petite partita : modèle du genre, allant de la simplicité vers la
complexité contrapuntique. En plus des chorals luthériens, Christe, der du bist Tag und Licht (de source antérieure au XVIe siècle
: Christe qui lux et dies es), repris
lors de la Réforme, bénéficie de trois versions diversifiées interprétées avec
délicatesse, finesse et intériorité. Comme ce disque avait été introduit, il se
termine de façon grandiose et solennelle aux accents de l’imposant Prélude (et Fugue) en ré mineur. Tant par ses registrations judicieusement élaborées que par sa
technique hors pair, Bernard Foccroulle a rendu un vibrant hommage à
la facture d’orgue nordique et à G. Böhm.
Giovanni Pierluigi da PALESTRINA : Missa Papae Marcelli. Weihnachtliche Chormusik Alter Meister. Rondeau (mail@rondeau.de) : ROP n6043. TT : 55’07.
La Messe du Pape Marcel est entrecoupée
d’œuvres pour Noël, d’ailleurs très bien venues avec, entre autres, Vom Himmel hoch da komm ich her dans la
version de Johannes Eccard, baignant dans l’atmosphère lumineuse, deux
noëls de M. Praetorius : Es ist
ein Ros entsprungen et In dulci
jubilo (latin/allemand, avec respect des assonances), pleine d’élan ;
le noël de Leonhard Schröter (1532-1601) : Freut euch, ihr lieben Christen, ou encore le noël O Jesulein süss, o Jesulein mild de
Samuel Scheidt et de J. S. Bach, très prenants. Le premier
ensemble vocal fondé en 1999 par Volker Heldtfeld est devenu, en 2002, le
chœur de chambre Opus vocale qui se distingue non seulement par sa haute
musicalité, mais encore par sa plénitude vocale et le souci du détail planant aussi
bien sur les noëls que sur la Missa
Papae Marcelli. On sait que, lors du Concile de Trente (1562-1565),
Palestrina a été considéré comme le défenseur de la polyphonie attaquée par les
Pères. Sa Messe à 6 voix, dite « du Pape Marcel » (imprimée en
1567 à Rome), s’est imposée ; elle respecte l’intelligibilité du texte,
sans pour autant sacrifier la polyphonie. Elle répond à l’usage liturgique
comme aux exigences artistiques. Voilà, incontestablement, une version de
référence.
Tomás Luis de VICTORIA : Requiem. Officium
defunctorum. Rondeau (mail@rondeau.de) : ROP 6042. TT : 57’39.
Le célèbre Chœur de
chambre de Saarbrucken, fondé en 1998 par Georg Grün, a enregistré chez
Rondeau Production (Leipzig) l’Office
des Défunts de Thomás Luis de Victoria (ca 1548-1611),
ainsi que 3 motets pour le temps de la Passion et de Pâques. Le texte reprend la Leçon 2 pour les
matines (Job, 10, 1-7), la Messe des Morts proprement dite : Introït, Kyrie - Graduel, Offertoire -, Sanctus, Agnus Dei, Communio (suivi du motet Versa est in luctum cithara mea…,
lamentation de Job), Absolutio : Libera me Domine avec le poignant Dies illa, dies irae, puis
l’invocation : Requiem aeternam dona eis, Domine, et lux perpetua luceat eis,
suivie de la triple invocation du Kyrie
eleison. Avec une incomparable
maîtrise et haute technicité, le chef obtient de ses chanteurs une justesse
parfaite, un fondu des voix rarement atteint, une diction irréprochable qui
permettront aux discophiles de ressentir intensément cet Officium Defunctorum. Meilleur hommage ne pouvait être rendu au remarquable polyphoniste
espagnol, à l’occasion du quatrième centenaire de sa mort.
Nawal. Caresse de l’âme. Jade (jade@milanmusic.fr) : 699 739-2. TT : 63’28.
Nawal Mlanao, à la fois artiste et productrice depuis plus de vingt ans,
« continue de s’inscrire résolument dans la lumière
d’un Islam fondé sur l’amour, le respect et la paix ». À travers ses chants, elle mise surtout sur
les émotions et le mysticisme, et privilégie la musique comorienne qui est
« un mélange de musique africaine, bantoue, arabo-perse, avec quelques
épices occidentales », comme il ressort de ces 10 pièces
lançant un message de paix. Elles sont
accompagnées au gambousi — ancêtre du
luth arabe —, instrument de cérémonie ; au m’bira s’apparentant au sandza,
« piano à pouces » - traditionnel pour appeler les esprits - ;
au daf (tambourin avec cymbalettes) employé dans le soufisme. Ces instruments mystiques, aux sonorités
dépaysantes, sont propices à la méditation et à l’introspection, tout comme son
répertoire « pour la paix et la dignité humaine ».
Édith Weber.
Franz LISZT : Œuvres pour piano. Cyprien Katsaris – 2 CDS Piano 21 : LC 11797,
vol. 1. Franz SCHUBERT : Œuvres pour piano. Cyprien Katsaris – 2 CDs Piano 21 : LC 11797,
vol. 8. Wolfgang
Amadeus MOZART : Concertos pour piano nos 5 & 27, Rondo pour piano
& orchestre K. 382. Cyprien Katsaris, Yoon Kuk Lee, Salzburger Kammerphilharmonie – Piano 21 : LC 11797,
vol. 7.
L’extraordinaire
talent du pianiste Cyprien Katsaris, tôt salué par des maîtres aussi avérés
qu’Olivier Messiaen (« technique d’acier, fougue,
force et autorité, brillance ») ou György Cziffra,
illumine trois disques récents, aussi remarquables par la variété du programme
que par la qualité transcendante de l’interprétation. Délicatesse mozartienne,
virtuosité lisztienne et douceur schubertienne sont des données qui relèvent
ici de l’incongru, tant l’artiste sait modeler le métal musical en usant
simultanément de ces trois caractères pour la totalité de son immense
répertoire. Tout au long de sa
carrière, cet étonnant virtuose se sera ainsi attaché à chercher, au sein de
ses œuvres de prédilection, les couleurs harmoniques, raretés mélodiques et
superpositions contrapuntiques les plus inattendues, sans jamais mettre en
péril l’unité formelle et la cohérence structurelle voulues par les
compositeurs. Dût-il parfois, pour cela, dérouter une partie de ses
auditeurs, sans doute afin de plus sûrement les séduire. En cela, il
reste le glorieux héritier de Franz Liszt, grand pianiste et grand
compositeur, mais aussi incomparable improvisateur chez qui l’invention ne
brutalisait jamais la forme. En ce temps de grave crise du disque classique,
par ailleurs, il est réconfortant de vérifier que le label
« Piano 21 », créé par Katsaris, le 1er janvier
2001 (dix ans déjà !) offre un panel si complet et si divers du répertoire
créé au cours des deux derniers siècles pour le roi des instruments.
Cyprien Katsaris ©DR
Gérard Denizeau.
Le Clavecin du Roi
Soleil.
Jean-Patrice Brosse, clavecin. 2CDs Saphir (www.saphirproductions.net) : LVC1125. TT : 68’10 +
28’18.
Une anthologie des plus éminents
compositeurs de pièces pour clavecin, dont Champion de Chambonnières, Couperin,
d’Anglebert et Rameau, pour n’en citer que quelques-uns, composées
au cours du règne de Louis XIV (1638-1715). En parallèle des deux
disques, un livre largement illustré, le Clavecin du Roi Soleil, du même
auteur, paru chez Bleu Nuit (www.bne.fr)
vient compléter cet enregistrement. Un disque-hommage au clavecin, instrument
qui ne vécut guère plus d’une centaine d’années, succédant au luth et
s’éteignant avec l’arrivée du pianoforte.
Max BRUCH & Felix
WEINGARTNER : Septuor op. posth. & Octuor op.73. Octuor de France. Jeff Cohen,
piano. Calliope : CAL1103. TT : 72’17.
Un disque remarquable, tout à
fait dans la lignée du répertoire de l’Octuor de France, qui nous donne, une
fois de plus, le plaisir d’entendre deux œuvres peu connues de compositeurs du
XIXe siècle, rarement joués. Le Septuor de Bruch, composition de jeunesse, un peu passéiste, aux accents brahmsiens et
l’Octuor de Weingartner, post-romantique,
plus méditatif, empreint de nostalgie. Tous deux, magnifiquement interprétés,
deux climats différents, mais un même plaisir d’écoute.
Georges ENESCO : Sonates pour violoncelle & piano op.26. Alexandre Dmitriev (violoncelle),
Alexandre Paley (piano). Saphir (www.saphirproductions.net) : LVC1170. TT : 76’03.
Georges Enesco (1881-1955),
personnalité éclectique, pédagogue, violoniste virtuose, chambriste renommé et
chef d’orchestre, mais également, compositeur, comme en témoignent ces deux
sonates de l’opus 26, composées à plus de trente-cinq années d’intervalle.
La première, datant de 1898, œuvre de jeunesse aux accents brahmsiens, d’une
beauté méditative, la seconde écrite en 1935, plus moderne et, peut être, plus étrange avec son Final
« à la roumaine ». Un enregistrement live capté par France Musique, au Festival de Montpellier, le
23 juillet 2009, un très beau moment de musique, magnifiquement interprété.
Giovanni GIORGI : Ave Maria.
Chœur de chambre de Namur, Cappella Mediterranea, dir. Leonardo
Garcia-Alarcon. Ricercar (www.ricercar.be) :
RIC 313. TT : 55’.
Inlassable découvreur de
partitions oubliées, Leonardo Garcia-Alarcon nous propose, ici, une œuvre d’un compositeur totalement méconnu. Giovanni Giorgi, probablement né à
Venise, ayant passé une partie de sa vie à Rome où il devient maître de
chapelle à Saint-Jean-de-Latran en 1719, gagnant ensuite Lisbonne pour exercer
le métier de compositeur, mort à
Lisbonne en 1762. Son œuvre, constituée exclusivement de musique sacrée, mêlant
polyphonie et style concertant, est porteuse de ces différentes influences qui conduiront au futur classicisme. Bien enregistré, bien
chanté et bien joué, mêlant plaisir et découverte, un disque indispensable à
tous les amateurs de musique baroque.
GAIL, BOÏELDIEU, NADERMAN, DOMNICH, LAMBERT, ROMAGNESI, GARAT,
JADIN : Romances
françaises. French songs. 1795-1815. Sylvie Nicephor (soprano),
Etsuko Shoji (harpe Érard). Calliope :
CAL 1101. TT : 57’48.
Un disque plein de charme,
consacré aux romances françaises, ces chansons simples, centrées sur la voix
et la ligne mélodique, dont les
origines remonteraient à l’art des trouvères et dont l’âge d’or se situerait entre
1795 et 1815. Au-delà d’un genre musical, la romance est un phénomène de
société, prospérant à travers plusieurs régimes, depuis la monarchie (la reine
Marie-Antoinette en aurait chanté et écrit, tout comme Hortense de Beauharnais,
sous l’Empire) jusqu’au Directoire. À mi-chemin entre rue et salon, la
romance propose une sorte de consensus sentimental et social. Malgré le
caractère un peu répétitif de ces chansons, le beau timbre et la diction parfaite de Sylvie Nicephor,
l’accompagnement discret mais efficace d’Etsuko Shoji se prêtent
magnifiquement à ce genre d’exercice. À découvrir.
Antonio VIVALDI : Concerti per piccolo. Jean-Louis Beaumadier & Philippe Pierlot (piccolo). Orchestre national de
France, dir. Jean-Pierre Rampal. Ensemble instrumental La Follia, dir.
Philippe Pierlot. Saphir (www.saphirproductions.net) :LVC 1171. TT : 58’18.
Trois concertos pour piccolo
& trois transcriptions pour cet instrument permettent d’en apprécier toutes
les possibilités techniques et expressives. Des œuvres attachantes,
remarquablement interprétées.
Robert SCHUMANN : Concerto for cello
& orchestra. Concerto for piano
& orchestra. Orchestre de Bretagne, dir. Grzegorz Nowak. Matt Haimovitz (violoncelle), Laure
Favre-Kahn (piano). Transart : TR158. TT : 53’15.
Deux œuvres emblématiques du
romantisme schumannien, oscillant entre le nostalgique Eusebius et le fougueux
Florestan. Deux compositions quasiment contemporaines (1846 et 1850) où s’expriment tour à tour la
fougue, le bouillonnement intérieur, l’extase, le lyrisme, le drame, la
tendresse, la virtuosité et l’amour pour Clara. Deux monuments du répertoire romantique, deux admirables
musiciens, une association rare au disque. Interprétation live dans le cadre des Flâneries
musicales d’été de Reims.
BEETHOVEN, LISZT, WAGNER : Odyssey. Frédéric D’Oria-Nicolas, piano.
Fondamenta (www.fondamenta.fr) : FON-1101007. TT : 58’13.
Un disque qui nous donne à
entendre la Sonate « Waldstein » de Beethoven, la Vallée d’Obermann tirée des Années de Pèlerinage de Liszt, la
transcription de l’ouverture de Tannhäuser de Wagner et Adagio de Bach
BWV 564, transcrit par Busoni. Un enregistrement empli d’une présence
éblouissante où Frédéric D’Oria-Nicolas se hisse au niveau des plus grands. Des
tempi, des sonorités et un jeu entretenant des climats envoûtants qui perdurent
bien au delà de l’écoute. Une prise de son d’une remarquable qualité, effectuée
dans la magnifique salle de l’Arsenal de Metz. En bonus, le « CD Mobility » version adaptée aux écoutes sur
baladeur, voiture et ordinateur ! Du grand art !
CAVALLI, ROSSI, SCARLATTI, FALCONIERI, STROZZI, MARINI,
MONTEVERDI : Ferveur & Extase. Stéphanie d’Oustrac,
mezzo-soprano. Ensemble Amarillis. Ambronay : AMY 027.
TT : 64’18.
Un disque dont le programme est
centré sur l’amour baroque et ses deux visages, sacré et profane, représentés
par les figures de la Vierge Marie et de Didon, reine de Carthage. Deux visions qui s’expriment au XVIIe siècle
par le biais d’une nouvelle esthétique, celle du recitar cantando, où l’accent est mis sur une plus grande
lisibilité des textes et une plus grande simplicité dans l’élocution et la
déclamation. Stéphanie d’Oustrac (qui vient de triompher dans le rôle de
Sesto, de la Clémence de Titus de
Mozart, à l’Opéra Garnier) et ses complices de l’Ensemble Amarillis excellent
dans cet exercice, dans une symbiose parfaite, vocale et instrumentale.
Indispensable, à tous les amateurs de
musique baroque. Une chanteuse, pleine de talent, à suivre…
Johann Georg ALBRECHTSBERGER (1736-1809) : Entre ciel et terre. Quatuor
Mosaïques. Ensemble Baroque de Limoges, dir. Christophe Coin.
Albin Paulus, guimbarde. Labories
Records : LC08. TT : 65’40.
Un disque original qui permet de
découvrir un visage peu connu du compositeur Albrechtsberger, considéré comme
le représentant du plus pur classicisme viennois. Professeur de Beethoven, titulaire de l’orgue de la cathédrale
Saint-Étienne de Vienne, ami de Haydn, compositeur de musique sacrée, mais
également, de musique profane, aimant à mêler timbres et instruments
rares. Cet enregistrement en est un des
exemples les plus convaincants, avec notamment, l’utilisation de la
guimbarde. Les quatre Concertos pour guimbarde, écrits entre
1769 et 1771, étaient probablement destinés au révérend-père Bruno Glatzl,
virtuose de cet instrument, moine bénédictin de l’abbaye de Melk, ville où la
cour impériale avait l’habitude de séjourner lors de ses déplacements. Une surprise à écouter absolument.
J. S. BACH : Das Wohltemperierte
Klavier-Teil II. Sébastien Guillot (clavecin). 2CDs Saphir (www.saphirproductions.net) : LVC 1136. TT : 73’43 + 79’54.
Ce disque présente, en premier
enregistrement mondial, le second livre de la première version du Clavier bien tempéré de Johann Sebastian
Bach, recueil de 24 Préludes & Fugues, interprétés par
Sébastien Guillot, d’après le manuscrit autographe de Londres, acquis par
la British Library en 1896. La
composition de cette version, dite A, daterait des années 1739-1742. Par rapport à la version de référence de
1744, elle comprend nombre de variantes mélodiques, rythmiques et ornementales
que les mélomanes éclairés auront à cœur de découvrir ! Parfaitement interprétée par
Sébastien Guillot sur un clavecin O. Fadini de 1993 (d’après
F. Blanchet, Paris 1733).
W. A. MOZART : Sonate n°11. Marche
turque K. 331. Sonate n°2 K. 280. Sonate n°13 K. 333. Aldo Ciccolini (piano Bechstein). La dolce volta (www.ladolcevolta.com) : LDV 03. TT : 52’54.
À 85 ans, Aldo Ciccolini
réenregistre ces sonates de Mozart, des sonates qu’il côtoie depuis
l’adolescence. Il en résulte, évidemment,
un très beau Mozart, mûri, réfléchi, enrichi d’une expérience de plus de
soixante-dix ans, épuré et chargé d’émotion, qui laisse chanter les notes et
s’égrener la mélancolie dans un climat de romantisme naissant. Un très bel enregistrement qui laisse
espérer une intégrale.
Roula SAFAR : Vergers d’exil, échos méditerranéens. Roula Safar (mezzo-soprano, guitare & percussions). Hortus : 089. TT : 52’47.
Force est de reconnaître que
l’on ne retrouve pas, dans cet enregistrement, les accents chargés de
transcendance qui nous avaient émus dans le précédent disque (Racines sacrées, Voix des Origines,
Hortus 067). On se sent ici, en
effet, bien éloigné des complaintes de l’exil, comme du soleil de la
Méditerranée, tant les textes paraissent plats pour la plupart, les
arrangements incertains, la vocalité hasardeuse.
René MAILLARD : « Surviving after
Hiroshima ». Concerto Grosso.
Concerto da Camera n°2. Royal
Philharmonic Orchestra, dir. Dionysios
Dervis-Bournias. Sarah Jouffroy
(mezzo-soprano). Naxos (www.naxos.com) : 8.572623. TT : 71’.
Un disque qui présente trois
superbes compositions de René Maillard (°1931), compositeur français,
lauréat du Prix de Rome en 1955, symbolisant parfaitement la fructueuse symbiose entre tradition et modernité,
revenu, au début des années 2000, à la composition sur les conseils éclairés de
Nicolas Bacri, après une interruption de plus de quarante ans. Surviving
after Hiroshima est une cantate pour mezzo-soprano, chœur & orchestre,
inspirée de l’histoire vraie de
Kyoko Hama, véritable hymne à l’espoir mettant en avant toutes les
qualités du compositeur, écriture
intemporelle, clarté et richesse des couleurs orchestrales. En reprenant les
formes classiques et traditionnelles, revisitées, le Concerto grosso pour quintette à vents & orchestre à
cordes, composé en 1961, révisé en 2003 et le Concerto da Camera n°2 pour orchestre à cordes, composé en
1959, complètent ce magnifique
enregistrement. Absolument
indispensable !
Charles GOUNOD : Biondina, souvenir
d’Italie. David Lefort
(ténor), Simon Zaoui (piano). Hortus : 084. TT : 61’02.
Un très beau disque qui
vaut par l’originalité de l’œuvre
présentée, Biondina, composée à
Londres en 1872, chargée des influences
italiennes recueillies par Gounod (1818-1893) lors de son séjour en Italie
(Grand Prix de Rome, 1839) mais, également, par la qualité de l’interprétation
vocale et pianistique. Biondina, roman musical sur des poèmes de
Giuseppe Zaffira, en douze chapitres, nous conte l’histoire d’un poète
épris de sa voisine blonde et orpheline, qu’il épouse, avant que la mort ne la
lui arrache bientôt. Des mélodies de Tosti, contemporain de Gounod, et des
pages pour piano solo, dont À la
lune, encore inédite au disque, complètent agréablement cet
enregistrement. Toutes occasions, pour
Gounod, de faire montre de son amour pour la voix, la mélodie, l’Italie. David Lefort et Simon Zaoui sont
ici exemplaires, tout à fait convaincants dans ce domaine - associant diction
claire, vocalité facile, timbre rond, ample et accompagnement efficace. Un vrai régal !
Franz LISZT : Fever. Claire Chevallier (piano Érard, 1876). La dolce volta (www.ladolcevolta.com) : LDV 02. TT : 72’08.
Une sonorité exceptionnelle,
mais plus encore, un climat, une présence en filigrane, celle de Liszt jouant
sur ce piano Érard qu’il aimait tant. Un programme éclectique, aux multiples facettes ressemblant à Liszt lui-même. L’Andante lagrimoso et Funérailles, tirés des Harmonies poétiques et religieuses, la Mephisto-Walzer n°1, la Lugubre gondola n°2, Saint François d’Assise, la
Prédication aux oiseaux, Saint François de Paule marchant sur les flots et Wiegenlied. Une rencontre passionnante entre un compositeur, une artiste
talentueuse et un piano d’exception. Voilà un disque qui fera assurément date,
en cette année du bicentenaire de la
naissance de Liszt (1811-1886).
Patrice
Imbaud.
Richard WAGNER : Der fliegende
Holländer. Albert Dohmen (le Hollandais), Matti Salminen (Daland), Ricarda Merbeth (Senta), Robert Dean Smith
(Erik), Steve Davislim (le timonier), Silvia Hablowetz (Mary). Chœur & Orchestre symphonique de la Radio de
Berlin, dir. Marek Janowski. 2 SACDs Pentatone : PTC 5186 400 (distr. Codaex).
Ce coffret, élégamment présenté
en livre-disque, constitue le « Tome 1 » d’une entreprise
nationale allemande menant au bicentenaire Wagner de 2013. D’ici cette date sortiront, à un rythme
périodique, les dix opéras principaux du compositeur, enregistrés en
« live » sous la baguette de Marek Janowski dont on n’a pas
oublié la Tétralogie d’il y a trente
ans avec la Staaskapelle de Dresde. Cette fois, ce sont les forces de la Radio de Berlin qui se prêtent à
ces concerts exceptionnels, captés dans la salle de la Philharmonie. Quelques phrases écrites par le président du
Bundestag dans sa préface en disent long sur son plaisir d’écouter la musique
sans qu’elle soit polluée par les mises en scène que nous-mêmes dénonçons dans
ces colonnes ! Admirons tout
d’abord avec quelle perfection (on peut même parler de virtuosité) les
choristes (hommes et femmes) de la radio berlinoise donnent véritablement vie à
leurs rôles collectifs : ils ont été préparés par Eberhard Friedrich,
le chef des chœurs de Bayreuth, et ils étincellent tout du long. Marek Janowski, confronté à l’orchestre
wagnérien, se meut dans son élément, avec un respect souvent scrupuleux de la
partition (il a choisi évidemment la version durchkomponiert), à l’exception surprenante d’un moment important,
la Ballade de Senta qu’il dirige lourdement, sans remédier à l’absence de
nuances de la soprano. En effet,
Ricarda Merbeth néglige complètement les fp sur lesquels repose
l’effet du thème de la Ballade. Rien ne
la fait émerger d’une interprétation prosaïque du rôle. Nous sommes loin de la vibrante émotion et
de l’éloquente attention aux nuances que nous apportaient Catherine Naglestad
et Hartmut Haenchen dans un récent DVD chroniqué ici même (Opus Arte). La partie féminine s’avère d’ailleurs le
maillon faible de la distribution puisque le mezzo-soprano jouant Mary n’a
guère la voix bien placée. Le risque du
"live" nous fait craindre pour le Hollandais et Daland qui, tous
deux, commencent la soirée en trébuchant sur la justesse, mais ce n’était que
le temps de se chauffer. L’expression d’Albert Dohmen dégage toujours une
noblesse qui lui gagne les cœurs ; l’aigu est radieux, mais certains
graves, quoique résonnant richement, sont attrapés de manière... incertaine.
L’expérience wagnérienne de Matti Salminen n’est plus à vanter, il met
beaucoup d’esprit à faire vivre les phrasés wébériens du rôle de Daland (par
moments, il ne passe pas loin de la basse bouffe mozartienne). Deux bons ténors (Erik et le timonier)
complètent la distribution. La course
du Vaisseau fantôme devant suivre un
vent dominant parmi les deux options possibles (la survivance de racines
passéistes, ou la révolution wagnérienne en marche), la lecture de
Marek Janowski tire l’œuvre vers ses sources (Weber, Mozart, Rossini).
Emporté par un dynamisme général, le temps passe vite, mais c’est au détriment
d’un approfondissement émotionnel qui exhausserait le souffle futuriste, déjà
bien affirmé, autant que la dimension mythique de l’amour des deux
protagonistes. Est-ce volonté d’accuser le contraste avec le deuxième volet de
ce parcours, à l’autre extrême du grand œuvre wagnérien, puisque Parsifal nous est annoncé sous
peu ? Nous recevrons bientôt la réponse.
RACHMANINOV : Préludes op. 3
n°2, op. 32 n°5 et 12, op. 23 n°4, 5, 7. Études-Tableaux op. 39 n°1, 3, 5. CHOPIN : Sonate n°2
op. 35. Maciej Pikulski, piano. Stermaria
(http://mascarel.eu/label-stermaria).
Le courant, dicté par les
mutations économiques, est au rapprochement entre activités de concert et
diffusion discographique autour d’un même artiste. Ainsi Laurence Hitzel prolonge-t-elle désormais la promotion
des musiciens dont s’occupe son agence Mascarel par la création d’un label
discographique, joliment baptisé Stermaria. Le premier disque ouvre ses sillons au pianiste polonais
Maciej Pikulski, dont le pianisme élégant et l’intelligente musicalité ne
sont plus à vanter. Il s’agit de prises
effectuées en 2 jours (d’une belle qualité microphonique), et remontant à
octobre 2008. Alors se pose la
question, au sein d’un marché discographique très concurrentiel, de la nécessité d’une gravure de plus :
il semblerait plus judicieux qu’un artiste jeune, et guère parvenu au statut de
vedette, se positionne sur le créneau d’œuvres non rebattues, ce qui rendrait nécessaire d’aller vers son disque,
tandis que la nième version de Chopin, Beethoven ou autre, se heurtera
toujours à d’immortelles références autrement plus marquantes – et attractives
pour le public ! –, et ne conquerra sa place que si elle s’affirme comme
le fruit d’une expérience longuement mûrie. On voit bien ici que Maciej Pikulski sollicite excessivement les
morceaux les plus célèbres (le Prélude en ut# mineur !), comme
s’il se demandait comment faire pour s’y distinguer ! Tandis que d’autres plages coulent plus naturellement,
ou que des idées pertinentes se font jour ici et là. D’où un manque de cohérence dans la réalisation globale. Prenons l’exemple de la Sonate n°2 de Chopin : le premier mouvement semble en
proie à des contorsions, les motifs chantants ne trouvent pas leur agogique
naturelle ; il manque au Scherzo une
pulsation venue de l’estomac, et le trio se déroule superficiellement ; en
revanche, le détachement presque lumineusement timbré de la Marche funèbre ouvre une
perspective d’ordre métaphysique à l’immuabilité dénuée de pathos de son
cheminement ; c’est une vision personnelle de la mort que nous propose
l’interprète et nous l’accueillons ainsi ; mais, pris dans cette logique,
le Presto émerge d’un brouillard et
perd du coup sa dimension de houle hallucinée sans laquelle son extrême
brièveté (son déséquilibre formel, à l’échelle de la Sonate) ne peut plus se justifier. Parmi les pièces de Rachmaninov, relevons le splendide lyrisme de l’Étude-Tableau op. 39 n°5, les
suggestives cascades du Prélude op. 23
n°7, la fraîcheur poétique du Prélude op. 32 n°5, le climat d’intériorité du Prélude op. 23 n°4. Mais il manque une
dimension imposante au Prélude op. 32 n°12 et à la cambrure de l’op. 23 n°5 que de grands pianistes
russes ont marqué de leur empreinte. Quant à l’Étude-Tableau op. 39 n°3, elle reste du beau piano trop extérieur, mais y manque le
violent appel de la nostalgie russe, si présente au cœur de Rachmaninov. Alors on se réjouirait d’entendre
Maciej Pikulski, mais peut-être pas dans des œuvres où les géants de
plusieurs générations pianistiques l’écrasent de leurs ombres prestigieuses.
Harmonious breath. Concertos pour saxophone & orchestre
d’instruments chinois de Yiu-Kwong Chung (°1956) et Leilei Tian (°1971) + deux
arrangements de chants traditionnels chinois. Claude Delangle (saxophones alto & soprano). Orchestre chinois de Taipei, dir. En Shao. Bis : CD-1790.
Oubliez toutes vos certitudes
sonores et laissez-vous séduire par cette rencontre entre Orient et Occident
qui s’inscrit dans un projet associant le label suédois Bis et des institutions
de Taiwan : quatre solistes vedettes du label développent un partenariat
avec l’orchestre d’instruments traditionnels ; la flûtiste
Sharon Bezaly avait ouvert le bal, suivie du saxophoniste Claude Delangle ;
viendront le tromboniste Christian Lindberg et la percussionniste
Evelyn Glennie. Claude Delangle
situe son travail dans le droit fil de ses précédentes expériences au Japon et
de sa riche pratique de la musique contemporaine, mais y voit aussi un reflet
de l’histoire universelle des instruments à anche (anche double et
anche simple). Sous la direction
d’En Shao, chef formé à l’orchestre symphonique en Angleterre, le jeu des
instrumentistes traditionnels présente les mêmes vertus que celui d’un ensemble
occidental, tandis que Claude Delangle sait évoquer avec virtuosité le guanzi chinois. Le métissage sonore peut produire des
moments magiques, tel le mouvement central (En
écoutant la cascade) du Deuxième Concerto de Yiu-Kwong Chung, écrit pour une formation réduite mais féerique de
quintette : saxophone soprano, vibraphone, erhu, guzheng, sanxian (trois instruments à cordes
nettement différenciés). En revanche,
quand l’orchestre chinois se rapproche des repères occidentaux, l’expérience
perd de son originalité et fait un peu « world music ». L’apport
le plus novateur de ce disque est à mettre au crédit de Leilei Tian,
compositrice formée en Suède et à Paris, dont Open secret (commande du ministère français de la Culture,
2009) représente une authentique création d’aujourd’hui, procédant par
glissements mystérieux entre deux mondes finalement convergents.
« Soul Mates » :
Paule MAURICE : Tableaux de Provence. Piotr GRELLA-MOZEJKO : Moon down, Numen. Caroline CHARRIÈRE : Miniature, Tranquillo-Agitato. Victor CORDERO : Soul Mates. Darius MILHAUD : Scaramouche. Laurent Estoppey (saxophone), Virginie Falquet
(piano). Claves (www.claves.ch) : 50-1111.
Sous le rébarbatif matricule
« ST15 » (quelle idée de baptiser ainsi un ensemble !) se
cachent deux artistes suisses pleins de fraîcheur. Dans les « classiques » du répertoire saxophonistique
(Paule Maurice et Darius Milhaud ; les Français rectifieront les
graves approximations relatives à l’enseignement au Conservatoire de Paris dans
les notices biographiques), on peut juger de l’esprit piquant que nos
duettistes apportent à leurs interprétations ; la pianiste est délicieuse,
on aimerait seulement que le saxophoniste travaillât encore la qualité de ses timbres. Les écoles françaises, que l’on penche vers
celle si féconde de Jean-Marie Londeix ou vers Claude Delangle, nous ont
habitués à un modelé incomparable des sonorités de l’instrument ; l’on
pense encore, dans cet ordre d’idées, au prodigieux Hollandais
Arno Bornkamp, d’ailleurs élève de Londeix. Le cœur du disque de Laurent Estoppey et
Virginie Falquet repose sur des pièces d’auteurs actuels écrites à leur intention : Piotr
Grella-Mozejko (Canadien comme son nom ne l’indique pas) procède par délicates
touches atmosphériques ; « presque imperceptible »,
indique-t-il sur un des morceaux, or on touche vite aux limites du
non-renouvellement de cette imperceptibilité. Mais, au moins, on traverse ces brumes en se laissant doucement
envelopper, tandis que les pièces de Caroline Charrière sont
inconsistantes et qu’il n’y a rien, dans Soul Mates de Victor Cordero que l’on ne trouve, autrement plus élaboré, dans le
formidable cycle d’études pour saxophone de Christian Lauba.
Gabriel DUPONT (1878- 1914) : Les heures dolentes. La
maison dans les dunes. Stéphane Lemelin. 2 CDs Atma Classique :
ACD2 2544 (distr. Intégral).
Le pianiste canadien Stéphane
Lemelin s’est fait une spécialité d’exhumer des pages françaises oubliées de la
fin du XIXe siècle ou du début du XXe. On lui devait ainsi (toujours chez Atma) un
beau disque Ropartz, mais aussi des gravures consacrées à des auteurs plus
mineurs tels que Samazeuilh, Migot, Théodore Dubois. Aujourd’hui paraît
enfin un enregistrement de décembre 2007 nous révélant deux recueils de
Gabriel Dupont, destin fauché à 36 ans par la tuberculose, qui connut
une relative gloire pour ses opéras (La Glu, Antar). Le cahier de 14 pièces aux titres suggestifs, Les heures dolentes, constitue un
émouvant journal intime de sa convalescence après le premier assaut de la
maladie : on y ressent les angoisses d’un jeune homme de 25 ans mais
aussi le candide regard porté sur la moindre petite joie ou une fraîche
visite. N’étant pas nourries de cette
expression autobiographique, les 10 vignettes de La maison dans les dunes nous laissent indifférents.
À parler franchement, l’oubli
dans lequel tomba cette musique s’explique par un manque de
« signature » personnelle tandis que l’influence de son contemporain
Debussy éclate par bouffées tellement « non digérées » qu’elle
prête à sourire. Peut-être manque-t-il
à Stéphane Lemelin une étincelle d’imagination pour transcender ces pages
de second tiroir ? Et la prise de
son n’est pas non plus la plus riche captation de piano que l’on puisse trouver
sur le marché.
TCHAÏKOVSKY : Quatuor à cordes n°3 (a). CHOSTAKOVITCH : Trio pour piano, violon et violoncelle n°2 (b). Christian Tetzlaff
(violon, a et b), Antje Weithaas (violon 2, a),
Tatjana Masurenko (alto, a), Gustav Rivinius (violoncelle, a),
Tanja Tetzlaff (violoncelle, b), Lars Vogt (piano, b). Avi Music : 8553224 (distr. Codaex).
Issus de concerts se tenant sur
le site de l’usine hydroélectrique de Heimbach (un bâtiment Art Nouveau de
1904 qui abrite chaque été un festival de musique de chambre dirigé par
Lars Vogt), ces enregistrements réalisés par la radio Deutschlandfunk
réunissent deux œuvres écrites comme des hommages funèbres à des amis musiciens
disparus. L’émotion nous étreint dès le
lamento initial du 3e Quatuor de Tchaïkovsky. Toutes les incursions
de Christian Tetzlaff dans la musique de chambre produisent des fruits
aussi magistraux que ses interprétations de soliste ; il fédère autour de
lui de talentueux partenaires auxquels il communique un esprit fusionnel. L’élan lyrique insufflé à l’œuvre de
Tchaïkovsky met merveilleusement en lumière la richesse de l’écriture, animée
de surcroît par une vie mouvante dans la gradation des dynamiques et les
échanges de répliques. L’Andante funebre et doloroso s’élève du lugubre désincarné à la compassion la plus tendrement vibrante. Pourrait-on rêver interprétation plus
accomplie, plus sentie ? Je ne
crois pas. Dans le Trio n°2 de Chostakovitch, l’âpreté du 1er mouvement
monte de très loin depuis les redoutables harmoniques de la phrase initiale du
violoncelle (si bien réussis par Tanja Tetzlaff), le Scherzo endiablé grince
un peu trop (je parle ici des cordes, non des intentions satiriques...
effectivement grinçantes !). Les
pleurs rentrés du Largo s’exhalent
par le son lointain des cordes sur l’imperturbabilité des accords de
piano. Leur interprétation du finale sur un motif juif privilégie les
effets de lointain du premier élément en pizzicato,
puis les sommets exacerbés sonnent avec la brutalité d’une catharsis (les
micros engrangent même désagréablement les chocs qu’inflige Lars Vogt à
son piano), non avec l’ampleur qui donne à ce mouvement son inexorable gravité
dictée par la ferme pulsation : c’est une vision d’outre-monde qu’ont
voulue les artistes, là où d’autres mettent l’accent sur la puissance
visionnaire d’une opiniâtreté qui résiste à tout, y compris à la mort. La comparaison des diverses versions de ce
sublime Trio ouvrirait presque la
voie à une discussion ontologique de type heideggerien sur la finitude...
Sylviane Falcinelli.
« La Belle
Danse ». Ballets anciens & modernes. Capriccio Stravagante / Les 24 Violons, dir.
Skip Sempé. Digipak Paradizo (www.paradizo.org) : PA0010. Distr.
Harmonia Mundi. TT : 60’47.
Sous la direction de l’Américain
Skip Sempé, le tout nouvel ensemble « Capriccio Stravagante /
Les 24 Violons » (violons provenant de la collection du Centre de musique baroque de
Versailles) nous plonge au cœur de concerts à la cour de Louis XIII ou de
Louis XIV : Ouvertures & suites de Jean-Baptiste Lully (Atys, Les plaisirs de l’Île enchantée,
Armide, Roland, Triomphe de l’Amour, Pastorale comique, Roland…), de
Marin Marais (Alcyone) -
ensemble assorti de pièces plus rares signées William Brade,
Michael Praetorius, Luigi Rossi, Georg Muffat.
Ludwig van BEETHOVEN : Quatuors à cordes
op. 127 et op. 131. Quatuor Brentano
(°1992). Æon (www.aeon.fr) :
AECD 1110. TT : 78’21.
Par la célèbre phalange
étasunienne (ayant pour titre distinctif le patronyme de celle qui fut sans doute la « Bien-aimée
lointaine », Antonie Brentano), voici les 12e et 14e Quatuors, chefs-d’œuvre de la maturité. À la lumière du répertoire contemporain dont ils sont tout aussi
familiers (Elliott Carter, György Kurtág, Milton Babbitt,
Sofia Gubaïdulina…), les Brentano nous offrent, de ce corpus
testamentaire, une lecture renouvelée.
Johannes BRAHMS : Rhapsodies,
Intermezzi, Klavierstücke. Jonas Vitaud, piano. Orchid
Classics (www.orchidclassics.com) :
ORC 100020. Distr. Codaex. TT : 76’53.
D’une admirable sobriété sont
ces interprétations d’un pianiste qui n’avait jamais encore enregistré en
soliste. Treize années séparent, chez
Brahms, les deux Rhapsodies,
op. 79 (1879) - d’esprit orchestral - des Fantasie, op. 116 et Intermezzi, op. 117 (1892), puis des Klavierstücke op. 118 et 119 (1893) – d’esprit plus intimiste
- qui composent ce remarquable album.
Gabriel FAURÉ : Œuvres pour violoncelle & piano, Trio op. 120. Éric Le Sage (piano), François Salque (violoncelle), Paul Meyer
(clarinette). Alpha (www.alpha-prod.com) : 600. TT : 74’02.
Bonheur de voir s’enrichir la
discographie du célèbre Appaméen – dans l’interprétation, surtout, de tels
artistes ! Au sommaire : Romance op. 69, Première Sonate op. 109, Élégie op. 24, Deuxième Sonate op. 117, Sérénade op. 98, Papillon op.77, Berceuse op. 16 et Trio avec clarinette op. 120.
Maurice RAVEL : Œuvres pour piano. Jean-Yves Thibaudet, Hélène Grimaud, piano. Royal Philharmonic Orchestra, dir.
Jesús López-Cobos. Regis Records (www.regisrecords.co.uk) : RRC 1339. TT : 68’25.
Un précieux enregistrement réunissant
Jean-Yves Thibaudet - musicien sensible et raffiné, qui fait ici merveille dans Jeux d’eau, la Sonatine, Le Tombeau de Couperin – et, sans excessif maniérisme, la
belle Hélène Grimaud dans le Concerto
en sol, merveilleusement sertie par le grand chef espagnol Jesús
López-Cobos.
Georg Friederich HAENDEL : Ombra cara. Arias par Bejun Mehta,
contre-ténor. Freiburger
Barockorchester, dir. René Jacobs. 1 CD + 1 DVD
(« making of » the recording) Harmonia Mundi (www.harmoniamundi.com) : HMC 902077. TT : 71’46.
Originellement dédiées à des
voix de castrats (celle notamment de Senesino…), les arias ici interprétées
sont extraites des opéras Amadigi
di Gaula, Agrippina, Riccardo prime, Tolomeo, Orlando, Radamisto, Rodelinda et Sosarme. Évidente passion
pour l’art baroque & démesure pyrotechnique caractérisent l’art de
Bejun Mehta. Outre le
« making of » de l’enregistrement, le DVD comporte, de
passionnantes interviews du chanteur et du chef d’orchestre. Qui
mieux que René Jacobs, était
qualifié pour ce partenariat ?...
Down by the salley gardens. 20th Century english songs. Bejun Mehta (contre-ténor), Julius Drake (piano). Harmonia
Mundi (www.harmoniamundi.com) : HMC 902093. TT :
66’33.
Outre ses interprétations
d’arias haendéliennes, le contre-ténor Bejun Mehta a enregistré tout un
florilège de chants anglais du XXe siècle – depuis l’esthétique
édouardienne de Roger Quilter (1877-1953) ou du premier
Vaughan Williams (1872-1958) jusqu’à l’intense expressivité d’un
Herbert Howells (1892-1983) ou d’un Gerald Finzi (1901-1956).
Sans oublier les superbes pages d’Ivor Gurney (1890-1937),
Lennox Berkeley (1903-1989), Charles Villiers-Stanford (1852-1924),
Peter Warlock (1894-1930), non moins que les réalisations purcelliennes
signées Benjamin Britten (1913-1976) ou Michael Tippett (1905-1998).
« Méditerranée sacrée ». Chœur de
chambre Les Éléments, dir. Joël Suhubiette. L’Empreinte digitale (www.empreintedigitale-label.fr) : ED13235. Distr. Abeille
Musique. TT : 60’52.
Florilège de 14 monodies et
polyphonies anciennes & modernes (en arabe, grec ancien, hébreu,
latin, syriaque), dirigées par le grand chef béarnais
Joël Suhubiette. Comprenant
notamment : Jerusalem surge, O vos omnes, Aestimatus sum (Gesualdo), O vos omnes (Victoria), Crucifixus (Lotti), Kaddish,
Barechu (Rossi), Bacchantes (Markeas), Lama Sabaqtani,
Mèn éntè (Moultaka), Ave Maria (Scelsi)… Soit huit siècles de musique
sacrée - du Llivre Vermell de Montserrat (anonyme, XIVe siècle)
aux pièces de Giacinto Scelsi (1905-1988), Alexandros Markeas (°1965)
et Zad Moultaka (°1967).
Javier TORRES MALDONADO (°1968) : Un posible día (quasi un radiodramma), pour voix, récitant, ensemble & électronique (2011). Maja Pavlovska (soprano),
David Jisse (récitant), Ensemble 2e2m, dir. Pierre Roullier. La Muse en circuit (www.alamuse.com) : ALM 002. Distr.
Distrart Musique (www.clicmusique.com).
Compositeur mexicain, Javier Torres Maldonado s’inspire ici
de Quel profundo oceano (incursion dans l’âme féminine), pièce
radiophonique d’Ana Candida de Carvalho. Au sein de formes relativement orthodoxes, il utilise - outre un
instrumentarium classique - des sonorités électroniques, non moins que… jouets,
crayons, verre en cristal & percussions.
Michel LYSIGHT (°1958) : Cosmographies, pour instruments à vent & piano. Quartz Ensemble. Quartziade (www.ensemblequartz.be) : QTZ 014. TT : 65’04.
Fort diverses mais infiniment
séduisantes sont les musiques qui composent ce florilège : Chronographie IX pour basson &
piano (2005), Deux Esquisses pour quatuor à vent (2004-2010), Thrène pour flûte alto & piano (1995), Sextuor pour quintette à vent & piano (1990), Soleil bleu pour cor anglais & piano (1989), Pentagramme pour quintette à vent
(2009), Cosmographic Mystery pour cor (2002).
Thierry PEAL (voix),
Bruno ANGELINI (piano), Francesco BEARZATTI (saxophone,
clarinette) : Move is. Re:think-art Records (www.rethinkartrecords.com) : re0111 /
2362004. Distribution : Musea.
Une petite merveille que cet
enregistrement, qui nous réconcilie avec le jazz transalpin. Où l’on découvre qu’animés par une passion
commune pour le cinéma, nos trois amis ont enregistré 12 titres inspirés
de films chocs (Bearzatti & Angelini, compositeurs) : See Berg /
Il fanfarone / No spring for Marnie / Mulholland /
Umberto / Gena / Face à l’inconnu / Guardie e Ladri /
A special day / Done it right ! / Was it
you ? / L’orage. Justes
hommages à Jean Seberg, Vittorio Gassman, Gena Rowlands,
Romy Schneider…
©Niko Rodamel
The Songs of England. John Potter, Lucie Skeaping,
Jo Frey & The Broadside Band. Regis (www.regisrecords.co.uk) :
RRC 1337. TT :
76’30.
En un temps où la scène britannique
folk est dominée par les musiques celtes, il n’est pas indifférent de
redécouvrir celles de la vieille Angleterre. La plupart des mélodies écossaises, irlandaises, galloises, de même que
nombre de chants américains (tels ceux des Appalaches) ne plongent-ils pas
leurs racines dans un répertoire proprement anglais ? Sont
ici regroupées 11 mélodies traditionnelles, interprétées par
John Potter & Lucie Skeaping (Greensleeves, The Roast Beef of Old England, Rule Britannia, God save the King, The British Grenadiers, Home,
sweet home…) ainsi que 12 chants interprétés par la remarquable
Jo Freya (All things are quite
silent, A blacksmith courted me, Geordie, Sweet England…). Anthologique !
Les Chœurs de l’Armée rouge, dir. Boris Alexandrov.
Volume 1. Frémeaux & Associés
(www.fremeaux.com) : FA 5356.
Il s’agit là d’enregistrements
historiques, sous la direction du fils d’Alexandre Alexandrov, fondateur du
célèbre ensemble. Accompagnés à l’orchestre, nous retrouvons,
bien sûr, les « incontournables » : Troïka, Nastasia, Kalinka, Plaine ma plaine, et bien d’autres. D’un monde ancien…
« La Mal Coiffée » : Òu ! Los òmes ! Label Sirventés (www.sirventes.com) : 21188013. Distr.
Autre Distribution.
« La Mal Coiffée »,
groupe polyphonique languedocien, c’est : Marie Coumes,
Laëtitia Dutech, Hélène Arnaud, Myriam Boisserie &
Karine Berny. Dans ce 3e album
(Oh ! les hommes !), elles nous proposent 12 titres
incandescents. Livret comportant textes originaux en langue d’oc &
traductions en langue d’oïl : Berceuse /
Prenez du bon temps, fillettes ! / Moissons / Il faut décoiffer
la mal coiffée / Le chat / Berceuse pour la petite fille / La
ronde des morts / Le soir de la noce / Les tailleurs de vigne /
Dis-moi Catinèl / Marion, ton pucelage / Catarina.
Furieusement roboratif !
Francis Gérimont.
Johann Georg ALBRECHTSBERGER : « Entre
ciel et terre ». Concerto pour guimbarde, viole de gambe,
deux violons & basse. Divertimento a tre pour violon piccolo, violon & alto. Sonate pour violon, alto & violoncelle op. 11 n°1. Divertimento a tre pour alto, violoncelle & violone. Sonate pour deux violons, deux violes &
deux violoncelles. Partita pour viole
d'amour, flûte & violone. Sonate
II a due cori. Christophe
Coin (violoncelle & viole de gambe), Albin Paulus (guimbarde). Ensemble baroque de Limoges. Quatuor Mosaïques. Laborie : LL08. TT :
65'40.
Voilà une rareté comme il est
réconfortant d'en rencontrer ! La
remise en selle d'un répertoire inédit et d'un musicien oublié, comme ce label
aime à le pratiquer. Compositeur
viennois (1796-1809), Albrechtsberger, qui compta Beethoven parmi ses élèves,
fut titulaire de l'orgue de l'abbaye bénédictine de Melk en Basse-Autriche,
avant d'entreprendre à Vienne une prestigieuse carrière d'organiste à la cour
de Joseph II puis à la cathédrale Saint-Étienne. S'il a beaucoup écrit de musique sacrée, il ne négligea pas le
domaine de la musique de chambre. En
particulier les pièces dites de tribune destinées à être jouées du haut de la
tribune d'une église. La sélection de pièces que propose ce CD montre combien
ses compositions appartiennent au classicisme viennois. Alors surtout qu’Albrechtsberger aime écrire
pour des formations peu ordinaires et pour des instruments rares. Le Concerto
pour guimbarde (ou « Jew's harp ») de 1791 lui adjoint la
viole de gambe, deux violons, l'alto et la basse. La sonorité fort particulière
du soliste s'accompagne d'un luxe d'ornementations, notamment dans les
cadences. Écrit pour un moine de Melk,
virtuose dudit instrument, il offre au fil des pages des combinaisons
instrumentales inédites (tel le duo de la guimbarde et de la viole de gambe). Le finale en forme de menuet est extrêmement
varié dans l'écriture quasi affolante pour le soliste, en particulier à la
cadence, succession de borborygmes les
plus invraisemblables. La Sonate « a due cori » ou « Divertimento a tre » (1759) se déploie en
quatre mouvements bien différenciés dont un pimpant scherzo et un joyeux
finale. Il en va de même du Divertimento a tre de 1767 dont la particularité est de faire
intervenir le violone, proche de la contrebasse. Le dire est ample et coulant. Albrechtsberger a beaucoup donné aussi dans le genre de la sonate
d'église. Ainsi de la Sonate pour violon, alto & cello (1794) en deux parties : un andante majestueux et une fugue allègre. Ou encore
de la Sonate pour deux violons, deux
altos & deux violoncelles. La Partita
pour viole d'amour, flûte & violon de 1773, combinaison là encore peu
usitée, apporte une note ancienne. La disposition de ses trois mouvements est,
là encore, inhabituelle, plaçant un adagio au début. Enfin la Sonate II a due cori »
de 1799 est la plus instrumentée du programme s'agissant d'un octuor (4
violons, 2 altos, 2 cellos) énonçant un andante grazioso (!) et une
fugue. Les forces réunies à partir de
la matrice qu'est l'Ensemble baroque de Limoges dirigé par Christophe Coin
qui joue aussi viole de gambe et violoncelle, et du Quatuor Mosaïques
offrent des lectures aussi accomplies que pénétrantes. Mérite le détour !
Wolfgang Amadeus MOZART : Sonate pour piano
n°11 en la majeur, « Marche turque » K. 331. Sonate n°2 en fa majeur
K. 280. Sonate n°13 en sib majeur, K. 333. Aldo Ciccolini,
piano. La dolce volta : LDV03.
TT : 52'54.
Ce disque est inattendu. À 85
ans, le grand pianiste français s'en revient à Mozart. « Mozart me fait du bien. Il m'aide à
vivre » souligne-t-il. Son analyse
ne s'arrête pas là car dans une interview figurant dans la plaquette du CD, il
livre son sentiment sur la manière d'interpréter cette musique pour
piano : trouver le rythme juste, ce qui est différent du tempo
métronomique et a à voir avec le ressenti de la musique, loin d'une approche
empreinte de froide objectivité. C'est
à Elisabeth Schwarzkopf qu'il doit d'avoir compris l'importance de ce paramètre. Pour bien servir Mozart il
faut « posséder le sens de la vocalité et de la couleur » dit-il
encore, et pour bien jouer ses sonates de clavier « connaître ses opéras
est une nécessité ». Le cantabile
est au cœur des trois opus abordés dans ce récital. La Sonate K. 331,
écrite à Paris, est d'une coupe quelque peu inusitée : un andante à
variations sur un chant populaire allemand, tour à tour tendre et énergique,
comme improvisé sous les doigts de Ciccolini, un menuet et son trio d'une belle
envolée, un presto « alla Turca », humoristique dans
l'alternance rapide majeur-mineur. L'atmosphère de la Sonate K. 333 est différente. La tension rythmique y est moins prononcée, notamment à
l'allegro initial, très allant. L'andante cantabile est un manifeste de l'abyssale profondeur
mozartienne tandis que l'allegro grazioso nous emmène au théâtre comme
deux personnes conversant. Logée entre
ces deux pièces conséquentes, la courte Sonate K. 280,
composée à Salzbourg par un musicien de 18 ans, affirme déjà toute sa
géniale manière. Un allegro plein
d'élan, d'une joie de vivre incroyable, suivi d'un adagio empli de gravité pour
finir sur un presto éclatant d'esprit, ce que l'interprète marque d'un jeu très
volontariste. Aldo Ciccolini
séduit par la clarté du phrasé, le chant maîtrisé, le refus de l'affect, la
franchise des traits rapides. Il dit
avoir choisi un instrument Bechstein de préférence au Steinway, trop confortable
à ses yeux et ainsi opté pour un son clair, pas enveloppé comme chez les pianos
du facteur de Hambourg. Une prise de
son aérée complète le bonheur de ces exécutions.
Wolfgang Amadeus MOZART : Concertos pour piano
et orchestre n°20 K. 466 en ré mineur & n°27 K. 595 en sib majeur. Mitsuko Uchida (piano & direction). The Cleveland Orchestra. Universal/Decca : 478 2596. TT : 65'51.
Pour la deuxième étape (après le
couplage des nos 23 et 24) de ce qui apparaît une seconde
intégrale au disque (elle était naguère accompagnée par Jeffrey Tate),
Mitsuko Uchida dirige du clavier le cultivé Orchestre de Cleveland. Elle rapproche sur ce CD les Concertos nos 20 et 27. Le Concerto KV 466,
un des deux seuls à utiliser le mode mineur, était admiré par Beethoven qui en
écrira les cadences. L'allegro
introductif est pris ici de manière très retenue dans son introduction
orchestrale mystérieuse, presque troublante. La cadence est fière, jusqu'à un soudain changement d'une grande douceur
lorsqu'elle reprend la syncope ronflante des premières pages orchestrales. La belle Romance distille une délicate
broderie jusqu'à ce que le mineur s'impose à la partie médiane, telle une
éruption d'une certaine violence. Uchida joue les traits du piano très détachés sur l'accompagnement
plaintif des bois. L'agitation du finale, introduit par l'embardée de l'arpège
du piano se poursuit dans un
développement volontariste, assez maîtrisé dans la présente interprétation. Il s'équilibre peu à peu, alors que le mode
repasse en majeur lors de la cadence très scandée, pour une péroraison emplie
de félicité retrouvée. Le Concerto KV 595,
le dernier écrit par Mozart, est empreint de mélancolie. S'y épanche un
sentiment de résignation dans une orchestration raffinée. Son larghetto calme
et radieux est paré par Uchida de belles ornementations. Le rondo final est aussi d'une émouvante
simplicité dans son balancement. Quelques turbulences troublent la partie centrale jusqu'à la cadence
récapitulative où la joie finit par l'emporter. Là encore, l'interprétation de la pianiste est d'un ton mesuré.
De manière plus générale, le geste pianistique est nerveux, toujours délicat,
presque sans surprise et sans prise de risque. La direction d'un effectif instrumental peu nombreux est bien rythmée,
sans hâte, un brin calamistrée.
Gioachino ROSSINI : Guillaume Tell. Opéra en quatre actes. Livret d’Étienne
de Jouy & Hippolyte Bis, assistés d’Armand Marnat & Adolphe
Crémieux, d'après la pièce Wilhelm Tell de Friedrich
von Schiller. Gerald Finley, John
Osborn, Malin Byström, Marie-Nicole Lemieux, Elena Xanthoudakis, Frédric Caton,
Matthew Rose, Carlo Cigni, Carlo Bosi, Celso Albelo, Dawid Kimberg, Dawide
Malvestro. Orchestra e Coro
dell'Accademia di Santa Cecilia Roma, dir. Antonio Pappano. 3 CDs EMI Classics :
0 28826 2. TT :
74'16 + 79'26 + 54'33.
Chant du Cygne de Pesaro, du
moins à la scène avant le long été indien que l'on sait, Guillaume Tell occupe une place à part parmi ses nombreux chefs-d'œuvre. Car il a bénéficié de
diverses influences, ce qui explique le mélange de ses ingrédients :
populaire, pictural et mélodramatique. On a décrié son livret, qualifié de « réduction ab absurdum » de la pièce
épique de Schiller, avec son « héros de carton sauvé de la banalité
uniquement par l'énergique musique de Rossini » (Lord Darvent). On le monte peu souvent eu égard à ses
proportions et ses exigences vocales. La récente production de l'Opernhaus Zürich fait exception (cf.
notre NL de janvier 2011). Au disque, les intégrales ne se bousculent
pas non plus : l'une dirigée par Lamberto Gardelli avec
Montserrat Caballé, Gabriel Bacquier et Nicolaï Gedda, un cast
difficile à surpasser (Decca), l'autre conduite par Riccardo Muti à la
tête de ses forces de La Scala (Philips). Antonio Pappano fait sien maintenant ce grand œuvre. Et de quelle manière ! À faire
croire qu'il s'agit d'un opéra de chef et pas seulement de gosiers. Indispensable, cette version l'est pour sa
direction qui n'hésite pas à jouer le jeu à fond, transcendant la grandiloquence
de bien des pages n'ayant de pompier que ce qu'on veut bien leur faire
dire. Dès les premières mesures de la
fameuse ouverture on le comprend : une énergie farouche comme un lyrisme
échevelé. Pappano souligne à juste
titre ce qui est « un immense défi architectural pour le chef ». La maîtrise des volumes est formidable comme
la place accordée aux diverses voix orchestrales. Ainsi dans les vastes ensembles (finales du IIe acte
avec ses trois chœurs ou du IVe quasi mystique comme le sera celui
de Faust de Gounod) ou lors des duos héroïques ou passionnés. Il se régale des traits d'orchestration
intéressants aussi bien martiaux que poétiques. Une rythmique rigoureuse souligne le martèlement de la basse
sous-jacente. La couleur raffinée de
maints passages est une révélation, dont les divertissements piquants et
enlevés. Son Orchestre de l'Accademia
di Santa Cecilia a la sonorité idoine. Le cast n'est hélas pas du même niveau. Le rôle-titre, loin
d'être le plus spectaculaire de la pièce, est défendu avec brio par
Gerald Finley qui, encore une fois, montre sa capacité d'énonciation et
d'articulation. Ce rôle de père
protecteur comme le sera le Rigoletto de Verdi, n'a qu'un grand air
« Sois immobile », lors de la scène de la pomme, magnifiquement
chanté sur le solo du violoncelle. Le
vrai timbre de ténor rossinien se fait rare surtout lorsqu'il requiert du
poids. Pavarotti refusa de s'y risquer
à La Scala. John Osborne
tient le challenge. Le mezza voce est ménagé avec goût, en particulier
dans l'aria « Asile héréditaire » débordante de mélancolie. La
prosodie complexe, le débit difficultueux et les riches accents en voix de tête
avec une note finale filée en falsetto, tout cela est de qualité. Si Marie-Nicole Lemieux, Hedwige, a fière
allure et offre à son beau timbre grave matière à s'épanouir, le soprano sombre
de Malin Byström est à la peine dans le rôle de Mathilde, il est vrai
quasi impossible à distribuer. La
ductilité des vocalises devient au fil des actes plus problématique. Reste que les curieux mélismes dont est paré
le chant de cette femme héroïque offrent quelques compensations. Du reste de la distribution le réconfort -
devant le dommage infligé à la langue de Molière par quelques basses italiennes
peu scrupuleuses - vient de Frédéric Caton, voix française pur jus.
Louis Ferdinand HÉROLD : Concertos
pour piano & orchestre nos 2, 3 et 4. Jean-Frédéric Neuburger, piano. Sinfonia Varsovia, dir. Hervé Niquet. Mirare (en
collaboration avec le Palazzetto Bru Zane) : MIR 127. TT : 59'19.
Une des faces cachées de Louis
Ferdinand Hérold est bien celle du compositeur de musique d'orchestre. Alors que le répertoire du concerto de
clavier était peu apprécié en France au début du XIXe siècle, le
jeune musicien en livre, coup sur coup, quatre. Il s'en dégage une certaine modernité. Si le premier est parvenu
de manière fragmentée, ce qui explique son omission dans la présente
interprétation, les trois autres méritent l'écoute. Le Troisième (1813), écrit à la Villa Médicis, préfigure
l'élan romantique. L'allegro maestoso a
grande allure, non loin de la manière de Mendelssohn. Mais la rareté reste l'andante « con violino
obligato », sans l'intervention de l'orchestre, en forme de sonate en
trois parties. Les deux instruments
dialoguent de manière amusée jusqu'à une virtuose cadence du violon. Cette intrusion d'une page chambriste est
des plus étonnantes. Le rondo final est
spirituel dans son énergique énoncé et la partie soliste y déploie une manière
démonstrative, ce que confirme une cadence emportée. Le Concerto n° 4 (
Rome, 1813) est concis, quelque 13 minutes et deux mouvements. Écrit en mineur, il est lui aussi fort
attrayant dans l'allegro d'une belle envolée, là encore quasi romantique
avec une fière entrée du piano et une véhémente progression. Le rondo offre un climat schubertien dans
son thème élégant et souple. Le
développement fait contraste avec ses modulations inattendues et quelque peu
hardies. Le Concerto n°2 (Paris, 1811), de vastes proportions, est d'une
envergure enviable pour l'époque. L'héroïque et le lyrique se partagent l'allegro maestoso. Une entrée en forme de cadence du soliste
préfigure un discours musclé. L'attrait reste le développement, séquence libre
avec force figures acrobatiques ou plus mesurées dans le ton d'une mélodie
opératique, comme du Bellini. Le
musicien d'opéra que sera Hérold n'est pas loin. Une romance très classique distingue l'andante, une suite de
variations aussi diverses qu'inventives chez le soliste et dans
l'accompagnement orchestral toujours renouvelé. La ritournelle du rondo conclusif est plaisante. De tout cela Jean-Frédéric Neuburger, le
plus jeune des professeurs actuels du Conservatoire de Paris, fait son
miel : un talent sûr, élégant et transparent, une maîtrise souveraine mais
aussi un flair peu commun. Hervé Niquet partage cet intérêt pour ces musiques inédites. On le sent, comme le pianiste, proche de la
passion.
Édouard LALO : Fiesque. Opéra en trois actes. Livret de Charles Beauquier d'après la pièce
de Friedrich von Schiller Der
Verschwörung des Fiesco zu Genua (« La conspiration de Fiesque de
Gênes »). Roberto Alagna, Michelle
Canniccioni, Béatrice Uria-Monzon, Franck Ferrari, Jean-Sébastien Bou, Armando
Gabba, Vladimir Stojanovic, Roman Nedelec, Alexandre Swan. Chœur de la Radio lettone. Orchestre
national de Montpellier Languedoc-Roussillon, dir. Alain Altinoglu. 2 CDs Universal/DG : 476
4547. TT : 37'45 + 75'09.
Édouard Lalo n'a pas, pour la
scène, conçu que le Roi d'Ys. Son premier opus, Fiesque, connut un sort bien curieux. Écrit de 1866 à 1868 d'après une pièce de
Schiller, dont le sujet fut également choisi par Gounod en 1864, mais sans
lendemain, l'opéra fut présenté à un triple concours de musique dont les lauréats
devaient voir le fruit de leur travail représenté à l'Opéra, à l'Opéra-Comique
et au Théâtre-Lyrique. Celui de Lalo ne
vint qu'en troisième position. Il dut
même le faire imprimer à ses frais. Pis ! Il ne devait pas trouver preneur pour être monté : l'Opéra de Paris
n'en voulut pas et La Monnaie, prête à l'accueillir en 1872, fit faillite
peu avant la mise en répétition. Il
sombrera dans l'oubli jusqu'en 2006 pour être redécouvert par René Koering
et être enfin créé au Festival de Montpellier. Certes, le livret manque d'envergure - mis à part quelques belles
figures pour illustrer une intrigue de conjuration menée par Fiesque contre la
famille régnante de Gênes, les Doria. On rencontrera ce même personnage dans le Simon Boccanegra de Verdi. Pour l'heure, cette sombre
histoire de conflits politico-familiaux laisse aussi à voir un fanatique
républicain, déterminé à empêcher Fiesque d'accéder au pouvoir et une histoire
de jalousie de l'épouse de Fiesque, laquelle n'apprécie guère les sentiments de
celui-ci pour Julie Doria. Mais la
musique ne manque pas d'intérêt, ce que la direction d'Alain Altinoglu,
habitué des découvertes estivales de Montpellier, démontre à l'envi. Lalo a puisé dans certaines de ses
compositions passées. Il en recyclera
d'ailleurs le matériel dans ses œuvres ultérieures dont Le Roi d'Ys précisément, Néron, pantomime chorale, et des pièces
instrumentales. L'inspiration est
souvent proche de Meyerbeer, dans les ensembles en particulier. Le langage a recours aux harmonies chromatiques. Il a de la flamme à revendre et de quoi
traiter des scènes de genre comme le bal masqué où Fiesque marivaude avec
Julie. Cet échange est précédé d'un
chœur dansé fort bien troussé durant lequel Fiesque accueille ses invités. La vigueur du discours le dispute à la
fraîcheur de l'expression, presque naïve. L'exécution en concert dont est issu le disque fait la part belle aux
chanteurs, Roberto Alagna en tête. Le monologue du IIe acte, titré « le rêve de
Fiesque » a grande allure, évoquant les aspirations de celui-ci à la
richesse et au pouvoir. La pureté de la
diction du ténor et son refus de l'emphase font merveille, tout comme une
brillante quinte aiguë. La distribution
est équilibrée, plus encore chez les messieurs que chez les dames :
Frank Ferrari campe de sa solide voix de basse le personnage de Verrina
sombre et négatif et Jean-Sébastien Bou celui de l'histrion Hussan avec esprit
et un timbre de baryton bien typé. On
eût aimé meilleure intégration des diverses prises pour unifier la mise en
scène sonore.
« Live in Zaragoza ». Enrique GRANADOS : Goyescas. Heitor VILLA-LOBOS : Bachiana brasileira n°4 pour
piano. Carlos FARINAS : Alta Gracia. Ignacio CERVANTES : Danzas cubanas (extraits). Ernesto LECUONA : Malagueňa. Jorge Luis Prats, piano. Universal/Decca : 478 2732. TT : 81'51.
Le pianiste cubain Jorge Luis
Prats, un colosse aux doigts d'argile, fut finaliste du concours Long-Thibaud
en 1977 aux côtés d’Ivo Pogorelich. Formé par les plus grands, Witold Malcużyński, Magda Tagliaferro et Paul Badura-Skoda, il
possède une technique impressionnante. S'il s'inscrit dans la lignée de son compatriote Jorge Bolet, c'est
bien sûr à Alicia de Larrocha qu'on pense devant le programme ibérique de ce
récital enregistré live à
Saragosse. Les Goyescas de
Granados composent une musique luxuriante et complexe dans quelque évocation
idéalisée de Goya. Ce sont
successivement le volubile morceau « Les compliments », l'échange
fort contrasté de « Dialogue à la fenêtre », la rythmique obstinée et ses
notes piquées de « Fandango à la chandelle », les arabesques
enjolivées de « Complainte » dotées de trilles immatériels, la
tempête de « Il Pelele », le pantin qu'on lance en l'air, avec
ses scansions animées et un jeu de plus en plus jouissif. Un accord massif introduit la dernière
pièce, « L'amour et la mort » : le contraste est saisissant et
Granados exige de l'interprète d'évoquer « comme un bonheur dans la
douleur ». Prats libère l'impact
de l'extrême grave du piano et des effets massifs puis soudain la poésie la
plus éthérée au ton espagnol si attachant. Chantre de son Brésil natal, Heitor Villa-Lobos le célèbre dans ses Bachianas brasileiras. La série n°4 est d'un grand classicisme
cependant. Le « Prélude » est
sérieux et ample, « Cotel » chante le folklore à la main droite sur
une large pédale de basse, « Aria » débute solennel avant de se muer en
une danse animée de plus en plus rythmée. Enfin « Dança » termine le cycle dans une belle
animation. Trois longs bis complètent
le récital : « Alta Gracia » de Carlos Farińas (1934-2002) cultive le rythme
particulier des grands écarts tout comme le grave de l'instrument. Cette musique moderniste est grisante. De Ignacio Cervantes (1847-1905), les Danses cubaines au charme naïf sont fort attractives avec quelques relents de samba et claquettes
obligées sur le bois du piano ! Enfin Malagueña d’Ernesto Lecuona
(1895-1963) est brillant dans ses gammes dévastatrices et son thème
déclamatoire. Les interprétations de
Jorge Luis Prats sonnent aussi vivantes que colorées.
Gabriel FAURÉ : Messe de Requiem op. 48 en ré mineur,
pour soprano, baryton, chœur mixte,
orgue & orchestre. Cantique de
Jean Racine, op. 11 pour chœur mixte & orchestre. Élégie op. 24 pour violoncelle &
orchestre. Pavane op. 50
pour chœur mixte & orchestre. Super flumina Babylonis pour chœur
mixte & orchestre. Philippe Jaroussky, contre-ténor, Matthias Goerne, baryton,
Éric Picard, violoncelle. Chœur de
l'Orchestre de Paris, Orchestre de Paris, dir. Paavo Jarvi. Virgin Classics : 50999 088470 2. TT : 67'46.
L'agnostique Fauré a sans doute
composé l'un des plus beaux Requiem de l'histoire. Un des plus originaux
aussi. Ainsi ne comporte-t-il pas de Dies irae à part entière, cette séquence étant incorporée au Libera me. La gestation en fut
longue. La première version de 1888 ne comportait que 5 mouvements. Celle pour grand orchestre, créée par
Paul Taffanel lors de l'Exposition universelle de Paris en 1900. Abondant en modes antiques, son atmosphère
est plus compatissante que religieuse. Fauré dira de ce requiem qu'il est « doux comme
moi-même ». On n'y compte pas les
bonheurs : l'ampleur de l'Introït, la douceur consolatrice de l'Offertoire,
la transparence du Sanctus, marqué par le doux balancement des arpèges
de la harpe, la fabuleuse ligne éthérée du Pie Jesu ou encore la
vision séraphique de l'In Paradisium qui transporte bien au-delà
des mots et des notes. La présente
exécution se signale par sa rigueur : Paavo Jarvi adopte des tempos
retenus. On mesure le travail de
cohérence déjà accompli avec l'Orchestre de Paris en quelques mois
(l'enregistrement en concert date de février 2011) : cordes graves
soyeuses, pupitres de bois soignés, violons au son plus plein, quoique pas
encore assez lisse. Surtout, il sait
habiter son interprétation. Le chœur
est éloquent dans son approche faite de discrétion et les solistes d'une
fervente pureté. L'idée de confier le Pie Jesu non à une soprano
mais à un contre-ténor n'est pas neuve. Elle prend cependant ici une dimension nouvelle car la voix de
Philippe Jaroussky est proche du sopraniste, ce qui confère à son
intervention quelque candeur. Matthias Goerne apporte pareille ferveur élégiaque à l'Hostias,
murmuré telle une prière, comme au Libera me, aspiration à la
délivrance. Le CD est complété par
diverses pièces passionnantes. Le Cantique de Jean Racine (1865),
qui valut à Fauré un premier prix de composition, introduit cette modulation et
ce rythme répétitif qui caractériseront sa musique et une belle mélodie
dépourvue de grandiloquence. Élégie pour violoncelle (1880), au geste tantôt discret tantôt ample, ne se départit
pas de quelque mélancolie (magistrale exécution d’Éric Picard). Pavane, contemporaine du Requiem, avec son solo de flûte dans le
grave, offre des modes archaïsants, là encore nimbés de mélancolie. Moins connu (c'est une 1re au
disque), est la pièce titrée « Super flumina Balylonis » de
1863, tirée des Psaumes, vaste lamento du peuple hébreu exilé. Le chœur mixte fait place à un quatuor de
solistes pour énoncer la plainte, la colère, la révolte puis la résignation en
des pages saisissantes. L'orchestre est
curieusement composé (bois par deux, quatre cors, trois trombones, timbales
& cordes). Là encore
l'interprétation de Jarvi et de ses forces parisiennes est de fort belle
facture.
Gabriel FAURÉ : « Intégrale de la musique de chambre pour cordes &
piano ». Sonates pour violon & piano n°1 op. 13 et n°2
op. 108. Pièces pour violon &
piano : Berceuse op.16, Romance op.28, Andante op.75,
Morceau de lecture. Sonates pour
violoncelle & piano n°1 op. 108 et n°2 op. 117. Pièces pour violoncelle & piano : Élégie
op. 24, Papillon op. 77, Romance op. 68, Sérénade op. 98,
Sicilienne op. 78. Trio pour piano
op. 120. Quatuor à cordes op. 121. Quatuors
pour piano n°1 op. 15 et n°2 op. 45. Quintettes pour piano n°1 op. 89 et n°2 op. 115. Morceau de lecture pour deux violoncelles. Renaud Capuçon (violon),
Gautier Capuçon, Raphaël Merlin (violoncelles), Gérard Caussé
(alto), Michel Dalberto, Nicholas Angelich (piano).
Quatuor Ebène. 5 CDs Virgin Classics : 070825 2 3.
TT : 67'05 + 62'52 + 44'45+69'02 + 68'3.
On peut être réticent devant les
coffrets encyclopédiques. Mais non pas lorsqu'il s'agit de Fauré et de sa
musique de chambre. Encore moins devant
pareilles interprétations ! Les
fins musiciens réunis sous la houlette de Renaud Capuçon mettent en avant
la transmission de quelque secret, d'une manière de sentir et de jouer si
typiquement française. Le mélange des
générations y est aussi pour beaucoup : les aînés (Dalberto, Caussé) côtoient
les jeunes loups (les frères Capuçon, Angelich, le
Quatuor Ébène). Fauré c'est une
émotion esthétique rare, ce que Vladimir Jankélévitch appelle « le
je-ne-sais-quoi » ( in : Fauré et l'inexprimable, Plon, 1974). Les compositions de musique de chambre
s'articulent en trois périodes : la première est séduisante et lumineuse,
aux harmonies chatoyantes quasi irrésistibles dès la première
écoute ; la deuxième est plus concise car elle est celle de la
maturité ; la dernière, la plus prolixe, abstraite, tournée vers l'intérieur,
ne se laisse pas aisément apprivoiser. C'est que le chemin vers l'ascèse est exigeant. Les présentes exécutions sont ordonnées par
genre. Les deux sonates pour violon
ouvrent le bal. La Sonate op. 13 (1877) est d'un lyrisme lumineux et y « plane un charme qui enveloppe
l'œuvre entière et fait accepter à la foule des auditeurs ordinaires, comme
choses toutes naturelles, les hardiesses les plus imprévues » dira
Saint-Saëns. Les deux derniers
mouvements, allegro vivo puis quasi presto sont pris par Renaud Capuçon
et Michel Dalberto à une allure modérée. La Seconde Sonate pour violon (1917, dédiée à Caplet & Cortot) est plus dense, offrant déjà cette
quintessence qui sera le maître mot de toute la production chambriste
fauréenne. Tout y est d'une concision redoutable, comme ramassé autour de
quelques thèmes choisis. La progression
est presque obsédante, l'archet modulant à satiété sur une ondulation du piano
interrompue par des conclusions abruptes. L'interprétation de
Renaud Capuçon, quoique n'évitant une légère dureté dans l'extrême aigu,
est d'une immense musicalité. Et c'est
plaisir d'entendre Michel Dalberto, si rare dans les studios. Les petites pièces pour cette même formation
sont purs joyaux telle la Berceuse (1879) dont la suave harmonie ne peut
laisser indifférent.
Les morceaux pour violoncelle et
piano ne sont pas moins désirables. La Première Sonate op. 109 (1927)
signale la pureté formelle, l'élan et le chemin d'ascèse : un long
soliloque intérieur enlumine l'andante dont les modulations sont fondées sur
l'enharmonie. La progression en forme
de ballade se prolonge au finale dans la plus parfaite abstraction. La Seconde Sonate op. 117 (1921) est d'une séduction plus immédiate quoique, là encore, le
message demeure plus ou moins caché. Les morceaux isolés pour le violoncelle sont bien connus dont Élégie op.24, brûlant épanchement se développant par paliers successifs, Papillon op. 77, pièce brillante et tendre, Romance op. 69, triomphe de
la modulation fauréenne telle une mélodie vocale, Sicilienne op. 78, à l'origine incluse dans une musique de scène du Bourgeois Gentilhomme puis intégrée, dans sa version orchestrale, à la suite d'orchestre Pelléas
et Mélisande. Le Trio pour piano & cordes op. 120 (1922/1923) fut presque « dicté » à Fauré par son
éditeur Durand : malade, le musicien parviendra malgré tout à élire ce
genre nouveau. Le geste y est ample
comme les chutes, en fin de parcours, abruptes. Les trois instruments sont traités avec tendresse même si les
deux cordes dans leur effusion créent cette ardeur polyphonique typique de la
dernière manière. Le Quatuor à cordes op. 121 marque aussi l'unique incursion de Fauré dans
ce genre si délicat. Il lui aura fallu
attendre le grand âge pour le coucher sur le papier. Mais quelle beauté : une adieu non pas déchirant, mais
apaisé. On a déjà dit tout le bien de
l'interprétation du jeune Quatuor Ébène, inscrite dans un CD rapprochant
cette pièce des quatuors de Debussy et de Ravel. Il est dommage que la plaquette du nouveau coffret omette de
donner des indications sur cette œuvre particulière.
Les quatuors avec piano sont au
cœur de la production chambriste. Le Quatuor
n°1 op. 15 (1880) marque le premier essai de Fauré dans le genre piano
et cordes. Et un coup de maître ! Il lui aura pourtant fallu deux ans pour en mener à bien l'écriture,
mélange subtil du majeur et du mineur. Admirables y sont les unissons délicieux, les traits solistes délicats
dont un piano « liquide », un lyrisme souverain sans parler de la
rythmique sautillante du finale au lyrisme débridé. Le Second Quatuor op. 45 (1887), contemporain du Requiem, est plus développé encore et
généreux. C'est pour Jankélévitch « l'œuvre rayonnante de la
maturité ». La coupe en quatre
mouvements distille, entre autres, le jaillissement de l'allegro initial aux
élégantes harmonies des cordes, comme le tourbillon de l'allegro suivant,
scherzo vertigineux dont le piano brode le dessin (merveilleux Angelich). Que dire encore du chant nocturne de
l'adagio marqué par la cantilène de l'alto et dont les ultimes pages
transportent vers quelque au-delà ! La lecture des Capuçon's, Caussé,
Dalberto (n°1) et Angelich (n°2) est une merveille d'équilibre. Les quintettes offrent autant de félicités. Le Premier
Quintette offre dans son flux continu une sorte de mouvement perpétuel
seulement interrompu par quelques soubresauts. Le geste est ample sans rien perdre de sa transparence. Fauré aura
peaufiné cette pièce durant de longues années, de 1891 à 1906. Le Second
Quintette op. 115 (1921) est plus introverti. Se signalent un moderato
initial aux vastes crescendos conduisant à une sorte d'apothéose, un andante au
chant soutenu des cordes sous les arabesques du clavier. Le dire fauréen y est de l'ordre de l'impalpable,
de l'indéfinissable, de l'ineffable. Mais toujours fidèle à un style unique, un langage fondé sur l'ambiguïté
tonale-modale-chromatique selon Jean-Michel Nectoux. Une somme indispensable !
Roberto ALAGNA : « Mes plus grands rôles à l'Opéra ». Extraits de Roméo et Juliette (Gounod), Werther, Manon (Massenet), Carmen (Bizet), Lucie
de Lammermoor (Donizetti), Don Carlos, Le Trouvère (Verdi), La Bohème, Tosca, La Rondine, Gianni
Schicchi, Le Villi (Puccini). Roberto Alagna (ténor). Avec Angela Gheorgiu, Natalie Dessay, Inva Mula, Leontina Vaduva, Karita
Mattila (sopranos), Waltraud Meier, Larissa Diadkova (mezzo-sopranos), Thomas
Hampson (baryton), José van Dam (basse). Orchestre du Capitole de Toulouse, dir. Michel Plasson. Orchestre
de l'Opéra national de Lyon, dir. Evelino Pidò. LSO, Orchestre symphonique de
La Monnaie, Orchestre de Paris, Philharmonia Orchestra, dir. & piano : Antonio Pappano. 3 CDs
EMI Classics : 6789782 7. TT : 75'39 +
79'50 + 66’58 & bonus.
À l'occasion de la rentrée de
Roberto Alagna à l'Opéra Bastille dans Faust, sa maison de disques met
sur le marché un album généreux regroupant ses « plus grands
rôles ». En fait, dix de ses rôles
de prédilection auxquels il ne manque que ledit Faust... Pour ce faire, on a puisé dans les
enregistrements maison effectués entre 1996 et 2003. Des trésors assurément. Telle cette version française de Don Carlos,
donnée naguère au Châtelet, où le ténor émeut par sa juvénilité comme dans le
rôle de Mario de Tosca. Le choix
est judicieux. Et si on préfère pour La Bohème sa prestation captée
ultérieurement pour Decca avec Gheorgiu, et si on rechigne à apprécier un Trouvère jusqu'au-boutiste, le ténor outrepassant les limites de sa tessiture favorite,
voilà bien des interprétations de référence. On y admire un engagement légendaire. Car Alagna ne se ménage pas, il se donne à fond que ce soit à la scène
ou en studio. La tension qu'il apporte
à cet exercice sans public rejoint celle de ses apparitions au théâtre. Le refus du faux-semblant, même lorsqu'il s'en tient à un parti pris de
vedettariat. La leçon de style encore
dans une ligne de chant soignée jusqu'au détail. Une diction idéalement articulée, en français notamment. On peut
en juger non seulement par les « grands » airs émaillant ces divers
rôles mais aussi lors de scènes entières. Ses partenaires appartiennent à la crème des solistes vocaux, celle fort
riche de l'écurie EMI-Virgin : Angela Gheorgiu bien sûr, avec
laquelle il forma ce fameux couple qui orna tant d'intégrales et monuments du
répertoire au tournant du siècle. On ne
lésinait pas alors à enregistrer une nouvelle interprétation. Il y a aussi Dessay dans la production,
donnée à Lyon, de Lucie de Lammermoor, version française si attachante du chef-d'œuvre de
Donizetti. Ou encore le fabuleux tandem
Mattila-Meier enflammant Don Carlos. Ces dix rôles et faire-valoir du ténor ne suffiront pas à cerner
le phénomène Alagna. Parmi tant
d'autres, célèbres et moins connus, il y a désormais le Fiesque de Lalo
(voir ci-dessus). Et cela
devient même peu pour l'infatigable ténor qui, après un long passage à travers
d'autres contrées, recentre, ces temps, ses activités sur le cœur de
métier. Ne se promet-il pas d'aborder
sous peu Maurizio d'Adrienne Lecouvreur, Calaf de Turandot, voire
même d'aborder Gluck à Garnier. Pour
l'heure ce coffret est un must pour
tous ses admirateurs et sans doute plus encore pour ceux qui ne connaissent pas
encore ses interprétations. Ils peuvent
être assurés d'entendre un florilège de pages parmi les plus inspirées du
répertoire interprétées par un de ses plus ardents avocats.
Jean-Pierre Robert.
DVDs
Gustav MAHLER : Symphonie n° 9. Lucerne Festival Orchestra,
dir. Claudio Abbado. Accentus Music & Arte Edition : ACC20214. TT : 95'.
Ce DVD est la captation du
fabuleux concert donné lors du Festival de Lucerne 2010. Sommet de l'œuvre
orchestrale de Mahler, sa Symphonie
n° 9 se compose de trois parties : l'andante comodo initial
marqué par le pressentiment de la mort, les deux mouvements centraux, un
Ländler en forme de valse presque moqueuse suivi d'un rondo burlesque que
distingue un frénétique fugato, enfin le vaste adagio métaphysique final où, peu à peu, se désagrège la matière sonore.
L'exécution de Claudio Abbado est lumineuse et pénétrante, la simplicité
triomphant des textures les plus tourmentées. D'une totale lisibilité aussi, allégeant la coulée mystérieuse de
Mahler. Elle étire le temps dans une maîtrise peu commune du silence. Son
orchestre - constitué de solistes renommés qu'on a plaisir à retrouver au fil
de l'image, les Gutman, Meyer, Zoon ou autres membres des Berliner
Philharmoniker et du Mahler Chamber Orchestra - ménage un son d'une rare
limpidité. L'intérêt du DVD est de montrer le détail de la gestuelle du grand
chef, l'empathie évidente avec cet idiome musical magnifiant l'orchestration si
différenciée de Mahler et les combinaisons originales, parfois bizarres
d'instruments. Comment aussi il amène
ses musiciens au bout d'eux-même à l'écoute de la moindre inflexion. L'immense
andante comodo livre des oppositions de dynamiques inouïes et des
transitions magistralement amenées. Ainsi de la péroraison douce d'où émergent
la clarinette puis la flûte, bientôt relayée par le solo de violon. La valse du
Ländler au rythme arraché mais non cassant laisse affleurer le grotesque et le
rondo burlesque apporte son lot d'assemblages de timbres curieux. Abbado allège soudain le débit et la
résolution finale laisse pépier les bois sur les grands arpèges de la harpe
puis l'envoûtant solo nocturne de l'alto. L'adagio est abordé ample avec ses phrases qui s'agrègent les unes aux
autres dans un crescendo fervent, longue montée vers une sorte d'au-delà. L'ultime séquence progresse de plus en plus
lente et ppp sur d'imperceptibles impulsions du chef et une accentuation
des silences. La prise de vues restitue
l'atmosphère d'un moment d'exception : visages concentrés des musiciens,
expression tendue du chef pétrissant avec tendresse une pâte qu'il épure
doucement. Un beau sourire furtif s'en
échappe parfois, comme timide. Le
dernier mouvement verra une nouvelle manière de saisir le travail d'Abbado,
filmé de plus près, offrant le seul visage transfiguré par un bonheur interne
et le bras puis la main gauche modelant la vague sonore tandis que l'éclairage
se fait plus tamisé sur le plateau. À
voir et à méditer !
Jean-Pierre Robert.
Mark-Anthony TURNAGE : Anna Nicole. Eva-Maria Westbroek (Anna Nicole),
Gerald Finley (l’avocat Stern), Alan Oke (J. Howard
Marshall II), Susan Bickley (la mère), Peter Hoare (Larry King). Chœur
& Orchestre du Royal Opera Covent Garden, dir. Antonio Pappano.
Mise en scène : Richard Jones. Décors : Miriam Buether. Costumes : Nicky Gillibrand. Réalisation pour la BBC : Francesca Kemp. Opus Arte : OA 1054 D.
Si vous n’avez pas peur des
couleurs flashy ni du mauvais goût
volontairement poussé jusqu’à un étalage criard, vous ne vous ennuierez
pas ! C’est qu’il s’agit, en nous jetant à la figure les dépravations de
la société médiatique, d’en dénoncer vigoureusement les criminelles déviations
à travers une histoire lamentablement vraie. Souvenez-vous : au cours des années 90, on avait beaucoup
parlé de cette playmate qui avait
réussi à se faire épouser par un (plus qu’) octogénaire libidineux,
milliardaire du pétrole. Le livret de
Richard Thomas, excellemment troussé (or un découpage théâtral efficace
n’allait pas de soi, à partir de ces éléments d’actualité), nous raconte toute
l’histoire de cette bimbo issue d’une
minable bourgade du Texas, devenue strip-teaseuse dans un bar : pour
attirer plus de regards masculins, donc plus d’argent, elle passe sous le
bistouri d’un chirurgien esthétique peu scrupuleux qui l’orne d’énormes
implants mammaires en silicone (au prix d’un invincible mal de dos, donc d’une
fatale dépendance médicamenteuse), avec pour résultat le riche mariage
sus-mentionné. Sans surprise, le
vieillard (joyeusement campé par Alan Oke, qui simule des gestes
parkinsoniens mais déploie une santé vocale sans faille) décède vite, et des
années de conflit judiciaire ne résoudront pas la question de l’héritage,
tandis qu’Anna Nicole sombre dans la drogue, l’obésité, et dans les bras
de l’avocat véreux pourvoyeur de substances toxiques (magnifique
Gerald Finley, plus connu pour ses incarnations mozartiennes si réussies),
entraînant dans sa déchéance son fils qui meurt d’une overdose avant qu’elle ne
connaisse le même sort. Mais le sel de
l’histoire est que cette déchéance se déroula sous les objectifs vampiriques
des cameramen et photographes (une scène, dans l’opéra, reconstitue même le talkshow du célèbre Larry King), et
que l’on assista – peut-être pour la première fois, mais pas la dernière,
hélas ! – à l’engrenage de la trash-TV fabriquant de toutes pièces
l’hyper-célébrité d’une personne qu’aucun mérite n’aurait dû destiner à cela
(bien au contraire !), jusqu’à l’enfoncer dans sa spirale infernale.
Pour répondre à la commande que
lui avait passé Covent Garden (nous voyons ici la représentation du 26
février 2011), le musicien anglais Mark-Anthony Turnage, qui ne s’encombre pas
de préjugés esthétiques, réagit en fait à l’américaine, s’insérant dans un
concept de "show" où le librettiste et le metteur en scène font jeu
égal avec lui pour "composer" le spectacle. Très américaine aussi, sa musique intégrant des éléments venus de
la comédie musicale, et des sonorités jazzy ou pop. Mais quelle postérité attend cette partition ? Nous ne
cessons de réécouter au disque des opéras du passé aux livrets impossibles,
sans le secours visuel du spectacle scénique, pour la seule beauté de leur musique
qui vit de sa génialité propre. Ici,
nulle trace d’originalité créatrice chez Turnage : son style fonctionnel
de "musical" s’intègre efficacement à ce que l’on voit sur scène, et
sa part est indissociable de l’ensemble. Écoutée séparément, elle ne se
distinguerait par rien de personnel. La
mise en scène drolatique s’appesantit sur le kitschissime "made in
USA" pour mieux le caricaturer. Le
librettiste n’a pas fait dans l’économie, puisque l’ouvrage aligne un grand
nombre de personnages, et l’on doit féliciter la troupe britannique qui évolue
avec tant d’aisance dans la parodie. Naturellement, la palme revient à la
soprano Eva-Maria Westbroek, qui ose une incarnation débridée, de l’aguicheuse
"putain" (le mot "whore"
figure bien dans le livret) à la naïveté d’une fille immature propulsée dans
une histoire qui la dépasse. Il n’est
pas inutile de voir la cantatrice au naturel dans l’interview proposée en
bonus, belle femme aux formes "normales" et à l’élégance sobre, pour
mesurer l’inénarrable composition d’actrice qu’elle accomplit dans ce
rôle. Il faut aussi mentionner
Susan Bickley, qui réussit une incarnation pleine de nuances de la mère
réprobatrice. Le spectacle de notre temps renvoyé aux spectateurs de notre
temps...
Giacomo PUCCINI : Turandot. Maria Guleghina (Turandot), Marcello
Giordani (Calaf), Marina Poplavskaya (Liù), Samuel Ramey (Timur), Charles
Anthony (Altoum), Joshua Hopkins (Ping), Tony Stevenson (Pang), Eduardo Valdes
(Pong). Chœur & Orchestre du Metropolitan Opera de New York, dir.
Andris Nelsons. Mise en scène et
décors : Franco Zeffirelli. Costumes : Anna Anni et Dada Saligeri. Réalisation : Gary Halvorson. Decca (HD Live) : 074 3426.
La célèbre production de
Zeffirelli au Met peut concourir pour le titre de mise en scène la plus chère du
monde. Un fastueux picturalisme y occupe chaque centimètre carré de la vaste
scène new-yorkaise, les costumes étalent une beauté à couper le souffle. Mais pourquoi, à l’intérieur de la même
société (Universal), nous resservir sous étiquette Decca cette mise en scène
dans une reprise du 7 novembre 2009, alors que nous l’avions déjà chez DGG
dans une version de 1988 autrement plus gratifiante. Car, quitte à en avoir plein les mirettes, autant en avoir aussi
plein les oreilles ! Le spectacle
de 1988 alignait, sous la baguette de James Levine, les souffleries
d’orgue de Plácido Domingo et Eva Marton, la bouleversante et pure
Leona Mitchell (Liù), Paul Plishka (Timur), le trio enjoué Brian Schexnayder,
Allan Glassman, Anthony Laciura (Ping, Pang, Pong), et le vénérable déjà âgé de
86 ans !) en Altoum. On a donc
l’impression de revoir aujourd’hui le spectacle en petites pointures.
Marcello Giordani s’en tire
comme il peut (ah, la prononciation de Nessu- -orma !),
mais n’est pas Domingo qui veut ; Maria Guleghina ne semble absolument pas
concernée par ce qu’elle raconte, que ce soit dans son jeu inexistant voire
carrément maladroit, ou dans son chant monotone à force de traits épais. Les trois chambellans manquent de vivacité,
dans leur jeu comme dans leur diction, Marina Poplavskaya s’écoute chanter,
donc livre une interprétation fort extérieure, Samuel Ramey n’est plus en état
d’assurer la tenue de sa voix, Charles Anthony (dont on fêtait les 55 ans
de carrière au Met) nous la joue sénile, faisant passer Hugues Cuénod pour
un jeune homme. La direction d’Andris Nelson manque de majesté et
d’épanouissement dans le lyrisme ; de surcroît, la mise en place entre
orchestre et plateau accuse des flottements (surtout au Ier Acte). Et que dire de la grossière interruption
qu’il inflige au flux musical pour laisser le public acclamer Marcello Giordani
après un Nessun dorma qui n’en
mérite pas tant ! Même les
maquilleuses ne sont plus ce qu’elles étaient, et l’on s’amuse des faux plis
gondolant les crânes en latex des chambellans. Alors, si vous voulez vraiment vous extasier devant une Chine de rêve,
reprenez le DVD de chez DGG.
Giuseppe VERDI : Aida. Violeta Urmana (Aida), Johan Botha
(Radamès), Dolora Zajick (Amneris), Carlo Guelfi (Amonasro), Roberto Scandiuzzi
(Ramfis), Stefan Kocán (le Roi). Chœur
& Orchestre du Metropolitan Opera de New York, dir.
Daniele Gatti. Mise en scène : Sonja Frisell. Décors : Gianni
Quaranta. Costumes : Dada Saligeri. Réalisation : Gary
Halvorson. 2DVDs
Decca (HD Live) : 074 3428.
Autre « recyclage »,
la production de Sonja Frisell, très inspirée des monuments égyptiens, que DGG
(toujours en 1988) avait publiée avec Plácido Domingo et
Sherrill Milnes sous la direction de James Levine ! Mais une confrontation supplémentaire se
déroule sous la même étiquette Decca, puisque son catalogue affiche l’Aida du 7 décembre 2006 à la Scala
de Milan, dans la mise en scène pharaonique (cela s’impose !) de
Franco Zeffirelli et sous la baguette de Riccardo Chailly : or
le DVD milanais, outre Roberto Alagna qui rencontra là les déboires que
l’on sait, réunissait déjà Violeta Urmana et Carlo Guelfi. La cantatrice lituanienne, ex-mezzo soprano
grimpée à l’assaut des rôles de soprano, assume plutôt bien le passage des ans
(le présent DVD nous restitue le spectacle du 24 octobre 2009), mais le
baryton, déjà déplaisant à entendre en 2006 en raison de son timbre peu
séduisant et d’un vibrato instable, ne s’est pas arrangé ; de toute
manière, on connut d’autres Amonasro à l’interprétation moins monolithique
quant à la psychologie du personnage. Passons sur les basses (Ramfis, le Roi) à la voix mal assurée (défaut
qui devient endémique), et sur une Amnéris peu inspirante, quand son jeu
théâtral n’est pas franchement ridicule.
À l’opéra, le dilemme est souvent
entre des interprètes (mâles ou femelles) à la silhouette de top modèle
mais au réservoir d’air cachexique, ou des physiques à la Botero abritant des
soufflets de forge dans leur cage thoracique, ce qui s’avère tout de même bien
utile pour affronter les grands rôles dans de vastes théâtres. Fermons donc les yeux et saluons en
Johan Botha, éminent wagnérien, l’un des rares ténors à chanter l’air
fameux Celeste Aida avec
les nuances et les paliers de pp, ppp, et jusqu’à pppp détimbrés, réclamés par le compositeur (la référence absolue
demeurant Carlo Bergonzi dans son anthologie des airs pour ténor de Verdi
parue en coffret chez Philips) ; à entendre bramer tant de ténors, peu de
gens savent que l’ultime sib aigu de
l’air est marqué pp morendo ! Ailleurs encore, au IVe Acte
notamment, Johan Botha chante toutes les sfumature de dynamiques soigneusement indiquées par Verdi. Convenez que ces dégradés requièrent autrement plus de contrôle
du souffle que la facilité consistant à clamer le rôle (et pas seulement Celeste Aida) toutes voiles dehors,
travers auquel n’échappe pas Roberto Alagna lors du spectacle milanais où
il accumule tout du long les pires conventions du ténor "héroïque",
gestes compris. Mais le Radamès sculpté
par un compositeur au sommet de sa maturité en 1870, ce n’est pas cela, et
sachez, chers lecteurs, qu’en écoutant le rôle interprété par Johan Botha,
vous entendrez la partition de Verdi, vertu si exceptionnelle qu’elle mérite
d’être soulignée. De même, si les
baguettes de James Levine et de Riccardo Chailly emmenaient les
troupes avec éclat, l’on remarque chez Daniele Gatti, dès les premières
notes du Prélude, une finesse de
phrasé, une souplesse agogique qui font merveille dans les pages
impressionnistes de l’Acte du Nil. Certes, on eût aimé une direction d’acteurs animant les décors et
costumes fidèlement "à l’antique", certes le DVD milanais
marquait un net avantage en matière de chorégraphie, mais on conseille tout de
même un détour par ce spectacle new-yorkais pour le chant nuancé de
Johan Botha et la direction, d’une musicalité attentive, de
Daniele Gatti.
Robert SCHUMANN : Manfred. Chœur du
Städtischen Muzikvereins zu Düsseldorf, Düsseldorfer Symphoniker, dir. Andrey Boreyko. Avec cinq comédiens dont Johann von Bülow (Manfred), Dieter
Prochnow (l’Abbé) et quatre solistes vocaux. Création visuelle de Johannes Deutsch. Réalisation pour la ZDF/Monarda Arts : Ellen Fellmann.
Arthaus : 101 575.
Très original spectacle que
celui-ci, monté pour le bicentenaire du musicien dans la ville et avec les
forces qu’il dirigea en son temps... même si Manfred fut (secours immanquable !) créé par Liszt à
Weimar. Schumann a composé une suite de
numéros qui ne constituent pas à proprement parler une musique de scène,
puisque le poème Manfred de Byron
n’est pas du théâtre, tout en représentant une forme sublimée de commentaire
scénique, puisque Byron décrit son ouvrage comme du « théâtre
mental » (vous me suivez ?). Autant dire que l’objet musical non identifié de Schumann est rarement
joué dans son entier (seule l’Ouverture figure au programme des orchestres) car il existerait difficilement de manière
autonome. Alors Düsseldorf choisit de
l’honorer par une mise en scène que les moyens actuels rendent plus fidèle à
l’objectif originel : la musique est insérée à sa juste place dans le
texte de la traduction allemande de Karl Adolf Suckow (1839) qu’utilisa
Schumann (rassurez-vous, des sous-titres vous sont proposés), et Johannes
Deutsch l’accompagne d’une création vidéographique projetée sur un écran en
forme d’œil, s’inscrivant judicieusement sous la coupole de la splendide
Tonhalle de Düsseldorf, ex-planétarium. Le traitement électronique des images superpose des strates rendues
surréalistes (les montagnes suisses du décor rêvé de Byron, des silhouettes fantomatiques) et nuancées de
très beaux jeux de couleurs, tandis que l’acteur principal (qui s’appelle
von Bülow, cela ne s’invente pas !), enfermé et filmé dans une
capsule suspendue au-dessus de l’écran, n’apparaît que par son visage projeté
en surimpression du flux d’images. L’invention du microphone permet de rendre mieux justice au concept de
monologue intérieur de Byron commenté en douceur par les états d’âme musicaux
de Schumann : le comédien peut murmurer son texte, il sera de toute manière
entendu, et dosé en fonction de l’orchestration dans les passages où il
fonctionne en mélodrame. Dimension
surréaliste aussi, quand sa voix venue d’ailleurs dialogue avec des personnages
présents sur le plateau. Cette création doit donc tout à la technologie
moderne, mais elle restitue enfin l’imaginaire fantasmé des deux génies
romantiques.
“HOLST in the bleak
midwinter”, un film
documentaire de Tony Palmer. Gonzo Multimedia : TP-DVD173 (distr. Codaex).
La structure assez “fouillis” de
ce documentaire n’aidera pas les non-initiés à situer Gustav Holst dans
l’histoire musicale de son pays et de son époque. Les spectateurs ayant au préalable de claires notions de sa
biographie et des styles anglais pourront picorer ici et là quelques notations
intéressantes. On eût souhaité un portrait clairement construit et musicalement
instructif de cette figure attachante qui mériterait d’être mieux approfondie
au-delà du succès planétaire des seules... Planètes. Mais combien d’autres œuvres de valeur
ignorées de ce côté-ci de la Manche ! Indiquons à ce propos à nos lecteurs toulousains que le Chœur du
Capitole donnera, le 14 mars 2012, les Hymnes
choraux tirés du "Rig Veda" (Holst avait appris le
sanskrit), au sein d’un alléchant programme comportant également des pièces de
Janáček et Ghedini. Immanquablement, des images indissociables d’un
certain "folklore" anglais feront pouffer de rire les "froggies" (nous vous en laissons la
surprise !). Une délicieuse
vieille dame – comme on n’en fait plus
hors d’Angleterre – apporte sa touche
attendrissante : Imogen Holst, fille du compositeur, bien connue pour
avoir été la fidèle assistante de Benjamin Britten. Étant
"admis" (!!!) une fois pour toutes que la musique insulaire n’atteint
pas les oreilles continentales, aucun sous-titrage n’a été prévu (en quelque
langue que ce soit), ce qui en limite la portée à la clientèle anglophone.
Sylviane Falcinelli.
Marcel Proust, le
musicien. Avec Anthony Leroy (violoncelle),
Sandra Moubarak (piano), Tedi Papavrami (violon), Magali Léger
(soprano). Livre-disque, 2 CDs
Decca/Universal : 4764693.
Romane Bohringer,
Michale Lonsdale & Didier Sandre nous lisent ici les pages les
plus musicalement significatives de Du côté
de chez Swann et de La Prisonnière. Judicieusement illustrées par des œuvres de
César Franck (Sonate pour violon
& piano, transcription pour violoncelle), Reynaldo Hahn (Si mes vers avaient des ailes et À Chloris, transcription pour
violoncelle & piano), Camille Saint-Saëns (extraits des Sonate pour violoncelle & piano op. 123 et Sonate pour violon &
piano op. 75, par Jascha Heifetz et Emmanuel Bay), Ludwig
van Beethoven (6e mouvement du 14e Quatuor, par le Quatuor Capet),
Richard Wagner (Prélude du 3e acte de Tristan und Isolde, par le Bayreuther Festspiele, dir.
Karl Bohm), Claude Debussy (Sonate
pour violoncelle & piano). Un original et fort heureux parcours
entre les textes de l’écrivain et les musiques qui l’auront inspiré.
Darius Milhaud et sa
musique, de la Provence au monde. Un film de Cécile Clairval-Milhaud. Coffret de 2 DVDs
Steinval Éditions : ARC 1049.
Éblouissant document sur Darius
Milhaud (1892-1974), compositeur que l’immensité même de son catalogue aura longtemps desservi (443 opus). Puissante et originale est pourtant l’œuvre
d’un musicien qui collabora avec les plus grands écrivains : Claudel,
Cocteau, Cendras, Gide, Desnos, Lunel, Supervielle, Élie Wiesel… et dont
les décors et costumes des opéras et ballets furent réalisés par Léger, Masson,
Picasso, Braque… Le présent film (60’)
nous conduit sur les lieux où se déroulèrent les événements importants de sa
vie et de sa carrière artistique, récit accompagné des commentaires de Darius
lui-même, de son épouse, Madeleine (1902-2008) - alors largement centenaire -,
de son fils Daniel, ainsi que d’anciens élèves ou amis :
William Bolcom, David Bernstein, Katharine Warne, Manoel Corrêa
do Lago… Nombreux bonus documentaires & musicaux (2h30’) :
Le logis du Bras d’Or / Darius Milhaud & le Brésil / La cheminée du roi René,
op. 205 / 1er et 18e Quatuors à cordes… Si m’en croyez, précipitez-vous !
Richard STRAUSS (1864-1949) : Capriccio, « Conversation musicale » en un acte. Livret de
Clemens Krauss & Richard Strauss. Renée Fleming
(la comtesse), Dietrich Henschel (le comte), Rainer Trost (Flamand,
le musicien), Gerald Finley (Olivier, le poète),
Franz Hawlata (La Roche, directeur de théâtre), Anne Sofie
von Otter (la Clairon, actrice). Orchestre de l’Opéra national de Paris, dir. Ulf Schirmer.
Mise en scène : Robert Carsen. 2 DVDs Arthaus Musik (www :
107 327. TT : 148’00.
De ce chef-d’œuvre tout
d’élégance et d’humour – dernière œuvre lyrique de R. Strauss, composée en
1942 au cœur de la Seconde Guerre mondiale -, l’Opéra de Paris proposait,
en 2004, une éblouissante production. Le metteur en scène,
Robert Carsen, en a fort imaginativement transposé l’action - censée
se passer vers 1770 dans le salon d’un château près de Paris - à l’époque
de la création de l’ouvrage (28 octobre 1942, au Staatsoper de
Munich). Qualité de la régie, alliée à
la splendeur des voix, la beauté des protagonistes, la rutilance des décors
& costumes, tout concourt à faire de ce joyau opératique (capté live au Palais Garnier) un spectacle
inoubliable. Ne serait-ce que pour son
sublime final, encore exhaussé par l’incomparable Renée Fleming…
Francis Gérimont.
Henri DUTILLEUX : Ainsi la nuit. Film-hommage de Vincent Bataillon. DVD « Les Films de La Lys » (www.collection-opus.fr / lesfilmsdelalys@free.fr). 18 €.
Le 10
octobre dernier avait lieu, en avant-première, à l'Auditorium Debussy-Ravel de
la Sacem, la projection d'un film consacré à Henri Dutilleux et, plus
précisément, à son quatuor à cordes Ainsi la Nuit. Moments d'intense émotion à la découverte
d’un court métrage à la fois sobre et fascinant, admirablement conçu et
réalisé par Vincent Bataillon. L'image d'Henri Dutilleux (sur laquelle s'ouvre et se referme le film) -
vu de dos, face à l'immense étendue de la Loire - encadre des épisodes
musicaux. L'œil écoute avec
enchantement, cependant que l'oreille discerne toute la subtilité des
nuances. Grâce au talent des musiciens
du Quatuor Rosamonde : Agnès Sulem-Bealobroda, Thomas Tercieux,
Jean Sulem, Xavier Gagnepain, l'analyse d’Ainsi la Nuit est développée en reconstituant minutieusement la
genèse de l'œuvre. Leurs commentaires, intelligemment dosés, retracent
rétrospectivement les étapes qui lui ont donné naissance et complètent
l'interprétation exemplaire de ce chef-d'œuvre. Comme Debussy et Ravel, Henri Dutilleux n'a écrit qu'un
quatuor à cordes, cette haute forme de l'art qui porte en elle les exigences de
la perfection, qu'il rénove miraculeusement.
Pierrette
Mari.
POUR LES PLUS JEUNES
Children’s Nursery Rhymes & Singing
Games. Forum (www.regisrecords.co.uk) : FRC 6143. TT : 63’58.
Il s’agit là d’une compilation
de 33 chansons enfantines & jeux musicaux – toutes mélodies de haute tradition britannique, dont certaines
empruntées des Tommy Thumb’s Pretty Song
Book (1744) ou Mother Goose’s
Melody (1760)… Enregistrements
datant des années 1960, remarquablement remastérisées.
Alain SCHNEIDER : Dans ma rue. La Boutique de Victorie (www.club-tralalere.com) : 278 231-9. Distr. Universal. TT : 52’06.
Entouré de musiciens
polyinstrumentistes (violoncelle, guitares, clavier, percussions) &
choristes, Alain Schneider nous livre ici l’enregistrement live de son spectacle donné, en 2010,
lors du Festival Mino à l’Espace Cardin (prestation pour laquelle il
obtint le Grand Prix Adami).
Dominique DIMEY : Des voix pour la
planète. La Boutique de Victorie
(www.club-tralalere.com) : 278 200-0. Distr. Universal. TT : 57’55.
Jamais déçus par la merveilleuse
Dominique Dimey ! Textes
joyeusement poétiques et musiques fort bien venues - dues, pour la plupart, à
Pierre Bluteau qui dirige également un orchestre diversifié (clavier, cordes et percussions classiques, mais
aussi banjo, koto, charango, kena, naï, violon cajun, flûte ethnique,
violon chinois…). Quatorze
titres + 4 versions instrumentales (J’vais
partout avec mon vélo / Des refuges pour la vie / Naturellement /
Mon ami l’oiseau).
Henri DÈS (Paroles et musique) : Abracadabra. La Boutique de
Victorie (www.club-tralalere.com) : 278 207-7. Distr. Universal.
À l’approche des Fêtes, fidèle
nouveau cru du charmant Henri Dès… Album (son 17e) comportant
12 chansons inédites, avec - comme il se doit - play-back d’orchestre et
paroles incluses dans le livret. Réalisation & arrangements :
Martin Chabloz. Illustrations : Étienne Delessert. Partitions disponibles sur : www.henrides.net
Francis Gérimont.
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Novembre - Décembre 2011 - n° 573
A PARAITRE
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Septembre-Octobre 2011 - n° 572
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Les dossiers de l'Education Musicale déjà parus
Dossiers à paraître :
* Frontières du chant et de la parole
* L'improvisation
Le grand ouvrage de James Lyon : Leoš Janác(ek, Jean Sibelius et Ralph Vaughan Williams. Un cheminement commun
vers les sources
Bientôt en souscription aux éditions Beauchesne.
James Lyon est l'auteur de JOHANN SEBASTIAN BACH : CHORALS aux éditions Beauchesne.
Aïmata et le secret
des tambours. Auteur : Laure Urgin - Illustratrice : Élise Mansot. « Les contes
du musée de la musique ». En
coédition avec la Cité de la Musique.
Il était une fois, sur l’île de Tahiti, en
Polynésie, une princesse qui s’appelait Aïmata et qui était sur le point de
devenir reine. Mais comment être une reine aimée par son peuple ? Quel est le
secret pour bien régner ? Un dieu apparut une nuit à la jeune princesse et lui
dévoila que si elle savait écouter les tambours de son pays, les pahus, ils lui
révèleraient leur secret.
Malheureusement, les tambours avaient beau chanter
et Aïmata tendre l’oreille, la jeune princesse n’entendait pas ce qu’ils
avaient à lui dire, tant et si bien qu’elle se mit en colère contre eux et leur
tourna le dos. Alors, au son des pahus, les éléments se déchaînèrent puis les
tambours se turent tout à fait. Pour se faire pardonner, Aïmata alla trouver le
vieux sage du village et lui demanda de l’aide. “Pour comprendre les tambours,
il faut d’abord savoir comment ils sont faits”, lui révéla l’homme et il lui
proposa alors de rester à ses côtés pour apprendre à chercher et à assembler
les éléments d’un pahu parfait.
Les jours passèrent et petit à petit la princesse
apprit à écouter…
L’AUTEUR : Laure Urgin est conteuse. Avec
les autres artistes de la compagnie Le Murmure des Bancs, elle raconte à
une ou plusieurs voix, seule ou en musique. Ses récits nous font voyager, des
déserts à la lune, des étoiles à la pluie, des villes aux dunes et s’adressent
à tous, enfants, et plus grands.
L’ILLUSTRATRICE : peintre et illustratrice, Élise
Mansot vit à Lyon. Elle a déjà illustré plusieurs albums chez Actes Sud
Junior et notamment, dans la collection des “Contes du musée de la musique”, Itto
le pêcheur des vents et Babik, l’enfant du voyage.
Philomène et les ogres. « Giboulées », Gallimard Jeunesse. Découvrez le « making of » de
l’enregistrement du conte musical d’Arnaud Delalande & David Chaillou, lu
par Jean-Pierre Marielle & Agathe Natanson :
http://www.youtube.com/watch?v=OXXFf13rRJ0
http://www.dailymotion.com/video/xk7oqd_philomene-et-les-ogres-making-of_creation
Laëtitia Girard.
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LIBRAIRIE GIBERT JOSEPH
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94100 Saint Maur
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LIBRAIRIE MUSICALIA
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