www.leducation-musicale.com
mai-juin 2010
n° 566
|
mars-avril 2010
n° 565
|
janvier-février 2010
n° 564
|
Sommaire :
1. Editorial
2. Sommaire du N°566
3. Informations générales
4. Varia
5. Manifestations et concerts
6. Recensions de spectacles lyriques et concerts
7. Echos des touches blanches et noires
8. Sensibilisation des jeunes à l'art lyrique
9. Le tsunami des berceuses germaniques
10. L'édition musicale
11. Bibliographie
12. CDs et DVDs
13. La vie de L’éducation musicale
Abonnez-vous à L'éducation musicale
et recevez 3 dossiers gratuits
« C’est ça la musique qu’écoutait Mamie
avant qu’elle soit morte ? »
« Certes, mon doux fils, mais avant que de flétrir le
passéisme élitaire de ton aïeule, veuille bien considérer que la malheureuse
vivait dans un temps où André Rieu n’avait point encore entrepris, auprès de nos
populations incultes, sa sainte croisade !
« Temps obscurs, où la mezzo Anne-Sofie von Otter ne s’était
point encore produite aux côtés d’Elvis Costello, où l’accordéoniste Richard
Galliano ignorait tout des Suites de
Bach, où Roberto Alagna n’était pas né à Luis Mariano, où Sting ne vocalisait pas
sur Dowland et Purcell, où Renée Fleming ne s’éclatait pas dans la pop-rock...
Temps pré-modernes en vérité, limbes de la culture où aucun de ces charmants
accouplements n’était même envisageable…
« Est-il désormais plus noble mission que d’accueillir
toutes les cultures du monde, que de crossovériser tous horizons ? Dans
la radieuse perspective d’accoucher d’un monde enfin décloisonné, solidaire,
fraternel, libre de tous apartheids, de tous ostracismes culturels… Où les
vaches, elles-mêmes, n’auront plus à être gardées !... Où se tairont
enfin tous ces prophètes de malheur - venimeuses et tristes figures - qui, tel un
Milan Kundera, n’ont de cesse d’insinuer que “l’air du temps, c’est le destin des feuilles mortes”… »
Francis B. Cousté.
Kaija Saariaho ou les espaces prolongés (entretien)
Sylviane Falcinelli
Le Festival de Salzbourg, une institution protéiforme
Jean-Pierre Robert
***
Dossier : « Olivier Messiaen »
Quatuor pour la fin du Temps (analyse)
Gérard Moindrot
Gagaku, un faisceau d’influences
(analyse)
Patrick Revol
L’influence
d’Olivier Messiaen dans l’œuvre
pour
accordéon d’Alain A. Abbott
Jérôme Carayol
Roger
Muraro en résonance avec Olivier Messiaen (entretien)
Sylviane Falcinelli
Olivier
Messiaen et Jean Dewasne
Gérard Denizeau
***
Recensions
La grille d’Hélène Jarry
Haut
BOEN n°19
du 13 mai 2010. Baccalauréat technologique –
techniques de la musique et de la danse. Liste des morceaux imposés pour
l’épreuve d’exécution instrumentale ou d’électroacoustique, session 2010.
Le Bulletin officiel de l’Éducation nationale est
librement consultable sur :
www.education.gouv.fr/pid285/le-bulletin-officiel.html
Le compositeur hollandais Louis
Andriessen (°1939) vient d’être honoré du titre de
« Musical America’s Composer of
the year 2010 ».
©Musical America
La seconde « Conférence
mondiale sur l’Éducation artistique » a réuni à
Séoul, du 25 au 28 mai 2010, d’éminents experts, chercheurs, praticiens et
éducateurs du monde entier. Dans le droit fil de la première édition de
2006, à Lisbonne, cette seconde réunion internationale a mis l’accent sur le
rôle important de l’éducation artistique à l’intérieur & à l’extérieur de
l’école et promu son importance auprès de la communauté internationale.
Le Mois Molière à Versailles (du 1er au 30 juin 2010) : Sur quelque quarante lieux, cette prestigieuse manifestation de
théâtre & musique fêtera son XVe anniversaire.
Renseignements :01
30 21 51 39. www.moismoliere.com/index-1.php
Au Palais de la
Découverte :
Le vendredi 11 juin 2010, de 15h à 17h30, Patrick Saint-Jean,
(enseignant-chercheur à l'ENS Cachan, ancien collaborateur de Iannis Xenakis)
& Denis Dufour (compositeur, professeur de composition au CRR de Paris)
donneront une conférence sur Musique
& nouvelles technologies. Réservation obligatoire.
Exposé des motifs : « On assiste à une démocratisation de l'accès
aux musiques informatiques ou musiques par ordinateur, aujourd'hui musiques digitales et numériques.
Des logiciels spécialisés ajoutent à la partition classique les interfaces
graphiques interactives et diagrammatiques, et la visualisation scientifique
(signal audio, spectre sonore). On peut même concevoir des spectacles
musicaux et chorégraphiques interactifs, des musiques numériques orchestrales
ou acousmatiques en réseau avec le pure
data, les serveurs de données et l'Internet. Les instruments, outils
et logiciels de travail d'aujourd'hui permettent toutes sortes d'effets sonores
et visuels. On atteint un pluri-média d'entrée-sortie (audio, Midi,
commande numérique), un multi-média d'expression (images, sons, textes,
animations) et surtout un uni-média d'analyse de traitement et de synthèse de
l'information. »
Renseignements : avenue Franklin Delano Roosevelt,
Paris VIIIe. Tél. : 01 56 43 20 20.
www.palais-decouverte.fr/index.php?id=1894#c5026
…en 1937
Pour le 10e anniversaire de la disparition d’Olivier Greif (1950-2000), nombreux sont en cours les
hommages rendus à cet artiste visionnaire trop tôt disparu : 6 parutions de disques, plus de 35 concerts,
nombreuses émissions radiophoniques et, surtout, sortie du film documentaire
« Nuits, Démêlées » que lui
a consacré Anne Bramard-Blagny. Ce magnifique film était donné en
avant-première, le lundi 10 mai 2010, au grand auditorium Debussy-Ravel de la
Sacem. Projection suivie d’un concert, au cours duquel furent interprétées,
par le pianiste Pascal Amoyel, la sonate Les
Plaisirs de Chérence et, par la violoncelliste & vocaliste Emmanuelle
Bertrand, Sadhana [In memoriam Olivier Greif], une création
de Pascal Amoyel. Un admirable hommage.
Renseignements : www.oliviergreif.com
…au Vésinet, ca 1978
« L’opéra pour
enfants »,
tel est le thème de la 3e Journée d’étude du groupe Opefra qui se
déroulera le samedi 12 juin 2010, de 10h à 18h, en la Salle des colloques de la
Cité de la musique, à Paris. Avec la participation de :
Isabelle Aboulker, Cécile Auzolle, Leyli Daryoush, Anne-Claire Di Meglio,
Coralie Fayolle, Graciane Finzi, Nathalie Guilbaud, Agnès de Jacquelot, Lucie
Kayas, Christine Lehen, Antoine Macarez, Jérôme Pillement et Theresa
Schmitz.
Renseignements : 221, avenue Jean-Jaurès, Paris XIXe. www.cdmc.asso.fr/fr/lieu/cite_musique_paris / cecile.auzolle@univ-poitiers.fr ou : ac.di-meglio@orange.fr
La grande pianiste et
pédagogue Yvonne Loriod, veuve du compositeur Olivier Messiaen (1908-1992), est décédée, à
l’âge de 86 ans, le lundi 17 mai 2010, en la Maison de retraite des
Petites sœurs des pauvres, à Saint-Denis (Région parisienne).
Yvonne Loriod &
Olivier Messiaen,
1977 ©DR
Théâtre du Capitole. La saison
2010-2011
comportera 119 levers de
rideau : 59 représentations d’opéra, 29 de ballet, nombreux
récitals et concerts. Opéras : La Bohème (Puccini), Grandeur
et décadence de la ville de Mahagonny (Kurt Weill), L’homme de la Mancha (Mitch Leigh), Les fiançailles au couvent (Prokofiev), Medea (Dusapin), L’Aire du
dire (Jodlowski), Le Barbier de
Séville (Rossini), Oberon (Weber), Belshazzar (Haendel), Così fan tutte (Mozart). Ballets : Alice au pays des merveilles (Glazounov), L’Oiseau de feu & Le sacre du printemps (Stravinski), Duato (Mendelssohn), Les trois mousquetaires (Verdi), Coppélia (Delibes), La Sylphide (Løvenskjold). Renseignements :
05 61 63
13 13
. www.theatre-du-capitole.fr
Sur Canal
Académie : « Chopin vu par Chopin ». Ses amours & sa
relation avec les autres musiciens. Jean-Pierre Grivois nous entretient
de la vie du compositeur au travers de sa correspondance. À
écouter sur : www.canalacademie.com/emissions/carr661.mp3
« Fête de la
musique » : Sa 29e édition se tiendra le 21 juin 2010.
Renseignements : www.fetedelamusique.culture.fr mais aussi sur Facebook, Twitter ou FlickR
L’exposition
sonore « Radical Jewish Culture » se
tient, jusqu’au 18 juillet 2010, au Musée d’art & d’histoire du judaïsme
(MAHJ). Elle revient notamment sur le mouvement musical new-yorkais
fédéré, dans les années 1980, par le compositeur & saxophoniste John Zorn
[notre photo], réunissant des artistes issus de l’underground américain
(free-jazz, punk, rock progressif, musique contemporaine…). Avec
notamment David Krakauer, Marc Ribot, Anthony Coleman, Frank London, Ben
Goldberg, etc.
Renseignements : MAHJ – 71, rue
du Temple, Paris IIIe. Tél. : 01 53 01 86 48. www.mahj.org
« Échos
intimes », tel est le titre distinctif de la saison
2010-2011
de l’Ensemble Contrechamps. Au
cours de laquelle seront particulièrement honorés : Hugues Dufourt &
Gérard Grisey, Brice Pauset, Philippe Leroux, Franck Bedrossian, Harrison
Birtwistle, Evan Gardner & Oscar Bianchi, William Blank & Pierre
Boulez, Stefano Gervasoni, George Benjamin, Jonathan Harvey…
Renseignements : 8, rue de la Coulouvrenière, CH1204 Genève. Tél. :
+41 (0)22 329 24 00
. www.contrechamps.ch
André
Petit [notre photo] vient de disparaître à l’âge de 80 ans. Éminent clarinettiste,
il fut président de la Confédération musicale de France de 1983 à 1991, puis de
la Fédération musicale de Basse-Normandie de 1986 à 2007. Il était,
jusqu’à ces jours-ci, président des Carrefours de la musique, organisme
indépendant dont la création a été souhaitée et encouragée par la Direction de
la Musique, rassemblant - dans un esprit de concertation, de réflexion et
d'échanges - des acteurs de la vie musicale française d'aujourd'hui (Rencontres
sur « Musique & enseignement », « Musique dans les
liturgies », « Regards de la presse sur l’évolution de la musique »,
etc.). Dans sa bonne ville de Lisieux, André Petit fut directeur de l’École
de musique (aujourd’hui Conservatoire à rayonnement départemental) et chef de
la Chorale de la cathédrale Saint-Pierre (devenue Ensemble vocal Gabriel-Fauré),
de 1959 à 1987. Il fonda l’Orchestre symphonique de Lisieux.
©DR
***
Haut
Quand Saint-Saëns composait, en
1908, la première musique de film… « Autour de L’assassinat du duc de Guise »,
entretien avec le musicologue Jérôme Rossi.
À écouter sur : www.canalacademie.com/ida3141-Quand-Saint-Saens-compose-la.html
Les ventes mondiales de musique
enregistrée, en baisse de 7,2 % en 2009. Tel est le chiffre communiqué le 28 avril
2010 par l’International Federation of the Phonographic Industry (IFPI).
Important recul, notamment aux USA et au Japon. Sont toutefois en légère
progression la Corée du Sud, la Suède et le Royaume-Uni. La part du
marché numérique étant de 25,3 %...
©DR
Autour d’Aspects de Chopin, ouvrage d’Alfred Cortot : le peintre Jean Cortot [notre
photo], fils du célèbre pianiste, nous entretient de l’influence de Frédéric
Chopin sur l’œuvre de son père.
À écouter sur : www.canalacademie.com/emissions/carr675.mp3
Arrivée sous la Coupole ©DR
Déjà justiciable d’un ASBO [Anti-Social Behavior Order], un fan de country music à moitié
sourd, l’excellent Michael O’Rourke, 51 ans [notre photo], vient de
s’entendre (!) intimer l’ordre, par un tribunal écossais, de s’équiper
d’un iPod. À défaut de quoi, il serait emprisonné… (« Buy an iPod or it’s jail ! »).
©DR
Le colloque « Jeunes sous
influence » [Musique & manipulation] se déroulera le samedi 12 juin 2010, de 10h00 à
19h30, en l’hôtel Mercure de Nevers. Avec, notamment : Alain
Busschaert (musicologue), Michel Poulaert (psychologue des médias), Ingrid
Lecointe & Étienne Bacquet (experts au sein de l’association AJ). Entrée libre.
Renseignements : 06 64 12 87
24.
©Ville de Nevers
L’Orchestre de Chambre de Lausanne, dir. Christian Zacharias, vient
d’établir le programme de sa saison
2010-2011
.
Renseignements : rue
Saint-Laurent 19, CH-1003 Lausanne. Tél. :
021 345
00 20
. www.ocl.ch
© OCL
Dans les écoles américaines :
« midi, l’heure du crime ! »… Selon une enquête du
NCIS (Bureau d’investigation sur la criminalité aux USA), les heures les plus
redoutables seraient celles du déjeuner et du début d’après-midi : 36% des
violences et 41% des vols se produiraient entre 12h et 15h.
Sir Elton John a été interdit de concert en
Égypte, le 18 mai dernier, au motif qu’il aurait déclaré que Jésus était gay.
Renseignements : www.freemuse.org/sw37763.asp
***
Haut
Du violoniste &
compositeur Lucien Durosoir (1878-1955), seront donnés, à l’Athénée Théâtre Louis-Jouvet, le 7
juin 2010, à 20h00 : Jouvence et Quintette par l’Ensemble
Calliopée. Au même programme, œuvres de : Claude Debussy/Arnold
Schönberg, Thierry Pécou & Maurice Ravel.
Renseignements : 01
53 05 19 19. www.megep.net
« Scarlatti
goes electro »,
spectacle Jeune public (à partir de 8 ans). Durée : 60’00. Amphithéâtre
de la Cité de la musique, les mercredi 9 juin (15h) et jeudi 10 juin (10h &
14h30). Avec Arnaud De Pasquale (clavecin) & Antoine Souchav
(synthétiseur, sampleur, ordinateur).
Renseignements : 221, avenue Jean-Jaurès, Paris XIXe. Tél. : 01 44 84
44 84.
www.citedelamusique.fr/pdf/dossier_sjp/sjp17_scarlatti.pdf
Sainte-Chapelle de
Paris. Concert-lecture : « Naissance des Préludes de Chopin à Majorque », le
mercredi 9 juin 2010, à 20h00. Ziad Kreidy [notre photo] interprètera –
sur piano à queue Pleyel de 1848 – des œuvres de Bach, Chopin &
Nietzsche. Récitante : Claire Prévost.
Renseignements : 01
73 70 38 41. www.ziadkreidy.com
©DR
« Lille
Piano[s] Festival » se déroulera les 11, 12 et 13 juin 2010. Avec pas moins de 25
pianistes internationaux : Denis Kozhukhin, Igor Tchetuev, Konstantin
Lifschitz, Jean-Philippe Collard, Nikolaï Lugansky, Paul Badura-Skoda, Alexei
Lubimov, Aldo Ciccolini, etc. Orchestre national de Lille,
dir. Jean-Claude Casadesus & Paul Mann. Ensemble Musiques
nouvelles, dir. Jean-Paul Dessy. Jazzmen invités : Zool
Fleischer & Andy Emler, Simon Nabatov, John Taylor, Maurice Vander
Trio.
Renseignements : 03 20 12 82 40. www.lillepianosfestival.fr
À Dunkerque, les
« Classes Orchestre à horaires aménagés » (Coham) se produiront auprès de leur
parrain, l’Orchestre de l’Armée de l’Air, le samedi 12 juin 2010, en la salle
du Kursaal de cette cité.
Renseignements : 03 28 65 05
20. www.oxygen-rp.com
©DR
Institut du monde
arabe. « Le luth dans tous ses états », tel est le thème du 11e Festival de musique de l’IMA qui se déroulera du 10 au 19 juin 2010.
Renseignements : 1, rue des Fossés-Saint-Bernard, Paris Ve. Tél. : 01
40 51 38 38. www.imarabe.org
Nassima ©DR
« Profs en c(h)œur », ensemble vocal
des professeurs d’Éducation musicale de l’académie de Paris, dir. Thibault
Lam Quang, se produira, le 17 juin 2010 à 20h45, en l’église luthérienne
Saint-Marcel (24, rue Pierre-Nicole, Paris Ve). Au
programme : musique française de la Renaissance, œuvres de Francis
Poulenc, plus deux créations d’Annick Chartreux [notre photo], sur des poèmes
de François Villon : Épître à mes
amis et La ballade des pendus (pour soliste, chœur mixte, chœur parlé, trois cors & trois
percussions). Entrée libre.
2010 Grafenegg
Musik-Sommer se
déroulera, auprès du célèbre château, du 17 juin au 14 août. Préludant
ainsi au Musik-Festival qui, lui, se déroulera du 19 août au 12
septembre.
Renseignements : +44 20 7700 5959. www.grafenegg.at/programme/festival
©Peter Rigaud
Théâtre
musical : Le Père, musique de Michael Jarrell
[notre photo], d’après la pièce de Heiner Müller, mise en scène d’André Wilms,
sera donné – dans le cadre du festival Agora de l’Ircam – à l’Athénée/Théâtre
Louis-Jouvet, les 17, 18 et 19 juin 2010. Avec le comédien Gilles Privat,
les chanteuses Susanne Leitz-Lorey (soprano), Truike van der Poel (mezzo),
Raminta Babickaite (contralto) & Les Percussions de Strasbourg.
Renseignements : square de l’Opéra/Louis-Jouvet, Paris IXe. Tél. : 01
53 05 19 19. www.athenee-theatre.com
©C.Daguet
Les « Fêtes
musicales à la Grange de Meslay » proposent cette année, du 18 au 27 juin, un programme
d’une exceptionnelle richesse.
Renseignements : 02 47 21 65
08. www.fetesmusicales.com
L’Orchestre national
des Pays de la Loire, dir. John Axelrod, se produira à Dunkerque, le samedi 19 juin
2010. Ce concert sera donné en plein air, au pied de la flotte du
« Record SNSM » (Société nationale des sauveteurs en mer). Programme :
Ouverture de Rousslan et Lioudmila (Glinka), Casse-Noisette (Tchaïkovski).
Avec le concours du « Big Band Bleu Citron » qui interprètera Suite pour jazz-band d’après Casse-Noisette (Duke Ellington).
Renseignements : 02 97 63 08
81. www.milletunevagues-news.com/774 ou : www.recordsnsm.com
©DR
Le 27e Festival « Chopin à Paris » se déroulera en l’Orangerie du Parc de Bagatelle (Bois de
Boulogne), du 20 juin au 14 juillet 2010. Double hommage à Frédéric
Chopin & Robert Schumann, à l’occasion du bicentenaire de leur
naissance.
Renseignements : Société Chopin à Paris – 23, avenue Foch,
Paris XVIe. Tél. : 01 45 00 22 19. www.frederic-chopin.com
L’association
« Femmes & musique » donnera, le lundi 21 juin 2010 [Fête de la musique], à
20h30, en l’église Saint-Roch, un concert d’œuvres des compositrices :
Claude Arrieu, Elsa Barraine, Lili Boulanger, Édith Canat de Chizy, Ginette
Keller, Annie Labussière, Édith Lejet… mais aussi des compositeurs :
Clément Janequin, Roland de Lassus, Felix Mendelssohn, Astor Piazzolla…
Avec le concours d’Odile Bourin (violoncelle), Louise Jallu (bandonéon),
Françoise Levéchin (orgue), Patricia Nagle (flûte), Catherine Pardo (soprano),
du trio à vents « Sora » et de la chorale « Pro Homine »,
dir. Marie-Christine Pannetier.
Renseignements : 24, rue
Saint-Roch, Paris Ier. Tél. : 06 89 83 44 20.
©DR
« Take a Bow ! », Salle Pleyel. Le mercredi 23 juin
2010, à 18h00, le London Symphony Orchestra, dir. Sir John Eliot Gardiner,
présentera le travail qu’il a mené avec de jeunes amateurs de tous niveaux
(élèves d’établissements scolaires, d’associations & de conservatoires
d’Île-de-France). Programme : The
Gypsy’ Violin (Jeff Moore), extraits de Water Music (Haendel), Symphonie
de chambre n°2 (Chostakovitch), Danse
de nuit (Pascal Zavaro), extraits de Dardanus (Rameau).
Renseignements : 252, fg
Saint-Honoré, Paris VIIIe. Tél. : 01 42 56 13
13. http://sallepleyel.fr
©DR
« Les
Francofolies de La Rochelle » se dérouleront, cette année, du 13 au 17 juillet.
Renseignements : 05 46 28 28 28. www.francofolies.fr
« Musique &
nature en Bauges ». La 12e édition
de ce festival de musique classique se déroulera du 17 juillet au 22 août
2010, sous le parrainage de Philippe Binder, directeur musical de l’Orchestre
de Cannes. Se produiront plus de 200 musiciens, parmi les plus
réputés – avec, notamment, une semaine orchestrale animée par les
55 musiciens du Cheltenham Symphony Orchestra, formation en résidence lors
du festival.
Renseignements : 04 79 54 84 28. www.musiqueetnature.fr
La 37e édition de l’« Académie-Festival des Arcs » se déroulera à Bourg-Saint-Maurice (Savoie), du 18 juillet au 2 août
2010. En résidence, la compositrice finlandaise Kaija Saariaho [notre
photo].
Renseignements : 04 79 07 12 57. www.festivaldesarcs.com
©Priska Ketterer
« Ligeriana
Musicale 2010 » « Amour et passion à
Montsoreau », les 16, 23 et 29 juillet, 3 et 13 août
(20h30) : Passion espagnole / Le triomphe du concerto / La voix
& les cuivres / À l’orée du romantisme / Starmania et les plus grands succès québécois.
Renseignements : 02 47 95 83 60. http://ville-montsoreau.fr
Montsoreau ©DR
« Musiques à la
Chabotterie »,
14e Festival de musique baroque (dir. Hugo Reyne), programme, du
21 juillet au 12 août 2010 : Emmanuelle Guigues & Bruno Procopio
(musique de chambre), Gustav Leonhardt (clavecin), Concerto Soave & Maria
Christina Kiehr (art lyrique), Capriccio Stravagante (orchestre), Concert de
l’Hostel Dieu (musique religieuse), Aeolus (instruments à vent), La Simphonie
du Marais (opéra), etc. Dans, notamment : Les Nations de Couperin (21 juillet), Le Triomphe de la Folie de Campra (23 juillet) et Sancho Pança de Philidor (11 et 12 août).
Renseignements : 02 51 43 31 01. www.chabotterie.vendee.fr
Le « Festival
Pablo Casals » célèbrera à Prades, en l’abbaye Saint-Michel de Cuxa [notre photo], du 26 juillet
au 13 août 2010, ses 60 ans de musique de chambre (1950-2010).
Renseignements : 04 68 96 33 07. www.prades-festival-casals.com
La 14e édition du festival « Labeaume en musiques » se déroulera du 22 juillet au 20
août 2010. Se produiront notamment : Jean-François Heisser,
l’Orchestre de la Nouvelle Europe, Dana Ciocarle, David Guerrier, la Cappella
Mediterranea, le Trio Wanderer, le Clemencic Consort, l’Ensemble Dhoad, le
Richard Galliano Sextet, l’Ensemble Canticum Novum…
Renseignements : Draille
des Écoliers, 07120 Labeaume. Tél. : 04 75 39 79 86. www.labeaume-festival.org
Labeaume ©DR
« Miroirs du
temps », tel
est l’intitulé du 21e Festival international de musique de Dinard
qui se déroulera du 4 au 18 août 2010. Sous la direction artistique du
pianiste coréen Kun Woo Paik [notre photo].
Renseignements : www.festival-music-dinard.com
©DR
« Sinfonia en
Périgord » fêtera ses 20 ans, du 24 au 29 août 2010. Douze concerts à Périgueux et sur
les plus beaux sites de la Dordogne - avec notamment : Le Concert
spirituel (dir. Hervé Niquet), La Fenice & le Chœur Arsys Bourgogne
(dir. Jean Tubery), le Collegium Vocale 1704 (dir. Vaclav Luck),
Célune Frisch et les ensembles Doulce Mémoire, La Venexiana, Barcarolle… Renseignements : 12, cours Fénelon, 24000 Périgueux. Tél. : 05 53 08 69 81. www.sinfonia-en-perigord.com
44e Festival de La Chaise-Dieu (18-29 août 2010). Avec
plus de 60 concerts autour de la musique sacrée, cette prestigieuse
manifestation rassemblera, sur 13 sites, plus de mille artistes européens
pour interpréter le grand répertoire : Messe
en si mineur et Magnificat (Bach), Vespro della beata Vergine (Monteverdi), Ein deutsche Requiem (Brahms), Stabat
Mater (Dvořák)… mais aussi des chefs-d’œuvre à découvrir : Missae Dei Filii ; Litaniae omnium sanctorum (Zelenka), Motets italiens (Giorgi)…
Renseignements : 04 71 00 01 16. www.chaise-dieu.com
Le festival
« Musique en Côte basque » fêtera, cette année, son 50e anniversaire.
Sous le parrainage du grand pianiste Aldo Ciccolini, nous seront proposés, du
29 août au 10 septembre 2010, onze concerts qui réuniront - à Anglet, Ascain,
Bayonne, Biarritz, Ciboure, Saint-Jean-de-Luz et Urrugne – des artistes de
renom.
Renseignements : 05 59 51 19 95. www.musiquecotebasque.fr
Festival
d’Île-de-France (5 septembre-10 octobre 2010) : Ivresses… Musiques entre Ciel et Terre. L’avant-programme est établi.
Renseignements : 01
58 71 01 01 (à partir du 14 juin). www.festival-idf.fr
En 2010-2011,
l’Orchestre national de Lille, dir. Jean-Claude Casadesus, fêtera son 35e anniversaire.
Programme d’ores et déjà disponible.
Renseignements : ONL – 30,
place Mendès-France, 59000 Lille. Tél. : 03 20 12 82 40. www.onlille.com
©DR
Francis Cousté.
***
Haut
Musique en
Sorbonne.
Dans le cadre du Grand Amphithéâtre de la Sorbonne, le
concert du 27 mai 2010 a été dominé par le Psaume XIII (1855) de Franz Liszt. À ce nom se rattache surtout le rayonnement d’une œuvre
pianistique et orchestrale ; on connaît moins les pages magnifiques dont
il a enrichi le domaine religieux. Ce psaume révèle, dans un lyrisme
éloquent, l’expression du mysticisme qui imprègne le style et le langage, tant
dans ses partitions profanes instrumentales que dans ses poèmes symphoniques.
On sait gré à Johan Farjot d’avoir transmis le sens profond de cette grandiose
partition et d’avoir dirigé, et insufflé avec la même prodigieuse énergie, le Psalmus Hungaricus (1923) de Zoltan
Kodáky.
Johann Farjot ©DR
Dans ces deux œuvres, la voix fort belle et expressive du
ténor coréen Ook Chung et le Chœur de Paris-Sorbonne, perfectionné par la
méticuleuse maîtrise et la musicalité de Denis Rouger, ont hautement contribué
à la réussite d’un concert qui avait débuté avec deux courtes pièces de Mozart,
interprétées à la flûte par Hélène Boulègue, lauréate du concours « Jeunes
Solistes de la Sorbonne », en 2009.
Ook Chung ©DR
Pierrette Mari.
Au Théâtre
des Champs-Élysées.
Francesco CAVALLI
(1602-1676) : La Calisto, drama
per musica en trois actes (1651). Livret de Giovanni Faustini, d’après Les Métamorphoses d’Ovide. Les
Talens Lyriques, dir. Christophe Rousset. Mise en scène : Macha
Makeïeff. Sophie Karthäuser (Calisto), Lawrence Zazzo (Endimione), Giovanni
Battista Parodi (Jupiter), Véronique Gens (Junon), Marie-Claude Chappuis
(Diane), Milena Storti (Lymphée), Cyril Auvity (Pan), Mario Cassi (Mercure),
Sabina Puertolas (Satyre), Graeme Broadbent (Sylvano).
Sophie Karthäuser ©DR
Il convient de rendre hommage à la direction du Théâtre
des Champs-Élysées d’avoir programmé cet opéra - peu connu et surtout peu joué
- de Francesco Cavalli, puisqu’il s’agit de sa création à Paris. Ouvrage historiquement
important, La Calisto marque le début
de la révolution opératique vénitienne où l’art lyrique évolue vers le théâtre
public, avec des moyens désormais limités, comme en témoigne l’effectif réduit
de l’orchestre. La Calisto est
particulièrement emblématique de cette mutation. Comme de règle dans la
production vénitienne, le livret mêle les dieux et les hommes, avec un
équilibre certain entre récitatifs et airs chantés. Inspiré des Métamorphoses d’Ovide, le livret fournit
la possibilité d’une parfaite comédie lyrico-sexuelle offrant une foule de
possibilités comiques au metteur en scène imaginatif. Cela ne fut, hélas,
pas le cas, tant la mise en scène de Macha Makeïeff nous a paru ennuyeuse, sans
originalité, rendant mal, à la fois, la violence du désir et la subtilité de l’évitement
dans l’amour éthéré avec, de plus, une scénographie assez laide, voire
indigente, malgré les éclairages réussis de Dominique Bruguière.
Musicalement, la cohésion et l’équilibre entre l’orchestre et les chanteurs
furent de mise, avec un chef très à l’écoute. Vocalement, la distribution
est de qualité relativement homogène. Notons la remarquable
interprétation, tant scénique que vocale, de Sophie Karthäuser qui confirme son
succès de l’an dernier à Bruxelles, dans ce rôle.
Aux côtés du non moins remarquable Lawrence Zazzo, Véronique
Gens campe une Junon passionnée et jalouse parfaitement crédible, Giovanni
Battista Parodi, en imitant Diane, fait des prouesses « vocales »
assez comiques, lors des passages en voix de tête, Milena Storti, Sabina
Puertolas et Marie-Claude Chappuis sont également convaincantes. Bref,
une qualité vocale et musicale qui nous fait amèrement regretter l’indigence de
la mise en scène.
Salle Pleyel.
Pittsburg Symphony Orchestra, dir. Manfred Honeck. Anne-Sophie Mutter, violon.
L’Orchestre de Pittsburg et son chef titulaire, Manfred
Honeck, étaient de passage à Paris, Salle Pleyel, à l’occasion de leur tournée
européenne, en compagnie de la célébrissime Anne-Sophie Mutter, dans un
programme associant le Concerto pour
violon de Brahms et la 5e Symphonie de Chostakovitch. Anne Sophie Mutter nous gratifia d’une interprétation
musicalement impeccable du Concerto de
Brahms (composé en 1878 et créé à Leipzig, en janvier 1879, par le violoniste Joseph
Joachim, sous la direction du compositeur). Une interprétation à la
hauteur du dédicataire concernant la virtuosité, la sonorité, mais une lecture
un peu maniérée, frisant parfois le mauvais goût. Une ovation de la salle
et, en bis, la Chaconne de Bach qui
réussit, enfin ! à faire passer l’émotion.
Mais l’essentiel restait à venir : une magnifique et
intelligente interprétation de la 5e Symphonie de Chostakovitch, composée en 1937, créée la même année à Saint-Pétersbourg
sous la direction du grand Mvravinski. Symphonie ambiguë, entre
repentance et provocation, humour et angoisse, rire grotesque et langue de
bois, résonnant comme une énigme, aux accents mahlériens, parfaitement menée de
bout en bout par Manfred Honeck [notre photo], qui sut - par sa direction
précise, le choix judicieux des tempi, la netteté des articulations et la
beauté du phrasé - rendre toutes les couleurs d’une œuvre, en même temps que la
magnifique sonorité de sa phalange, tant au niveau des cordes, d’une sublime
beauté, qu’au niveau des vents et percussions particulièrement sollicités, pour
notre plus grand bonheur. Trois bis généreux confirmèrent tout le plaisir
de jouer de cette formation et d’un chef plein d’allant. Public ravi, grand
succès.
©Jason Cohn
Patrice Imbaud.
Événement à La Scala : Quand le ténor Placido Domingo se fait baryton.
Giuseppe VERDI : Simone
Boccanegra. Mélodrame en un prologue & trois
actes. Livret de Francesco Maria
Piave. Placido Domingo, Ferruccio
Furlanetto, Anja Harteros, Fabio Sartori, Massimo Cavalletti. Orchestra del Teatro Alla Scala, dir. Daniel.Barenboim.
Mise en scène : Federico Tiezzi.
Le célébrissime ténor Placido
Domingo qu'aucun challenge n'arrête, a décidé d'ajouter à son immense
répertoire Simon Boccanegra, rôle écrit pour une
voix de baryton. Mais Verdi n'a-t-il pas porté
l'accent sur la partie héroïque de cette tessiture, ce que le timbre mordoré de
l'interprète en son glorieux automne permet de couvrir avec emphase. Et
puis est-il personnage plus passionnant que cet ex-corsaire
devenu doge, aux prises avec les factions rivales dans une Gênes vouée aux
luttes fratricides, et caractérisé par une déclamation lyrique
somptueuse ! Sous les ors de La
Scala, Placido Domingo, dans une forme insolente, lui prête des accents
majestueux et un formidable relief. On ira jusqu'à percevoir
des intonations dignes de la stature d'Otello dans le vaste ensemble qui clôt
le tableau du conseil, d'appel à la paix puis de malédiction lancée à l'endroit
du traître Paolo. Au point que l'interprète
semble driver une mise en scène pseudo-historiciste
qui ne brille pas par son inventivité. Mais peut-être la star
de la soirée a-t-elle préféré une régie sage à quelque réinterprétation
moderne du substrat politique irriguant l'intrigue.
©Marco
Brescia/La Scala
Une décoration plus clinquante
qu'évocatrice des embruns marins qui baignent la pièce ne rachète pas une
direction d'acteurs convenue. On est loin de la puissante
vision imaginée par Giorgio Strehler naguère sur ce même plateau.
Qu'importe ! le spectacle vaut avant tout par son volet
musical. Et là la réussite est quasi totale. Car, outre
le grandiose ténorissime Doge, on y apprécie la basse moelleuse de
Ferruccio Furlanetto, noble Fiesco, la sûre vocalité verdienne de l'Amélia de
Anja Harteros ou la vilénie assumée d'un Paolo remarquable, Iago avant la lettre,
Massimo Cavaletti. L'Orchestre de La
Scala qui connaît mieux que tout autre son Verdi, livre une interprétation
incandescente sous la baguette fièvreuse de Daniel Barenboim, aussi à l'aise
que dans l'idiome wagnérien. Sonorités envoûtantes,
lyrisme éperdu ponctué d'accents dramatiques d'une rare intensité, voilà bien
une lecture engagée qui prend au cœur et au
corps.
©Marco
Brescia/La Scala
Lulu à La Scala.
Alban BERG : Lulu.
Opéra en trois actes (IIIe acte
dans la version de Friedrich Cehra). Laura Aikin, Franz Mazura, Stephen West, Robert
Wörle, Thomas Piffka, Natascha Petrinsky, Roman Sadnik. Orchestra del Teatro alla Scala, dir. Daniele
Gatti. Mise en scène : Peter
Stein.
Curieusement, Lulu n'en
est, à La Scala, qu'à la troisième production de son
histoire. Avec flair, le « sovrintendente » Stéphane Lissner a choisi de présenter la production conçue par Peter Stein
pour l'Opéra de Lyon. Point de spectaculaire, mais
une approche presque intimiste, car Stein travaille sur les volumes aussi bien
que sur les caractères. Au lumineux studio Art Déco du
peintre qui croque Lulu, fait écho l'attique grisâtre et rapetissé
où elle sombrera sous la lame de Jack l’Éventreur.
Épurée, la mise en scène focalise sur les effets de symétrie et les
raccourcis troublants que recèle une pièce parfaitement construite en arche et
dont le film - qui retrace l'arrestation, le procès et le temps de la prison -
forme la clé de voûte. Les divers amants de Lulu
réapparaissent au IIIe acte comme autant de clients
de celle qui désormais est conduite à faire commerce de ses charmes. Stein
les saisit chacun férocement, gravitant autour de cette femme
qui, tel un aimant, attire tout
mâle alentour. De ses multiples
métamorphoses vestimentaires émane, de la
femme en pleine gloire à l'ange déchu, une irrésistible et folle séduction. Une
perversité sournoise aussi dans le détachement qu'elle affiche envers tout
événement morbide. C'est que la dépravation
reste plus suggérée que soulignée, comme le chemin de déchéance qui est le
sien. Avec son profil de danseuse, Laura
Aikin lui prête des accents d'une rare sincérité ; et
d'une grande sûreté vocale, même si conduite à se ménager en raison d'une
légère indisposition. Parmi la galerie des
soupirants, on citera un solide Dr Schön, Stephen West, un Alwa
impressionnant, Thomas Piffka, une saisissante comtesse Geschwitz, Natascha
Petrinsky. Daniele Gatti galvanise un orchestre d'élite,
quoique un brin hyper présent vis à vis des chanteurs. Mais
comment résister à pareil luxe sonore !
©Marco
Brescia/La Scala
Mignon triomphe à l'Opéra Comique.
Ambroise THOMAS : Mignon. Opéra-comique en trois actes. Livret de Jules Barbier & Albert Carré d'après Les
Années d'apprentissage de Wilhelm Meister de
Goethe. Marie Lenormand, Ismail Jordi,
Malia Bendi-Merad, Nicolas Cavallier, Charles Mortagne, Blandine Staskiewicz. Chœur Accentus. Orchestre philharmonique
de Radio France, dir. François-Xavier Roth. Mise
en scène : Jean-Louis Benoît.
Avec Mignon, Ambroise
Thomas aura laissé à l'opéra-comique l'un de ses plus beaux
fleurons : un sujet bien ficellé par le tandem Barbier
& Carré, une musique où triomphe la belle mélodie. L'air
de l'héroïne « Connais-tu le pays » n'a
pas de mal à rester gravé dans la mémoire de par sa souple tournure, et on
saisit vite pourquoi les colorature de la piquante Philine ont tant
fait pour populariser son auteur auprès d'un public captivé par la prouesse
vocale. Rien d'étonnant à ce que la pièce ait connu le
plus durable des succès salle Favart, avant de sombrer dans l'oubli dans les années 1960, « modernité » oblige ; à moins que ce ne soit le
déclin de la salle à partir de cette époque. Il
eût été dommage que cette tendre histoire ne vît plus le
jour et que nous soyions privés de la finesse du trait dramatique qui touche
par sa simplicité. C'est ce que la nouvelle
production de l'Opéra Comique démontre d'évidence, grâce
à des gens qui y croient. François-Xavier Roth, qui
dirige face au public, ressuscitant ce rôle de facilitateur entre plateau et
fosse qu'avait le chef d'orchestre au XIXe,
fignole à l'envi le discours, à la tête d'une formation rompue au lyrique. On
savoure la richesse de l'orchestration, dont se détachent les volutes de la
harpe, la vivacité des ensembles habilement agencés, l'ingéniosité
des airs où la voix est toujours traitée de manière flatteuse.
©E.
Carecchio
La régie mise sur le ressort
éprouvé du théâtre sur le théâtre et le vif des échanges, refusant tout
sentimentalisme. Cela ressortit souvent au
premier degré, mais avec adresse et bon goût. Dans
le rôle éponyme, qui vocalement est cousine de la
Charlotte de Massenet, Marie Lenormand séduit par un chant accompli, et Ismail
Jordi a cette jolie voix de tête qui donne tout
son panache à la partie exigeante de Wilhelm Meister, cet anti héros,
« amoureux de l'amour ». Parangon de vocalises pyrotechniques à la française, la Philine de Malia Bendit-Merad
possède un ton vif-argent dans le style de Mady Mesplé. Le chœur Accentus, habitué à l'estrade de concert, n'a pas de mal à se couler dans le
moule opératique et sa fraîcheur de jeu comme d'accents comble de bonheur.
©E.
Carecchio
Mazeppa ou Tchaïkovski l'épique à l'Opéra de Lyon.
Piotr Illitch
TCHAÏKOVSKI : Mazeppa. Opéra en trois actes. Livret du compositeur
& de Victor Bourenine d'après Poltava de Pouchkine. Nikolai Putilin, Anatoli Kotscherga, Olga Guryakova, Marianna Tarasova, Misha
Dydik. Orchestre de l'Opéra de Lyon,
dir. Kirill Petrenko. Mise en scène : Peter
Stein.
Moins prisé qu’Eugène
Onéguine ou La Dame de Pique - entre
lesquels il se situe (1884) - l'opéra Mazeppa partage avec eux de s'inspirer d'une œuvre de
Pouchkine. En l'occurrence, du
poème épique Poltava, mettant en scène un
personnage historique. Le vaillant héros romantique
Mazeppa, évoqué par Victor Hugo dans ses Orientales, y
est représenté comme un chef de guerre vieillissant, en rebellion contre le
tsar Pierre le Grand, pour la libération de son Ukraine natale, et animé d'une
passion démesurée pour la fille d'un grand propriétaire terrien, Kotchoubeï. Le
tableau de mœurs qui fait le charme d'Onéguine, laisse place à une
vaste fresque historique où le thème du fatum est omniprésent. Tchaïkovski la façonne par une musique au ton plutôt sombre, émaillée
d'éléments empruntés au folklore russe. L'Opéra de Lyon reprend la mise en scène créée en 2006 par Peter Stein. Ne
cherchant pas à éluder la composante conventionnelle, elle la magnifie au
contraire et fait du réalisme un atout avec une étonnante économie
de moyens : lande cosaque aride baignée de soleil ou
enneigée, que deux ou trois tapis d'Orient suffisent à habiter de
couleur locale vraie. Tels des tableaux vivants,
les scènes d'ensemble ont un réel impact dans leur simplicité évocatrice. Stein
surtout inculque à ses caractères une force singulière, tel le vieux
Kotchoubeï, chef de clan soucieux de ses prérogatives, auquel un solide
briscard comme Anatoli Kotscherga apporte une imposante
conviction et une voix de stentor. Mazeppa, personnage ambigu, tourmenté et calculateur, mais aussi capable d'humanité,
est, sous les traits de Nikolai Putilin, souvent bouleversant. D'autant que le registre héroïque du timbre de baryton renforce une présence
grandiose. Olga Guryakova prête à l'infortunée Maria des
accents sincères et une ample vocalité dans un rôle exigeant. L'Orchestre de l'Opéra de Lyon sonne fièrement sous la direction impulsive de
Kirill Petrenko qui ne laisse dans l'ombre aucune des aspérités de ces pages
colorées où les vents apportent une tonalité tragique, tel l'interlude
symphonique animé entre les deuxième et troisième actes évoquant la
bataille de Poltava, et galvanise des chœurs qui
sont loin d'avoir une fonction secondaire.
©Michel Cavalca
À La Monnaie : Don Quichotte pour un adieu.
Jules MASSENET : Don Quichotte. Comédie héroïque en cinq actes. Livret de Henri Cain d'après Jacques Le Lorrain & Miguel de
Cervantès. José
van Dam, Silvia Tro Santafé, Werner Van Mechelen, Julie Mossay, Camille Merckx,
Gijs Van der Linden, Vincent Delhoume. Orchestre symphonique et Chœurs de La
Monnaie, dir. Marc Minkowski. Mise en scène : Laurent Pelly.
Massenet a sous-titré
son Don Quichotte : comédie héroïque. Sans doute la veine héroïque
trouve-t-elle son origine dans l'épopée de Cervantès,
dont l'opéra s'inspire, de loin d'ailleurs. L'appelation de comédie est plus paradoxale, car le truculent qui se mélange à
l'épique vire plutôt à l'humour, et sombre dans le tragique. En
tout cas, c'est ainsi que le conçoit Laurent Pelly dans sa mise en scène à
La Monnaie. Nul doute aussi que cette
production, montée pour marquer les adieux à la scène de sa ville natale de
José van Dam, en est influencée dans sa couleur
générale. Une certaine mélancolie s'en dégage, installée
dès la première scène où Don Quichotte assiste rêveur à l'animation alentour,
plongé dans ses lectures. Même les moments de franche
gaieté paraissent écrêtés au profit du trait distancé. Y est
pour beaucoup l'étonnant décor (Barbara de Limburg) en
amoncellement de papier mâché, comme si étaient réunies là toutes les lettres
et billets doux empilés au cours d'une vie de fantasmes rimeurs
et de doux rèves éveillés.
©J.
Jacobs
L'émotion affleure souvent. Ainsi
lors de la scène des moulins, alors que notre héros charge l'illusion d'une
énorme aile tournoyant au premier plan ; plus
encore au cours de la traque des bandits où, figé
sur sa propre lance, Don Quichotte acquiert à sa juste cause ses poursuivants. Il y
a là quelque vision christique. Si José van Dam n'a bien sûr
plus la vigueur vocale d'antan, le magnétisme dont il habite ce « fou
sublime » reste phénoménal et, à
l'heure de l'ultime adieu, déchirant. Alors
qu'il faut finir en « héros admirable », une page se tourne. Et l'on se
prend à penser que cette Île des Rêves léguée à l'ami Sancho, c'est
celle que le chanteur nous a livrée soir après soir.
À ses côtés, Sancho qui, comme
Leporello vis à vis de Don Giovanni, en vient presque à s'identifier à son
grand héros, a belle stature. Marc Minkowski joue à fond
les contrastes d'une musique séduisante dans sa verve presque trop énergique et
ses climats poétiques on ne peut plus galbés.
©J.
Jacobs
Reprise brillante de Billy Budd à l'Opéra Bastille.
Benjamin BRITTEN : Billy
Budd. Opéra en deux actes. Livret
d'Edward Morgan Forster & Éric Crozier, d'après la
nouvelle d'Herman Melville. Kim
Begley, Lucas Maechem, Gidon Saks, Michael Druiett, Paul Gay, Scott Wilde,
Andreas Jäggi, Yuri Kissin, François Piolino, Frank Leguérinel. Orchestre et choeurs de l'Opéra national de Paris, dir. Jeffrey Tate. Mise
en scène : Francesca Zambello.
Si la vitalité d'une maison d'opéra se mesure à la qualité de ses reprises,
assurément celle de l'Opéra de Paris est actuellement exemplaire à en juger par Billy Budd donné à Bastille. Non
seulement la mise en scène de Francesca Zambello (1996) n'a pas pris une ride,
mais l'excellence de l'interpétation musicale semble la ragaillardir.
À peu près unique en son genre, pour ne comporter aucun personnage féminin,
l'opéra de Britten traite l'histoire d'un jeune marin accusé faussement
par Claggart, le maître d'armes d'un navire de Sa Majesté, de vouloir fomenter
une mutinerie, et qu'il en vient à tuer dans sa gauche défense. Il
sera jugé et condamné à être pendu devant l'équipage réuni, crucifié sous l'œil du
Capitaine Vere qui, pourtant convaincu de sa droiture, ne
fera rien pour le sauver. L'œuvre n'échappe pas à l'ambiguité de ses sous-entendus, notammment de ses
implications homosexuelles. Car si le maître d'armes
s'est juré de perdre Billy, c'est que, fasciné par la beauté de celui-ci, il ne peut assumer cette partie inavouée de
lui-même. Mais l'esthète Capitaine Vere n'est-il pas tout
autant troublé. La confrontation manichéenne
entre Bien et Mal est transcendée par le drame moral que vit ce troisième
personnage, tel qu'exposé dans le prologue et l'épilogue qui encadrent la
pièce, elle-même fonctionnant comme un flash-back. Dans
le décor grandiose (Alison Chitty) d'un vaste pont de navire barré d'un
mât en forme de croix de Lorraine, où la lumière trace d'envoûtants
climats, ou des entrailles de celui-ci, Francesca Zambello sculpte aussi bien
l'épique de la fresque (l'attaque d'une frégate française troublée par la
brusque tombée de la brume) que la prégnance de l'inexorable
tragédie broyant un destin.
©Opéra
national de Paris/C. Leiber
Qu'il s'agisse des chœurs,
personnification d'un monde qui se vit clos, ou des figures solistes, chacune
magistralement burinée, tout est ici d'une singulière force.
De cet ensemble se dégagent : Lucas Maechem, Billy d'une
désarmante et radieuse jeunesse, Gidon Saks, Claggart ou l'homme pervers criant
son venin, et Kim Begley, Vere, qui insuffle une touche d'humanité à ce drame
de l'extrême. Jeffrey Tate offre une
lecture particulièment accomplie de la partition de Britten : diversité des paysages sonores et de ses résonances, mélange d'agitation et de
méditation, de sonorités lugubres ou frénétiques, tout est, sous
sa direction, frappé au coin du vrai.
©Opéra
national de Paris/I. Patrick
Jean-Pierre Robert.
In memoriam Jean Maillard (1926-1985).
Messe en si mineur de Jean-Sébastien Bach
(BWV 232).
Le dimanche 16 mai, il fut donné à
une assistance nombreuse, emplissant toute la nef de l'église Saint-Louis de
Fontainebleau, d’entendre une interprétation magistrale de la Messe en si mineur de Bach ;
l'exécution de ce monumental chef-d’œuvre par l'Ensemble Laudate Dominum de Fontainebleau-Avon, les solistes et l'orchestre sous la direction de leur
chef Jean-Jacques Prévost, était, ce jour-là, particulièrement dédiée à la
mémoire de Jean Maillard, pour célébrer le 25e anniversaire de sa
mort.
Beaucoup de collègues, d’amis, d’anciens élèves se
souviennent de cet éminent professeur d’Éducation musicale qui, pendant plus de
trente ans, enseigna et fit aimer la musique à des générations d'élèves et
d’étudiants, aussi bien dans les deux lycées de la ville, qu'à la Schola Cantorum de Paris, à Paris-IV Censier
et Paris-IV Sorbonne.
Beaucoup de musicologues n'ont pas oublié ses travaux
d'érudition, axés non seulement sur la lyrique médiévale, objet de sa thèse sur
le Lai lyrique en 1963, mais aussi sur bien d'autres sujets, privilégiant le
plus souvent la musique et les musiciens français, sans oublier ses recherches
sur les traditions populaires, l’hagiographie et l’organologie.
Beaucoup de lecteurs de l’Éducation
musicale, enfin, ont encore en mémoire sa fidèle et efficace action en
faveur de la revue depuis... 1950 ! Ses pertinentes et nombreuses
analyses, le courrier des lecteurs qu'il animait, cherchant toujours à aider
ses correspondants, ses critiques de disques et de livres faisaient de lui un
collaborateur efficace et apprécié.
Aucun hommage ne pouvait mieux lui être
rendu que ce concert d'exception.
Précédé par le choral d'orgue
BWV 645 de Bach, exécuté avec clarté et sensibilité par Éric Lebrun,
ancien élève de Jean Maillard et organiste de l'église Saint-Antoine des
Quinze-Vingts de Paris, le concert se poursuivit avec les vingt-quatre morceaux
composant l'intégralité de la Messe en si mineur dont le Cantor de Leipzig avait entrepris la
composition dès 1733, mais qu'il paracheva en 1748.
Les quatre-vingt choristes, l’orchestre
de vingt instrumentistes auquel s’adjoignait l'orgue d'accompagnement, tenu à
la perfection par Pascale Giardina, les cinq chanteurs solistes, sous la
baguette nette, claire et sensible de Jean-Jacques Prévost - successeur de Jean
Maillard au lycée François Ier - réalisaient une imposante
formation, digne du chef-d’œuvre qu’ils recréaient.
L'éloge de l'Ensemble Laudate
Dominum n'est plus à faire. Fondée en 1974, par Jean-Jacques Prévost,
au sein de l'Église reformée de Fontainebleau dont il était lui-même
l'organiste, cette chorale - dont Jean Maillard avait salué et encouragé les
débuts - s'est ensuite ouverte à tous, y accueillant de nombreux élèves et
anciens élèves (« Les musiciens de François Ier ») et, s’orientant vers un
répertoire de cantates, messes et oratorios. Depuis plus de trente ans,
son répertoire s’enrichit chaque année, allant de Bach à Widor, passant par
Vivaldi, Haendel, M.-A. Charpentier, Haydn, Mozart, Dvořák, Fauré,
Gounod...
Comme par le passé, nous avons
apprécié, ce jour-là, l’exécution d’une partition où les difficultés étaient
vaillamment surmontées : netteté des départs, justesse impeccable, en
particulier dans les chromatismes du 2nd Kyrie, agilité et
précision des vocalises, souvent périlleuses, comme celles du Gratias agimus
tibi, expression paisible et sereine de l'Et incarnatus est ou
douloureuse du Crucifixus, explosion triomphale enfin du Resurrexit.
Et, de surcroît, malgré l'imposante participation des voix féminines, et en
particulier des soprani, l'homogénéité de la masse chorale était presque
toujours présente.
Des félicitations sans partage doivent
être aussi décernées aux chanteurs solistes, aux voix fraîches et juvéniles des
deux soprani, Émilie Rose Bry (ancienne de François Ier) et
Dominique McCormick, au timbre chaud et riche de l’alto, Sophia Castiello, au
ténor Gil Chazallet, expressif et sensible, à la solide voix de basse d'Olivier
Ayault.
Mentionnons aussi les solistes
instrumentistes dialoguant, faisant corps avec le chanteur soliste ;
citons, par exemple, l’intervention du flûtiste Lisheng Wang, dont la ligne
mélodique, grâce à un phrasé délicat, s’intégrait si bien aux deux solistes du Domine Deus,
et plus loin, toujours aussi musicalement, au Benedictus du ténor.
Citons encore le merveilleux hautbois d’amour de Pierre Hartzfeld, donnant la
réplique à Olivier Ayault dans le Et in spiritus sancto, et surtout,
accompagnant la voix chaude et prenante de l’alto Sophia Castiello dans le Qui
sedes, un des sommets, à notre sens, de l'ensemble de cette magnifique
prestation. N'oublions pas non plus les trompettes, intervenant avec les
chœurs dans le Gloria et dans le Dona nobis pacem, dont les
éclats étaient soulignés par la prestigieuse timbale du jeune Florian
Bellecourt. Mentionnons encore l'intervention du cor et des bassons, se
partageant avec la basse l’air majestueux Quoniam tu solus sanctus.
Mais enfin et surtout, saluons la magnifique intervention du violon solo,
Marie-France Varnerot (ancienne élève de Jean et Francine Maillard), faisant
assaut de virtuosité avec la soprane, dans l’air Laudamus te.
Comment, enfin, ne pas saluer, en la
personne du chef de cet imposant ensemble, Jean-Jacques Prévost, le
« maître d’œuvre » qui permit de mener à bien une telle réalisation,
résultat de nombreuses heures de travail, de mises au point d’une partition
émaillée de difficultés techniques redoutables, même pour des
professionnels. Netteté et précision des départs, tant du chœur que de
l'orchestre ; tempos toujours régulièrement respectés, conduisant sans
heurt le discours musical, sans en exclure l'expression sensible ; appui
sur une impeccable « basse continue » (bravo à la contrebasse et à
l'orgue de Pascale Giardina !)… Voilà les qualités qu'il nous fallait
souligner.
Le public de ce dimanche 16 mai
goûta pleinement ces heures privilégiées et salua par des applaudissements
enthousiastes l'accord final de la Messe en si mineur, réclamant un bis qui lui fut donné avec un
triomphant et flamboyant Resurrexit.
Signalons que le programme de ce
concert avait déjà été donné à l’église Saint-Pierre d'Avon, à l'Oratoire du
Louvre, au Temple de l’Étoile et devait l'être ensuite à la collégiale
Notre-Dame et Saint-Loup de Montereau. Souhaitons que l'ensemble Laudate
Dominum nous comble à nouveau de concerts comme celui-ci !
Francine Maillard.
***
Haut
Quand l'expérience donne
la jeunesse de rebondir
À l'issue du concert donné le 23
avril 2010 à la Salle Pleyel, nous étions plus d'un à penser que le Concerto
en sol de Ravel, pourtant mille fois entendu, venait de résonner à nos
oreilles sous une lumière nouvelle. Roger Muraro, avec la
naturelle spontanéité qui le caractérise, en offrait une interprétation très
personnelle sans pour autant solliciter le texte en quelque aspect que ce soit.
S'y conjuguaient la virtuosité lisztienne – mettant ainsi en évidence les
sources multiples auxquelles a puisé Ravel – et une dématérialisation poétique
du discours sonore : par-dessus les arêtes vives et les segments colorés
dessinés à l'orchestre, le piano de Muraro faisait planer une strate irréelle,
semblant vivre son chemin comme en lévitation, que fusent les traits rythmiques
ou que chante le deuxième mouvement, que se propage une éblouissante vélocité
ou que s'infuse une rêverie nostalgique. Grâce à ce toucher admirablement
maîtrisé, nous flottions dans d'improbables « jardins suspendus »
jetant leur poudroiement sur les touches blanches et noires.
Roger Muraro ©Bertrand Desprez
Ce jeu subtil de strates musicales
était parfaitement compris, intégré, par Myung-Whun Chung à la tête d'un
Orchestre philharmonique de Radio-France en grande forme, au premier rang
duquel on reconnaît l'excellent Svetlin Roussev dont on ne saurait oublier les
belles performances de violoniste quand il s'exprime en musique de chambre, par
exemple en duo avec la pianiste Elena Rozanova. L'Orchestre avait tout
loisir de jeter ses feux colorés dans le reste du programme, décidément
ravélien, avec la Rhapsodie espagnole et la transcription des Tableaux
d'une Exposition, ainsi que dans la paradante mais vite oubliable Ouverture
pour une Exposition de Jean-Jacques Di Tucci, destinée à l'Exposition
universelle de Shanghaï.
Réjouissons-nous que le concert
ait été enregistré à des fins discographiques par Universal, tant la précédente
version de Roger Muraro était handicapée par le partenariat lénifiant du chef
hollandais Hubert Soudant ! Le public de Pleyel ne voulait plus
laisser partir le pianiste qui donna, du même Ravel et avec une délicieuse
élégance, À la manière de Borodine et À la manière de Chabrier.
Mais quelle absence de contrôle de
la programmation dénote l'annonce du même concerto, en la même salle, à quatre
jours d'intervalle... hélas sous d'autres doigts ! Il n'y a pas que
les voitures de police qui se répandent en carrosseries banalisées, les œuvres
musicales s'y exposent aussi... Et l'inusable Concerto en sol fera
encore quelques tours de piste la saison prochaine... Pendant ce temps,
d'autres belles partitions concertantes françaises de la même époque
(Roussel,Vierne, R. Hahn) sommeillent sur des voies de garage.
Fauré connut une période de mise à
l'écart, pour ne pas dire de condescendante ignorance, de la part des pianistes
les plus en vue ; réjouissons-nous qu'une génération au sommet de son art
contribue aujourd'hui à lui restituer son plein rang dans la modernité.
Le récital de Jean-Marc Luisada au Châtelet (25 avril 2010)
s'ouvrait audacieusement : ayant choisi de constituer un parcours à
travers les Nocturnes de Fauré en première partie, il nous donnait
d'entrée de jeu le plus tardif de sa sélection (l'op.104 n°1, de 1913), le plus
troublant aussi dans sa manière de brouiller les pistes de l'itinéraire
harmonique. Ainsi éveillait-il nos sens pour affûter notre réception de
quelques autres Nocturnes antérieurs, démontrant judicieusement qu'il
suffit parfois de peu d'années pour franchir des paliers notables dans
l'évolution du langage fauréen. Une articulation et un phrasé
d'anatomiste accusaient les intentions, révélaient les angles cachés de cette
introspection musicale. Qui parlerait encore de désuétude à propos de
telles pièces n'aurait rien compris au message fort que véhiculait Jean-Marc
Luisada !
Si l'on considère que
l'intelligence d'un artiste se manifeste aussi en orientant l'attention des
auditeurs par de nouvelles mises en situation de pièces fort courues, alors
notre artiste a réussi sa démonstration : sa manière de s'engager dans la
seconde partie du programme - celle vouée à Chopin - par la Ballade n°2,
regardait nettement du côté des penchants mozartiens du compositeur.
L'esprit romantique surgissait plutôt par flambées pianistiques, en s'orientant
vers la Ballade n°1 puis l'Andante spianato et Grande Polonaise
brillante, mais sans se laisser ravaler à un sentimentalisme « le cœur
en écharpe » (pour emprunter l'expression de Ravel), et gardait le cap des
pulsions classicisantes revendiquées par Chopin. Fidèle à ses amours bien
connues, Jean-Marc Luisada, le cinéphile passionné, adressait en bis un clin d'œil
à Pasolini par le biais d'un morceau de Morricone, puis revenait à ses chères Mazurkas de Chopin, dont il est un apôtre infatigable. On garde le souvenir
vivace de l'intégrale des Mazurkas qu'il avait, dès ses débuts au
disque, fait paraître chez Deutsche Grammophon ; pourtant, son
questionnement permanent l'a poussé à reprendre ces chefs-d'œuvre concis mais
si riches de perspectives futuristes pour une nouvelle gravure RCA. Nous
en reparlerons dans la lettre de rentrée de L’éducation
musicale.
Jean-Marc Luisada ©DR
De Fauré il était
encore question grâce à Michaël Levinas : au Musée Marmottan-Monet
(le 27 avril 2010), le pianiste-compositeur accompagnait la soprano Magali
Léger selon l'attention au son qui le caractérise. « [Le piano]
porte la voix par la résonance et d'une certaine manière la voix est à l'intérieur
de l'espace du piano », déclare Michaël Levinas. Sa défense et
illustration de la modernité de Fauré s'appuie sur la définition des
« grilles harmoniques » fauréennes au sein d'une hiérarchie
acoustique susceptible de rejoindre les préoccupations des musiciens
d'aujourd'hui. Il aime citer son maître Olivier Messiaen : « L'œuvre
de Fauré participe d'un renversement des priorités. Il ne s'agit plus de
mélodies harmonisées mais de mélodies résultantes des processus
harmoniques ». Cette approche « spectrale » d'un espace
acoustique très intime se traduit notamment chez Levinas par une étude subtile
des paliers de la pédalisation, tandis que l'art de modeler le son procède par
un jeu près du clavier, dans le clavier, les changements
d'articulation ayant mission de doser les nuances sans jamais
« attaquer » (au sens – hélas – littéral qu'appliquent certains
pianistes) les touches. Au programme, La Bonne Chanson, Les Berceaux, Chanson d'Amour, Clair de Lune, Le Secret, traçaient un
parallèle avec le disque enregistré par le duo en 2008
(M&A Classique : M&A JS226). Les Ariettes
oubliées de Claude Debussy et les Chansons grises de Reynaldo Hahn
complétaient les paysages psychologiques d'une galerie verlainienne.
Michaël Levinas ©Lemoine/C.Daguet
Quand l'histoire
artistique est revisitée par l'innovation éditoriale
Les éditions Actes Sud
innovent en imaginant de beaux objets : des livres-disques où l'art
photographique (en noir et blanc) répond à l'art musical, sous la préface d'une
plume du monde musical. Une émouvante soirée privée (10 mai 2010),
destinée à lancer la collection sous le signe de son premier volume, ramenait Jean-François
Heisser sur les lieux où Blanche Selva, fidèle interprète d'Albéniz, créa
l'un des cahiers d'Iberia : le magnifique salon de Winnaretta
Singer, princesse de Polignac (l'hôtel particulier est aujourd'hui géré par la
Fondation Singer-Polignac). On sait le lien indéfectible qui unit le
pianiste français au répertoire ibérique. Dans un discours d'une
érudition allant à l'essentiel, il fit revivre le contexte des concerts du
temps, et donna, sur le beau Steinway de la Fondation, quelques extraits des
différents cahiers d'Iberia. À évoluer en compagnonnage fervent
avec ce chef-d'œuvre, Jean-François Heisser a enrichi son interprétation – qui
se veut toujours purifiée du pittoresque facile – en laissant plus de temps aux
atmosphères pour enrober chaque inflexion chargée d'âme, en approfondissant la
résonance que prolonge la pédalisation, en creusant le champ des arrière-plans
qui sertissent les lumières dominantes de ces évocations agissantes.
Si l'on compare le
présent disque au premier enregistrement (Érato, 1994) qu'avait gravé
Jean-François Heisser de ces pages dont il a lui-même assumé une édition
d'après les manuscrits (Salabert), on se laisse toucher, dans l'interprétation
d'aujourd'hui, par des sonorités plus enveloppantes, des atmosphères plus
vibrantes, qui rendent plus pénétrantes les pages chargées d'émotion
nostalgique et leur confèrent une intensité intérieure plus humaine. Les
contrepoints rythmiques sont aussi dessinés d'une main plus ferme. Cette
nouvelle approche a bénéficié de la prise de son de René Gambini, grand
spécialiste du piano et fondateur du label Lyrinx. Et l'on savoure en
lecteur esthète le bonheur d'être introduit à cet univers par les descriptions,
magnifiques de poésie suggestive, que le compositeur Philippe Fénelon
(également associé à l'enregistrement sous la fonction de directeur artistique)
a tracées de chaque pièce.
Jean-François Heisser ©DR
À telle musique
devaient être couplées des photographies de même exigence : avec une
pureté de trait sans faille, les instants dérobés par Isabel Muñoz savent
extraire le détail éloquent d'une architecture ou d'un mouvement de danse
flamenca. On pourra retrouver Jean-François Heisser au Théâtre des
Bouffes-du-Nord le 7 juin prochain, en attendant qu'il offre aux Parisiens
l'exploit déjà accompli avec son Orchestre de Poitou-Charentes, à savoir
l'intégrale des Concertos pour piano de Beethoven – joués et dirigés du clavier
– en une seule journée de concerts (à l'Opéra Comique, le 10 avril 2011).
Dans le deuxième
volume, les photos de l'Israëlo-Américain Michael Ackerman, par leur traitement
du grain et du flou, semblent fixer une vallée de larmes à travers un filtre de
fin du monde. Le cri d'Edvard Munch n'est pas loin de l'une de ces
photos. D'autres suinte une vision transposée des camps de la mort, ce
qui les rapproche des drames dont Schoenberg et Webern furent les
contemporains. Le sommet du disque est à chercher sans conteste dans
l'intégrale des pièces pour piano de Schönberg : nulle dispersion aride
des sons dans le travail du pianiste brésilien Jean Louis Steuerman,
mais un poids de méditation accordant à chaque note sa place dans le cheminement
expressif de questions mystérieuses, d'allusions humoristiques, d'orages
brévissimes, la mélancolie du voyage sans retour venant tempérer un radicalisme
vécu avec un fond de nostalgie. S'y enchaînent, comme une conséquence
logique, les Variations op.27 de Webern. Seule réserve :
étendu à la Sonate op.1 de Berg, pourtant d'une autre veine, ce
traitement tout en délicatesse lui enlève de son puissant lyrisme.
On sourit en lisant,
entre les lignes, le texte introductif de Gérard Condé, tant y transpirent les
débats intérieurs vécus par le compositeur-musicologue, d'abord héritier
convaincu de l'École de Vienne avant d'opérer un revirement à 180 degrés vers
le conservatisme néo-tonal.
Les prochains volumes
annoncés par l'éditeur introduiront des compositeurs vivants dans cette
précieuse collection, volonté d'un double engagement artistique qui appelle
l'adhésion.
Jean-Louis Steuerman ©DR
Quand les jeunes talents
imposent leur maturité de pensée
Et si nous regardions
un peu la jeune génération, à présent (même si les artistes précédemment cités
brillent par la perpétuelle remise en question de soi-même qui témoigne de la
jeunesse d'esprit !).
Arièle Butaux, pour
son émission « D'une rive à l'autre » (France Musique), nous conviait
le 6 mai 2010 à l'Auditorium du Petit Palais pour une belle opération de
métissage culturel à deux pianos en blanc et noir ; mais, touche
originale, le jazzman était blanc (Franck Avitabile), tandis que le
pianiste « classique » était noir (Wilhem Latchoumia).
Latchoumia s'est très vite
imposé par une pratique intensive de la musique contemporaine : on se
risque volontiers à prédire qu'il porte en lui la capacité d'en renouveler
l'interprétation. Doté de moyens phénoménaux, il assimile, intègre,
revivifie des langages qui, aux yeux des contemporains d'une effervescente
éclosion, dérangent par leur impact novateur, mais, entre les mains de la
génération puînée, prennent leur place naturelle dans l'histoire. On
regrette, à ce propos, que certains jeunes artistes, privés de la culture et de
la clairvoyance nécessaires, se laissent « balader » au gré des modes
ambiantes ; or les modes ont pour sort inéluctable de se démoder très
vite ! Est-ce l'apprentissage de la musicologie ?
Toujours est-il que Wilhem Latchoumia projette un regard large et pénétrant sur
les audaces de la création des ces dernières décennies. Il les entraîne
dans une farandole festive où son intuition métissée convie au premier plan des
visages inattendus. Il n'est que de voir son corps, au piano, s'animer
souplement, mû par un rythme chaloupé semblant une résurgence de ses racines
caraïbes (donc africaines...). Sous ses doigts, la Mysterious Adventure pour piano préparé (1945) de John Cage sonne avec une vie évocatrice de
percussions africaines et débarrassée de l'aridité intellectuelle inhérente à
la pose soi-disant avant-gardiste. Lorsque le piano redevient libéré de
ses clous, gommes et autres accessoires, on goûte le beau son, riche de nuances
poétiques, de Wilhem Latchoumia. Le folklore d'Europe centrale, recueilli
par Bartók, trouve des accents communs – les « universaux » de
l'inconscient collectif des peuples se reliant dans la chaîne de leur
expression séculaire – avec ce qui constitue l'essence la plus profonde du
jazz. En ce sens, un tel programme invite à en méditer quelques
enseignements.
Wilhem Latchoumia ©DR
Au chapitre de
l'invention jazzistique, on regrettera que le vocabulaire d'improvisateur de
Franck Avitabile soit bien pauvre et privé d'envolée (songeons à la
vertigineuse imagination des grands musiciens... noirs du passé !), mais
ses pièces écrites pour deux pianos apportaient une note divertissante de bonne
venue.
Censé représenter une note plus
prestigieuse au chapitre de la programmation de Radio France, le concert du 21
mai, au Théâtre des Champs-Élysées, décevait : on attendait beaucoup
du Concerto de Schönberg par David
Fray, encore eût-il fallu que le chef et le pianiste regardassent dans la
même direction ! Or David Fray – qui se dit « attentif au rapport qui
existe entre chaque note », optique semblant si à propos dès lors qu'il
s'agit de l'École de Vienne – travaillait dans la ciselure, avec sa coutumière
sophistication qui peut même irriter, tandis que Daniele Gatti, à la tête de
l'Orchestre national, brossait à gros traits. La cohérence, déjà si
difficile à dessiner dans cette œuvre, restait sur le pas de la porte. Le
reste du programme semait tout autant la perplexité : aucun souffle dans
les pages de Wagner que Daniele Gatti faisait marcher d'un pas conventionnel,
aucune recherche de palette raffinée dans les Nocturnes de Debussy.
Et l'on ne peut s'empêcher de comparer la trajectoire accomplie par les deux
orchestres de Radio France : tandis que le Philharmonique – qui fut, à de
lointaines époques, la phalange de second plan – s'est épanoui jusqu'à offrir
les splendides couleurs qui lui valent ses succès, le National parcourrait-il
le chemin inverse ? Les scories rendant granuleuse la pâte sonore
réveillaient ce soir-là le souvenir d'heures peu gratifiantes.
David Fray ©DR
Le jeune Toscan Maurizio
Baglini se distingue par une recherche de sonorités qui lui dicte un travail
original sur l'articulation : à l'heure où les évocations de Blanche Selva
se succèdent (lire supra et infra), la manière qu'a Maurizio
Baglini de gouverner sa pensée des modes d'attaque n'est pas sans nous
remémorer l'observation du geste à laquelle incitait l'illustre disparue.
Trois compositeurs au programme de son récital à la Salle Gaveau
(27 mai 2010), trois touchers diversement pesés : après des Scarlatti
articulés de très haut venait une Berceuse de Chopin hypnotique, nimbée
de ce climat qui la fait encore aujourd'hui considérer comme l'une des pièces
les plus « post-modernes » de leur auteur. La Barcarolle évoluait sur des arrière-plans accumulant les nuages chargés de latences qui
devaient éclater dans la 1re Ballade. Les Mazurkas,
en revanche, supportaient moins d'être ramenées à des brumes intimes, privées
de leur ossature rythmique (décidément Luisada reste notre référence !).
Maurizio Baglini ©DR
Le moment fort de ce récital
résidait dans le cycle complet des 12 Études d'exécution transcendante de
Liszt où l'interprétation de Baglini faisait lever des étrangetés par la
manière d'attirer l'oreille vers des ressorts cachés à l'intérieur de la
texture. Souventes fois, les voix intermédiaires et les ombres des graves
capturaient le premier plan, ne concédant guère leur territoire aux effets
convenus de main droite bravache. On retiendra particulièrement un Paysage comme en suspension, une Vision qui jamais ne mérita si bien son titre,
hantée d'apparitions hallucinées. Le triptyque central Vision – Eroica – Wilde Jagd s'imposait d'ailleurs comme la clé de
voûte d'une lancée de contrastes, tandis que Feux follets et Ricordanza voltigeaient sur le clavier, avant des Harmonies du soir d'un crépuscule
rougeoyant et un Chasse-neige traversé de tempêtes. Mais nous
reviendrons sur cette interprétation puisque la gravure qu'en a réalisée
Maurizio Baglini (Decca) parviendra sur le marché français à l'automne.
Sylviane Falcinelli.
***
« Un
mécène, deux regards » : une
expérience réussie, à l'Opéra Comique, de sensibilisation des jeunes au
monde du lyrique.
L'Association des Amis et
Mécènes de l'Opéra Comique (AMOC) mène depuis 2008, entre autres
actions, une opération originale en direction du jeune public. « Un mécène, deux regards » a pour dessein d'ouvrir les portes de la
maison aux jeunes issus d'horizons différents ou souffrant d'exclusion, afin de
les familiariser avec un lieu et un genre considérés a priori
comme peu accessibles. Le dispositif, qui
met en place une médiation pédagogique et une offre de spectacles, se
décline en quatre étapes :
- une formation des enseignants,
puisqu'aussi bien la sensibilisation des accompagnateurs est essentielle. Des
sessions d'information sont organisées sur la programmation et sur les thèmes à
développer pédagogiquement. L'édition de dossiers
pédagogiques la complète ;
- une médiation culturelle
personnalisée, revêtant des formes variées et complémentaires : visite de l'Opéra Comique ; ateliers de présentation
d'une œuvre (Carmen, par exemple) ou d'un thème (les histoires
d'amour à l'opéra et dans la littérature ; le héros
d'opéra) ;
- une offre de places de spectacles durant la
saison. Il faut vaincre les barrières qui entravent
l'accès à cette forme de culture, qu'elles soient économiques, sociologiques
ou même symboliques. L'assistance à la représentation est
toujours précédée d'une initiation à l'œuvre donnée ;
- une
réalisation annuelle en écho aux expériences partagées au cours de la saison. Ce
peut être la réalisation d'un témoignage plastique ou audiovisuel, ou le
montage d'un spectacle vivant. Ainsi, en
juin 2009, un spectacle intitulé « Carmen Jeun's », travail scénique à
partir de Carmen, a
permis un retour ciblé sur les actions menées durant l'année à partir
du chef-d'œuvre de Bizet.
Dessin de Sabrina Mamelouk, lycée Évariste-Galois
Cette opération s'inscrit dans
le tradition d'ouverture de l'Opéra Comique. On y
est ici, à travers le Conseil d'administration et les dirigeants, extrêmement
sensibilisé. Elle illustre, selon Macha
Makeieff, « une volonté de travailler ensemble, ce qui est déjà
beaucoup ». Les artistes qui professent
les métiers du théâtre lyrique - par nature généreux - n'hésitent pas à venir
expliquer ce qu'ils font. Quelle chance pour les jeunes
de voir le chef d'orchestre, personnage un peu mythique et incaccessible, venir
à eux pour dialoguer sur ce qui vient de se passer dans la salle. Dès lors, les premières timidités vaincues, rien
d'étonnant à ce que les échanges soient animés. Et les retours
enthousiastes : « l'émotion nous atteint en plein cœur, nous
submerge et nous voici catapultés de force en dehors de l'Opéra
Comique » (un élève de Seconde, après la représentation de Didon
et Énée).
Entièrement financée par le
mécénat, elle mobilise actuellement une douzaine de partenaires institutionnels
ou individuels. C'est le cas d'associations
travaillant dans le domaine de l'insertion des jeunes, tels « Les
Petits Riens » (faciliter l'accès à la
musique classique), « Réussir aujourd'hui »
(sensibilisation d'élèves de 1re et Terminale
de Stains et Épinay-sur-Seine), « Œuvres de Secours aux Enfants » (maisons d'enfants), « Cultures
du Cœur » (jeunes bénéficiant d'une mesure d'accueil
temporaire ou d'une mesure d'assistance judiciaire éducative). Des
établissements scolaires participent aussi activement au
programme, tels le lycée Évariste-Galois à Noisy-le-Grand
ou le collège Gustave-Romanet dans le XVIIIe arrondissement
de Paris. Enfin des fondations, ainsi celle de la RATP, se
sont jointes devenant mécène de projets (un soutien logistique permettant à des
jeunes de banlieue de se rendre au théâtre ; ou
encore l'édition d'une brochure ludique gratuite présentant l'Opéra
Comique).
©Amoc/Opéra
comique
Le programme se veut ambitieux
tout en gardant une approche qui soit en rapport avec les proportions de la
maison et les caractéristiques de son répertoire. Durable
également car le public à sensibiliser est très vaste et l'expérience prouve un
réel investissement des jeunes. Aussi cherche-t-il à se
diversifier et à associer de nouveaux partenaires ; de
même qu'à organiser des activités nouvelles, telles des sessions de formation
aux métiers du théâtre. Comme le souligne Marie
Delbé, sa responsable, « l'intérêt est que cette action ne se situe pas
dans le cadre scolaire, et qu'elle permet le partage d'un moment de
plaisir ». Aussi faut-il trouver le bon
médiateur, autrement dit celui qui fasse découvrir et aimer.
©Amoc/Opéra Comique
Contact : AMOC. Marie Delbé, déléguée générale,
Opéra Comique (5, rue Favart, Paris IIe.
Tél. : 33
(0)1 42 44 45 64
. amoc@opera-comique.com).
Jean-Pierre Robert.
***
Si on
chantait ? Aux yeux des autres Européens, le peuple allemand passe pour un peuple
de musiciens et de chanteurs. Et bien, figurez-vous que ce n’est plus
tout à fait vrai : eux aussi otages des jeux vidéo, du Net et de la
télévision, les enfants allemands ne chanteraient plus. C’est en tous cas
le constat attristé que font certains musiciens qui, comme la célèbre basse
mozartienne Cornelius Hauptmann , ont un beau jour décidé de faire quelque
chose.
Le raisonnement de Cornelius a été très simple : pour
que les enfants aient envie de chanter, il faut qu’ils chantent dans leurs
familles. Autrement dit, il faut que leurs parents chantent avec eux.
Ayant gardé un souvenir ému des berceuses que lui chantaient ses parents et
surtout ses grands-parents, il a compris que c’était de là qu’il fallait partir
si on voulait renverser la tendance actuelle.
Usant de sa notoriété, Cornelius a contacté ses collègues
chanteurs et a réussi à rassembler 52 artistes qui, tous, ont accepté de
participer bénévolement à l’aventure ; avec des pointures comme Peter
Schreier et Kurt Moll - membres, comme Cornelius, du « gang des Sarastro
et des Tamino ».
Trouver une maison de disque fut plus délicat et, après
bien des tergiversations, c’est la maison Carus qui a finalement dit
« banco ».
Parallèlement, Cornelius et ses amis ont sélectionné 52 berceuses
allemandes, une pour chaque interprète et une pour chaque semaine de l`année,
de quoi graver finalement deux CDs de 26 titres chacun. Les chansons
sont exclusivement accompagnées par un piano ou une guitare, les synthétiseurs
ayant été soigneusement bannis de cet enregistrement haut de gamme et hyper
professionnel réalisé par les techniciens de la radio de Stuttgart, « les
enfants méritant ce qui se fait de mieux », pour citer Hauptmann lui-même.
Chaque CD existe en outre dans sa version « karaoké », c'est-à-dire
avec l’accompagnement seul, un violon remplaçant la voix pour soutenir et
accompagner celle des enfants.
Cornelius Hauptmann ©DR
Lame de
fond : Sortis simultanément il y a sept mois sous les références Carus 83 001
et Carus 83 002, les
volumes 1 et 2 des Wiegenlieder [www.wiegenlieder.org] ont eu, aux
quatre coins de l’Allemagne, un retentissement énorme, que leurs auteurs
n’auraient pu imaginer dans leurs rêves les plus fous. La plupart des
grandes radios allemandes ont d’emblée joué le jeu, et décidé de programmer -
toutes les semaines, à la même heure - la même berceuse (intitulée « Berceuse
de la semaine ») jusqu’à ce que tous les petits Allemands - et surtout
tous leurs parents - sachent la chanter. Elles sont ensuite passé au
titre suivant, la semaine d’après.
Les premiers acheteurs furent bien sûr les grands-parents,
désireux de renouer avec leurs petits-enfants un lien peut-être distendu par la
vie moderne. Mais pas seulement : des hôpitaux pour enfants, des
crèches, des écoles maternelles font désormais grand usage de ces si belles
chansons, fruit du génie populaire, dont beaucoup sont d’auteur inconnu.
Jusqu’aux femmes enceintes qui les écoutent régulièrement pour le plus grand
bénéfice de leurs futurs bébés.
Berceuses
contestataires ? Début mai 2010, un très grand
nombre de sages-femmes d’Allemagne ont manifesté dans tout le pays pour une
amélioration de leurs salaires et de leurs conditions de travail : leur
nombre serait insuffisant et leur profession menacée. Celles de Stuttgart
ont demandé à Cornelius, qui vit dans cette ville, de leur donner un petit coup
de main : juché sur une scène, en pleine place du marché, la basse
mozartienne a donc chanté, accompagné des voix de plusieurs centaines de
manifestantes, 5 des berceuses figurant dans les Wiegenlieder. Tous se sont volontairement et brutalement
interrompus au milieu de la cinquième chanson : le scandale que
constitua cette berceuse inachevée, tuée en plein élan, étant le symbole de
celui qui guette l’Allemagne si elle est un jour privé de ses sages-femmes.
Malin, non ?
L’intégration
en chantant ? Mais il y a plus fort
encore : avec les 150 000 euros déjà récoltés grâce à ces deux
disques (et aux livrets illustrés qui vont avec) par l’« Organisation pour
l’éducation musicale des enfants » qui fait partie de la fondation
« Herzenssache » (affaire de cœur), une opération originale s’est
mise en place dans le sud de l’Allemagne, près de Ravensburg : des séances
de chant choral après la classe, pendant lesquelles des enfants de 2 à 5 ans
et leurs mères étudient ces
berceuses en allemand. Le nombre de familles turques est en effet très
élevé dans ce coin de l’Allemagne et les mères, très isolées et sortant peu, ne
parlent que trop rarement la langue de leur pays d’accueil. La découverte
et l’accès à la langue de Goethe à travers des chansons toutes simples est une
voie originale, pour ne pas dire géniale, à laquelle aucun politique n’avait
encore pensé et qui est pourtant en train de se réaliser à titre expérimental.
Nul doute que l’expérience sera un succès qui se reproduira ailleurs - la
chancelière Angela Merkel en personne ayant fait publiquement connaître, en les
patronnant, son engouement pour ces deux disques et, surtout, pour ce qu’ils
peuvent apporter à l’ensemble de ses citoyens.
Michael Nagy ©DR
Ce qui me conduit à parler de notre pays. Les petits
Français ne chantent pas plus que les petits Allemands ; leurs parents, à
de rares exceptions près, ne leur chantent plus de berceuses et les mères
immigrées n’ont pas toutes accès à la langue que parlent désormais leurs
enfants. Et si, chez nous aussi, des artistes généreux (il y en a
beaucoup) issus du Classique mais aussi, pourquoi pas, de la variété, se
mettaient à enregistrer les fleurons de notre patrimoine musical
national ? Des chansons que tous les enfants, sans exception,
apprendraient dès la Maternelle ? L’identité nationale française, dont il
n’a été récemment que trop question, c’est aussi les vieilles chansons (« Il pleut bergère », « Sur l’pont de Nantes », « Gentil coquelicot », « Le temps des cerises ») que se sont
transmises les générations qui nous ont précédées ; des chansons
immortelles, qu’on n’entend pourtant plus guère.
Et si, chez nous aussi, l’intégration des « nouveaux citoyens »
passait par elles ?
Michèle Lhopiteau-Dorfeuille.
***
CLAVECIN
Anne
CHAPELIN-DUBAR : Les préludes non
mesurés de Louis Couperin, vol.1. « Les Carnets de
Sonatine », traité. ZurfluH (www.zurfluh.com).
20,5 x 29,5 cm, 266 p., ex.mus. 30 €.
Prenant en compte les deux copies anciennes (il n’est ni
manuscrit autographe ni publication du vivant du compositeur) & les quatre
dernières éditions modernes (Curtis, 1970/ Moroney, 1985/ Tilney, 1991/ Wilson,
2003), sont ici mises en regard - sinon toujours solutionnées - les nombreuses problématiques.
Des plus récentes recherches, l’arrêt sur image.
VIOLON
Bruno GARLEJ : Violon (volume 1). « Le
temps des études ». 42 études célèbres, à la 1re position.
Hit Diffusion (www.editions-hit-diffusion.fr) :
TEV01. 18 €.
La collection « Le temps des études » réunit les
pièces les plus souvent travaillées par niveau et par instrument. La
présente anthologie d’études (1re position) permettra aux
apprentis violonistes d’avoir accès aux plus grands maîtres de la pédagogie
musicale (Paganini, Wolfhart, Campagnoli, Auer, Mazas, L. Mozart, Leonard,
Sevcik, Spohr, Dancla…), et d’acquérir ainsi ou d’améliorer leur technique
instrumentale.
ORGUE
Henri CAROL
(1910-1984) : Livre de noëls, pour
orgue (sans pédale obligée). Éditions Les Escholiers (tél. : 02 37
90 22 96. edesco@orange.fr) :
ESG-HC2 LN 2010. Format à l’italienne, 20,5 x 29 cm, 90 p.
Pour commémorer le 100e anniversaire de la
naissance du chanoine Henri Carol, éminent organiste (il fut, 25 ans
durant, maître de chapelle à la cathédrale de Monaco) et compositeur de musique
religieuse, l’association « Les Escholiers de sainte Geneviève »
publie (à l’initiative de Guy & Isabelle Miaille) ce recueil de noëls de
pays, sur lesquels le musicien a écrit de magnifiques (et fort simples)
variations. Un bonheur de déchiffrage – ne serait-ce qu’au piano…
Francis Gérimont.
FORMATION MUSICALE
Siegfried DRUMM
& Jean-François ALEXANDRE : Symphonic FM. La formation musicale par l’orchestre. Volume 5. Livre du
professeur. Combre : C06653.
Nous avons dit dans les recensions précédentes tout le
bien que nous pensions de cette entreprise à la fois originale et féconde. Ce
cinquième volume développe encore les possibilités grâce à une nouvelle formule
du cahier de l’élève, qui comporte ce qui est commun à tous les instruments,
plus une partie séparée spécifique pour chaque instrument. Le répertoire
s’étend de Haendel à Scott Joplin en passant par Haydn, Schumann, Bizet,
Moussorgsky et Tchaïkovsky. Rappelons qu’il ne s’agit pas d’un cours de
musique d’ensemble mais d’un véritable cours de formation musicale recouvrant
tous les aspects de cette formation par la pratique de la musique d’ensemble.
Ce volume s’adresse aux élèves commençant leur sixième année de pratique
instrumentale. La méthode fait également une large part à la création en
plus des disciplines traditionnelles de rythme, de lecture, d’intonation,
d’écoute… bref de tout ce qui fait une véritable formation musicale.
PIANO
Laure BORIE : Jazz me boogie. 5 boogies
pour piano. Combre : C06680.
Ces pièces très simples mais aussi très entraînantes
peuvent constituer une excellente initiation au rythme ferroviaire et à la
grille classique du boogie. Beaucoup de plaisir en perspective pour les
jeunes pianistes.
Jean KLEEB : Classic
goes Jazz. 13 Jazzy Arrangements.
1 vol. 1 CD. Bärenreiter : BA 8760.
Jacques Loussier ou les Swingle Singers nous ont, de
longue date, habitués à ces détournements. Disons que les arrangements
ici proposés sont de grande qualité et ne décevront pas les interprètes.
Du Petit Livre d’Anna Magdalena à
Moussorgski en passant par Mozart, Schubert, Chopin et consorts, ce sont les
grands « tubes » du jeune pianiste qui sont ici revisités.
Attention, il ne s’agit pas de pièces pour débutants mais pour pianistes
aguerris. On se délectera en écoutant le CD, à la fois interprétation et
réinterprétation des pièces écrites. Cette écoute est indispensable,
notamment pour l’interprétation du « ternaire »…
ORGUE
SWEELINCK : Sämtliche Orgel –
und Clavierwerke. Polyphone Werke (Part 2). Vol. II.2,
édité par Siegbert Rampe. Urtext. Bärenreiter : BA 8476.
Au-delà de ce volume passionnant, c’est la publication
intégrale de l’œuvre de Sweelinck que nous voudrions ici saluer. Ce
volume contient des œuvres d’authenticité certaine et d’autres qui le sont
moins, mais qui ne manquent pas, pour autant, d’intérêt. On lira avec
beaucoup d’intérêt la copieuse préface qui introduit le volume.
Guy de
LIONCOURT : Petite suite classique, pour
orgue. Adaptation : Germaine Chagnol. Delatour :
DLT 1809.
La collection « Organ Prestige », dans laquelle
est publiée cette œuvre, se donne pour but de mettre à la disposition des
organistes des œuvres peu connues et souvent inédites du répertoire de
l’instrument. C’est le cas pour cette Petite
suite classique, œuvre de jeunesse d’un compositeur élève de Vincent
d’Indy. Écrite primitivement pour piano, elle a été transcrite pour orgue
par Germaine Chagnol, son élève à l’École César Franck. Composée de huit
mouvements, elle constitue une parfaite suite de concert.
GUITARE
Yves CARLIN : 2 danses irlandaises, pour guitare. Niveau 2e cycle. Combre : C06679.
Ces deux morceaux invitent réellement à la danse. Ils
sont notés en notation classique et en tablature. Pièces pleines de
charme et de vie.
Yvon DEMILLAC : Wake up ! 12 pièces
variées pour guitare. Combre : C06656.
Également de niveau 2e cycle, ces douze courtes
pièces comportent des objectifs techniques bien précis, mais leurs titres
évocateurs permettent aux musiciens d’exprimer leur sens musical.
John-Richard Lowry, directeur du Conservatoire d’Angers, n’hésite pas à parler
de « petits bijoux musicaux ». Nous souscrivons volontiers à ce
jugement.
Raphaël FAŸS : Album n°7. Cinq pièces pour guitare
classique. Transcription : Xavier P. Pernel. Niveau
Moyen 1 & 2. Combre : C06660.
Disciple de Django Reinhardt, pratiquant jazz manouche,
guitare classique et flamenco, Raphaël Faÿs nous offre ici cinq pièces d’une
écriture classique pleine de charme et de caractère, cinq petits tableaux à
découvrir et à faire partager.
José SOUC : 14 pièces pour guitare. Lemoine :
28 769 HL.
Ces pièces originales de styles divers sont de niveau
difficile. Mais elles méritent d’être découvertes et jouées tant leurs
qualités musicales sont grandes.
CONTREBASSE
Piotr
TCHAÏKOVSKY : Nocturne op.19 n°4 pour
contrebasse & piano. Transcription : Daniel Marillier. Réduction
piano : Régis Prudhomme. Delatour : DLT 1757.
Écrite dans une tonalité adaptée au registre de
l’instrument, cette transcription fidèle mais assez difficile est présentée
avec deux accompagnements de piano, selon que la contrebasse est accordée en ut ou en ré.
Max BRUCH : Romance op.85 pour contrebasse &
piano. Transcription : Daniel Marillier. Réduction
piano : Régis Prudhomme. Delatour : DLT 1758.
Écrite primitivement pour alto, cette Romance dédiée à Maurice Vieux est proposée ici dans une
transcription d’après la version orchestrale. Comme pour la précédente,
il y a une double partition de piano, en ut et en ré. Assez difficile.
FLÛTE
Gabriel FUMET : Illustration musicale du Cid de Corneille. 4 mélodies pour
flûte seule. Delatour : DLT 0792.
De niveau facile à moyen, ces courtes mélodies dans le
style Renaissance ont été commandées à l’auteur pour l’illustration musicale du Cid. Remercions les éditions
Delatour de nous faire ainsi découvrir la musique de ce flûtiste, héritier de
toute une lignée de compositeurs.
HAUTBOIS
Alexandre
CARLIN : De Paris à Saint-Louis pour
hautbois en ut & piano.
Lafitan : P.L. 2109.
Comme l’indique le titre, cette pièce nous emmène d’une
charmante mélodie à un ragtime endiablé. Elle donnera beaucoup de plaisir
aux hautboïstex de niveau élémentaire.
Jean-Michel
TROTOUX : La voie des dauphins pour
hautbois & piano. Lafitan : P.L. 2055.
De niveau également élémentaire, cette pièce nous conduit
de manière élégante et chaloupée (tempo
di bossa nova) sur la route des dauphins. Un thème, une partie de
style improvisé (mais entièrement écrite) et une reprise du thème forment un
ensemble bien séduisant.
CLARINETTE
Francis
COITEUX : Joyeuse randonnée, pour
clarinette en sib & piano.
Lafitan : P.L. 2027.
De niveau préparatoire, cette allègre promenade commence
par un joli andantino à 2/4 et se poursuit par un 6/8 bondissant et plein de
charme.
Xavier
EECKELOOT : Dulce et Decorum pour
clarinette en sib & piano.
Lafitan : P.L. 1953.
Voilà un titre bien sombre que cette citation du poète
Horace : « Il est doux et
glorieux de mourir pour la patrie… ». Rien de martial, cependant, dans
cette pièce à l’allure de marche mélancolique. Il y a bien cette quarte
montante qui introduit beaucoup de phrase et qui n’est pas sans évoquer un
autre commencement… Les clarinettistes de niveau préparatoire ne se poseront
sans doute pas ces questions et joueront avec plaisir cette pièce pleine de
charme.
André GUIGOU : Au bord du lac pour clarinette sib & piano. Lafitan :
P.L. 2008.
De niveau préparatoire, cette pièce fait dialoguer
habilement clarinette & piano dans une charmante déambulation.
Marie-Luce
SCHMITT : Vacances landaises pour
clarinette sib & piano.
Lafitan : P.L. 1970.
On s’attendait à une promenade sous les pins, et nous
voici plutôt dans l’arène avec les vaches landaises. Quoi qu’il en soit,
cette joyeuse pièce conviendra parfaitement aux débutants par son caractère
entraînant et dynamique.
PERCUSSIONS
Patrick BILLAUDY
& Hakim BRAHMI : Le Cajon. Initiation et perfectionnement. Fabrication de l’instrument.
1 vol. 1 CD. Paul Beuscher : PB 1380.
Une introduction précise l’origine et l’évolution de
l’instrument. Ce recueil éminemment pratique permet à la fois de le
construire et de s’initier à son jeu. Le CD joint au recueil contient non
seulement les exemples musicaux mais les plans pdf en grand format, rendant la
construction particulièrement aisée à toute personne un peu méticuleuse.
CHANT
Peter WAGNER : Marianische Gesänge II. Alma
Redemptoris Mater – Ave Regina coelorum – Regina coeli – Ave maris stella, pour
voix & orgue. Bärenreiter : BA 9268.
Dans notre Lettre n°34, nous avions annoncé la prochaine
parution de ce deuxième volume. C’est chose faite. On y retrouve toutes
les qualités du premier : regroupement de pièces originales d’auteurs du
XVIIIe au XXe siècle, avec une nette prépondérance du XIXe.
On y retrouve donc des œuvres de Dvořák, Gounod, Grieg… Ce très
intéressant recueil fera le bonheur des chanteurs. Les tessitures sont
moyennes. Il s’adresse donc à toutes les voix.
MUSIQUE CHORALE
Anthony
GIRARD : Hesychia pour
vibraphone/glockenspiel, piano, tam-tam & chœur d’hommes.
De niveau assez difficile, cette œuvre méditative et
incantatoire est inspirée de la méthode « hésychaste », c’est à dire
de paix intérieure pratiquée notamment par les moines du mont Athos. La
répétition des mots « Kyrie eleison » (Seigneur, aie pitié) est au
cœur de cette spiritualité. Il s’agit d’une œuvre exigeante et d’une
beauté tout autant musicale que spirituelle.
MUSIQUE DE CHAMBRE
Jean-Maurice MOURAT
& Guy COTTIN : Les classiques
pour flûte & guitare, vol. B. Combre : C06648.
Saluons avec plaisir le deuxième volume de cette très
intéressante entreprise dont le premier a été recensé dans notre Lettre n°17.
Le duo flûte/guitare constitue un ensemble particulièrement agréable. Les
pièces de ce volume sont légèrement plus longues que celles du premier.
Le choix est très éclectique, allant de Vivaldi à Tchaïkovsky en passant par
Lully, Haendel, Schumann… Souhaitons que de nouveaux volumes viennent enrichir
ce répertoire très prometteur.
MUSIQUE D’ENSEMBLE
Paul HOORN : Balkan. 13 arrangements pour
formations variées. Matériel en ut, sib et mib. Collection « Combocom », Bärenreiter :
BA 6700.
Partant de la constatation que les Balkans sont au
confluent de nombreuses traditions musicales, Paul Hoorn a réuni dans ce volume
des arrangements aussi divers qu’intéressants de ces différents courants.
Quelle que soit la formation envisagée, chant & piano, quatuor à cordes,
ensemble à vent ou orchestres divers, le matériel fourni permet la réalisation
de ces différentes pièces qui font l’objet d’une présentation et de conseils
d’exécution.
Alexandre
OUZOUNOF : Jaka, dixtuor pour
anches doubles. Collection « Les bandes de hautbois »,
Delatour : DLT 1531.
Cette composition originale est écrite pour deux solistes,
hautbois & hautbois baryton, soutenus par deux hautbois, deux hautbois
d’amour, deux cors anglais & deux bassons. Créée en février 2003
au Conservatoire Henri Dutilleux de Clamart, sous la direction de Claude
Villevieille, elle est assez difficile et utilise les doubles trilles, les
doublesharmoniques, les sons multiphoniques, etc.
Daniel Blackstone.
***
Les publics des festivals. Étude collective sous la direction d'Emmanuel Négrier (CNRS),
Aurélien Djakouane (EHESS) & Marie Jourda (CNRS). Co-édition France
Festivals/Réseau en scène Languedoc-Roussillon/Michel de Maule, mars 2010.
150 x 215 cm, 284 p. 20 €.
Une étude statistique très complète a été menée sur tous
les critères pouvant définir le profil sociologique, culturel, économique des
spectateurs composant l'audience des différents types de festivals (musiques
dites « classique », baroque, contemporaine, musiques dites
« actuelles », danse), ainsi que leur assiduité, leurs motivations,
leur provenance géographique... Certaines évidences tombent sous le
sens : que les personnes dépensant 220 € pour assister aux Chorégies
d'Orange soient issues des classes aisées et d'un niveau d'études supérieures,
nul n'en doutait. Pourtant, cette étude fait tomber bien des certitudes
dans lesquelles s'enferment les acteurs culturels : par exemple, le public
d'un genre est bien moins cloisonné, bien plus poreux que l'on serait porté à
le croire ; le taux de renouvellement incite à l'optimisme et ne suit pas
des courbes reproduisant rigidement des schémas passés (à ce titre, le
potentiel des manifestations de musique contemporaine en direction de nouveaux
auditeurs, jeunes et peu élitistes, serait à cultiver avec sagacité) ; la
gratuité ne constitue guère un appel incitatif pour les classes défavorisés
mais plutôt une « rente de situation » pour des habitués ayant flairé
l'« aubaine ». Et – grave dommage pour l'industrie touristique
– les festivals français n'attirent qu'une minime clientèle étrangère ;
pis, le public, étudié selon sa provenance locale, départementale, régionale,
nationale et au-delà des frontières, s'avère majoritairement « du coin »,
en tout cas à jet de kilomètres permettant de rentrer à la maison après le
spectacle, à moins qu'il ne s'étoffe des personnes invitées en vacances chez
des amis (mais point clientes d'hôtel !). Nous sommes loin du cliché
de l'événement culturel institué en carrefour obligé d'une caste cosmopolite
venue des capitales. Et c'est tant mieux si cela permet d'ouvrir à la
culture des populations trop longtemps tenues à l'écart...
Parallèlement paraissent les actes du Colloque de Montpellier
(12-13 novembre 2009), « Ami public n°1 : l'audience des festivals »,
co-édités par France Festivals et le magazine La Scène. À ce
colloque participaient Emmanuel Négrier et ses collaborateurs, ce qui nous
livre – une fois élagué le bla-bla des propos officiels et convenus – un
condensé de l'étude commentée ci-dessus, discuté en direct par quelques
dirigeants d'institutions (www.francefestivals.com).
Jean-Marc WARSZAWSKI et alii : Blanche Selva, naissance d'un piano moderne.
Préface de Gilles Cantagrel. Actes du colloque de l'association Blanche
Selva (18 novembre 2005). Symétrie (www.symetrie.com).
300 p., ill. n&b. 50 €.
Réunion de contributions diverses, ce volume permet de
mieux cerner la vie musicale unissant dans une ferveur mystique les musiciens
de la Schola autour du « Maître », Vincent d'Indy. En étudiant,
grâce à la correspondance de l'éminente pianiste Blanche Selva – qui fut une
des grandes prêtresses de ce culte – les relations nouées entre l'interprète et
les compositeurs Isaac Albéniz, René de Castera, Déodat de Séverac, Albert
Roussel, Guy Ropartz, et bien sûr Vincent d'Indy, les auteurs (Jean-Marc
Warszawski, Stéphan Etcharry, Rémy Campos, Ludivine Isaffo, Cécile Quesney,
Florence Le Doussal, Claude Gay, Damien Top) font revivre un milieu finalement
assez clos sur lui-même, émouvant par l'idéalisme et la chaleur amicale qui
l'imprègne, mais imperméable à ce qui faisait progresser la musique hors de ce
cercle (ce que souligne a contrario l'article de Françoise Thinat).
Delphine Grivel y ajoute un aspect transdisciplinaire par l'étude de l'amitié
entre le peintre symboliste Maurice Denis et la pianiste. L'œuvre
pédagogique et théorique de Blanche Selva est immense, et comporte des pages à
méditer de nos jours : parmi les contributeurs s'attachant à ce versant,
la pianiste Diane Andersen dégage une réflexion d'une salutaire profondeur de
pensée, transposable à toute pratique interprétative. Florence Launay
esquisse quelques pistes pour nous donner une idée de l'œuvre de compositrice
laissée par Blanche Selva, aujourd'hui complètement oubliée (sans parler de
certaines partitions perdues). Quelques négligences dans l'appareil
documentaire seraient à corriger, mais cet ensemble a le mérite de remettre en
lumière une personnalité dont l'incessante activité et l'influence rayonnèrent
sur la France, la Catalogne, et jusqu'en Tchécoslovaquie.
Sylviane Falcinelli.
Yves-Michel ERGAL
& Michèle FINCK. Écriture et
silence au XXe siècle. « Configurations
littéraires ». Presses universitaires de Strasbourg (www.pu-strasbourg.com), 2010. 363 p.
28 €.
Cet ouvrage regroupe une série d’articles centrés sur les
rapports qu’entretiennent écriture et silence au XXe siècle.
Une problématique qui permet d’envisager les rapports complexes entre le
langage au sens large (parole, écriture, musique, voire danse) et les diverses
modalités du silence, à travers le roman (Beckett, Quignard, Djebar, roman noir
anglo-saxon), le théâtre (Maeterlinck, Rilke, Claudel, Pinter et Bernhard)
& la poésie (Bonnefoy, Luzi, Celan). De ces rapports naît le désir de
comprendre l’écriture hors la domination du logos.
Une émancipation du silence à partir de laquelle se déploie une nouvelle
approche de l’écriture. Un livre fondamental et passionnant.
Patrice Imbaud.
Murielle Lucie
CLÉMENT et alii : Les Bienveillantes de Jonathan Littell.
Études réunies. Openbook Publishers ( www.openbookpublishers.com), 2010. 344 p. £14.95
Ouvrage collectif - dirigé par notre collaboratrice M. L. Clément,
écrit en français et publié par un éditeur académique de Cambridge - qui fait
écho au roman de J. Littell, les
Bienveillantes, paru en 2006 avec le succès que l’on sait, prix Goncourt et
Grand Prix du roman de l’Académie française. Ce livre se présente comme
une sélection d’articles internationaux, pour la plupart universitaires, chacun
proposant de mettre en avant une facette et une lecture particulière du roman
de Littell. Différents angles d’approches, sociologiques, culturelles,
historiques, poético-rhétoriques, interdisciplinaires, intertextuelles,
philosophiques et freudiennes qui viennent enrichir une réflexion menée depuis
2006, date de la parution et de la réception mouvementée du livre de Littell…
Toujours pertinents, certains éclairages traduisent l’émoi, l’horreur, le dégoût
mais aussi, parfois, l’empathie dangereuse que peut ressentir le lecteur face à
un roman axé sur la perversion (l’un de ses leitmotive, de même que les
voyages, l’homosexualité…). Une exégèse - certes ardue, mais fascinante -
qui ne manquera pas d’inciter à la lecture des Bienveillantes ceux qui ne l’auraient pas encore lu.
Pierre Mary.
Alfred GELL : L’art et ses agents, une théorie
anthropologique. Traduit de l’anglais par Sophie & Olivier
Renaut. Introduction de Maurice Bloch. « Fabula », Les
Presses du réel (www.lespressesdureel.com).
14 x 22,5 cm, 356 p., 123 ill. n&b.
26 €.
Dans son ultime livre, le grand
anthropologue anglais Alfred Gell (1945-1997) proposait une approche révolutionnaire
de l’art : plutôt que de penser l’art en termes de beauté, il s’agit de le
penser en termes des agencies (intentionnalités)
qui se rencontrent dans l’œuvre – qu’elles soient réelles ou imaginaires.
Notre approche esthétique étant, selon lui, inapplicable aux cultures non
occidentales… Aussi, dans la combinatoire propre à l’œuvre d’art distingue-t-il :
l’objet lui-même, l’artiste, le destinataire et le réseau (ou Art Nexus, désignant
l’ensemble des relations qui font qu’un objet d’art est reconnu comme tel par
les différents acteurs sociaux). Même s’il n’est ici question que d’arts
visuels, les liens avec l’art des sons s’imposent naturellement.
Alexandre
MARAL : La chapelle royale de
Versailles sous Louis XIV. Cérémonial, liturgie et
musique. Préface d’Yves-Marie Bercé. Seconde édition, revue &
mise à jour. « Études du Centre de musique baroque de
Versailles », Mardaga (www.mardaga.be).
17 x 24 cm, 476 p., cahier d’ill. n&b et couleurs.
45,00 €.
Ayant presque exhaustivement étudié les annales des
chapelles de Versailles, Alexandre Maral - aujourd’hui conservateur des
collections de sculpture au Musée national des châteaux de Versailles & de
Trianon – nous propose une vision d’ensemble de tous les aspects de la Chapelle
royale, au regard de l’histoire de l’art, de la musicologie, de l’histoire des
institutions ou de l’histoire culturelle. Cette nouvelle édition coïncide
avec le tricentenaire de l’achèvement de la chapelle définitive, en 1710.
Catherine
DEUTSCH : Carlo Gesualdo (1566-1613). « Horizons », Bleu Nuit éditeur (www.bne.fr). 14 x 20 cm,
176 p., ex. musicaux, riche iconographie n&b, 20 €.
Haute en couleurs et sulfureuse aura été la vie du prince
Carlo Gesualdo, madrigaliste de génie, mais non moins suspect de crimes,
d’amours adultérines et autres « forfaitures ». Démêler le
mythe de la réalité, tel est le but que s’est ici fixé – non sans réussite –
Catherine Deutsch – s’attachant aussi à l’analyse d’un langage musical plus que
tout autre, en son temps, sophistiqué, d’un lyrisme souvent poignant.
Riches annexes.
Rémi JACOBS : Heitor Villa-Lobos (1887-1959).
« Horizons », Bleu Nuit éditeur (www.bne.fr).
14 x 20 cm, 176 p., ex. musicaux, riche iconographie n&b,
20 €.
S’il est un illustre compositeur à encore découvrir - en France,
tout au moins - c’est bien Villa-Lobos ! Les commémorations du
cinquantenaire de sa disparition n’y auront, hélas ! pas changé
grand-chose. Hormis la sempiternelle Bachiana
brasileira n°5 (pour soprano & 8 violoncelles), que
connaissions-nous de cet immense compositeur brésilien, dit « l’Indien
blanc » ? Alors qu’est partout visité, hors notre pays, son pharamineux
catalogue : innombrables pièces pour piano, guitare, violoncelle, concertos,
symphonies, quatuors, ballets, ouvrages lyriques… Sa Magdalena, « aventure musicale, en deux actes », vient
d’être toutefois donnée – avec succès… - au Théâtre des Champs-Élysées. Merci
à l’éminent musicologue Rémi Jacobs de rendre enfin justice à un grand musicien
qui tant aima la France (biographie, présentation d’œuvres significatives).
En utiles annexes : tableau synoptique (mettant en regard vie du
compositeur, événements culturels et politiques), bibliographie &
discographie sélectives, index nominum.
Ralph P. LOCKE : Musical Exoticism. Images and Reflections. Cambridge
University Press (www.cambridge.org). En anglais. Relié sous jaquette. 18 x 25,5 cm,
420 p., ex. mus., ill. n&b. £55.00
Dans cette ambitieuse monographie, Ralph P. Locke,
professeur à l’Université de Rochester, parcourt l’immense répertoire des
œuvres musicales occidentales évoquant personnages ou pays
« exotiques » : une geisha, une caravane moyen-orientale, un
violoneux hongrois, Carmen jetant une rose à Don José, Joséphine Baker chantant La Petite Tonkinoise, les
mozartiennes turqueries du Rondo alla
turca & de L’Enlèvement au sérail,
non moins que Les Indes galantes, Les Pêcheurs de perles, Madama Butterfly, Sheherazade, West Side Story… et jusqu’au Marco Polo du compositeur
chinois Tan Dun ! Passionnant.
Sylvia KAHAN : Music’Modern Muse. A life of Winnaretta Singer, Princesse de
Polignac. University of Rochester Press (www.urpress.com). En anglais. Broché,
14,5 x 22 cm, 550 p., 29 photos n&b. £19.90
Professeur à l’Université de New York, Sylvia Kahan s’est
ici penchée sur la fascinante personnalité de la princesse Edmond de Polignac -
riche héritière de la firme de machines à coudre Singer - qui fut sans doute,
en France, la plus grande mécène du XXe siècle - auprès notamment d’artistes
tels que Stravinsky, Proust, Ravel, Cocteau, Colette… Une magnifique biographie,
quasiment exhaustive, dont les éditeurs français devraient (!) s’arracher les
droits.
Laure
BENAROYA : Winnaretta
Singer-Polignac, princesse et mécène. « Les Carnets de
Sonatine », biographie. ZurfluH (www.zurfluh.com).
14,5 x 20 5 cm, ill. n&b et couleurs. 20 €.
Fille d’Isaac Singer (heureux
industriel en machines à coudre), Winnaretta Singer-Polignac fut assurément le
mécène le plus éclairé de son temps (1865-1943). Ne reçut-elle pas en
effet, dans son célèbre salon de l’avenue Henri-Martin, tout ce que Paris
comptait de musiciens, de peintres et d’écrivains : de Proust et Cocteau à
Colette et Anna de Noailles ; de Toulouse-Lautrec à Braque et
Chagall ; de Fauré et Ravel à Satie, Poulenc et Stravinski… D’un
flamboyant personnage, la vie fascinante… [Plus que jamais vivace est
aujourd’hui la Fondation Singer-Polignac (www.singer-polignac.org).]
La musique contemporaine d’hier à demain. Revue Circuit (vol. 20, nos 1-2, 2010). Les Presses de l’Université de
Montréal (www.revuecircuit.ca).
21,5 x 23 cm, 140 p., ex. mus., ill. n&b.
28 $ CA.
Au sommaire de ce numéro double, publié à l’occasion du 20e anniversaire
de la revue Circuit : « 20 ans
avant, 20 ans après » (Jonathan Goldman), « Hier » (il y a
20, 40, 100 ans, par Jean-Jacques Nattiez, Nicolas Donin & Michel
Duchesneau), « Aujourd’hui » (extraits de partitions en création,
2009-2010), « Demain » (enquête sur l’avenir de la musique
contemporaine, par vingt contributeurs). Une magnifique livraison !
Les éditions Demi Lune (www.editionsdemilune.com) dédient une série de biographies
aux plus grandes figures des Musiques du monde (collection « Voix du monde »). Récentes parutions :
Jonathan
GLUSMAN : Ravi Shankar, le maître du
sitar. 13,5 x 18 cm, 160 p., ill. n&b, 15 €.
À ce grand « artiste de l’intime & de
l’universel » [est-il meilleure définition d’un authentique musicien du
monde ?], Jonathan Glusman consacre - après une utile « Introduction
à la musique indienne » - une attentive et respectueuse biographie :
L’éveil artistique/ L’appel du sitar/ Sur les scènes du monde/ Rencontres/
Entre Orient & Occident/ Traditions et innovations/ Les vies de Ravi
Shankar. En annexe : glossaire, discographie, bibliographie,
filmographie, ressources Internet.
Florent MAZZOLENI : Salif Keita, la voix du Mandingue.
Préface de Salif Keita. 13,5 x 18 cm, 128 p.,
ill. n&b. 14 €.
Depuis quelque 40 ans, Salif Keita chante le Mali,
mais aussi l’amour et les tribulations d’un quotidien assurément
mouvementé. Découvert en Occident avec l’album Soro (1987), son succès ne s’est plus, depuis lors, démenti.
Éléments relatés : L’enfance mandingue/ Les années Rail Band/ De
Bamako à Abidjan/ Mandjou, chant de
tout un peuple/ Percée sur la scène internationale/ Les années 1990/ Renouveau
acoustique avec Moffou dans les
années 2000. En annexe : glossaire, discographie (vinyles & CDs),
bibliographie, filmographie, ressources Internet.
Denis ROULLEAU
(Présentation de) : Rock Critics.
Préface de Pierre Lescure. Don Quichotte-Le Seuil.
Distrib. Gilles Paris (www.gillesparis.com).
14 x 22,5 cm, 500 p., 19,50 €.
Genre littéraire en soi, la critique rock a de fidèles lecteurs.
Nous est ici donnée une sélection de ses meilleures pages (signées
Alessandrini, Armanet, Ardisson, Assayas, Bayon, Bigot, Blum, Chalumeau,
Dister, Dordor, Eudeline, Garnier, Gorin, Kent, Loupien, Paringaux, Rotcage,
Viviant, etc.), parues dans Rock&Folk, Best, Actuel, Libération, Rolling Stone, Les Inrocks… Plumes fulgurantes, métaphysiques, déjantées,
littéraires… forment ici un fort joyeux patchwork.
Patrick WILLIAMS et alii : Les quatre vies posthumes de Django Reinhardt. Trois fictions
et une chronique. « Eupalinos/ Jazz & musiques
improvisées », Parenthèses (www.editionsparentheses.com).
15 x 23 cm, 280 p. 16,00 €.
2010 : centenaire de la naissance de Django (décédé à
43 ans, le 16 mai 1953, d’une congestion cérébrale). En guise d’hommage,
trois écrivains ont successivement imaginé une « vie » du musicien : Sensationnel ! Un concert de Django
Reinhardt & Thelonious Monk en duo » (Guy Leclère, journaliste),
« A room with a view », 43e étage (James
D. Cszernynk, critique littéraire), Sous
une pluie de fleurs d’acacia (Bertrand Journens, romancier). La
quatrième « vie » est, quant à elle, la chronique des cinquante-six
ans de vie posthume du grand guitariste : Une postérité à n’en plus finir (Patrick Williams, ethnologue).
Chantal
GROSLÉZIAT : Abécédaire musical.
Les bébés & la musique, 3. « Mille et un bébés », Érès (www.editions-eres.com). 11,5 x
16 cm, 168 p. 10 €.
Déjà auteur, aux éditions Érès, de Les bébés & la musique et de Bébés, chasseurs de sons, Chantal Grosléziat récidive avec ce
charmant Abécédaire musical dans
lequel - sans a priori culturel, esthétique ou pédagogique - elle traite
de l’éveil à la musique, circonscrivant la grammaire des premières
rencontres. Tout un kaléidoscope de pratiques et de réflexions.
Francis Cousté.
***
Haut
Johann
Hermann SCHEIN : Opella Nova. Fontana d’Israel. Hortus (editionshortus@wanadoo.fr) :
075. TT : 66’05.
L’Ensemble vocal Sagittarius, sous
la direction si expérimentée de Michel Laplénie, s’est spécialisé - tant pour
ses concerts que pour ses enregistrements -, entre autres, dans les œuvres des
« 3 S » de la musique allemande : H. Schütz (son
« patron »), S. Scheidt et J. H. Schein (1586-1630),
prestigieux Cantor à Saint-Thomas de Leipzig. Cette excellente production peut
s’honorer d’une présentation du Prof. Dr. Walter Werbeck, président de la
Société internationale H. Schütz. L’enregistrement (17 pièces),
judicieusement réalisé selon certaines indications de Schein lui-même, propose
une interprétation très fidèle aux intentions de ce dernier. Reposant sur
des textes de J. Agricola, M. Luther ou des extraits
vétérotestamentaires, comme le Psaume 126 : Die mit Tränen
sähen… (Ceux qui sèment dans les larmes…), ces pages représentent de
véritables petits chefs-d’œuvre de symbolisme et d’expressivité.
Aeterna. Jade (14, rue Guynemer -75006 Paris. jade@milanmusic.fr ) :
699 676.2. TT : 63’24.
Nathalie Choquette (soprane québécoise)
rend avec le même bonheur le chant grégorien, le répertoire allant de
Pergolèse, Bach, Mozart, Fauré, Kedroff… à son compatriote Raynald Arseneault.
Cette mini-anthologie de pages à grand succès, nécessitant infiniment de
sensibilité, est interprétée avec intelligence par une voix chaleureuse,
lumineuse, exceptionnelle. Chaque auditeur, selon ses affinités, appréciera ce
programme comportant 21 œuvres brèves appartenant au répertoire de tous
les temps. Confirmation du succès de ce CD : 25 000 exemplaires
vendus au Québec. Il reste à souhaiter le même accueil en Europe.
Alessandro
SCARLATTI : Toccate per cembalo. Arcana (stephanie@outhere.com) :
A323. TT :
73’10.
Les œuvres d’Alessandro Scarlatti
(père de Domenico), très estimées de leur temps - où pourtant l’intérêt des
mélomanes pour le clavecin commençait à décliner - exigent une remarquable
technique clavecinistique : doigtés compliqués (notés en symboles, Toccata I) ;
multitude des traits interminables en doubles croches alors à la mode).
Dans ce digest de 8 toccatas et 4 fugues qui traduisent
l’intention du compositeur misant - comme dans l’art vocal - sur la haute
virtuosité, R. Alessandrini fait preuve d’une transparence extrême et
brille par la précision de l’attaque, son sens de la structure.
J. S. BACH : Œuvres pour
orgue. Laurent Jochum à l’orgue de l’abbatiale de Guîtres. Triton
(triton@disques-triton.com) :
TRI 331159. TT : 71’28.
Enregistré à l’orgue Beuchet-Debierre
(1978, avec grand orgue, écho & pédale) de l’abbatiale Notre-Dame de
Guîtres (Gironde), ce programme-type de J. S. Bach, s’ouvre sur le Prélude
et fugue en sol majeur et se termine sur la Passacaille et fugue en ut mineur, œuvres redoutables, parfois galvaudées, mais
que Laurent Jochum a le mérite de jouer avec des tempi raisonnables, une solide
technique et un remarquable sens de la registration et de la construction.
La Fantaisie et fugue en sol mineur constitue la partie centrale, précédée et suivie de Chorals
de Leipzig (avec 3 versions sur le cantus firmus : Allein Gott
in der Höh sei Ehr) et d’extraits de la troisième partie de la Clavierübung. L. Jochum
tire le meilleur parti des possibilités diversifiées de jeux et de l’acoustique
de ce lieu historique.
Orgues historiques de France, vol.
8. Orgues L’Épine, Sarlat. Sinus (Postfach 526, CH-8802 Kilchberg. sinus-verlag@bluewin.ch) : Sin 3008. CD Diffusion (31,
rue Herzog, F-68920 Wettolsheim. info@cddiffusion.fr). TT : 60’ 08.
En 2010, pour le 8e volume
de sa collection, l’infatigable Albert Bolliger a sélectionné les Orgues
L’Épine (1752, restauré à partir de 1980) de la cathédrale de Sarlat-la-Canéda.
Son programme met en valeur les possibilités de ce remarquable instrument
(4 claviers et pédale) accordé en mésotonique et convenant parfaitement à
l’interprétation de la musique française des XVIIe et XVIIIe siècles : J.-Fr. Dandrieu, L. Couperin, Fr. d’Agincourt.
Le texte de présentation a le mérite de donner la registration pour chaque
œuvre. L’intérêt est encore rehaussé par des pièces (G. Raison,
G. Corrette…) extraites du Manuscript de Limoges (ca 1725) - don du collectionneur
Chr. Gauny - conservé à la Bibliothèque municipale ; il contient des
œuvres significatives de la pratique liturgique de l’époque.
Dimitri CHOSTAKOVITCH : Symphonie
n°14. Alpha (stephanie@outhere.com) :
159. TT : 52’21.
À l’apogée de sa carrière,
D. Chostakovitch (1906-1975) a dédié à Benjamin Britten une œuvre
originale. En effet, sa Symphonie n°14, op. 135, composée au
printemps 1969, associe des textes très prenants, gravitant autour du thème de
la mort et faisant fonction de Requiem. Les poèmes (espagnols,
français et allemands), empruntés à F. García Lorca, G. Apollinaire
et R. M. Rilke, suscitent émotion, mélancolie et drame. Laideur
et tristesse y côtoient la compassion. L’atmosphère est assez proche des Kindertotenlieder (G. Mahler). J. Korpacheva (soprano), P. Migunov (basse),
l’Ensemble MusicAeterna et l’Orchestre de chambre de l’Opéra de Novosibirsk -
placés sous la direction si expérimentée de T. Currentzis - traduisent les
divers degrés de la sensibilité humaine face à la « mort » qui
« est grande », et qui « ose pleurer » (Rilke).
Joyful
Listening to the Music of Heinrich Schweizer. VDE-Gallo (La Cure, rue du
Four 2, CH-1410 Denezy. info@vdegallo.ch.
CD 1284. TT : 70’02.
Les éditions VDE-Gallo, se
référant « à un public appréciant la musique du monde classique et les
liens entre les éléments occidentaux et orientaux », ont enregistré un
programme fondé sur « la joie de l’écoute », comportant de rares associations
d’instruments (harpe & quintette à vents ; percussions africaines…) et
des titres variés. Le compositeur suisse Heinrich Schweizer (°1943) manie
avec une aisance déconcertante le style populaire mais aussi classique et
contemporain, s’inspire des apports africains et chinois. Cette musique
extraordinaire, faite pour plaire, mais très recherchée et raffinée, est
entraînante, envoûtante, irrésistible. À découvrir impérativement.
Tous publics.
Orgue de Lorris-en-Gâtinais : 500 ans d’histoire. Triton (triton@disques-triton.com) :
TRI 331121. TT : 66’11.
Enregistré sous la direction de la
regrettée Annie Isoir, à l’orgue de Lorris-en-Gâtinais préparé par Yves Koenig,
sous le titre : « Musiques d’Europe du XIVe siècle à nos
jours », André Isoir - bien connu du grand public - a signé une anthologie
de 41 pièces brèves, allant de G. Du Fay et du Strasbourgeois
B. Schmid, à J. Alain (Berceuse sur deux notes…) et J. Berthier
(Jeu de quartes), représentant les écoles française, italienne,
néerlandaise, allemande, anglaise... Ce cortège de musiciens illustre
parfaitement, d’une part, les possibilités de registration de l’instrument
historique et, d’autre part, la diversité des œuvres issues de la danse ou des
formes typiques : canzon, sonata… Un modèle du genre.
Francesco DURANTE : Vespro
breve – Miserere. Tactus : TC 680403.
CD Diffusion (31, rue Herzog, F-68920
Wettolsheim info@cddiffusion.fr). TT : 60’07.
Précédé par une Sonata d’Ascanio
Maione (1570-1627) et entrecoupé par une pièce d’orgue (avec 4 fugues) de
G. M. Trabaci (1575-1647), ce CD concerne Francesco Durante
(1684-1755) - à peu près contemporain de J. S. Bach - : avec ses Vêpres
brèves reposant sur des versets de psaumes, l’Hymne Pange lingua et
le Magnificat et son Miserere mei Deus (Ps. 50/51).
L’Ensemble strumentale Sagittario - à ne pas confondre avec Sagittarius dirigé
par M. Laplénie…- et l’Ensemble vocale Il Dodicino confèrent luminosité
et entrain, ou calme et intériorité à ces pages rarement enregistrées et à
redécouvrir.
Johann
Sebastian BACH : Aus der Tiefe. Ricercar (stephanie@outhere-music.com) :
RIC 295. TT :
78’18.
L’objectif comparatif de ce CD
retiendra l’attention ; avec plusieurs versions du même texte : Aus
der Tiefe(n) rufe ich, Herr, zu dir (Des profondeurs, je crie vers toi… : Ps. 129/130). Tout d’abord : J. S. Bach
avec sa cantate éponyme (BWV 131) suivie de trois versions de Thomas
Selle (1599-1663), Christoph Bernhardt (1627-1692) et Johann Philipp Förtsch
(1652-1732). Avec Christoph Graupner (1683-1760), le texte est
collectif : Aus der Tieffen rufen wir Gott (…nous invoquons…).
Dans sa Cantate-choral, le Cantor de Leipzig intercale des strophes du choral
de B. Ringewaldt : Herr Jesu Christ, du höchstes Gut. Cet
enregistrement original se termine sur sa Cantate 82 Ich habe genug.
Grâce aux quatre solistes et au Ricercar Consort, ce disque - tout à l’honneur
des 30 ans du label Ricercar - est d’ores et déjà un incontournable.
Gustave NADAUD : La Bouche
& l’Oreille. Alpha (stephanie@outhere-music.com) :
160. TT : 74’42.
Gustave Nadaud (1820-1893) -
auteur de chansons à succès publiées notamment dans L’Illustration et Le
Figaro - met en musique des textes de caractère populaire et drôle, parfois
engagés, ayant pour thèmes : le Voleur, la Femme du pompier, le Séducteur,
mais aussi le Cigare…, la Bouche & l’Oreille (d’où le titre), les Ruines de
Paris, les Noces du Soleil et de la Terre…, révélateurs du XIXe siècle
finissant. Les interprètes - dont A. Marzorati (chant & direction) -
s’y donnent à cœur joie… Et pourquoi pas les auditeurs ?
Détente garantie.
Pascal Amoyel plays GREIF /
Emmanuelle Bertrand plays AMOYEL. Triton (triton@disques-triton.com) :
TRI 331160. TT : 64’01. DVD : 43’24.
Geneviève Thiébault, directeur du
label Triton, et Pascal Amoyel ont le mérite de promouvoir l’œuvre du regretté
Olivier Greif (1950-2000). Son 8e CD (avec DVD) et les
nombreux concerts annoncés rendent enfin l’hommage qui est dû à celui qui, en
1998, a écrit à l’excellent pianiste : « Vous m’avez ému au-delà de
ce que vous pouvez imaginer. Vous vous êtes approprié l’œuvre, c’est-à-dire
que vous êtes parvenu à ce que j’entendais, à ce que je voulais, par l’unité
qu’apporte l’accession à un état second, intuitif et visionnaire… ».
Qualités confirmées par sa Sonate pour piano n°22 (1997) et sa Sonate
de Guerre n°15 (1975), enregistrée sous la direction du compositeur.
En 2009, P. Amoyel a composé Sadhana (In memoriam O. Greif),
interprétée avec musicalité par Emmanuelle Bertrand (violoncelle et voix).
Avec le DVD (extraits d’œuvres, interviews), voici donc trois hommages très
émouvants à Olivier Greif.
Édith Weber.
Hector BERLIOZ : Symphonie fantastique. Les Siècles, dir. François-Xavier
Roth. « Les Siècles Live »,
Musicales/ Actes Sud.
Cet enregistrement, réalisé durant le Festival Berlioz de
La Côte-Saint-André en août 2009, ouvre une nouvelle série chez Actes Sud, où
l'excellent orchestre polymorphe fondé par François-Xavier Roth pourra publier
ses meilleurs concerts. Une telle version sur instruments d'époque doit
être envisagée sous l'angle de deux problématiques. Si l'on s'en tient à
l'interprétation des intentions expressives, on ne peut qu'être séduit par la
sensibilité qui se dégage des pages rêveuses conduites avec fluidité, et par
l'incisivité des moments traités en eaux-fortes à la Jacques Callot. La cantabilità et les impulsions de la Symphonie fantastique se dégagent avec un
naturel sans apprêt de la direction de François-Xavier Roth ; on savait
déjà que sa valeur l'inscrit au tout premier rang des meilleurs chefs français,
et – considérant le sort fait à ceux-ci en France – l'on serait presque porté à
s'étonner que l'on nous concède encore la satisfaction de pouvoir l'écouter
sous nos cieux (notamment au Philharmonique de Radio France), même si sa nomination
à la tête du prestigieux Orchestre du SWR de Baden-Baden offrira un cadre
optimal à son talent reconnu d'avocat de la musique contemporaine. Mais,
pour reprendre le débat sous un angle qui ne tempère en rien l'estime portée
audit chef, l'usage d'instruments anciens, associé à l'effectif un peu réduit,
limite le spectre dynamique de l'œuvre, donc l'impact dramatique de ses pages
les plus saisissantes. Certes, les solistes des vents sont très
performants, et leurs timbres apportent une couleur salutaire, de même que les
(vraies) cloches. Cependant, à part ces touches d'authenticité, il faut
bien considérer que le retour aux instruments « d'époque » constitue
souvent une trahison – en termes d'histoire, mais oui ! - des compositeurs
les plus avant-gardistes de leur temps (or c'était le cas de Berlioz !).
Nous savons (témoignages relatifs à Beethoven, par exemple, du temps où il
entendait encore) que les maîtres les plus « anticipateurs »
souffraient des limitations des instruments dont ils devaient alors se
contenter, instruments guère encore façonnés par leur langage, la prise en
compte de l'évolution du langage générant les évolutions ultérieures de la
facture ! D'autre part, pour transmettre le message novateur d'une œuvre,
il s'agit de recréer sur la réceptivité des auditeurs d'aujourd'hui les mêmes
sensations fortes qui frappèrent leurs contemporains. Ce n'est certes pas
en gommant tout ce qui a conditionné l'oreille des générations successives dans
des salles modernes, donc en enclenchant la marche arrière et en rétrécissant
le champ de perception acoustique, que l'on peut y parvenir et transposer cette
réactivité sensorielle à échelle comparable. Autant les instruments
« authentiques » sont indispensables dans la musique des compositeurs
soumis aux canons esthétiques de leur temps, ou bien lorsque des timbres à
« effets spéciaux » ont disparu, autant ils sont un contresens
psychologique dès lors qu'on les ré-applique de force aux quelques compositeurs
qui voyaient très loin au-delà de leur terreau natal, et dont
l'instrumentarium, prorogé dans la facture actuelle, bénéficie d'une
construction évoluée facilitant l'exigence du jeu ou la projection sonore.
On se réjouit que la collection d'Actes Sud nous donne
bientôt à entendre François-Xavier Roth dans un répertoire qu'il fait vivre
admirablement, à savoir des créations récentes... sur instruments d'époque (la
nôtre), bien entendu !
Robert SCHUMANN : L'œuvre
complète pour piano, vol. 4. Sonates op.11,
op.22, op.14. Fantaisie op.17. Francesco
Piemontesi. 2CDs Claves : 50-1003/04.
Il y a bien longtemps qu'un pianiste ne nous avait plus
captivé avec les si périlleuses Sonates de Schumann. Dans le cadre d'une intégrale répartie entre divers
artistes, la firme suisse Claves nous donne à entendre un jeune natif de
Locarno, âgé de 26 ans à la date de ces enregistrements réalisés en quelques
jours dans la fameuse Jesus-Christus-Kirche de Berlin. Souvenons-nous que
les quatre œuvres ici réunies ont été composées par Schumann entre 22 et
26 ans.
Maîtrisant un beau son, Francesco Piemontesi, dans la 1re Sonate,
éclaire les dialogues et les échos d'une voix à l'autre, détachant tour à tour
les personnages d'un théâtre fantasmé. On se croirait tantôt dans une
joute oratoire, tantôt à l'opéra (recitativo secco du 3e mouvement
de l'op.11), tantôt sur une scène chorégraphique. Jamais ne fait défaut
le rebond rythmique donnant une pulsation nerveuse à ces débats avec soi-même.
Seul le finale de l'op.11 faiblit un peu, n'emportant pas comme on
l'attendrait – après les trois autres mouvements – la culmination de l'élan
général. Si l'interprétation de la Sonate op.22 ne se distingue
pas de manière aussi saillante, la Sonate op.14 (« Concerto sans
orchestre ») représente un autre temps fort, même si l'on aurait
préféré entendre la structure originelle en 5 mouvements : la version
choisie combine la forme ultime en 4 mouvements de 1853 avec l'écriture
primitive du mouvement initial (1836). Le pianiste, évoluant avec une
parfaite aisance au fil de cette partition complexe, y fait montre d'une
bondissante fièvre juvénile dans les mouvements extrêmes, qui ne contredit pas
la maturité imprégnant les moments plus graves.
Dans la Fantaisie op.17, Piemontesi veille à ce que
l'aspect déclamatoire ne masque pas les confidences intimes : il en
résulte une interprétation originale par la tenue de l'émotion intérieure, là
où est souvent mis en avant l'autre versant, celui de la puissante éloquence
romantique. Il n'en amène que mieux la profondeur méditative du dernier
mouvement. Une très belle prise de son complète notre bonheur.
Pascal DUSAPIN : Sept solos pour
orchestre. Orchestre philharmonique de Liège-Wallonie-Bruxelles, dir.
Pascal Rophé. 2CDs Naïve : MO 782180.
Le titre paradoxal (le mot Solo appliqué à de grands
effectifs orchestraux) indique que le compositeur a poursuivi une recherche
homogène sur des formes qui, s'additionnant, forment une grande arche dont les
éléments se chevauchent et s'infiltrent d'une pièce à l'autre. À dire
vrai, les concepts formels décrits par le compositeur à grand renfort de mots
latins n'apportent rien de nouveau dans l'histoire de la musique, et – quel que
soit le postulat poursuivi – l'important s'avère que le résultat s'entende.
Or, bien que les sept partitions, composées pour ce cycle au gré de commandes
internationales, s'étendent sur un horizon allant de 1992 à 2009, aucune
évolution ne s'y fait jour, et les oppositions ou « pliages »
annoncés (oui, oui, de la composition considérée comme un origami) ne
recouvrent qu'un langage engendrant vite la monotonie. Nulle force de
contraste dramaturgique ne relance l'intérêt, et l'écoute continue nous inspire
bientôt un profond sentiment d'ennui. Une question s'insinue alors :
Pascal Dusapin n'a-t-il pas trop écrit, lui a-t-il échappé que la vertu
de prendre du recul par rapport à soi-même impose de préserver des temps
d'intériorité, de remise en question, de réexamen de sa propre exigence ?
Sylviane Falcinelli.
« Stabat Mater. Motets to the Virgin Mary ». Motets de Alessandro GRANDI, Giovanni LEGRENZI, Francesco CAVALLI,
Giovanni Antonio RIGATTI, Giovanni Paolo CAPRIOLI, Girolamo FRESCOBALDI,
Giovanni Felice SANCES, Govanni Battista BASSANI, Andrea MATTIOLI, Girolamo
CASATI, Giovanni Paolo COLONNA. Philippe Jaroussky, contre-ténor. Avec
Marie-Nicole Lemieux, contralto. Ensemble Artaserse. Virgin Classics.
TT : 71'31.
C'est à un émouvant
florilège de motets dédiés à la Vierge Marie et un non moins passionnant voyage
à travers la musique italienne du seiciento que
nous convie Philippe Jaroussky. Le culte marial a inspiré
bien des compositeurs vénitiens et romains, dans le sillage de Monteverdi ou de
Palestrina, dont certains nous sont peu familiers, tels Bassani ou Grandi. Et
pourtant, que de richesses dans ces courtes pièces sertissant la voix comme un
joyau en des courbes mélodiques qui tirent le religieux souvent vers le
profane. Ainsi de ce magnifique Stabat Mater de
Sances, exemple parfait du canto ostinato, ou
des pièces de Grandi comme le Salve Regina qui
fait dialoguer la voix avec les divers instruments.
Jaroussky émeut avant tout par le naturel du discours où rien n'est apprêté,
dessinant les divers affetti : la
suavité, la douce nostalgie, la douleur contenue, la ferveur contemplative. La
flexibilité de la ligne de chant n'a d'égale que l'articulation rigoureuse sans
dureté. La voix se fond dans l'ensemble instrumental
(merveilleux musiciens de Artaserse), évoluant elle-même tel un instrument, d'une infinie ductilité et d'une vraie
douceur dans les ornements. Il émane de ces
interprétations une réelle tendresse, apportant à la déclamation une rare
plénitude. Lorsque, l'espace de deux des motets, Jaroussky est rejoint par Marie-Nicole
Lemieux, les deux voix s'enlacent comme dans un duo d'opéra ; idéale combinaison de deux timbres rares. Deux pièces purement instrumemtales
complètent cette captivante anthologie, dont la belle Sonata
prima de Bassani.
« Rosso : Italian baroque arias ». Antonio SARTORIO : Giulio Cesare in Egitto ; L'Orfeo. Allessandro STRADELLA : San Giovanni Battista. George Frideric HÄNDEL : Alcina ; Rinaldo ; Ariodante. Alessandro
SCARLATTI : Griselda ; Il
Sedecia, re di Gerusalemme.
Nicola PORPORA : Lucio Papirio.
Antonio VIVALDI : L'Olimpiade.
Benedetto MARCELLO : Arianna. Patricia Petibon, soprano. Venice Baroque Orchestra, dir. Andrea Marcon. Universal/DG :
477 8763. TT : 75'23.
L'industrie phonographique
privilégie plus que jamais la formule du récital qui permet à telle vedette du
chant d'empiler une suite d'airs avantageux. On ne
s'en plaindra pas s'agissant de Patricia Petibon. Car
le talent est plus que vocal et l'interprète qu'on sait brûler les
planches - quelquefois un peu trop - caractérise avec bonheur les héroïnes pour
la plupart sanguinaires représentées ici. Elle
aborde la variété des affects avec juste ce qu'il faut d'emphase dans
l'expression. Il est rare d'entendre, dans
un même récital, les deux rôles de soprano que renferme Alcina : le
rôle-titre où affleure le drame de la souffrance, et le mode enjoué de la piquante
Morgana. Quelques autres héroïnes haendéliennes
sont au rendez-vous : la poignante Cléopâtre de Jules
César, l'émouvante amante désespérée Almirena de Rinaldo. Surtout, quelques raretés viennent
enrichir la discographie. Ainsi des pièces de Sartorio -
un bouleversant aria tiré d'un autre Orfeo - ou
de Stradella : l'air ensorcelant de Salomé tiré de l'oratorio Saint
Jean-Baptiste. Partout
on admire la sûreté des ornementations. On aime moins quelques
interprétations façon chant médiéval, avec interjections à la cantonade ou
détimbrage de la voix. Peut-être ce style fleuri enflammait-il
le siècle baroque, par ses effets de surprise. Reste
qu'il ne laisse pas d'étonner aujourd'hui dans Ariodante de
Haendel par exemple. Andrea
Marcon et sa quinzaine de musiciens du Venice Baroque Orchestra procurent
le plus imaginatif des accompagnements, même si les accents sont parfois
sollicités à l'extrême.
Johann Sebastian BACH : Matthaüs Passion BWV 244. Johannes Chum, Hanno Müller- Brachman, Christina Landshamer, Marie-Claude Chappuis, Maximilian Schmitt, Thomas Quasthoff, Klaus Häger. Thomanerchor Leipzig. Tölzer Knabenchor. Gewandhausorchester, dir. Riccardo Chailly. 2CDs Universal/Decca :
478 2194. TT : 80'34 + 79'36.
Outre l'orginalité
d'avoir été enregistrée dans la ville même de sa création, cette nouvelle
version de la Passion selon saint Matthieu se distingue par la valeur de
sa partie chorale. On a, en effet, fait appel à deux chœurs de garçons parmi les plus célèbres d'Allemagne : le Thomanerchor de Leipzig et le Knabenchor de Tölz en Bavière. Cette donne, issue d'une longue
tradition, restitue à la pièce une couleur particulière qui tempère son aspect
monumental. De même a-t-on respecté la disposition en deux orchestres. Riccardo Chailly, qu'on n’attendait pas dans ce répertoire, trouve le ton juste, de par la vivacité
des tempos, dépourvus de rigidité, le sens des porportions et l'intense ferveur
de la démarche. De même
qu'on est saisi par le climat intime qui se dégage de l'exécution. Bien qu'il s'agisse avec le
Gewandhaus d'une formation d'instruments modernes, on est séduit par la haute
qualité des solistes et leurs sonorités diaprées, aux couleurs comme mordorées. Loin de tout vedettariat, la ligne
des solistes vocaux vaut par sa sobriété. L'Évangéliste, Johannes Chum, possède ce timbre clair et cette
douceur d'élocution qui apportent une extrême sensibilité à l'énonciation du
texte biblique, à la fois objective et émue. Le Jésus de Hanno Müller-Brachamn se
distingue par l'aura de ses accents lyriques. Parmi les solistes des récitatifs
accompagnés et des arias, dont la Passion selon saint Matthieu tire son profond climat
méditatif, la basse Thomas Quasthoff fait autorité par une grande noblesse de
ton. Les voix de femmes auxquelles
est dévolue toute la tendresse de l'humain dans cette proximité de la mort, sont sans doute plus
claires que de coutume, mais pas moins convaincantes.
L’alto, Marie-Claude Chappuis, fait montre d'une belle
émotion contenue. Tout comme
la soprano, Christina Landshamer, à la présence juvénile. La prise de son, en concert, livre une acoustique justement
aérée, ajoutant au bonheur de cette exécution.
Ludwig van BEETHOVEN : Quatuors à cordes op.18 n°2, op.59 n°3, op.131, op.132. Artemis Quartet. 2CDs Virgin Classics : 60710208. TT : 75'36 + 62'39.
Les Artemis
poursuivent leur intégrale des quatuors de Beethoven, selon la formule adoptée
pour leurs précédentes parutions, en juxtaposant des opus appartenant aux trois
périodes créatrices du génie de Bonn. Leur manière se vérifie ici encore : une vigueur contrôlée, des couleurs instrumentales contrastées et
surtout un choix de tempos souvent très personnel qui, à l'occasion, précipite volontiers le
débit. Dans l'op.18 n°2, où souffle
encore l'esprit du classicisme de Mozart et de Haydn, on admire un pétillant
scherzo, aux couleurs italianisantes, et un impétueux finale. De l'op.59 n°3, dernier des trois Quatuors Razumovsky, se distingue un finale fugué joué en un vertigineux presto ; ce qui ajoute à l'effet de surprise. Les deux morceaux de choix de
l'album, on les trouve bien sûr dans les Quatuors op.131 et 132. Le
premier, un chef d'œuvre certes,
mais combien déroutant parfois, avec ses sept parties jouées d'un seul tenant,
foisonne d'idées et de modes compositionnels. Il y a quelque secret dans cette enfilade de séquences que les
Artemis traitent avec un art consommé de la modulation. Le formidable élan créateur qui vient
à se briser pour renaître plus vif encore, l'opposition de la force éclatante
et de la tendresse, car « le cœur conçoit, la
raison sculpte » (Romain Rolland) sont là
considérables. Le 15e Quatuor op.132 est
sans doute encore plus énigmatique et mystérieux. On sait qu'il fut interrompu par la maladie. Son long adagio médian forme une prière
d'action de grâce qui adopte la forme d'un choral pétri d'humanité. Ce que les Artemis traduisent avec
emphase au-delà de la seule perfection formelle, avant de conclure sur un
allegro appassionato dansant et déclamatoire qui se mue en un presto empli d'une joie
irrésistible.
Bicentenaire Chopin
Frédéric CHOPIN : Ballade n°1
op.23. Études op.10
n°4 et op.55 n°2. Mazurkas op.41
n°1 et n°4, op.24 n°2, op.63 n°2, op.33, n°2. Trois Mazurkas op.59. Nocturnes op.15
n°2 et op.55 n°2. Sonate n°3
op.58. Martha Argerich, piano. Universal/DG :
477 7557. TT : 64'25.
Aussi incroyable que possible,
il existait encore des enregistrements non publiés de la grande Martha
Argerich, en l'occurrence effectués pour la plupart en 1967,
deux ans après sa brillante victoire au Concours Chopin de Varsovie. La
pianiste prodige s'était vue offrir un contrat d'exclusivité par DG, cinq ans
plus tôt, de justesse dit-on. Les présentes exécutions
proviennent d'archives de radio. Leur
premier intérêt est de liver quelques inédits dans le repertoire
Chopin de l'Argentine, telles la Ballade n°1 (interprétée ici en 1959) ou l'Étude op.10 n°4. On
reste interdit devant le jeu très intuitif de la pianiste à cette
époque, qui semble tout oser : une vitalité irrépressible,
une absolue liberté de l'expression des climats antagoniques que cèlent le Noctune op.15 n°2. Ou
encore le rubato très personnel qui transforme la 1re Ballade en récit épique ou enveloppe les Mazurkas de climats tour à tour
brillants ou d'une profonde délicatesse. Tout aussi fascinant est l'art de
narrer et de captiver l'auditeur. Ainsi
de l'exécution (en public) de la Troisième
Sonate : un premier mouvement progressant tel un ouragan et
malgré tout paré de nuances pudiques, un scherzo comme liquide dans son premier
sujet, un largo grandiose dans son introduction pour se métamorphoser en pure
émotion poétique, un finale tumultueux, à la rythmique
étourdissante. Ici comme ailleurs, on a affaire à une approche
visionnaire, dégagée de toute pesanteur, transcendant les interrogations qui emportent
la musique de Chopin.
Et quelques autres perles pour une
discographie chopinienne...
On ne saurait trop recommander
encore quelques disques d'exception dont la parution n'a pas attendu 2010 pour
parer la discographie de jalons marquants et enrichir l'interprétation
chopinienne de fleurons essentiels, sinon défnitifs. Ainsi
en est-il de l'ensemble des Mazurkas par Arthur Rubinstein,
assurément l'interprète qui a le plus marqué le sillon du grand polonais et qui
s'approche le mieux de cet esprit élusif qui parcourt ces pièces
(RCA) ; des quatre Ballades par Krystian Zimerman, autre maître polonais
visionnaire, premier prix du concours Chopin de Varsovie (DG) ; des Scherzos par
Ivo Pogorelich, visions pas toujours sages, mais animées d'une irrésistible
patte (DG) ; des Polonaises par Maurizio Pollini (DG), un des grands disques
du virtuose italien, ou encore par Samson François, l'émotion pure à la
française, sur les traces de Cortot (EMI).
On éprouve encore une
particulière tendresse pour les Valses telles que jouées dans
l'évidence de leur simplicité par Claudio Arrau, ou la poésie
même au clavier (Philips) ; comme un indéfectible
attachement pour les deux Concertos tels que gravés par Zimerman
à la tête d'un orchestre ad hoc, visions d'un confondante musicalité (DG). Sans
oublier les Mélodies, magnifique anthologie s'il en est, distillée par la
regrettée Elisabeth Söderström avec la conviction qui était la sienne, accompagnée
par Vladimir Ashkenazy, lui-même un grand champion du piano de Chopin
(Decca).
__________________
« Bad Boys ». Arrigo BOITO : Mefistofele. Amilcare PONCHIELLI : Barnaba (La Gioconda).
Giacomo PUCCINI : Scarpia (Tosca).
Gaetano DONIZETTI : Dulcamara (L'Elisir
d'amore). Giuseppe VERDI : Iago
(Otello). Carl Maria von WEBER : Kaspar (Der Freischütz). George GERSHWIN : Sporting Life (Porgy and Bess).
Kurt WEILL : Mackie Messer (Die Dreigroschenoper). Arthur SULLIVAN : Roderic (Ruddigore). Stephen SONDHEIM : Sweeney
Todd. Claude-Michel SCHÖNBERG : Javert (Les Misérables). Gioacchino
ROSSINI : Basilio (Il Barbiere di Siviglia).
Ludwig van BEETHOVEN : Pizzaro (Fidelio).
Charles GOUNOD : Méphistophélès (Faust). Wolfgang
Amadeus MOZART : Don Giovanni,
Leporello, Il Commendatore. Bryn Terfel, baryton-basse. Avec Anne Sofie von Otter, mezzo-soprano. Swedish Radio Choir. Swedish Radio Symphony Orchestra, dir. Paul Daniel. Universal/DG : 4778091. TT :
58'10.
Voilà un récital en forme de
galerie de mauvais garçons, à laquelle le timbre sombre de Bryn Terfel, comme
sa posture de grand communicateur, confèrent une indéniable consistance. Mais
un bien curieux assemblage tout de même. Car
qu'a à faire, en pareille occurrence, l'histrion Dulcamara présentant sa liqueur miraculeuse ? De
même que la sempiternelle « Calomnie », distillée par le mielleux et bien inoffensif Basilio ? Sauf
à admettre qu'il fallait faire bonne mesure avec ces bons vieux poncifs du
répertoire de basse. Vilénie oblige, on eût
préféré quelques morceaux empruntés aux quatre rôles de vilains, précisément,
tirés des Contes d'Hoffmann – dont, au
demeurant, Bryn Terfel est un des grands défenseurs. Cela
dit, son Scarpia, illustré par le « Te Deum » qui clôt
le Ier acte de Tosca, est
connu pour sa morgue. Son Iago mérite de l'être,
car tout aussi démoniaque à l'heure du fameux « Credo ».
Si son Mefistofele est un brin caricatural, son Barnaba reste justement
menaçant. Il semble que l'idiome allemand lui convienne
mieux encore : le vil Kaspar et le diabolique Pizzarro sont
là pour le prouver. En fait, c'est bien dans la
comédie américaine que le Gallois est le plus à l'aise.
La chanson de Sporting Life est proprement irrésistible. La voix est
glorieuse et le portrait grandiose. Paul
Daniel est lui aussi plus en phase avec ces pages qu'il ne l'est dans le
répertoire italien. Pour ceux qui aiment
collectionner les pages sulfureuses du genre lyrique.
Sergei RACHMANINOV : Symphonie n°2 op.27. London Symphony Orchestra, dir. Valery Gergiev. LSO-Live : LSO 0677.
TT : 60'53.
Maître incontesté du piano,
Serge Rachmaninov s'est peu intéressé au domaine symphonique. Cet
univers l'inspirait moins que celui du concerto de clavier par exemple. Après
l'échec d'une première tentative (1897), il ne se risquera que
prudemment dans la composition d'un second opus qui, à ses
dires, aura été « une grande source de tracas ». Il la
créera lui-même en 1908 à Saint-Pétersbourg. C'est
l'exemple du romantisme russe, plus tourné vers un maître comme Tchaïkovski qu'attiré
par le modernisme que va incarner Stravinsky. Des
années-lumière semblent séparer ces deux musiciens
pourtant contemporains. Chantre de la musique en soi,
c'est-à-dire de la primauté mélodique, Rachmaninov s'appuie sur des mélodies
amples et généreuses et des harmonies pleines et rondes. Cette
richesse de texture a pour corollaire un rythme comme élastique. Après
une lente introduction, le premier mouvement, allegro moderato, construit en
forme d'arche, est émaillé de sombres sonorités. Le deuxième alterne une sorte de course épique et des vagues expansives. Il
est brièvement interrompu par un passage en forme de scherzo, vigoureux et
incisif. L'intense lyrisme de l'adagio, qui se déploie aux
cordes et est rehaussé par la mélopée de la clarinette, est mélancolique. Le
finale a fière allure, progressant d'abord en forme de marche. Mais
le mode lyrique revient vite en des phrases qui semblent s'enrouler sur
elles-mêmes comme dans un ballet de Tchaïkovski. Un
grandiose climat clôt une œuvre, certes un peu longue, mais
bien construite. A la tête de
« son » orchestre londonien - un LSO brillant -, Valery Gergiev lui donne un élan certain.
Jean-Pierre Robert.
Tobias HUME (ca
1569-1645
) : The first part of Ayres (1605). Captaine Humes poeticall musicke (1607). Éric FISCHER : Topographic Long-Range (2008). Marianne Muller avec Liam Fennelly & Pau Marcos, violes de
gambe. Zig-Zag Territoires (www.zigzag-territoires.com) :
ZZT 100501.
Sous la direction de la gambiste Marianne Muller, il
s’agit là de l’enregistrement d’un corpus de pièces solo ou en consort de
l’énigmatique Tobias Hume - auquel Éric Fischer (lui-même violiste, mais aussi
saxophoniste de jazz et compositeur) rend ici hommage (1er duo :
Rock / « Les Géosophiques »,
2e duo / « La
clepsydre »). Voici ce qu’il note, à propos du capitaine Tobias
Hume, mercenaire écossais, compositeur dilettante et gambiste virtuose :
« Au-delà des bravades de corps de
garde et de la mélancolie de bon ton propre à l’époque, il n’y a pas beaucoup
d’effort à faire pour entendre [à travers cette musique ] un homme paradoxal, fragile et d’une
énigmatique fêlure ». Un disque hors du commun.
Arcangelo CORELLI
(1653-1713) : Sonate da chiesa,
opera terza. Sonate postume.
Ensemble Aurora, dir. Enrico
Gatti. 2CDs Arcana (www.arcana.eu) : A 402.
TT : 133’00.
Cet album comporte les 12 Sonates d’église et 7 Sonates
posthumes (WoO, 4 à 10), interprétées par deux violons,
orgue positif ou clavecin, violoncelle & chitarrone, incidemment rejoints
par une trompette naturelle ; il est assorti d’un livret proposant un
extraordinaire dialogue imaginaire tenu, en divers lieux de New York, par deux baroqueux,
intitulé « Éloge de la
lenteur. Dialogue atrabilaire » - où est stigmatisé le démon de
la vitesse qui a saisi notre malheureuse époque, dégoûtée d’elle-même, obsédée
par le désir d’oublier. Textes en italien, français, allemand et anglais.
Arcangelo CORELLI
(1653-1713) : Sonate a violino e
violone o cimbalo, opera quinta. Enrico Gatti (violon), Gaetano
Nasillo (violoncelle), Guido Morini (clavecin). 2CDs Arcana (www.arcana.eu) : A 423.
TT : 126’30.
Dans ce nouveau coffret sont réunies 11 Sonates en trio, plus Follia en ré mineur. Derechef signé Enrico Gatti, le livret propose une
longue méditation intitulée « De la
simplicité inutile et du temps perdu » - autour de la perfection stylistique
de ces sonates en trio, manière de « pierre tombale » sur ce que l’on
qualifiera plus tard de baroque, mais
déjà riche toutefois des idéaux esthétiques de la future Accademia d’Arcadia.
Deux coffrets de prestigieuse référence.
Défense de la basse de viole [contre les entreprises du violon
et les prétentions du violoncelle]. Ricercar Consort,
dir. Philippe Pierlot (www.ricercarconsort.com).
3CDs Ricercar (www.ricercar.be) : RIC 296.
TT : 3h45’35.
Sous ce titre quelque peu étonnant (emprunté à l’ouvrage
publié en 1740, à Amsterdam, d’un juriste nommé Hubert Le Blanc), le
présent album de 3 CDs évoque les riches heures de la basse de viole &
Monsieur de Sainte-Colombe, non moins que le répertoire qui associa, plus tard,
basse de viole, violon & violoncelle. Sont ainsi proposées des œuvres
de : Marin & Roland Marais, Du Buisson, Demachy, Sainte-Colombe
(père & fils), Morel, Cappus, Dollé, Caix d’Herlevois, Dornel, Duval,
Rebel, Leclerc, Corrette, Bodin de Boismortier, Massé, Barrière, Canavas et
anonymes.
Robert
SCHUMANN : Fantaisie en ut majeur, op. 17. Kreisleriana, op. 16. Arabesque, op. 18. Hideyo
Harada, piano. Audite (www.audite.de) : 92.577 SACD.
TT : 78’59.
À l’occasion du 200e anniversaire de la
naissance de Schumann (par trop éclipsé par celui de Chopin), certes bienvenue
est cette publication. Délicatesse et parfaite cohérence des phrasés –
même dans les passages les plus passionnés – caractérisent l’interprétation,
par la grande musicienne japonaise, de trois œuvres particulièrement emblématiques
du pianisme romantique.
Hugo WOLF (1860-1903) : Möricke-Lieder (1888). Dietrich Henschel, baryton. Fritz
Schwinghammer, piano. 2CDs Fuga Libera (www.fugalibera.com) : FUG568. TT :
124’42.
Davantage que pour tout autre compositeur, l’écoute des
lieder d’Hugo Wolf nécessite le suivi du texte – seule la poésie déterminant,
pour lui, la forme et l’expression musicales. La traduction française
& anglaise des poèmes d’Eduard Möricke (1804-1875) est ici heureusement
donnée en regard des originaux. Dans ce célèbre cycle (45 lieder),
fait merveille la souple voix d’airain du baryton Dietrich Henschel – admirablement
sertie par un pianisme raffiné. L’interprétation désormais de référence.
Gabriel FAURÉ
(1845-1924) : Barcarolles.
Delphine Bardin, piano. Alpha (www.alpha-prod.com) :
162. TT : 59’12.
Légèreté du toucher et limpide raffinement dans
l’expression – sans nulle évanescence toutefois – distinguent le jeu de
Delphine Bardin dans ces treize voluptueuses Barcarolles dont la composition s’échelonna de 1881 à 1921.
Une belle carrière s’ouvre assurément devant cette jeune interprète.
Dmitry SHOSTAKOVICH (1906-1975) : Les 24 préludes & fugues.
Alexander Melnikov, piano. 2CDs + 1CD/DVD Harmonia Mundi (www.harmoniamundi.com) : HMC 902019.20.
TT : 2h31’15.
Trop longtemps dénigré (non sans arrière-pensées
doctrinaires), ce fascinant corpus – de par, notamment, son constant souci d’expérimentation
(fugues extraordinairement diversifiées) – a ici trouvé un interprète de rêve.
Riche de citations de Bach, bien sûr, mais aussi de Beethoven, de Prokofiev… et
d’auto-citations, l’œuvre fut composée en quelque trois mois – et, ce qui n’est
pas indifférent, demeure techniquement accessible à tout « honnête »
pianiste. En bonus, le DVD comporte un dialogue - de parfaite intelligence…
- entre Alexander Melnikov et un autre grand claviériste, Andreas Staier.
Si m’en croyez, un « indispensable » !
Éric PÉNICAUD : Guitare du XXIe siècle.
Quantum (www.quantumclassics.com) :
QM 7054. Distr. Codaex. TT : 68’37.
Immédiate séduction de musiques sensuelles et poétiques où
– comme l’écrit le grand Leo Brouwer dans sa préface enthousiaste à ce
scintillant album – « le son crée la
forme et non le contraire […] tout
vibre et résonne constamment ». Volontiers polytonale, l’œuvre est
d’une grande richesse harmonique… Pour ce florilège de 13 titres (partitions
publiées aux éditions d’Oz, Lemoine, Transatlantiques, Durand, Eschig, Combre,
etc.), les plus grands guitaristes entourent le compositeur : Roberto
Aussel (Argentine), Fabio Zanon (Brésil), Gaëlle Solal, Olivier Pelmoine &
Sara Chenal, Leo Brouwer (Cuba), Roland Dyens, Tania Shagnot, Sébastien Vachez,
François Laurent, le Quaternaglia Guitar Quartet (Brésil), Arnaud Dumond.
Avec notamment, interprétées par le duo « Cordes & Âmes » (Maud
Laforest & Benjamin Beirs), deux pièces pour violon & guitare : Jubilatio et Stable/Mouvants.
Filomena MORETTI
joue Jeux interdits et autres célèbres
« bis » pour la guitare. Transart (www.cdpresto.com) : TR168.
Distr. Naïve. TT : 78’37.
Que des « tubes » pour guitare, émaillés de
transcriptions de mélodies célèbres signées Bach/Gounod, Schubert, Granados,
Albéniz, Monti, Sor. Ensemble fort agréablement interprété, avec aisance
et naturel. Fussent-ils faciles, ne boudons jamais nos plaisirs !
Aubert
LEMELAND : 6e Symphonie « Les Éléments »,
op.130. Time Landscapes, op.153. Mémorial, op.158. Concert nocturne, op.137. Carole
Farley, soprano. Staatsorchester Rheinische Philharmonie, dir. Jose
Serebrier. Skarbo (www.skarbo.fr) : DSK 3104. Intégral
Distribution. TT : 60’25.
Comme il n’est, hélas ! que trop fréquent, c’est hors
nos frontières que sont enregistrées nombre d’œuvres de ces compositeurs
français se refusant à toute allégeance envers un terrorisme de chapelle qui, heureusement,
fait long feu désormais. Ainsi d’Aubert Lemeland dont – grâces soient
rendues à la courageuse firme Skarbo – sont reprises quelques œuvres majeures –
où sensualité, lyrisme et puissance ne sont pas les moindres qualités. Le Concert nocturne, pièce brève pour
harpe & cordes, est ici interprété par Sabine Chefson à la harpe,
accompagnée par l’Ensemble instrumental de Grenoble, dir. Marc Tardue.
Le Sommeil de l’Ange. Musique
basque pour txistu & orgue. Sergio Torices Roldán, txistu.
Jesús Martín Moro, à l’orgue Jean Daldosso de l’église d’Urrugne. Hortus
(www.editionshortus.com) : 077.
Distr. Codaex. TT : 59’25.
Flûte basque à trois trous, le txistu se joue de la main gauche, ce qui permet le maniement, par
la main droite, d’un petit tambour nommé tamboril,
fixé au bras de l’interprète. Sa sonorité se marie fort plaisamment à
celle de l’orgue - ici un tout nouvel instrument spécifiquement conçu pour
l’interprétation du répertoire basque des XIXe et XXe siècles,
mais aussi des musiques contemporaines. Sont interprétés, à l’orgue seul,
une Marcha religiosa de Luis Urteaga
(1882-1960), une Plegaria (prière) de
Juan Urteaga (1914-1990), une Improvisación
sobre un canto vasco de Eduardo Gorosarri Maiztegui (1889-1947) et Le visage du vent de Gorka Cuesta
(°1969). Avec txistu : trois extraits de la Euskal Suitea (Contrapas, Gavota et Fandango Bolero) de Tomás Garbizu Salaberria (1909-1989), Le Sommeil de l’Ange de Gorka Cuesta
(°1969) et Nondik nora de Sabin
Salaberri (°1934). Virtuose du txistu, Sergio Torices Roldán s’intéresse
tout autant – comme en témoigne ce CD – au répertoire traditionnel qu’à la
création contemporaine. Jesús Martín Moro a, quant à lui, travaillé avec
Xavier Darasse, au CNR de Toulouse ; il est aujourd’hui titulaire de
l’orgue de Saint-Jean-de-Luz. Bien plus qu’une curiosité, ce disque est
une révélation !
Christopher
BJURSTRÖM : Carnet de croquis d’un
voyageur immobile. Ensemble de dix musiciens, dir. Christopher
Bjurström. Marmouzic (www.marmouzic.org) :
MAR 005.
D’un extraordinaire dynamisme et variété de couleurs sont
ces vingt-et-une musiques « voyageuses » nées de traces et
impressions glanées au cours de parcours cinéphiliques parmi des films muets du
début du XXe siècle (signés Murnau, Buster Keaton, Douglas
Fairbanks, Victor Fleming, Raoul Walsh, Charley Bowers…). Ici joyeusement
interprétées par des musiciens, à l’évidence, passionnés de jazz.
Francis Gérimont.
Pérégrinations par Fabrice
Millischer, trombone/sacqueboute. PERC-PRO (www.perc-pro.com) : LC
11995
. TT : 58’39.
Un disque original qui nous donne à entendre un jeune et
talentueux tromboniste, jouant indifféremment du trombone ou de son ancêtre, la
sacqueboute, dans un répertoire éclectique s’étendant du XVIe au XXe siècle (Albrechtsberger, Castérède, Ortiz, Šulek, Kassatti), permettant ainsi
de porter un regard nouveau sur l’univers du trombone et d’apprécier tous les
charmes d’un instrument plus souvent utilisé en orchestre qu’en soliste.
Alliance de sensibilité et de virtuosité, un disque à écouter assurément.
Wolfgang Amadeus MOZART : Complete works for string trio. Trio Fenix. 2CDs Fuga
Libera : FUG569. TT : 85’34.
Un disque qui rassemble l’ensemble des œuvres de Mozart
pour trio à cordes, dont le célébrissime Divertimento
K 563, composé en 1788 et dédié à son frère en loge Michael Puchberg, ici
associé à six Transcriptions de préludes
& fugues de J. S. Bach, commande du baron von Swieten. Concernant
le Divertimento, il est certain que
cette œuvre constitue l’un des sommets du répertoire pour trio à cordes,
comprenant six mouvements, associant noblesse, sérénité et lyrisme, où l’alto
trouve l’une de ses plus belles pages (ce pupitre était habituellement tenu par
Mozart lui-même). L’interprétation du trio Fenix est, en tous points,
remarquable : modèle de sonorité, d’expressivité, d’équilibre…
Alegransa. Isabelle
Bonnadier : Chants de troubadours / Grâce & désir. Troba
Vox (www.art-troubadours.com) : TRO 21. TT : 58’20.
Un disque original, d’une grande qualité musicale, tant
instrumentale que vocale. Un langage d’amour, de grâce et de désir, dans
une langue populaire où poésie et musique s’enlacent pour notre plus grand
plaisir.
Naviguer le ciel. L’Heure incandescente, dir.
Geoffroy Dudouit. Association « Et avec votre esprit »(www.etavecvotreesprit.org) :
AM/CD 107/31001. TT : 69’46.
Association originale entre poésie contemporaine &
créations pour chœur de femmes. Différentes poétesses, différents
compositeurs, différentes façons d’envisager le ciel et d’y naviguer. Un
disque assurément différent qui n’est pas exempt de charme.
DEBUSSY /
MOUSSORGSKY : Tableaux.
Juliana Steinbach, piano. Paraty : 110.111. TT : 52’29.
Premier disque en solo de la jeune et prometteuse pianiste
Juliana Steinbach, dans un programme consacré à Debussy (Estampes, L’Isle joyeuse) et Moussorgsky (Tableaux d’une exposition). Les Estampes (1903), comprenant trois pièces (Pagodes, Soirée à Grenade, Jardins sous la pluie), et l’Isle joyeuse (1904) marquent le début
de la grande période pianistique de Claude Debussy, révélant en profondeur
l’importance de son art, par la saveur des rythmes, la nouveauté de la matière
sonore et l’expression de l’imaginaire. Les Tableaux d’une exposition, composés en 1874, à la mémoire du
peintre Victor Hartmann, réunissent les thèmes chers au cœur de Moussorgsky
(monde de l’enfance, folklore, scènes populaires et fantastiques) et se
présentent comme une suite de pièces exprimant les émotions d’un visiteur, le
long d’une promenade, face aux différents tableaux de l’exposition.
L’occasion, pour Juliana Steinbach, de faire montre de tout son talent, par la
délicatesse de son toucher, la beauté de sa sonorité et l’intelligence de son
interprétation. Pour un début, c’est un coup de maître.
Carl NIELSEN, André
JOLIVET, Jacques IBERT : Concertos
pour flûte. Soyong Lee, flûte. Ensemble de Tokyo, dir.
Chang-Kook Kim. Skarbo : DSK3101. Intégral Distribution.
TT : 55’42.
Un disque qui présente trois des plus grands concerti pour
flûte du XXe siècle : celui de Carl Nielsen (1865-1931),
composé en 1926, espiègle et souriant, celui d’André Jolivet (1905-1974),
composé en 1949, empli de dynamisme et de gravité et celui de Jacques Ibert
(1890-1962), composé en 1932, bondissant et ambigu. Toutes occasions pour
la flûtiste coréenne de faire valoir sa sensibilité et sa virtuosité.
Voce Ventu &
Mieko Miyazaki : Tessi Tessi.
Daquí (www.daqui.org) :
332042. TT : 62’23.
Un disque surprenant qui mêle sonorités du koto
(instrument traditionnel japonais à cordes pincées, originaire de Chine) et…
polyphonies corses, pour un métissage musical non dénué de charme.
Patrice Imbaud.
DVD
Christoph Willibald
GLUCK : Orpheus und Euryrike. Opéra en deux actes. Chorégraphie de Pina Bausch. Maria
Riccarda Wesseling (mezzo-soprano), Julia Kleiter & Sunhae Im (sopranos). Yann
Bridard, Marie-Agnès Gillot, Miteki Kudo (danseurs). Ballet de l'Opéra national de Paris. Balthasar-Neumann
Ensemble und Chor, dir. Thomas Hengelbrock. Filmé
à l'Opéra Garnier (février 2008). Bel Air Classiques : BAC044. TT : 104'.
Le mythe d'Orphée traité par
Gluck dans son éloquente simplicité dramatique, se prête à une mise en scène
chorégraphiée. Pina Bausch en fait un
« opéra dansé » introduisant une nouvelle dimension, celle du
mouvement corporel qui, mieux que tout autre medium, libère les
forces élémentaires traversant l'opéra, donné ici dans sa version allemande. L'idée est d'en dédoubler les trois personnages, chacun étant confié à un
chanteur et à un danseur : au premier revient le récit poétique, au
second l'épaisseur du drame. Tandis que le corps de ballet
figure les choristes, eux-même non visibles. Le
film (Vincent Bataillon) réalisé en direct à l'Opéra Garnier, capte l'essence
du vocabulaire épuré de la chorégraphe, sur un plateau dépouillé où domine le
noir et le banc, par des plans bien différenciés et des images d'une grande
beauté plastique. Les différences de
climat sont saisissantes : à l'animation démoniaque du tableau des
Enfers, fait suite une vision toute poétique, quoique
sombre, de celui des Champs-Élysées. On
admire l'émouvante vision d'Orphée que livre le danseur Yann Bridard comme la
prestation émue de sa partenaire de chant, Maria Riccarda Wesseling. Le
duo final, qui conduit Orphée à braver l'interdiction divine de regarder
Eurydice, mêle habilement chanteurs et danseurs en un tout fusionnel d'une
force peu commune, chant et danse étant désormais indissolublement
mêlés. La direction de Thomas Hengelbrock livre une
lecture, elle aussi, intense du chef-d'œuvre
de Gluck.
Vincenzo BELLINI : La
Sonnambula. Opéra en deux actes.
Livret de Felice Romani. Natalie Dessay, Juan Diego Flórez,
Michele Pertusi, Jennifer Black. Metropolitan Opera Orchestra, Chorus and Ballet, dir. Evelino Pido.
Mise en scène : Mary Zimmerman. Filmé
au Met de New York, en 2009. Universal/Decca : 074 3357.
TT : 138'.
L'intrigue convenue de La
Somnambule de Bellini peut sembler un obstacle à sa
représentation scénique. Qu'à cela ne tienne, il
suffit de la transposer pour lui donner quelque épaisseur ! En
l'occurrence, durant la répétition d'une troupe d'opéra
préparant précisément cette pièce. L'auteur de la
mise en scène justifie son choix par le fait que, pour
les somnambules, rêve et réalité se confondent, tout comme il en est des
interprètes sur la scène : les uns et les autres évoluent dans un
espace imaginaire qui n'est pas loin de l'univers réel. Cela
débute en effet comme les préparatifs d'un spectacle, mais glisse vite et
adroitement vers une superposition de deux histoires, la supposée écrite et
celle qui se déroule vraiment. Car bien sûr, le beau ténor
s'éprend pour de vrai de l'éblouissante diva. Leurs
amours seront évidemment contrariés par les manigances d'une méchante soprano
qui saisit l'aubaine de l'affection d'hypnose dont sa collègue est atteinte. La
production, montée indiscutablement pour mettre en valeur deux stars de la
voix, Natalie Dessay et Juan Diego Flórez, fonctionne bien, malgré
l'unicité du vaste décor, surtout que restituée par une adroite prise de vues. Musicalement, le show subjugue car les susdites caressent la mélodie bellinienne comme peu
aujourd'hui et savent l'art de tenir la note aiguë qui fait s'embraser la
salle. Mais leur interprétation va au-delà d'une
brillante démonstration de vocalité, et c'est tout à l'honneur de la mise en
scène que de donner un vrai relief aux duos qui les unissent ou les voient se
déchirer. Evelino Pido les entoure amoureusement et
fait sonner l'orchestre new-yorkais avec raffinement.
Jean-Pierre
Robert.
***
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