Lettre d'information - no 120 mai 2018
La newsletter du mois d'Avril proposait des portraits de compositeurs : tout d'abord un portrait de Sir John Tavener, compositeur anglais de musique sacrée, disparu en 2013, dont le Little Lamb est aujourd'hui en Angleterre presque aussi connu que les chants de Noël (carols) les plus communs. Un portrait également d'un jeune compositeur bien vivant et actif, Pedro Garcia Velasquez, auteur du très bel opéra chorégraphique Initio, et fondateur de BabelScore, une maison d'édition/diffusion utilisée par un grand nombre de compositeurs et interprètes du monde entier. La lettre de ce mois-ci propose, au travers d'interviews, de questionner l'enseignement de la musique. Christine Prost, professeur émérite de l'université d'Aix-en-Provence, nous livre une synthèse sur la musique et son enseignement, sur sa façon d'appréhender et de transmettre le langage musical. Jean-Phillippe Dambreville, quand à lui, pose plus concrètement certaines bases de l'enseignement de la musique sur le territoire français : successivement directeur des écoles de musique de Rouen, du conservatoire régional de Beauvais puis de celui d'Aix, Dambreville nous fait part de ce qu'il a souhaité apporter dans ces structures qu'il a portées. Georg Hajdu enfin, dirige depuis peu le département musique de la Hochschule für Musik und Theater Hamburg. Il nous donne ici, en anglais, une approche résolument moderne de l'apprentissage de la musique post-baccalauréat, abordant notamment la difficile question du statut de la recherche-création, ou de la recherche artistique dans les universités aujourd'hui.
Spécialiste de musique contemporaine, auteur d’une thèse sur la musique du compositeur Maurice Ohana, Christine Prost a formé plusieurs générations de musiciens, musicologues et professeurs de musique à l’université d’Aix-en-Provence. Elle s’entretient ici avec deux anciennes élèves, Armelle Babin et Valérie Brigot, professeurs de musique en collège, afin de poser une vaste question : Pourquoi la musique ?
Christine Prost : La question, en elle même, est ambivalente. On peut la comprendre de deux façons : Pourquoi, partout où il y a des hommes, y a t il de la musique ? Pourquoi, parmi tous les moyens dont nous disposons pour nous exprimer, la musique est-elle ce qui m’a retenu au point d’y consacrer ma vie professionnelle, et d’y trouver un véritable accomplissement ?
Valérie Brigot : Comment penses-tu qu’il faut s’y prendre pour enseigner la musique aux plus jeunes ?
Christine Prost : Je ne sais pas si, avec le temps chichement concédé par l’Education Nationale à l’apprentissage de la musique, le mot « enseigner » est pertinent. Je dirais plutôt : leur faire découvrir quelques aspects essentiels de l’univers de la musique. Cette découverte passe nécessairement par l’éducation de l’oreille, que l’habitude actuelle d’être sans cesse environnée de sons rend paresseuse. Par ailleurs, je tiens pour une erreur d’avoir recours, pour faciliter cette éducation, à des substituts du langage musical, dont la nature est différente du langage verbal. « Traduire » une forme, un rythme, un timbre par une analogie verbale ou visuelle est-il plus efficace que de caractériser cette figure au mieux de ses propriétés musicales ? Travailler par comparaison, par description ou par imitation permet d’ aborder les différents éléments de ce qui constitue le langage musical, (hauteurs, durées, tempos, rythmes, dynamiques, timbres, intervalles) sans quitter une réalité musicale qui n’est jamais mieux comprise que lorsqu’elle vient du « ressenti » de l’élève lui-même. Armelle, je sais que tu pratiques beaucoup le chant en classe. Peux-tu nous donner une idée de ton expérience en la matière ?
Armelle Babin : Je constate que chaque proposition de création, si modeste soit-elle, éveille la curiosité et l’adhésion des élèves. La création suivie d’une écoute d’œuvre qui utilise les mêmes paramètres ou les mêmes éléments apporte toujours une révélation. Et la joie naît toujours de la compréhension. Pour la pratique vocale, il en est de même : l’apprentissage se fait uniquement d’oreille, ce qui requiert beaucoup de concentration et développe la mémorisation – d’un texte, d’une mélodie, d’un rythme. Je n’annonce jamais les difficultés techniques telles quelles mais donne des moyens aux élèves de les surmonter. Cela passe par un échauffement vocal systématique, mais varié et adapté au chant en question. Quant au répertoire, j’estime que tout peut être chanté, exceptés les airs d’opéra… et le rap, que je trouve personnellement très difficile à réaliser en groupe, encore que : à nous d’adapter ce que l’on a envie d’apprendre, de choisir un extrait, de faire chanter le refrain et de faire déclamer les couplets. Je pense à l’air Non piu andrai de Figaro que je fais pratiquer ainsi. Et toi, Christine, que t’a appris cette expérience ? Peux-tu donner des exemples de cette pédagogie que tu as développée au contact des publics scolaires ?
Christine Prost : Pour ma part, le public scolaire m’a appris que tout ce que nous considérons comme allant de soi - nous qui « savons » - est toujours à reconsidérer sous l’angle de la découverte. Le public scolaire m’a enseigné que rien ne remplace le contact direct avec la réalité sonore, qui ne s’appréhende pas par le langage verbal, mais s’éprouve par une expérience personnelle.
Certes, on peut laisser s’écouler la musique, en rêvant ou en pensant à tout autre chose. Il m’est arrivé de le proposer aux élèves, volontairement. Mais l’écouter vraiment, de manière active, relève d’une attitude différente, qui requiert disponibilité et concentration.
Je pense fermement qu’en ce qui concerne ce que l’on appelle « musique savante occidentale » l’effort consenti pour écouter et comprendre est largement payé par le bonheur éprouvé en retour. Je dis bien « bonheur », et dire cela, c’est probablement répondre en partie à la question qui nourrit cet entretien: Pourquoi la musique ? Parce que la musique donne du bonheur ? Valérie, toi qui es encore, comme Armelle, en pleine activité professionnelle, dans un monde scolaire qui, certes a beaucoup changé depuis que j’enseignais moi-même, mais où, je crois, les jeunes ont le même besoin fondamental de se sentir « exister », qu’as-tu à dire par rapport à ton métier ?
Valérie Brigot : Étudiante, j’ai ressenti un grand bonheur lorsqu’au détour d’une analyse musicale, je pouvais donner un sens à une œuvre, comprendre comment ce qui n’est que combinaisons de sons, mécanismes et rouages de composition, jeux sur des paramètres purement sonores, aboutissait à un moment singulier, capable de nous transporter. Ce bonheur doit ressembler à celui du physicien face au mystère de l’univers ou celui de l’explorateur découvrant une nouvelle terre. En découvrant les microcosmes que constituent les œuvres musicales, c’est un peu une part de nous-même qui émerge. Je n’ai bien-sûr pas la prétention de faire de l’analyse universitaire avec mes jeunes élèves. Mais je garde en tête qu’aider à comprendre, à se sentir intelligent, renforce le plaisir musical que j’aimerais partager.
Armelle Babin : oui, le terme d’enseigner est sûrement ambitieux. Mais j’ai un peu peur que celui d’initier soit trop restrictif. Sans enseigner la technique de la musique comme dans les conservatoires, je suis toujours très ambitieuse dans mes choix d’écoute et dans le questionnement de la perception de mes élèves. Mon rôle est de guider leur perception, de l’affiner, en donnant ensuite accès à un vocabulaire musical technique. Les élèves le retiendront dès lors qu’ils en auront compris le sens par leurs oreilles.
Christine Prost : A la Faculté, où s’est déroulée la seconde partie de ma carrière, j’arrivais aussi « innocente » qu’à l’étape précédente. J’avais peu d’avance sur les étudiants, mais j’ai très vite compris que ce que je pouvais leur apporter n’était ni d’ordre musicologique, ni d’ordre technique, mais d’ordre musical. La plupart d’entre eux avaient une bonne formation d’instrumentistes, mais ne se souciaient pas du sens de ce qu’ils jouaient. Ainsi ai-je été amenée à pratiquer avec eux une analyse impliquant, outre la traditionnelle reconnaissance des formes et l’étude de l’harmonie, un travail pragmatique sur l’appréhension de la dramaturgie propre à chaque œuvre, et sur son interprétation.
Ce que j’appelle la dramaturgie d’une œuvre, c’est tout ce qui, s’inscrivant dans un cadre formel (sonate, suite, fugue, etc…. ) le déborde en imposant , par sa structure propre, sa dynamique, ses ruptures, sa matière, un itinéraire musical dont le sens doit être interrogé. Travail hasardeux, lorsqu’on s’appuie uniquement sur une « partition », c’est-à-dire sur la trace écrite d’une réalité sonore absente. C’est pourquoi il me paraît important que ces deux aspects de l’analyse restent complémentaires et que l’œil ne prenne pas le pas sur l’oreille. La partition, par ailleurs, fourmille d’indices indispensables à sa compréhension.
Je prendrai, comme exemple de cette analyse « dramaturgique », une partition qui ne met en jeu que quelques unes des composantes de la musique, laissant délibérément de côté les autres : il s’agit du premier prélude (en Ut Majeur) du premier livre du Clavier bien tempéré, de J.S.Bach, qui est dans toutes les mémoires.; Le rythme en est uniforme, sans ruptures, et « ce qui se passe » est défini essentiellement par le trajet harmonique que dessine la pièce au sein de l’espace musical.
Le titre de « Prélude» indique d’emblée son caractère : pièce en un seul jet, préparant celle qu’elle annonce. Il s’agit ici du couple « Prélude et fugue », qui associe dans un ensemble binaire simplicité et complexité, liberté et contrainte. On peut l’envisager comme une manière de se « mettre en doigts, un échauffement, une façon de tester l’instrument et de vérifier comment il sonne dans ses différentes tessitures,, dans l’acoustique spécifique du lieu etc…..
La structure harmonique est presque totalement basée sur des carrures paires, qui s’appuient sur des basses conjointes et énoncent des formules d’enchaînements cadentiels qui, sans rompre le flux sonore, parcourent les tons voisins d’Ut Majeur.
Soit : 4 mesures posant la tonalité principale : Ut Majeur,
7 mesures de marches harmoniques descendantes menant à un enchaînement cadentiel en Sol Majeur
8 mesures en chromatisme descendant menant à un enchaînement cadentiel en Ut Majeur qui signale le milieu du morceau.
4 mesures de transition préparant la longue Pédale de Dominante qui la suit
8 mesures sur pédale de dominante créant un sentiment d’attente prolongé sur 8 mesures
4 mesures de formule cadentielle terminale. passant par la sous-dominante Fa majeur.
Comme il était d’usage au temps de J.S. Bach, aucune indication de tempo ni d’intensité ne vient préciser sur la partition comment comprendre et rendre ce que l’usage seul considérait comme allant de soi . L’usage ayant disparu , c’est à l’interprète qu’il revient de choisir quelle forme dramaturgique la plus convenable et la plus convaincante adopter .
(J’adopterais volontiers, pour ma part, une longue courbe diminuant d’intensité en même temps qu’elle s’enfonce vers le grave de l’instrument, mais gardant rigoureusement le même tempo avant de s’éapanouir librement dans la cadence conclusive)
Ni théoricienne, ni spécialiste, j’étais, il me semble, peu considérée par certains de mes collègues, mais, curieusement, appréciée par les magnifiques compositeurs ou interprètes que j’ai eu la chance de côtoyer : à Marseille...
J’ai eu la chance de côtoyer, à Marseille, Pierre Barbizet, Jean-Claude Risset, Georges Bœuf : à Aix , André Boucourechliev, et surtout , à Paris, Maurice Ohana, qui m’a fait assez confiance pour accepter que mon travail de thèse porte sur sa musique et m’ a introduite dans un milieu musical de haut niveau. Jean-Claude Pennetier, d’ailleurs, n’a pas hésité à « descendre» de Paris pour jouer gracieusement les 24 Préludes d’Ohana le jour où j’ai présenté ma thèse. Il y eut aussi, entre 1978 et 1986, l’expérience unique de ma collaboration avec le Centre Acanthes, où j’ai pu travailler directement avec les compositeurs invités ces années-là.: Xenakis, Berio, Ligeti, Lutoslavski, Kagel, Messiaen. Ils étaient tous (à l’exception de Messiaen) de ma génération. J’ai pu vivre de l’intérieur l’effervescence de la recherche de nouveauté qui se répandait alors dans toutes les directions : théâtre, musique, peinture, danse, poésie, écriture... Partout il s’agissait de dépister du neuf dans le vieux, ou de l’inouï grâce aux technologies nouvelles qui commençaient à se développer.
Ainsi ai-je été qualifiée sans le vouloir de spécialiste de « musique contemporaine », comme on le disait il y a cinquante ans. L’obligation de me confronter à des œuvres ne relevant pas du « système tonal » m’a grandement aidée à reconsidérer le musical sous un angle élargi. Fructueuse expérience ! Car en fait, nous vivions depuis plus de trois siècles, en ce qui concernait la musique occidentale, sur un système que nous croyions inamovible, mais qui ne faisait appel en réalité qu’à une petite partie des possibles. Dans l’ordre des hauteurs, pourquoi continuer à privilégier les fréquences les plus audibles, alors qu’à l’intérieur d’une octave, les technologies récentes (ainsi que le développement de la connaissance des « musiques extra-européennes ») nous révélaient l’existence d’une multiplicité de fréquences utilisables? Pourquoi donner plus d’importance, dans une composition, à la mélodie plus qu’au timbre ? Schoenberg, et ses « mélodies » de couleurs, Messiaen avec ses « mélodies » de rythmes, avaient ouvert le chemin des explorations passionnées. ( Je me souviens : c’était au lycée Marseille veyre ; je croyais encore aux vertus de la flute à bec et j’avais demandé aux élèves d’y apprendre je ne sais plus quelle chanson un peu rythmée comme ils les aimaient alors. La semaine suivante, un petit africain demande avec insistance de jouer devant ses camarades. Il le fait avec une assurance, une confiance, qui me confondent. Et pourtant je ne reconnais rien de ce qu’il nous donnait à entendre jusqu’au moment où je réalise qu’il jouait bien la chanson, mais avec son rythme seul, sans se soucier des notes ! )
Ligeti rêvait d’inventer de grandes masses sonores se transformant insensiblement, comme se transforment les nuages. Les constructions les plus cérébrales côtoyaient l’aléatoire ; Cage « préparait » le piano en introduisant gommes et crayons entre les cordes. Varèse composait des œuvres pour percussions seules. Scelsi creusait le son à la limite de l’audible… Puis vint l’informatique musicale. Chacun peut désormais travailler chez soi, inventer sans risque. Peut-être n’est-il plus nécessaire de connaître l’histoire de la langue musicale pour composer…
Valérie Brigot : Comment cela s’est-il passé avec des publics adultes, celui des conférences que tu as données, une fois retraitée ? Est-ce que la façon de faire découvrir et aimer la musique est différente d’un public à un autre ?
Non. Cette activité fut un peu comme une troisième étape dans ma carrière. Car je n’ai jamais senti de rupture entre l’enseignement et la vulgarisation intelligente qui m’était maintenant demandée. Je l’ai pratiquée ces dernières années à Aix à travers le travail de « Passerelles », atelier pédagogique et socio-culturel issu du Festival d’Aix et centré sur les jeunes, et par les conférences données ici ou là pour des publics amateurs, mais non spécialistes de musique, comme le public des « Amis du Festival », plus orienté vers l’Opéra que vers la musique en général. Avant tout, il me paraît indispensable de savoir quel est ce public, quelles sont ses attentes, pour essayer d’y répondre au mieux. Dégager la « substantifique moelle » de l’opéra que l’on étudie demande beaucoup de travail et de réflexion si l’on veut en saisir les enjeux théâtraux et musicaux , les replacer dans leur époque, comprendre ce qu’ils ont à nous dire. Je ne suis pas par vocation une « fan » d’Opéra, genre que j’avais peu fréquenté, peu étudié et que je tenais (à tort) en piètre estime avant que le Festival ne me propose de faire partie de l’équipe pédagogique de « Passerelles ». En fait, je connais mal ce qu’on appelle « le répertoire ». Les œuvres, les chanteurs, les mises en scène, les lieux, les chefs… Mais je connais bien, même parfois très bien les quelques ouvrages programmés ces dernières années par le Festival qui m’ont intéressée et sur lesquels j’ai choisi de me pencher. Ce sont souvent des ouvrages assez contemporains. : Berg, Chostakovitch, Stravinski, Bartok. Les trésors qu’ils nous dispensent, en mesurons-nous tout le prix ? Il y a tant à entendre, tant à comprendre et tant à voir dans cette totalité que revendique l’opéra ! Tout participe à la réussite d’une représentation. Mais ce qui en fait le cœur, cette extraordinaire fusion du théâtral, du textuel et du musical que j’évoquais plus haut, que peut-on en dire au sortir du spectacle, serait-ce sous les étoiles , qui ne paraisse inutile et banal? L’émotion ressentie, celle qui vous laisse sans voix, parce que tout était si juste, si complètement habité, cela ne se parle pas. Cela se garde, précieusement, car c’est sans prix.
L’une des dernières chances de ma (très longue) vie de musicienne est d’avoir connu de près Bernard Foccroulle, homme et musicien d’exception, directeur général du Festival d’Art lyrique depuis 2007, qui le quitte cette année entouré des regrets unanimes de ceux qui ont eu la chance de l’approcher. Sous sa direction, le Festival s’est débarrassé de tout ce qui travestit cet exercice musical et théâtral exigeant en exercice social du « paraître ». Pour la préparation des créations, il demande aux interprètes 6 semaines de présence. Le travail des artistes devient une aventure collective à laquelle participent pleinement toutes les « petites mains » sans lesquelles l’édifice pourrait s’écrouler. Le respect des uns commande le respect des autres. Metteur(euse) en scène, dramaturge, éclairagiste, chef d’orchestre, instrumentistes, chanteurs et chanteuses, danseurs(quand il y en a ), sans compter tous ceux qui travaillent derrière le plateau, (et pas seulement pendant le spectacle), forment une équipe homogène, - ou du moins qui le paraît - où peut s’opérer au mieux la fusion qui donne tout son prix à ce genre difficile…. et coûteux ! On peut n’être pas toujours d’accord avec les options prises par certains metteurs en scène. Mais pour que le genre vive, pour qu’il puisse s’inscrire dans notre modernité, pour qu’il puisse faire sens au sein même de cette modernité, comment éviter le risque de la critique, ou même de l’échec ? Ce risque est assumé par Bernard Foccroulle avec l’engagement, le calme et la confiance nécessaires à qui sait quelles sont ses priorités et les maintient d’une main ferme.
Armelle Babin : N’as-tu finalement pas déduit de ces différentes expériences une sorte de questionnement universel envers l’aspect créatif des activités humaines et la confiance que cela inspire envers l’humanité ?
Christine Prost : Bien sûr. Je me posais au départ, sans avoir les moyens d’y répondre, une question philosophique qui n’était pas de mon ressort. S’y est progressivement substituée, plus simplement, une réflexion sur la multiplicité des domaines où peut s’exercer la créativité humaine et sur ce que j’ai appelé plus haut « une sorte de bonheur ». Pourquoi la musique ? On pourrait tout aussi bien dire : pourquoi la peinture, l’écriture, la poésie. Je ne crois pas que la condition humaine fasse à ce que j’aime et connais un peu une place d’exception. Mais dans un monde tel que le nôtre, où l’enchaînement des causes pousse davantage à la désespérance qu’à l’optimisme, l’admiration pour les quelques êtres de grande qualité qu’il m’a été donné de connaître par l’intermédiaire de la musique est une grâce. Est une grâce aussi la qualité des émotions qui m’ont été dispensées par elle. Dans le rôle de « passeur » de musique que les circonstances et mon tempérament m’ont attribué, entre la spécialisation professionnelle et la jouissance égoïste de l’amateur moyen, j’ai cherché une voie médiane. Qui permette à tout un chacun d’apprendre à mieux entendre, à pénétrer au coeur de cet organisme complexe et vivant qu’est une composition musicale. A en saisir la dramaturgie. A en dévoiler l’enjeu. Une voie qui fasse confiance à l’audition autant qu’à la lecture. Qui ne boude ni l’effort, ni l’émotion, ni le plaisir. Qui offre des clés pour ouvrir des portes, mais laisse chacun les ouvrir à sa guise.
Qui augmente l’être, et donne envie de croire, mais en quoi ?
Cette option esthétique et morale, qui est la mienne, bien au-delà d’une stratégie pédagogique, je rêve qu’elle soit capable de nourrir la vie intérieure de ceux à qui je m’adresse, et, en donnant sens aux œuvres, de donner sens également, serait-ce en une part minime, à leur propre vie.
Armelle Babin est professeure agrégée de musique au collège au collège Arc-de-Meyran d’ Aix-en-Provence et participe aux projets de découverte du Festival d’Aix (avec des classes). Elle a été chargée de mission à l’Opéra de Marseille pour le service éducatif écrit des dossiers pédagogiques sur des œuvres de la programmation de ces deux maisons d’opéras.
Valérie Brigot est professeure agrégée de musique au collège Sophie Germain de Luynes, chargée de mission à la DAAC (Délégation académique artistique et culturelle), en tant que professeur relais pour les projets en partenariat avec le Festival international d’art lyrique d’Aix-en-Provence.
Georg Hajdu est compositeur, et dirige depuis peu le département musique de la Hochschule für Musik und Theater Hamburg, où enseignait jadis György Ligeti. Initiateur du projet Européen Copeco (masters in contemporary performance and composition), il est entouré à Hambourg de jeunes compositeurs comme Johannes Kreidler ou Alexander Schubert dont la renommée est aujourd'hui internationale. La composition musicale, à Hambourg, si l'on en croit la revue de présentation du Masterstudiengang Multimediale Komposition (dont cet article est extrait), s'enseigne nécessairement dans un environnement multimedia, dans lequel les nouvelles technologies occupent une place prépondérante.
Artistic research is a very hot topic now in Germany and elsewhere. And do we all know what this term encompasses? Looking into various fields, it seemed like there may be as many definitions as there are fields; and computer musicians and pottery artists might have very differing views on what artistic research means to them.
Why this interest now? Is it correlated with the fact that resources in the freelancing world are slowly drying up and struggling artists are taking refuge under the wings of academia? Or does it have something to do with the changing nature of art where the role of the author (if we can still define one) has undergone a drastic change from the lone genius creator of the 19th century to the networked team player working in Marshall McLuhan’s 21st century global village? Is the second wind of concept art (with its strong focus on artistic research) a consequence of socio-economic changes or merely coincidental?
Talking from my own experience as a composer, I remember how surprised I was in 1993 as a doctoral student at UC Berkeley when the chair of my dissertation committee, composer Olley Wilson, referred to my work as research, although from a German perspective I was “just” composing scores. Yet, practically from the outset of my compositional work I wasn’t doing anything else but research. I was just not aware of it because in Germany, at the time, people were so strictly differentiating between hard research in the sciences and the humanities on the one hand and creative pursuits in the arts on the other, that as someone who had also been trained as a scientist at some point in his life I had adopted these discriminating views myself. Musicologists in this country up to this date tend to be divided into historians and systematicists and in most cases physically separated from artists that need to be kept free from the ballast of hard thinking. This was also reflected in Werner Heisenberg’s ill-fated decision not to support Pierre Boulez’ idea of creating a Max-Planck Institute for research in acoustics and music—an idea which successfully materialized into IRCAM the Institut de Recherche et Coordination Acoustique/Musique, still going strong in Paris.
Yet in the world of electronic and computer music these distinctions never existed. I was glad that the people I learned from were different, most notably Clarence Barlow and David Wessel. And let’s not forget the über-father of the Hamburg composition department György Ligeti, himself inspired by the work of Béla Bartók, was famous for his integration of very diverse influences such as fractal geometry, microtonality and ethnomusicology.
The people inspiring me either had a strong affinity for mathematics, linguistics and acoustics such as in the case of Ligeti and Barlow or had even pursued a career as a cognitive psychologist such as in case of David Wessel. These men motivated my own definition of artistic research as tool making in the dialectic process of creating an artifact and sharpening the tools to do so.The artifact is unique and personal but the tools are more of a general relevance. Barlow’s work (and his own expansive documentation thereof) is living proof of this approach. In the mid-1970s he travelled through Anatolia and jotted down his first ideas of what was supposed to turn into his 30-minute piano piece Cogluotobusisletmesi, today considered a hallmark of generative music. The 100+ page documentation of the artistic process, the cognitive experiments he pursued and the mathematical attempts to formalize his findings have laid the ground for tools, which are still in use today. They have been the basis of an intense discussion about ownership and intellectual property, the authenticity of digital works, the shifting relation between programmers, authors, interpreters and spectators and so on which I led with my students over the years.
Being strongly influenced by advances in computer music I started working on an opera in 1994 which my librettist Thomas Brasch dubbed Der Sprung – Beschreibung einer Oper. In 1993, he had been visiting the center for new music and audio technologies (CNMAT) directed byWessel and understood that our opera was going to be the result of a multi-layered and interactive research process which I have partially described in my paper Research and Technology in the opera Der Sprung presented at the Leopoldina Science and Music conference in 2004. In an article I wrote a year later I elaborated on the fact that the history of computer music represents a co-evolution of artistic and technological principles driven my memes, which also manifest themselves in other areas (such as architecture, physics, philosophy, informatics, genetic engineering etc.). Meme, BTW, is a term analogous to gene, introduced by Richard Dawkins, as a notion for the replication and spreading of mental concepts, which just like their DNA counterparts are subject to the Darwinian laws of mutation and selection.
It seems to me increasingly important that budding (and mature) artists are made aware of these interdependencies and being exposed to the tools enabling them to reflect and document the artistic process that lead to the creation of artifacts. It was my aim from early on when I was hired in 2002 to establish a novel doctoral program at this university dedicated to artistic research. But as with most innovations one had to first exercise patience and wait for the right opportunity. In the early 2010s we were finally able to repurpose an old doctoral program in musicology originally catering to the composition/theory/performance graduates without a Magister degree in musicology. With the help of my colleagues Beatrix Borchard, Reinhard Flender, Manfred Stahnke and the support of our president Elmar Lampson as well as Reinhard Flender’s assistant Jenny Svensson we were able to establish this new artistic research program and admit our first student, Chinese composer Yijie Wang in 2012. Incidentally, she will defend her thesis in just a week from now, so please attend if you can. Currently, they are 10 composers and interpreters working on an artistic research project and their number is growing steadily.
While our applicants are free to choose any topic they’re interested in, there are, obviously, a few core topics more closely connected to our center for microtonal music and multimedia (ZM4) which we established as an artistic research unit in 2010 than others.
We consider ourselves lucky to having received funding by the Behörde für Wissenschaft, Forschung und Gleichstellung in the framework of the Landesforschungsförderung and are currently working on two projects, UMIS (Unified Musical Instrument Surfaces) and CoNomads (Cognition and Notation of Media Arts in Digital Space). We are very interested in finding partners to further pursue these projects on the basis of a European collaborative funding scheme.
If you’re interested: this year (the article was written in 2016) we will also host the international Sound and Music Computing conference (SMC) and the call for papers and sonic works is still out. Our guest of honor will be American composer and innovator John Chowning whose life and work brilliantly symbolizes the symbiosis between art and research in electronic and computer music. For his life achievement he will receive an honorary doctoral degree from our university. Please visit the conference website at smc2016.net for further information.
Directeur des Écoles de Musique de Rouen pendant de nombreuses années, Jean-Phillipe Dambreville a dirigé pendant 3 années le Conservatoire à Rayonnement Départemental du Beauvaisis et assuré, parallèlement, la coordination du spectacle vivant à la Direction des Affaires Culturelles de la Ville de Beauvais. Il est, depuis octobre 2012, directeur du Conservatoire « Darius Milhaud » de la Ville d’Aix-en-Provence.
Jonathan Bell : Lorsque vous avez pris la direction des écoles de musique de Rouen, qu’avez-vous cherché à développer, que manquait-il, et qu’avez-vous changé ?
Jean-Philippe Dambreville : Les écoles de musique avaient été créées six mois auparavant ; j’ai pris leur direction en Aout 1992 alors qu’elles avaient été créées en Janvier de la même année. C’était une initiative de la ville de Rouen, qui souhaitait démocratiser l’enseignement artistique. Le conservatoire était sur un schéma encore à l’ancienne : examens deux fois par an, avec une sélection sur épreuves. Les élèves de Rouen étaient souvent renvoyés du conservatoire, et nous n’étions pas sur un enseignement ouvert, mais dans une sélection – je ne suis pas néanmoins contre la sélection – mais celle-ci n’était pas saine et pas bien pensée. La ville de Rouen a donc voulu créer des écoles de musique en parallèle, pour qu’il y ait une pratique musicale qui soit moins conditionnée par les examens, ni à l’entrée, ni à la sortie. Ils ont ainsi créé des structures associatives qu’ils ont financé, et m’ont demandé de m’en occuper. J’étais déjà directeur d’une école de musique, et développai justement dans la région une dynamique autour des pratiques collectives, des projets partagés, de la diffusion, de la capacité à être au cœur de la cité, que ce soit dans les manifestations, le travail avec les groupes scolaires, l’apport d’une vie musicale qui soit la plus intense possible.
Après avoir commencé sur un site, la ville de Rouen a souhaité continuer sur trois autres sites, en créant donc des écoles de proximité. C’était une seule structure sur quatre lieux. J’étais en charge de ces derniers pendant seize ans. Le conservatoire a par la suite évolué puisque son directeur historique est parti ; on a développé une complémentarité entre les écoles et le conservatoire en partageant un certain nombre de pratiques collectives. Cette passerelle à permis d’équilibrer entre le conservatoire qui s’est ouvert à une autre forme de pratique et de type de sélection et les écoles de musique qui ont travaillé que leurs exigences artistiques restent au cœur de leurs exigences de formation, avec néanmoins le soin de s’attacher à la diversité et d’être impliqué dans ce qui se passait dans la ville. On a pu organiser de très belles manifestations : je me souviens d’un spectacle à Rouen en 2003 où nous étions 1300 sur scène. On avait monté un grand dispositif sur les réseaux d’éducation prioritaires où nous nous occupions de 1500 enfants. Il y avait deux cours d’éducation musicale et chorale chaque semaine, du Cours Préparatoire au CM2. Au-delà du cours d’instrument que l’on donnait hors temps scolaire, ces cours étaient prévus dans le temps scolaire. Ces projets permettaient ainsi de mélanger des publics très différents, orchestre, danse, chœur… des grandes aventures !
Par la suite, j’ai pris la charge du Conservatoire à Rayonnement Départemental de Grand-Couronne et Petit-Couronne, puis le conservatoire de Beauvais où j’y avais une double casquette car j’étais également à la direction des affaires culturelles de la ville pour l’ensemble du spectacle vivant. Cela a renforcé ce travail de complémentarité et d’harmonisation que je souhaitais mener entre le conservatoire et la politique de spectacle vivant de la ville. Une mission difficile mais passionnante puisque l’on pouvait faire des liens avec des manifestations aussi diverses que le festival de cinéma, les arts plastiques, la poésie. Cela nous permettait de travailler sur un programme de diffusion culturelle du conservatoire sur l’ensemble des communes de l’agglomération. Pendant trois ans s’est joué un grand travail de territoire, avec toujours cette politique d’être au cœur de la cité. Être dans la plus grande exigence artistique possible, mais au service de la cité et non à celui de nous-mêmes ou repliés sur nous-mêmes. Si un conservatoire ou une école de musique est replié(e), il ou elle disparaîtra. Il faut travailler avec les institutions et les autres grands acteurs artistiques, travailler à être dans la proximité par tous types de manifestations, mettre en lien l’ensemble des enfants que l’on forme avec un public, avec le territoire.
Lorsque je suis arrivé à Aix-en-Provence, j’ai voulu réinjecter ce que j’avais déjà entrepris à Beauvais. J’avais commencé ma direction dans l’ancien conservatoire qui avait déjà ce projet de délocalisation. Il fallait donc pouvoir l’équiper, organiser le projet de festival dans la rue… J’ai donc retrouvé les dimensions sur lesquelles j’avais déjà travaillé. Nous sommes actuellement conventionnés avec une vingtaine d’associations, et nous travaillerons aussi bien avec le CEFEDEM qu’avec les écoles primaires ou le festival d’art lyrique, le festival de Pâques, mais aussi les chorales, l’orchestre de la méditerranée, l’orchestre français des jeunes… nous sommes une plateforme accueillante et ouverte 320 jours par an.
Quel est votre regard sur les pratiques collectives ? Que peuvent-elles apporter chez un jeune musicien (pratique de l’orchestre, musique de chambre, chorale) ?
Dans le schéma pédagogique dans le texte du ministère de référence, les pratiques collectives ont été mises au cœur du projet d’établissement. En ce qui me concerne, j’avais déjà développé cette dimension avant que cela devienne officiel. On trouve néanmoins une très grande concurrence dans l’ensemble des activités de l’enfant, que ce soit le sport ou le numérique. La pratique collective est également une philosophie, puisque très tôt on fait comprendre à l’enfant qu’il ne fait pas de la musique tout seul, mais en relation, en écoute et en compréhension avec l’autre. Il apprend à construire son jeu en intégrant le jeu des autres. C’est quand même une révolution assez fondamentale dans le système français. Avec le développement de l’orchestre à l’école, la pratique commence par le collectif avant d’aller à l’individuel, ce qui constitue un renversement complet du paradigme du conservatoire à la française, car on apprend à jouer en faisant du collectif. Ce n’est pas cependant l’une ou l’autre des entrées qui est mauvaise ou bonne, c’est davantage la dialectique et le dialogue de l’individuel et du collectif qui, mis en place très tôt, permet de nourrir les deux pratiques réciproquement.
Il y a une vingtaine d’année, le solfège pouvait apparaître comme un obstacle dans la formation instrumentale de l’enfant. Les choses ont-elles changé avec la formation musicale d’aujourd’hui ?
Oui. L’enseignement de la formation musicale a évolué. Elle n’est plus seulement l’apprentissage de signes, mais celui d’un langage vivant, qui rend vivant le signe et qui rend ce langage disponible pour l’expression musicale. Mais cela demande la maîtrise d’un grand nombre de paramètres, ce qui rend cet objectif difficile à ménager. J’ai une grande admiration pour les professeurs de formation musicale. S’ils enseignent à l’ancienne, ils n’obtiennent que très peu de résultats et ne suscitent pas l’engouement des enfants car ils se déconnectent du monde actuel, mais, dans le même temps, la seule initiation et le jeu n’arrivent pas à installer dans leur pratique une véritable exigence de maîtrise de la langue musicale à l’écrit comme à l’oral. C’est donc un enjeu pédagogique que de pouvoir rendre le signe musical.
Pouvez-vous parler de votre pratique en tant que chef d’orchestre ?
J’ai la chance de pouvoir diriger l’orchestre du conservatoire, mais de pouvoir travailler sur des projets extérieurs, que ce soit avec l’orchestre de chambre de Marseille, et bientôt avec l’orchestre de Toulon. C’est pour moi important de rester musicien, car l’attente des musiciens d’orchestre m’oblige à être toujours le plus exigeant possible. C’est en même temps très draconien car la direction du conservatoire est chronophage et implique une discipline personnelle très rude pour ménager un temps de travail individuel pour pouvoir être opérationnel.
Qu’aimez-vous transmettre aux élèves en répétition ?
La compréhension de la pièce. Ce qu’a voulu dire le compositeur. Ce que je pense que le compositeur a voulu dire, bien qu’on puisse penser des choses très différentes. Pour moi, le compositeur dit quelque chose, de lui-même, de son époque, de son sujet qui est traduit par la musique, qui est une sémantique, une sémiotique. Quand je dirige une œuvre, j’essaie de pouvoir faire comprendre pourquoi elle est en telle tonalité et non une autre, le rapport des éléments entre eux, la forme de la pièce, l’analyse des différents événements. Il ne s’agit pas de jouer la musique pour la cervelle, mais leur donner les outils pour comprendre ce qu’ils sont en train de faire dans la texture même du langage.
Le festival marseillais 'les musiques' s'ouvrait cette année avec la création du monodrame 'Papillon Noir' de Yann Robin, au Théâtre de la Criée. L'oeuvre explore un univers résolument sombre: une femme, seule, rentre chez elle après avoir subi un accident de voiture. Entre la vie et la mort, sa mémoire et ses émotions se troublent et des bribes de pensées inconscientes, désordonnées, émergent en un flot continu, récité par la voix de la soprano Élise Chauvin. Le texte de Yannick Haenel étire à l'infini les pensées qu'on suppose n'avoir duré qu'un instant, après l'accident fatal... La musique de Yann Robin, par sa virtuosité instrumentale, épouse à merveille le propos littéraire: le langage du compositeur "saturationiste" sculpte un matériau grave, rugueux, quasi suffocant, sans presque aucune éclaircie. Il parvient néanmoins, dans cette obscurité, à convier une grande variété de timbres, d'images et de dynamiques. L'esthétique bruitiste s’entend particulièrement dans l'ensemble instrumental "Multilatérale", fondé par le compositeur, ainsi que dans les voix de l'ensemble "Métaboles". L'amplification, ici réalisée par l'équipe du GMEM, permet de détailler les moindres inflexions de chaque interprète, et de projeter ainsi vers l'auditoire une infinité de sons qu'on ne pourrait autrement entendre qu'en penchant l'oreille sur l'instrument.
Dans cette oeuvre incontestablement réussie, l'omniprésence de la mort, de la folie, les visions de cauchemar et tourments observées et ressenties par cette femme ne sont pas sans rappeler les figures d'Elektra de Strauss ou encore d'Erwartung de Schoënberg.
C’est non loin de La Roque d’Anthéron, au sein de l’abbaye de Silvacane – haut lieu de la musique ancienne si l’on pense à Alfred Deller ou l’ensemble Organum – que s’est pourtant créée ce Dimanche 20 Mai 2018 une musique toute contemporaine. L’ensemble Musicatreize et son chef Roland Hayrabedian ont en effet donné à entendre la première mondiale d’une œuvre de Zad Moultaka : Khenkhenou (Sortir au jour). Ainsi décrite en présence du compositeur franco-libanais, cette « fresque musicale à multiple visages », l’œuvre propose une véritable immersion dans les rites des anciens égyptiens alors même que la musique, oscillant toujours entre sonorités traditionnelles et écriture occidentale, s’est emparée des lieux cisterciens.
En effet, l’écriture s’organise autour d’une spatialisation du son, assurée par les multiples chœurs sollicités pour l’occasion. On a pu en effet entendre le Chœur du secteur Musique et Musicologie d’Aix-Marseille Université, sous la direction de Philippe Franceschi, l’Ensemble vocal d’Arles dirigé par Parscal Stuztmann – Prouvost, les chœurs des Docks de Marseille et du conservatoire Darius Milhaud d’Aix-en-Provence respectivement menés par Catherine Lambert et Maxime Kaprielian. Ces chanteurs confirmés ont été également rejoints par des chanteurs novices, avec la classe de l’École Victor Hugo de la Roque d’Anthéron et leur professeur Elsa Lautier, ainsi qu’une chorale spécialement créée pour l’occasion par Catherine Delolme, le chœur « Sortir au jour », formé par des enfants et des adolescents des quartiers défavorisés de Marseille. Un beau moyen de rendre accessible une musique qui peine à l’être au grand public.
Alors que l’ensemble musicatreize composaient entre sons et bruits au-devant de la scène en construisant des harmonies très rythmiques, le public a pu vivre une écoute acousmatique très singulière, puisque chaque chœur était positionné soit autour, soit à l’extérieur de la salle. Cette expérience hétérophonique a pourtant réussi, sous l’écriture du compositeur, à se fondre en une seule et même voix, un seul et même chant qui conduisait toute la partition par un souffle commun et partagé.
Tom MÉBARKI
Les “JIM”, les journées d’informatique musicale, bien qu’exclusivement francophones, restent très compétitives au niveau international. Les JIM se déroulent chaque année dans une ville différente, depuis vingt-quatre ans. On y présente les avancées de la “french tech” en matière de musique et discute des questions aux enjeux tout aussi intéressants que dans les grandes conférences de “computer music”, telles ICMC (international Computer Music Conference), SMC (Sound and Music Conference), NIME (New Interfaces for Musical Expression) ou bien d’autres… Cette année les JIM se déroulaient à Amiens, hébergées au Logis du Roy, pilotées par le l'Association Francophone d'Informatique Musicale, organisées par par l’équipe Algomus des laboratoires MIS (Amiens) et CRIStAL (Lille), et modérées par Louis Bigo, Mathieu Giraud, Richard Groult et Florence Levé. Le programme est disponible à l’adresse suivante: http://algomus.fr/jim2018/programme.html
François Pachet était présent aux JIM depuis ses débuts en 1994. Chercheur en intelligence artificielle (IA), et aujourd’hui directeur du Spotify Creator Technology Research Lab (Spotify est une compagnie Suédoise), il présentait comment l’intelligence artificielle peut-être aujourd’hui utilisée pour composer de la musique “qui plaise”, à des fins esthétiques, mais aussi mercantiles bien évidemment: Spotify est aujourd’hui tout à fait en mesure d’étudier la façon dont les jeunes sélectionnent leurs musique, quel élément musicaux font qu’ils “skip” ou passent à la musique suivante etc… Mais l’IA peut également servir d’aide à la composition, et l’artiste Stromae s’en est déjà emparé: il écoute les propositions de la machine composante, puis sélectionne ce qui l’intéresse. La machine semble-t-il a encore un peu de learning à faire avant d’avoir l’inventivité d’un DJ, mais peut-être plus pour longtemps!
Cette année les JIM ont décidé de mettre un accent sur les liens possibles entre nouvelles technologies et pédagogie. Madame Anne-Isabelle Ramanantsitohaina inspecteur d’académie, est donc venue rappeler l’importance du dialogue entre chercheurs et pédagogues dans le domaine de l’éducation musicale, et a aussi regretté que cette rencontre soit parfois difficile. Les décisions ministérielles du “plan chorale” ont également été rappelées: une chorale dans chaque collège et chaque lycée à l’horizon 2018/2019. Plusieurs professeurs en collège (François Degroote, Vincent Louette, ), lycée (Nicolas Dhondt) et université (Romain Bricout) sont venus présenter des retours d’expérience d’utilisation de logiciels en salle de classe. La manipulation d’audacity en collège - comme l’ont montré François Degroote et Vincent Louette - facilite l’épreuve du commentaire d’écoute: la compréhension de la forme musicale rendue moins abstraite par la manipulation et visualisation de la forme d’onde. Moreno Andreata a présenté l’enseignement de l’analyse musicale computationnelle à des scientifiques au Master ATIAM. Hugo Scurto présentait encore une forme de collaboration homme/Intelligence Artificielle dans laquelle un algorithme est capable de s’approprier les réflexes musiciens afin de mieux les guider. Alexander Mihalič a présenté "RéDi-Musix : réseau pour la distribution de la musique mixte", un réseau entre 8 conservatoires en France et Portugal ayant pour vocation de distribuer le matériel nécessaire (configurations, fichiers sons, etc...) à l'interprêtation de la musique mixte (instruments + électronique) - afin de jouer, créer et échanger cette musique dans les conservatoires (http://www.redi-musix.com/).
Le logiciel KIWI, enfin, présenté par Philippe Galleron, Eric Maestri, Jean Millot, Alain Bonardi et Eliott Paris, est un environnement de “patching collaboratif”. Le patching, dans Max MSP par exemple, consiste à relier des boîtes par des fils sur une interface graphique, afin de créer des sons. Dans KIWI, ce patching est collaboratif: les étudiants participent en même temps à l’édition d’un même patch depuis plusieurs machines (comme dans un googledoc). Ce logiciel, posant notamment la question du travail collaboratif en université, a remporté le prix AFIM 2018.
Voilà une bien réjouissante « fantaisie pédagogique » ! Sur une idée et commande de Pierre Dausse – Conseiller Musique à L’inspection Académique du Lot et Garonne – ce spectacle a été écrit pour chœurs à 2 voix, piano/clavecin, quatuor à cordes et flûte, dans le but de faire connaître l’œuvre de JS Bach aux grands élèves des écoles primaires. Myrtille et Sébastien, deux enfants qui s’amusent à la magie, nous entraînent dans une courte histoire à la découverte de la musique de JS Bach sur laquelle a été écrite des paroles de manière à mémoriser plus facilement les extraits utilisés. De la toccata en ré mineur au duo de la Cantate Burlesque, l’auteur nous fait parcourir des thèmes connus ou moins connus du Cantor dans des versions tout à fait respectueuses de l’original. L’ensemble est coupé de parties parlées et peut être donné avec mise en scène ou en oratorio. Conçu pour des scolaires, il est également parfaitement adapté aux chorales des conservatoires et pourra permettre de familiariser les élèves à des œuvres auxquelles ils n’ont pas forcément spontanément accès. Comme le remarque l’auteur, l’exécution de cette œuvre pourra « s’intégrer dans un projet plus global autours de J.S. Bach : Autres extraits d’œuvres, lien avec la danse baroque, Bach avec le jazz (Jacques Loussier, Swingle singers, Édouard Ferlet), Cross Over type Lambarena, etc... ». Ajoutons qu’on peut utiliser la version piano-chant si on ne dispose pas de l’ensemble instrumental nécessaire.
Daniel Blackstone
Nous écrivions à propos du deuxième volume dans la lettre 52 d’octobre 2011 : « Ce deuxième volume est un outil de travail tout à fait remarquable. Il comprend les cours, les applications en autonomie et, dans un livret joint, les partitions des œuvres étudiées, pouvant servir de corrigé. Il y a bien sûr un mode d’emploi, sans oublier le CD, enregistré tout spécialement pour cet ouvrage ; celui-ci constitue une formation de l’oreille tout à fait remarquable (relevé de thème, de rythme, de basse et harmonie, dictées à parties manquantes) ainsi qu’une éducation à l’analyse musicale par l’écoute, la seule qui soit vraiment profitable. » Ce troisième volume reprend la même méthodologie et est en tous points aussi remarquable. Le travail est fouillé, le CD s’écoute simplement pour le plaisir… mais donnera lieu à des travaux d’écoute, d’analyse, de ce que les jazzmen appellent des « relevés » et que les musiciens « classiques » appellent des dictées musicales… Bref, au risque de nous répéter, un ensemble d’une très grande richesse.
Daniel Blackstone
On ne présente plus la Petite Renarde rusée. Mais on sera heureux de trouver cette remarquable adaptation faite en 2014 par Didier Puntos pour une formation « de chambre ». L’ensemble instrumental est en effet composé de flûte (petite flûte, flûte en sol), clarinette (clarinette basse), violon, violoncelle, percussions et piano. On appréciera le fait que le conducteur est en ut. Didier Puntos explique lui-même son propos : « L’écriture musicale et orchestrale foisonnante de la Petite renarde rusée ouvre d’infinies possibilités d’adaptation. Celle-ci cherche à en restituer la lumineuse complexité en s’appuyant sur une formation chambriste : piano, violon, violoncelle, flûte, clarinette et percussion. Une manière de faire entendre cette « histoire gaie avec une fin triste » selon les mots du compositeur, au plus près des mots et notes de Janáček. »
L’édition qui nous est proposée comporte le conducteur en trois volumes, un par acte, et le matériel complet.
Daniel Blackstone
Voici donc une nouvelle édition critique de ces œuvres de Dvořák par Veronika Vejvodová. La préface trilingue (tchèque – allemand – anglais) permet de comprendre la genèse et l’histoire de ces pièces, et surtout des textes. En effet, le cycle des Gypsy Songs op. 55 sur les poèmes du poète tchèque Adolf Heyduk, a été écrit au début de 1880 à la demande du ténor bohémien Gustav Walter, membre de l'Opéra de la cour de Vienne et dédicataire de l'œuvre. Les poèmes tchèques ont été traduits en allemand par le poète lui-même, ce qui a permis de respecter pleinement l’esprit de l’œuvre. Une version anglaise a été réalisée peu de temps après. Les trois textes se trouvent dans la présente édition qui comporte par ailleurs de copieuses indications critiques en fin de volume.
Daniel Blackstone
Tilman Michael a compilé et édité ces neuf chœurs pour chœur mixte extraits d’opéras célèbres dans un recueil qui comporte les chœurs et la réduction d’orchestre au piano. Le choix est large puisqu’il va de Monteverdi à Tchaïkovsky. Les textes sont donnés dans la langue d’origine, ce qui nous vaut, pour le dernier extrait, un bien utile supplément sur la prononciation du texte russe. La préface remet en situation dans leurs opéras respectifs, les différents chœurs proposés. Ajoutons enfin que les chœurs ont été également choisis en fonction de leur intérêt musical. Nous savons que tous les chœurs d’opéra ne se valent pas… mais ne soyons pas cruel !
Daniel Blackstone
On pourra, avant d’aborder cette œuvre, écouter la mélodie grégorienne par les moines de Silos https://www.youtube.com/watch?v=RaroIcQ-cnM , d’autant plus que l’auteur propose de jouer les variations en alternance avec un chœur d’enfants qui chanterait les différents versets. Ces 8 variations forment un ensemble tout à fait séduisant, respectant pleinement l’ambiance du chant en même temps que l’ambiance chatoyante de Noël. Tour à tour méditatives ou flamboyantes, elles demandent, pour être pleinement mises en valeur un instrument de préférence à trois claviers et surtout riche en anches et en mixtures notamment pour la Toccata finale. Courte, chacune de ces variations est extrêmement typée et riche. Ce n’est pas étonnant de la part d’une organiste renommée, titulaire depuis 1989 du grand orgue de Saint-Nicolas-du-Chardonnet. Voilà de la musique qui fait du bien à la fois à l’intelligence et au cœur. Ajoutons qu’on peut écouter sur You Tube une délicieuse version intégrale par l’auteur et les « Petits Chardons » de Saint Nicolas du Chardonnet https://www.youtube.com/watch?v=mWYKK9kyoaI
Daniel Blackstone
Les Trois Danses Macabres ont été commandées par la Ville de Charleville-Mézières pour la commémoration du cinquième centenaire de la Basilique de Mézières. Pouvant s’interpréter en cycle ou séparément, elles se répondent par de multiples renvois et l’utilisation d’un matériau musical souvent proche. Elles font évidemment référence aux « danses macabres » des peintres du Moyen-Âge, mais surtout elles s’inspirent de la fameuse Légende des trois Morts et des trois Vifs, récit très populaire au XIII° et au XIV° siècle. Ecrites et créées en 1999, ces pièces ont été révisées en 2017. Cette version intègre la possibilité de conter par la voix d’un récitant la légende, qui figure dans la partition. Bien sûr, il ne faudra pas chercher dans les danses une quelconque illustration du texte, qui a d’ailleurs été introduit après coup ; mais il s’agit plutôt d’une évocation, d’une ambiance. L’auteur présente lui-même ainsi ses pièces : « Loin d’être « dansantes », c’est-à-dire cadencées, les trois pièces développent une gestique en rapport avec la danse archaïque, où l’aspect obsessionnel et tribal prédomine. En cela, le cycle vise plutôt la transe que le divertissement et c’est avant tout ici le plaisir physique de l’interprète qui est exalté. Dans cette perspective, tout en respectant l’esprit du texte musical, il convient d’envisager cette fresque avec une large liberté dans l’interprétation que ce soit en matière de vitesse d’exécution, d’articulation et de phrasés, qu’en ce qui concerne le choix des registrations ». Il n’empêche que cette œuvre requiert un instrument important et riche en couleurs et en timbres. Pascale Rouet en a réalisé un enregistrement sur l’orgue Koenig de la basilique de Mézières (Musiques en miroirs, Triton 331211, 2017).
Daniel Blackstone
Deux organistes, mais un seul orgue… Denbora qui signifie “temps” en basque est une fantaisie rythmique pour deux organistes qui joue avec la division du temps et s’inspire de la musique du Pays Basque, région natale de la compositrice, en particulier du jeu de la txalaparta, instrument de percussion traditionnel. Vers le centre de la pièce apparaît un passage plus nostalgique citant une mélodie basque à la Vierge. L’ensemble est très rythmé, très varié et bien agréable et intéressant à entendre. La partition de comporte aucune indication de registration mais comme la pièce a été enregistrée et est disponible sur You Tube https://www.youtube.com/watch?v=Djtw8BVz7kE , il ne sera pas difficile d’adapter à son propre instrument la registration de Marie-Bernadette Dufourcet et Naji Hakim qui interprètent l’œuvre sur l’orgue de la Cathédrale du Bon Pasteur, à la Quinzaine Musicale de Saint Sébastien. Mais il faudra que l’orgue et les interprètes aient du tempérament... Notons que les éditeurs ont prévu deux exemplaires de la partition pour un travail séparé de l’œuvre par les deux instrumentistes !
Daniel Blackstone
Plusieurs choix de registration sont proposés pour l’exécution de cette pièce pour orgue composée sur le thème du Salve Regina. Le chant est joué au pédalier, noyé dans un halo de motifs restreints de doubles ou de triples croches continus et répétitifs, aux deux mains, agrémentés de trilles. Cette pièce a été créée à Paris, le 28 novembre 2009.
Sophie Jouve – Ganvert
En qualité de compositeur, Émile Boussagol (1854-1917) embrassa divers genres. Cette petite pièce est vraisemblablement destinée aux classes des conservatoires. « Corinne rêveuse » est, comme son nom l’indique, une pièce s’inspirant du féminin jeune mélodieux, cherchant à s’évader dans des rêveries solitaires. D’écriture classique cette pièce courte, principalement en Do majeur, est d’humeur « douce et harmonieuse ». Elle est constituée d’arpèges simples mais denses, en raison de leur masse sonore et de leur timbre soigné.
Lionel Fraschini
L’auteur n’est pas un inconnu : ce remarquable pédagogue né en 1955 est l’auteur de nombreuses méthodes de piano pour tous publics ainsi que d’œuvres pédagogiques et notamment de remarquables adaptations et transcriptions. Ces vingt pièces mystérieuses ont la qualité habituelle des compositions de l’auteur. Leur facilité technique n’ôte rien à leur charme musical. Elles nous promènent dans tous les recoins de la forêt de Brocéliande mais aussi de Stonehenge ou du Machu Picchu. Il s’agit, nous dit l’auteur, d’un « outil parfaitement adapté pour amener les débutants de tous âges à jouer des compositions modernes qui se prêtent également très bien aux premières auditions. » L’auteur appelle son recueil « un grand cinéma musical imaginaire ». On ne saurait mieux dire. Ajoutons que le CD joint, qui reprend toutes les pièces, a été enregistré avec beaucoup de goût et de sens musical par Samantha Ward, jeune pianiste anglaise de grand avenir.
Daniel Blackstone
Ces seize belles mélodies sont toutes connues et bien belles : de Heal The World à We shall overcome à What a wonderfull World en passant par Over the Rainbow, Amazing grace, Blow’in The Wind et toutes les autres, la nostalgie est au rendez-vous ! Les arrangements sont faits avec beaucoup de goût et de respect des originaux. Le CD, très joliment enregistré, comporte, en plus de la partie de piano, qui se suffit, de jolis agréments orchestraux qu’on pourra facilement introduire puisque la partition est entièrement chiffrée. Que l’on se contente de la partie de piano ou qu’on l’agrémente dans l’esprit du CD, on trouvera beaucoup de plaisir à interpréter ces mélodies porteuses de tant de souvenirs et de tant d’espoirs…
Daniel Blackstone
Le titre complet de ce recueil est : 32 pièces faciles pour piano avec conseils pour l’exécution. Pièces choisies et commentées par Nils Franck. Le but de ce recueil est de fournir une transition entre les méthodes de piano traditionnelles et l’étude du répertoire. Ces trente-deux pièces assez courtes peuvent jouer parfaitement ce rôle. Si on y retrouve en n° 2 l’inusable – mais bien agréable – sonatine de Clémenti, les autres pièces sont en général peu connues et peu jouées. De Czerny et Cramer, ce ne sont pas, sauf exception, les études que l’on trouve ici mais des pièces moins connues et tout à fait intéressante. Le commentaire – en français – qui se trouve à la fin du volume comporte à la fois l’explication des buts de la collection Urtext Primo et de ses choix, une brève biographie (pas si brève que ça…) des compositeurs du volume, leur contribution à l’enseignement du piano, et de précieux conseils d’interprétation et d’exercices : toucher et articulation, qualité sonore, ornements, utilisation de la pédale ainsi que des conseils particuliers pour l’étude. Tout cela sera fort utile tant pour les élèves que pour les professeurs. Il s’agit donc d’une collection tout à fait intéressante et à conseiller vivement à tous.
Daniel Blackstone
Cette édition Urtext est basée sur la première édition de Leipzig, en deux volumes, datée de1883, le manuscrit n’ayant pas été retrouvé. L’auteur (1819-1905) fut élève (tout comme Felix et Fanny Mendelssohn) de Ludwig Berger, l’un des plus remarquables professeurs de piano de Berlin dans les années 1815, puis de R. Killitschgy à qui il succèdera à l’Académie Royale de musique sacrée.
Les quarante études pour débutants, écrites en grosses notes sur deux pages, proposent chacune un exercice technique précis, présenté par paire (une étude pour la main droite, l’autre pour la main gauche) : exercices avec les doigtés utiles pour deux doigts, pour trois, pour quatre puis cinq doigts, exercices en triolets, en notes répétées, en deux en deux, pour le travail du passage du pouce, de la vélocité, pour le travail d’accords et d’arpèges, pour la découverte du chromatisme et de la gamme. Ces études à l’ambitus restreint n’utilisent que les tonalités de Do, de Sol et de Fa majeur et de la, mi et do mineur. L’auteur n’indique aucun tempo ni nuance. On note seulement quelques accents.
Il est dommage que cette édition ne reproduise pas les conseils donnés par l’auteur dans les préfaces de ses deux volumes, auxquels Ruth Taneda renvoie, mais que l’on ne peut pas consulter.
Sophie Jouve-Ganvert
Né en 1947 à la Baule, Loïc Mallié a une importante activité de compositeur (œuvres pour piano, orgue, musique de chambre, chœurs et orchestre). Altissimo a été écrite en l’honneur du grand altiste Karsten Dobers. C’est une pièce virtuose dans un style improvisé « lent, sans mesure », utilisant l’écriture contemporaine pour mettre en valeur des sentiments spontanés comme « emporté, ému et sensible, haletant » etc... Elle mêle couleurs de timbres, chromatismes, rapidité des doigts, accords et jeux de rythmes. Seul un altiste confirmé pourra exécuter une pièce de ce genre pour en extraire toute la subtilité expressive.
Lionel Fraschini
Ces recueils sont conçus comme un accompagnement de la méthode Sassmannshaus d’alto, mais ont bien sûr leur intérêt en dehors de cet usage. Il s’agit d’arrangements soigneusement réalisés. Les parties d’accompagnement de piano sont très faciles et peuvent être confiées sans difficulté à des élèves. La partie d’alto comporte les indications de coup d’archet indispensables. La version pour deux altos est réalisée avec le même soin. L’ensemble pourra donc rendre de grands services aux professeurs et ces mélodies sans prétentions et, pour certaines, connues, seront très agréables à jouer.
Daniel Blackstone
On ne présente pas Jean-Baptiste Bréval, auteur incontournable, mais à juste titre, pour les jeunes violoncellistes. La partition mentionne « Transkribiert für Cello und Piano von Christoph Sassmannshaus. On reste un peu perplexe devant cette mention, car il semble bien que cette sonate soit d’origine pour violoncelle et piano. Il s’agit donc d’un travail d’édition et pas vraiment de transcription, même si on note de notables différences dans la partie de piano avec d’autres éditions. Peu importe : cette édition est tout à fait recommandable par sa clarté et sa précision, et il est important qu’une telle œuvre soit désormais à la portée de tous les violoncellistes. Rappelons qu’elle comporte deux mouvements : un allegro de forme classique et un Rondo grazioso à 6/8 très chantant et permettant au violoncelliste de faire preuve à la fois de sa musicalité et de sa technique.
Daniel Blackstone
Cette sonate, éditée par Denis Herlin, est une vraie découverte. Retrouvée en 1996 par Yves Gérard, elle provient de la rencontre entre le compositeur et le violoncelliste Pierre Destombes (1874-1917). L’histoire de cette sonate est racontée en détail dans la très intéressante préface qui figure – en français – dans la partition. Nous ne possédons malheureusement de cette œuvre que le premier mouvement et une partie du second. Elle a pourtant été écrite et jouée en entier en 1919, après la mort de Pierre Destombes, mais le seul manuscrit existant est malheureusement incomplet. Telle quelle, cette œuvre tardive (commencée en 1913) mérite d’être redécouverte. Si elle figure déjà dans le volume III/6 BA 10318 des Œuvres instrumentales complètes de Camille Saint-Saëns, elle n’avait jamais été éditée pour elle-même.
Daniel Blackstone
Ce petit recueil est destiné aux élèves du premier cycle des conservatoires et écoles de musique. Un certain nombre de motifs, d’harmonies et de rythmes contribuent à l’unité de ce recueil conçu comme un cycle. Les six courtes pièces, dont chacune porte en titre un prénom russe, abordent les différents modes de jeu de la contrebasse : col legno, glissando, les harmoniques naturels, le pizzicato, le pizzicato Bartok, le pizzicato de la main gauche, la quatrième position. Un petit lexique explique brièvement ces différentes techniques. Notons que l’accompagnement pianistique, essentiellement écrit dans le registre grave, comporte beaucoup d’octaves et d’accords fournis.
Sophie Jouve-Ganvert
Le titre de la pièce en dit bien le caractère. Avec parfois des accents fauréens, nous sommes embarqués dans une sorte de sicilienne lyrique et tendre coupée, vers la fin, d’accents plus impératifs pour terminer par un pianissimo minimaliste et transparent. L’ensemble est extrêmement agréable et écrit avec autant de science que de goût. L’opale est bien rendue par la délicatesse et la transparence de l’écriture. Les deux interprètes devraient trouver beaucoup de plaisir à jouer cette œuvre qui n’est mineure que par la taille et y rencontrer beaucoup de succès.
Daniel Blackstone
L’écriture de cette œuvre ne peut laisser indifférent : l’auteur utilise systématiquement la gamme par ton ainsi qu’une plurimodalité qui donnent à l’ensemble une couleur très originale. Ajoutons qu’il ne s’agit pas d’un exercice de style mais que les moyens mis en œuvre le sont toujours au service de la musique et de l’expressivité. Ce sentier à grandes enjambées est plein de charme et de dépaysement. Il supposera que le professeur le fasse découvrir et goûter à l’élève, mais c’est tout à fait possible en préparatoire. Le piano, bien loin d’être un simple accompagnateur, est un partenaire à part entière et dialogue souvent de façon contrapunctique avec le hautbois. Il s’agit donc d’une œuvre aussi originale qu’intéressante à tous points de vue.
Daniel Blackstone
Le goût affirmé du compositeur pour les petites formations de chambre est toujours actuel. Cette pièce pour deux bassons d’environ huit minutes trente affectionne le mélange de différentes techniques contemporaines avec des éléments plus traditionnels, « de façon à forger un langage personnel où se côtoient librement atonalité, modalité, chromatisme, modes de jeux et textures sonores ».
Son point central reste le travail sur le son de l’instrument au travers d’une écriture rigoureuse mais libre dans la pensée, d’où le titre Carpe Diem.
En effet l’univers sonore est très recherché. On y trouve une forme en arche où l’on commence et on termine pianississimo. Au centre sont présentes beaucoup de cassures sonores, avec par exemple un endroit où l’on passe de fortissimo flaterzung à pianissimo, comme si cette pièce racontait l’histoire d’une vie ou d’une journée où l’on se réveille dans ce monde dans lequel on s’agite en crescendo jusqu’à l’âge central, puis decrescendo jusqu’au moment où l’on s’endort.
Lionel Fraschini
Compositeur et musicologue français, Max Méreaux est connu pour ses nombreuses œuvres de musique de chambre, morceaux pour orchestre et pièces à caractère pédagogique. Il est également l'auteur d'ouvrages sur la musicothérapie.
Dans cette courte composition de 2’20’’ à caractère pédagogique, apparaît le souci de favoriser l’apprentissage en proposant un contenu essentiellement mélodique. Il était une fois est, comme son titre l’évoque, une pièce racontant une histoire susceptible de procurer un certain plaisir aux jeunes exécutants. On s’imagine facilement un conte pour enfant d’allure modérée, utilisant des modes de jeux simples.
Marie Fraschini
Bien qu’approximativement en sol mineur en raison de ses trois bémols, cette pièce recèle bien des surprises par ses modulations, ses emprunts de toute sorte, ses variations de couleurs et de tempo. Bref, nous sommes bien dans l’univers des magiciens pour la plus grande surprise et le plus grand bonheur des spectateurs ou ici des auditeurs et interprètes. Le tout se développe dans une atmosphère fluctuante et un peu inquiétante qui donne le frisson… Mais c’est parfois bien agréable d’avoir un peu peur ! Ici, le piano est plutôt accompagnateur, mais bien autonome et contribue par ses contrastes (accords plaqués, arabesques) à l’ambiance générale. Bref, on ne s’ennuiera pas dans ce pays merveilleux et inquiétant.
Daniel Blackstone
Cette petite pièce de trois minutes aux harmonies de septièmes est destinée aux élèves de fin de premier cycle, début de deuxième, des conservatoires et écoles de musique. Une cadence ad libitum fera travailler la justesse dans le chromatisme, la fin, le détaché sur un air de cavalerie arpégé.
Sophie Jouve-Ganvert
Nostalgique, cette pièce l’est bien dans les deux parties qui encadrent la partie centrale qui s’apparenteraient plutôt, elle, à bruit et fureur. Nous avons donc une pièce contrastée, ce qui n’en empêche pas l’unité par les harmonies délicates qui se trouvent d’un bout à l’autre. Le do mineur domine dans la première et la dernière partie même si l’on semble terminer en mi bémol majeur. Curieusement, c’est un si bémol mineur qui s’installe dans l’allegro médian mais les modulations fréquentes contribuent à l’aspect nostalgique et parfois un peu sauvage de l’ensemble. Bref, tout cela est plein d’intérêt et surtout de musique.
Daniel Blackstone
Tambour-percussionniste à la Musique de la Police Nationale depuis 1997, David Lefebvre est également compositeur de pièces pour tambour/percussions/batterie et fifre. Cette petite pièce d’1’50’’ de niveau 2ème cycle utilise des modes de jeux simples comme le charleston à la main, ouvert et semi ouvert, le cymbale ride et le cymbale crash pour une Caisse claire, un Tom alto, un Tom médium, un Tom Basse et une Grosse caisse. De style enjoué, ce morceau facilement écoutable sur youtube https://www.youtube.com/watch?v=Z9jHnW_Clxc , nous laisse aisément visualiser une aventure de jeux vidéos.
Marie Fraschini
Né en Pologne, Wieslaw Janeczek a été percussionniste solo au Théâtre dramatique populaire de l’Opéra de Cracovie, au sein de l’Orchestre Philharmonique de Cracovie et a enseigné au Conservatoire de musique de la même ville. En 1981, il quitte la Pologne pour s’établir en France. Actuellement, il enseigne la musique dans les classes de piano, batterie et percussion, à l’Ecole intercommunale de musique en Flandre française. Dans cette courte pièce d’une minute dix-huit, le piano qui joue des arpèges dans divers modes pentatoniques donne l’image du yoyo accompagnant une caisse claire de niveau 1er cycle. Dans la partie de caisse claire, on trouve des différences de timbres et de modes de jeux simples. Ils vont de la noire à 116 jusqu’aux doubles croches et des appogiatures liées à des noires et croches.
Marie Fraschini
Avec un titre et des sous-titres de chapitres particulièrement éloquents, ce livre représente à la fois une page d’histoire française et le symbole républicain de la grandeur artistique. Dès son inauguration, le 5 janvier 1875, le bâtiment avec son imposante coupole suscite l’admiration du monde entier. Deux auteurs, Pierrette Germain (musicologue) et Marie-Claude Tanguy (historienne) mettent en évidence les rapports entre histoire et musique. Ce haut-lieu du snobisme mondain attire les gloires du temps, des hôtes de marque et le Tout-Paris. Les politiques et la diplomatie récupéreront les valeurs culturelles à leur profit. Peu après la défaite de 1870, l’architecte parisien Charles Garnier (1825-1898) a réalisé ce « fleuron d’art national », source de prestige. Sa construction a été achevée en 1874.
En peu de pages, les deux auteurs proposent un bilan impressionnant portant sur un siècle : 1875-1975, allant de l’inauguration jusqu’à la prise de pouvoir effective de Rolf Liebermann (1910-1999). L’Opéra deviendra une vitrine du savoir-faire, un « guide vers la littérature et une incitation à la découverte des livres » (p. 53). La musique invite à une plongée au cœur des sentiments évoqués ; cette institution est donc un instrument d’éducation (p. 55). Les lecteurs seront renseignés sur les personnels en cause : administratifs, artistes (chanteurs, danseurs, choristes, instrumentistes), décorateurs, électriciens, responsables de l’habillement, machinistes, accessoiristes, pompiers. Ils découvriront des événements marquants : Germaine Lubin chantant la Marseillaise sur les marches de l’Opéra, le 11 novembre 1918, la réouverture en octobre 1944 après la Libération ; les programmes (reprises et créations contemporaines) ; l’apport des Ballets russes faisant bénéficier l’Opéra de leur dynamisme, l’administrateur ayant parfois à choisir entre culture et rentabilité. Les faits et moments caractéristiques font l’objet d’illustrations significatives, sans oublier le constat anecdotique (le créateur du lieu… obligé de payer sa place, lors de l’inauguration).
Charles Garnier a donc rempli sa mission : « réaliser, pour les grands spectacles ou les grandes cérémonies, un édifice adapté à la volonté du pouvoir et représentatif des dernières décennies du XIXe siècle » (p. 27). Au siècle suivant, cette « vitrine diplomatique » accueille entre autres les chefs d’état étrangers, les galas des Grandes Écoles… autour d’un « foisonnement créatif ». L’Opéra Garnier s’affirme donc comme un « phare de l’art lyrique », « un porte-drapeau de la France » (p. 107), un « bien pérenne » et, selon André Billy, « une des merveilles du monde ».
Édith Weber
Faisant suite à sa Thèse de Doctorat (Paris-Sorbonne, 2013), au livre : La chanson polyphonique française au temps de Debussy, Ravel et Poulenc (L’Harmattan, 2017) et au disque : Polyphonies françaises (www.ensembleleonor.fr) (cf. Lettre d’information n°118, 2018), Marielle Cafafa — fondatrice de l’Ensemble Léonor — et son équipe très motivée réalisent une nouvelle publication autour du renouveau de la chanson française. L’accent est mis notamment sur celles de Raymond Bonheur (1861-1939), Reynaldo Hahn (1874-1947), Paul Ladmirault (1877-1944), d’Angèle Ravizé (1887-1980), mais aussi de Maurice Ravel (1873-1937), Jean Langlais (1907-1991), Jacques Chailley (1910-1999)... Ce livre quadrilingue a le grand intérêt de présenter les poésies en français, anglais, espagnol et italien avec la collaboration de traducteurs expérimentés, d’indiquer les références des poètes allant de Charles d’Orléans (1394-1465), Clément Marot (1496-1544) et Rémy Belleau (1528-1577) jusqu’à Guillaume Apollinaire (1880-1918). Toutes ces chansons sont accompagnées de judicieux commentaires. Une publication prouvant que, si la chanson polyphonique française a vécu son apogée au XVIe siècle, elle connaît encore un véritable regain d’intérêt au XXe siècle.
Édith Weber
À l’automne d’un engagement réflexif édifiant, poussé par l’Agathodaïmon de la théorie, le Professeur Serge Gut, d’origine bâloise, fervent partisan, à la suite de Vincent d’Indy de la méthode riemanienne d’analyse harmonique soumet, – à l’appréciation des initiés –, un ouvrage testamentaire de 431 pages immergé dans le ferment musicologique d’une vie de recherche. En vérité, le maître d’oeuvre de « cette période retenue comme champ d’investigation », s’attelle à une permanente confrontation d’idées ; d’où, un titre, au potentiel si intimidant : Les principes fondamentaux de la musique occidentale - Un demi-millénaire de polyphonie (1400-1900). En assumant pleinement le recours aux considérations savantes qui surviennent tout au long de ces pages, le musicologue, – bien qu’il ne soit pas l’inventeur, à proprement parler, d’une théorie –, appréhende des facteurs déterminants du langage musical destinés à s’intégrer dans l’architecture rigoureuse d’un livre structuré en quatre grands chapitres : I. Les données de base. II. La première grande floraison (XVe et XVIe siècle). III. L’épanouissement (XVIIe et XIXe siècle). IV. Réflexion et synthèse.
Les spécialistes qui auront en main ces chapitres se rendront compte de la difficulté de l’exercice, ne serait-ce que pour échapper à l’écriture d’une histoire de la musique en raccourci. De même, si des exemples musicaux étayent le déroulement de la démonstration, cette réflexion ne s’obstine pas à entrer dans les arcanes d’un traité d’harmonie. En revanche, Serge Gut, se veut le dépositaire d’un savoir dont il faut extirper tous les secrets ; il anime les exemples musicaux de ses analyses en y incluant des perspectives appliquées à sa démonstration. Une fois établie cette rigueur architecturale propice à une insertion maîtrisée d’un ensemble de références destinées à être soumises au feu de son esprit critique, l’ancien directeur de l’UFR de musicologie à Paris-Sorbonne (Paris IV) – qui nous a quittés le 31 mars 2014 – a eu l’habilité de recycler, à bon escient, un chapitre de sa première thèse sur La tierce harmonique dans la musique occidentale et d’inclure, de brefs extraits d’articles, déjà publiés. L’érudition plurilingue affermit une donnée immédiate, actualisée, à la fois, en français, en allemand, en anglais et parsemée de nombreuses notes auxquelles elle renvoie le lecteur. Son constant usage ajoute une force indiscutable à la longévité d’un parcours musicologique en quête d’élucidation théorique de haut vol. L’investissement dû à de telles contraintes de lectures reste à l’image de la motivation que le locuteur réclame pour nouer, non seulement un dialogue fécond avec des théoriciens librement choisis qui ont un lien étroit avec le sujet abordé mais encore, à ferrailler avec eux, et ce, à la moindre occasion.
Défi théorique d’autant plus délicat que, l’esprit de contradiction aidant, Serge Gut, s’élève contre des positions habituellement admises. À l’origine de certaines considérations qui révèlent, au fil des pages, des affinités électives avec Friedrich Blume, Sigfrid Karg-Elert, Hans Kayser, une pensée dont l’accent, à la suite de Karg-Elert, a été mis sur l’essence de l’évolution des accords et leur nature profonde. À dire vrai, le Wesen, (monde nouménal) hérité de l’organiste allemand, joueur d’harmonium et théoricien de la musique, – à l’épreuve d’un surcroît de questionnement tel que le chercheur infatigable l’entend –, façonne l’esprit de son ultime message ce qui ne signifie pas que l’Erscheinung (la réalisation concrète de l’harmonie) a été minorée. Le projet du théoricien-musicologue s’avère très ambitieux. Il veut faire la lumière sur ce qui le taraude de manière à reconquérir un territoire qui pourrait lui échapper et s’acquitte de la redite, en dressant, au passage, des panoramas rétrospectifs aussi clairs que pédagogiques. Conscient de cet écueil, il réécrit des synthèses où la mémoire ne déborde pas dans l’à-peu-près. Sa parole d’expert, il l’a défend avec des arguments qui donneraient, lors d’une soutenance de thèse, un maximum de consistance à un débat contradictoire. Les choix, opérés au gré de la progression d’un plan aux substantielles informations, lui ont permis de s’affranchir des rites du colloque universitaire, en adoptant, suivant les circonstances, le ton d’une oralité plus familière, transcrite, le plus souvent, à la première personne.
En guise de considérations préliminaires, les noms de Gioseffo Zarlino, Jean Philippe Rameau, Sigfrid Karg-Elert, Hans Kayser, Jacques Chailley, Auguste Sérieyx, Ernest Ansermet, Rudolph Haase sonnent le rappel de sources théoriques incontournables et concaténées en strates mémorielles. La réminiscence commune, étant de reconnaître, le travail considérable sur la formation des échelles de Jacques Chailley et de saluer qu’il « y fait montre d’ingéniosité, d’habileté et d’une grande étendue de connaissances qui force l’admiration ». Avant de jeter les bases d’une étude très pointue sur les fondements du langage musical occidental, le rédacteur de ce travail d’érudit a sélectionné, en diverses langues, des sources primordiales pour nourrir les discussions à venir avec le discernement qui s’impose. Visiblement, ce spécialiste de Franz Liszt qui a su traquer, dans une Thèse d’État, les moindres recoins d’une oeuvre prolixe éprouve le besoin de se penser comme un explorateur désirant de la consonance et de la dissonance ; de les théoriser, toutes deux, différemment, et surtout, encore mieux que les autres. Le jugement est prompt si bien que, les coups de griffe, aux allures de pomme de discorde, libèrent la parole sur l’usage que font les théoriciens de leurs propres formulations; le sectateur de la théorie des autres ne cesse de soumettre le lecteur à la causticité de son appréciation. À ce titre, Jacques Chailley, figure tutélaire de la musicologie française du XXe siècle est suspecté d’avoir « interprété, avec beaucoup trop de rigidité le phénomène de la résonance sonore, en déduisant des généralisations inflexibles. » En pénétrant au coeur de l’exigeante réflexion, le troisième chapitre assure le temps fort qui scande et détermine l’organisation de chacune des douze parties numérotées. Son organisation interne délimite le propos et le fixe « sur la nature profonde et l’évolution des accords utilisés ainsi que sur les problèmes de syntaxe musicale ». La capacité à infuser de la documentation spécialisée permet de recenser des théories existantes ; pour mieux les décortiquer en vue d’y façonner l’art de l’explication technique distanciée.
En hommage aux splendides réussites musicales qui ont jalonné une période, répartie sur deux siècles, allant du début du XVIIIe siècle à la fin du XIXe siècle, la centralité du troisième chapitre s’affirme à l’aide d’un titre très évocateur : « L’épanouissement ». Passer en revue une panoplie d’accords ne suffirait pas si les conditions théoriques de retrouver l’échantillonnage d’un itinéraire obligé ne figuraient pas au programme ; à condition d’attirer l’attention sur une méthode qui mentionne, d’une manière chronologique, des textes allant de Jean Philippe Rameau à Vincent Arlettaz ; d’en extraire des citations et de les contextualiser ; bref, de voir au-delà des preuves usuellement colportées et de préciser la terminologie. De cette juxtaposition d’éléments naît l’esprit de déduction qui entraîne, parfois, à vif, quelques transparentes saillies. Dans l’ordre de lecture : l’accord de septième de dominante ; l’accord de septième de sensible ; l’accord de septième diminuée ; les autres accords de septième ; l’accord de neuvième de dominante ; les accords altérés et la tension exacerbée. Puis, l’harmonie dissonante dite « naturelle » ; les fonctions tonales ; les notions de consonance et de dissonance ; la tension harmonique et syntaxique ; les phénomènes de stabilité et d’instabilité en harmonie. D’un tel assemblage, patiemment réuni, il en résulte un puzzle de commentaires qui fait de ce troisième chapitre, - tant sont nombreuses les remarques auxquelles il a donné lieu -, un ensemble aussi pertinent que subtil.
Prenons l’examen de la nature profonde de deux accords : la septième de dominante puis, la septième diminuée, ce dernier accord qui « a fait à la fois les tourments des théoriciens et les délices des compositeurs ». Le problème soulevé par la préparation ou non de l’accord de septième de dominante suscite un jugement professoral sur les écrits, à réception, de Jean Philippe Rameau, Jean le Rond D’Alembert, Jean-Jacques Rousseau, Charles Simon Catel, François Joseph Fétis, Rudolf Louis, Ludwig Thuile et Auguste Sérieyx. Il se trouve que les Anciens, - figures instituées de la théorie -, du point de vue de la critique, sont quelque peu étrillés : « les explications de Rameau sont assez alambiquées et fort peu claires ». Se tournant vers un autre théoricien français du siècle passé, il note que Jacques Chailley dans son Traité historique d’analyse harmonique, en donne un « historique sommaire insuffisant pour avoir quelque valeur scientifique ». De même, une trentaine de pages plus loin, quand il envisage l’agencement de la septième diminuée, il fait à nouveau appel aux Anciens, muséifiés autant que défiés : « Il suffit de ce que Rameau tente de démontrer dans son Traité de l’harmonie pour justifier sa structure si particulière ou les élucubrations de D’Alembert. Avouons que – malgré leur renom – ces auteurs se fourvoient passablement ». Parmi les multiples remarques révélées au grand jour, des sujets de friction théorique entre Serge Gut et Jacques Chailley apparaissent. Animé d’une volonté d’aller jusqu’au bout de sa logique et loin de se soustraire aux conceptions de Jacques Chailley qui, dans la lignée de Charles Koechlin, considérait l’accord de septième diminuée « comme l’analogie d’une 9e de dominante mineure dont l’accord de 7e diminuée n’était par avance que l’expression tronquée », Serge Gut décide, pour finir, de s’en démarquer. Une réplique bien troussée suffit à manifester une certaine gêne : « c’est un joli tour de passe-passe qui ne va pas au fond du problème ». De cette manière, il porte le fer sur la nature profonde de l’accord et sur l’orientation de la recherche qu’il faut mener ensuite, sans faiblir, au niveau du tronc dominantique : tel un rai de lumière, seule, la profondeur l’accapare. Tout concourt à faire place aux diverses acceptions d’un terme qui fait problème ; le placer ensuite, sur le terrain de la confrontation n’exclut pas de tisser des liens, en chemin, avec le soubassement d’une filiation textuelle. En effet, pour faire feu de tout bois, tutoyer les cogitations des théoriciens français réclame une autonomisation de la parole qui s’adresse, aussi, aux ruminations des théoriciens d’Outre-Rhin.
Puisque le désir d’aller plus loin se heurte à sa propre énigme, se pose la question de savoir de quel côté infléchir la filiation textuelle. Déjà, au milieu des années cinquante, époque du 19° congrès international de psychanalyse, qui refuse la Société française de psychanalyse fondée par Daniel Lagache en 1953, Serge Gut avait pensé à publier un livre axé sur la psychanalyse. De ce projet, selon ses dires, trop « présomptueux » qui se serait intitulé Psychanalyse du langage musical, il en ressort une prédisposition pour le symbolisme des nombres ainsi que des dualités fondamentales telles que le masculin/féminin, le statisme/dynamisme, notions qu’il tentera d’élucider par la suite. Les intuitions du musicologue laissent entrevoir une curiosité qui le porte à citer un compatriote, le zurichois Carl Gustav Jung plutôt que Sigmund Freud ; en outre, il s’inspire de certaines options héritées de Sigfrid Karl-Elert, de Hans Kayser, d’Auguste Sérieyx, et même, du fondateur de l’orchestre de la Suisse romande, Ernest Ansermet. Sans éluder la charge immense que prendrait cette investigation, il faudrait que l’on se crût spécialiste d’une pluridisciplinarité menée à bras-le-corps pour aboutir à des résultats tangibles. Il est vrai que, « vouloir aborder un sujet presque toujours passé sous silence : celui de la confrontation masculino-féminine », relève d’un pari très risqué qui ne peut que susciter l’ire des féministes. Réellement en conversation avec cette filiation textuelle, Serge Gut surcommente le caché-dévoilé en une sorte de rendez-vous avec l’acception vitale du quinaire, la double nature de l’intervalle de tierce, la double symétrie reliée à l’arrière-plan de l’accord parfait ; il y adjoint, les présupposés de l’extraversion de l’accord majeur et de l’introversion de l’accord mineur ainsi que la double attraction, imposée, selon sa perception, par l’accord de la quinte diminuée. Face à cette ramification d’énoncés, l’interprétation s’escrime à vouloir entrer dans les zones profondes de la psyché. Le théoricien fait sienne, un aspect de la pensée de Sigfrid Karl-Elert ainsi contractée : « l’accord parfait majeur est masculin, ascendant extraverti et se déploie tout naturellement dans le monde des phénomènes, l’accord mineur féminin, descendant, introverti et trouve sa source dans le monde de l’âme » et de se remémorer, au passage, Novalis « c’est vers l’intérieur que passe le chemin mystérieux ». De ces références, saisies à brûle-pourpoint, émerge une explication, étonnamment subjective, qui rattache l’accord de quinte diminuée à deux demi-tons issus de la gamme heptatonique subissant une attraction de nature opposée dont l’une serait prépondérante, masculine, extravertie et l’autre, féminine, introvertie. Cela revient à faire apparaître, hélas, une armature de domination : celle qui perpétue les dissymétries maîtrise/passivité et domination/soumission.
Plutôt que d’éprouver que l’on est en mesure de partager toutes les arguties factices référées à la sexualisation intervallique, ce qui signifierait, l’acceptation, sans sourciller, d’une conception s’égarant dans le confinement d’un chemin de traverse, il est préférable, face à un corpus d’oeuvres, de redécouvrir une terminologie analytique, distinctive, clairement revendiquée par Serge Gut. Les mots : dissonance, instabilité, tension et même tension explosive s’appliquent à la morphologie des accords, à leur qualité intrinsèque et de nouveau à leur nature profonde. Tension harmonique/tension syntaxique précèdent un chapitre caractéristique sur les phénomènes de stabilité et d’instabilité en harmonie. À la différence d’Ernest Ansermet qui applique cette notion au déroulement linéaire, le musicologue la fait appartenir à l’harmonie, aux accords classés ; en lien direct avec l’instabilité qui en résulte ; de fait, il instaure un coefficient de tension de 1 à 3 (tension propre à l’accord lui-même), en fixant le coefficient 1 pour chaque triton ou accord de quinte augmentée, selon une règle ainsi rédigée : « tout accord comportant un intervalle de triton ou un accord de quinte augmentée provoque une impression d’instabilité ». Maintenant, sous l’angle de la stabilité des accords, il s’ensuit cinq exemples musicaux : le premier s’applique à Roland de Lassus (Libro de Villanelle, 1581. Matona mia cara); le deuxième est attribué à Jean Sébastien Bach avec un extrait relatif à l’instabilité neutralisée (Chromatische Fantasie und Fugue. Fantasie); le troisième met à l’épreuve Richard Wagner et l’alternance de tension 1 2 1 (Tristan, Prélude); le quatrième s’applique à Claude Debussy avec d’une part, un conglomérat de tension 3 (Préludes. Voiles) et d’autre part, en opposition, un effet de tension nulle (La Cathédrale engloutie); le cinquième incorpore Béla Bartók à cause d’une tension neutralisée par des dissonances contrariantes (Mikrokosmos, vol. VI, n° 147). En prolongeant la discussion sur la terminologie, ce qui intéresse le destinataire, à propos de Pelléas et Mélisande, c’est la réinsertion d’une section appartenant à un article intitulé « Le langage harmonique de Pelléas et Mélisande : Tradition et modernisme », publiée dans la revue de la Suisse romande en juin 2002. L’évident intérêt pour Debussy n’a de sens que dans le registre du statisme harmonique. Aller plus loin que le philosophe-esthéticien Vladimir Jankélévitch revient à entrer, techniquement parlant, dans l’analyse musicale pour y introduire, le statisme immobile et le statisme mouvant, à condition, de les différencier, subtilement. La tension, lorsqu’elle introduit l’instabilité, à l’intérieur de la stabilité, permettant de soumettre le dynamisme à l’épreuve du statisme, devient un sujet de spéculation. Dans cette perspective, la scène II de l’acte III de Pelléas et Mélisande s’intègre à une distinction ; le choix de l’exemple s’ouvre à la singularité d’une terminologie qui appartient à un processus « d’alternances globales ». Indissociable de Claude Debussy, la terminologie, défendue avec zèle, s’installe dans une certitude puisée chez monsieur Croche antidilettante. Sur cet arrière-plan fondamental, un hommage est rendu à un compositeur qui a « su trouver une position équilibrée entre tradition et modernisme ».
Peu enclin à suivre les démarches compositionnelles qui corrodent les acquis de la musique savante occidentale, Serge Gut, s’interroge sur la dissolution d’un langage demimillénaire au XXe siècle avec « la coupure barbaro-primitive de Stravinski » ou encore, attribuées au Pierrot lunaire, « les harmonies totalement anarchiques de Schönberg ». Sa lucidité lui impose de rédiger une conclusion méditative enracinée dans une culture germanique qu’il affectionne. Le Beethoven de Wagner prend la mesure de Schopenhauer et c’est l’occasion rêvée d’inclure trois citations : l’harmonie des sons, ce composant le plus spécifique de la musique qui n’appartient ni à l’espace ni au temps ; le rapport rythmeharmonie incarné dans l’écoute d’une célèbre oeuvre religieuse de Palestrina, image presque dégagée du temps et de l’espace ; l’affaiblissement de l’esprit interne de la musique dû à l’ordonnance des coupes rythmiques qui ne nous apporte plus la révélation de l’essence des choses. Placée au centre d’une tripartition héritée du dernier verset de la Première Epître adressée aux Thessaloniciens (1 Th 5, 23) de l’apôtre Paul, l’harmonie, qu’il place au centre de la tripartition, lui suggère l’âme entourée du rythme qui serait le corps et la mélodie, l’esprit. Au moment où s’achève la lecture de ces dernières pages, le musicologue – théoricien ne fait pas mystère de ses inquiétudes. Il se demande comment expliquer, de manière satisfaisante, la naissance de la polyphonie ou le passage du mouvement descendant au mouvement ascendant d’une mélodie ; il s’étonne de la poussée de la polyphonie jusqu’à son épuisement au début du XVIIe siècle et souligne l’importante césure qui s’opère au premier tiers du XVe siècle ; et, tels les éclats d’un miroir en morceaux, la rapide désagrégation d’un langage demi-millénaire, au début du XXe siècle, le laisse dubitatif. Mais le moment n’est plus aux joutes paradoxales et le fait de s’être ainsi, arc-bouté, - sur le socle savamment préparé d’explications pointues destinées à surplomber les prédécesseurs -, n’exclut pas une certaine écriture de soi, une assurance verbale qui ne maquille, en rien, ses convictions. L’extrait d’une lettre de Serge Gut, adressée à Vincent Arlettaz, rédacteur en chef de la Revue musicale de Suisse Romande, datée du 3 juin 2010, montre que l’entreprise était périlleuse. Alors, c’est dans la part d’une vérité sans fard que, cette dernière réalisation doit être lue comme « ce testament d’un demi-siècle de pensée, de réflexion, et de méditation sur la musique ». Le regretté musicologue et universitaire, spécialiste de Liszt et Wagner, à l’heure où, il avait mis la dernière main à ses considérations, n’avait plus rien à prouver si ce n’est, d’exister, au fil de la force de sa croyance. Sur la petite musique nostalgique de l’essor, de l’épanouissement et du déclin de l’Europe, il se surprend à écouter les derniers flamboiements de Mahler et de Debussy pour mieux les regretter. Si bien que l’auteur de cet essai sur Les principes fondamentaux de la musique occidentale pourrait reprendre ce jugement catégorique, hérité du Cours de composition musicale de Vincent d’Indy/Sérieyx, 1ere partie, IV, La sonate de Beethoven 2 « Le développement et la modulation » (1899-1900) : « La structure tonale est le principe fondamental et vital de toute oeuvre de musique ».
Michel FISCHER
Ce somptueux volume bénéficie d’un imposant apparat critique : titre complet de l’édition autographe, mention du dernier possesseur, classement thématique et chronologique (relatif), destination cultuelle des 165 Chorals selon l’Année liturgique : Avent et Noël, Nouvelle Année, Passion et Pâques, Pentecôte et autres circonstances et thèmes, dates et lieux de création : avant 1713 ; Weimar, vers 1713-16 ; Coethen ; puis Leipzig, vers 1726-1740. Les hymnologues apprécieront les indications relatives aux recueils et aux mélodies exploitées par Bach. Les historiens seront intéressés par l’histoire de la réception, l’apport codicologique, la chronologie des éditions successives, les lieux de conservation en Allemagne et à l’étranger. À noter la redécouverte d’une copie de Preller. Cette publication, éditée par Hans-Harald Löhlein et actualisée par Christine Blanken, bénéficiant d’une gravure très claire, commence par les citations des Chorals (p. XXXII-XLVI) exploités comme cantus firmus par Bach. Le Petit Livre d’Orgue est reproduit des pages 3 à 150. En Appendices : trois versions de la Partita (variations) : Sei gegrüsset, Jesu gütig (BWV 768). Autre qualité à relever : l’indication des liens pour les sources dans « Bach digital ». Un modèle d’édition scientifique.
Édith Weber
La musique d’orgue de Giacomo Puccini (1858-1924), célèbre compositeur d’une dizaine d’opéras, était jusqu’ici pratiquement inconnue. Pourtant, appartenant à une dynastie d’organistes (4 générations), il avait été initié à l’orgue notamment par son oncle Fortunato Magi et par Carlo Giorgi, organiste de la Cathédrale St Martin où, en 1875 et en 1876, il a obtenu le Premier Prix d’orgue. Son corpus pour cet instrument s’élève à 61 compositions.
Les Éditions Carus ont le mérite d’en faire connaître des extraits qui, sans doute, intrigueront les organistes. Ils y trouveront une sélection de 7 Sonates (dont celle en Ré majeur, intitulée Marcia e Valzer [sic]), 6 Versets, 4 Marches, soit un total de 17 œuvres. Ce volume, très bien gravé, est illustré par l’Orgue du facteur Pucci (Église San Girolamo à Lucca —Lucques), à 1 clavier et pédalier réduit, jadis joué par G. Puccini ; par des facsimile (autographes, pages de titres, signatures) et des copies de partitions. L’indispensable apparat critique précise l’état des manuscrits et leur provenance (entre autres, Collection Carlo Della Nina, son seul élève, qui en conserve 19). Certaines pages n’existent qu’en esquisses autographes (de Puccini) et d’autres, d’une main différente. Ces œuvres à finalité liturgique s’insèrent dans une messe pour orgue avec offertoire, élévation, communion, puis postlude après l’office.
Les organistes et professeurs apprécieront ces pièces presque toutes sans pédale, de moyenne difficulté, dans lesquelles Giacomo Puccini fait appel à quelques imitations, successions d’accords plaqués et oppositions de tempi (piu presto, adagio). Cette musique brillante et solennelle se dégage quelque peu du style de l’opéra pour être plus appropriée à la liturgie. Signalons qu’une édition critique intégrale (Edizione Nazionale delle Opere di Giacomo Puccini) en 1 volume est en cours de parution. Bref : un pan de l’univers musical puccinien inattendu.
Édith Weber
Moins souvent interprété que l’Oratorio de Noël, celui de l’Ascension (Himmelfahrt) vient d’être enregistré pour le Label leipzicois RONDEAU PRODUCTION, par le Chœur de chambre Gutenberg (Mayence) et le Neumeyer Consort (instruments historiques), placés sous la direction de Felix Koch, en une version pleine de vitalité grâce à l’enthousiasme des interprètes et aux trompettes et timbales.
L’œuvre a été créée à Saint-Thomas (Leipzig), le 19 mai 1735. Le livret repose sur des sources néotestamentaires : Marc 16, 19 ; Luc 34, 50 et 52 ; Actes des Apôtres 1, 9-12, concernant l’envoi des disciples dans le monde. Le récit biblique est confié à l’Évangéliste, Christian Rathgeber (ténor), à la voix si persuasive ; des récitatifs sont accompagnés par la basse continue auxquels s’ajoutent les textes contemplatifs des Chorals et des prières du chrétien demandant au Christ de différer son départ. À noter, entre autres : le Chœur introductif, avec le tutti traduisant la louange, contrastant avec le récitatif de supplication : Ach Jesu ist dein Abschied schon so nah ? (Ton départ est-il déjà si proche ?) ; le Choral conclusif (avec tout l’effectif) reprenant les paroles de Gottfried Wilhelm Sacer (1697) : Wie soll es doch geschehen ? chantées sur la mélodie de « Von Gott will ich nicht lassen » (1557) exposée en valeurs longues avec des imitations posant sur l’œuvre de caractère concertant un brillant point d’orgue.
Cette réalisation discographique est complétée par la Cantate de l’Ascension : Wer da gläubet und getauft wird (Celui qui croit et sera baptisé) (BWV 37, 1724) — comportant un énergique chœur d’entrée — et celle de Pentecôte : O ewiges Feuer, o Ursprung der Liebe (Ô feu éternel, ô source de l’amour) (BWV 34, 1746/7), particulièrement brillante et haute en couleurs. Les trois œuvres s’imposent par le respect de l’esthétique et des sonorités typiquement baroques. Une authentique réussite paraissant à point nommé pour le Jeudi de l’Ascension (mai 2018).
Édith Weber
Aussi inattendue qu’instructive, cette version des 9 Symphonies de BEETHOVEN conçue par Peter Stangel pour un orchestre très réduit (« de poche ») propose une nouvelle approche, une nouvelle écoute, une autre compréhension au bénéfice de la transparence : autrement dit une re-découverte en première mondiale. Le « plus petit orchestre au monde », fondé en 2006 par Peter Stangel, son chef actuel, réunit entre 12 et 19 musiciens, ce qui permet de conférer une très grande clarté à l’audition et de percevoir autrement ces Symphonies souvent galvaudées. Enregistrées entre 2012 et 2017, leur écoute exige une adaptation et un ajustement de l’oreille.
À titre d’exemples, la VIe Symphonie (Pastorale) est interprétée par 11 instruments, avec adjonction d’une timbale pour l’orage. La VIIe bénéficie d’un arrangement convaincant. La VIIIe se distingue par un certain humour qui échappe à l’orchestration lourde traditionnelle, en usage en Allemagne au XIXe siècle. Quant à la IXe — loin d’être massive, selon les intentions de Beethoven —, cette version enregistrée en direct pourrait surprendre quelques puristes, mais elle n’en reste pas moins énergique, car le chef a sélectionné des instruments aux effets sonores puissants avec une participation vocale limitée dépassant, dans ce cas, les dimensions d’une formation « de poche » pour atteindre celles d’un orchestre de chambre (11 cordes, presque autant de vents que dans l’original, un nombre réduit de cuivres et un chœur de chambre d’une vingtaine de choristes avec 4 solistes).
Cette conception d’un « orchestre de chambre-symphonique » à la fois osée, audacieuse et très neuve, ne pouvait être tentée et réussie que par un chef expérimenté. En effet, Peter Stangel, né en Tchécoslovaquie, installé à Hanovre, ayant étudié à Wurzbourg dès 1989, a rempli les fonctions de maître de chapelle, répétiteur, chef invité (Opéras de Saint-Gall puis d’Amsterdam), directeur musical de l’Orchestre Philharmonique Max Bruch. Il est également compositeur et un pédagogue avisé spécialiste des jeunes auditeurs ainsi que lauréat de nombreux Prix internationaux.
Ces diverses pratiques et qualifications multiples lui ont permis de se lancer dans cette aventure d’orchestre de chambre « de poche » relayant l’orchestre symphonique de masse traditionnel. Ce qui, au départ, aurait pu être une gageure ou un défi, s’avère une réussite du genre. Le « plus petit orchestre du monde » permet donc une perception et une meilleure compréhension de ces 9 Symphonies. Exploration à ne pas manquer.
Édith Weber
Les nostalgiques des critères traditionnels d’interprétation — s’interrogeant sur le dilemme : orchestre symphonique du XIXe siècle ou orchestre « de poche » (de chambre) — pourront confronter les deux conceptions différentes de Peter Stangel (cf. recension supra) et de Philippe Jordan. Autrement dit : d’un côté, le modeste Taschen Philharmoniker Orchester ; de l’autre : les imposants Wiener Symphoniker, orchestre fondé en 1900 par Ferdinand Löwe, entre autres dirigé par Herbert von Karajan... Se produisant dans le monde entier, il est actuellement placé sous la baguette du chef suisse Philippe Jordan (né à Zurich en 1974), le fils d’Armin Jordan. Il a fait partie des Zürcher Sängerknaben (Petits Chanteurs de Zurich), obtenu le diplôme de professeur de piano décerné par le Conservatoire de sa ville natale. Il a été successivement maître de chapelle et assistant au Théâtre d’Ulm et de Daniel Barenboïm à l’Opéra de Berlin, puis directeur musical de l’Opéra et de l’Orchestre Philharmonique de Graz jusqu’en 2004. Il est très sollicité sur le plan international.
Les discophiles peuvent se livrer à une audition comparative entre la version de poche et la version classico-romantique des Symphonies 4 et 5. La 4e Symphonie, en Si b Majeur (op. 60), créée en 1807 à Vienne, plus enjouée que passionnée, frappe par sa vivacité. Le 1er mouvement : Adagio Allegro vivace en Si b Majeur, à 4/4 : bénéficie d’une introduction lente et très développée, puis l’Allegro vivace traduit la gaîté et se termine en faisant alterner fortissimo / pianissimo avec trémolos de timbale aux basses. Le 2e : Adagio, en Mi b Majeur à 3/4, est imprégné de tendresse. Beethoven accorde une grande importance aux bois et aux cors. Le 3e : Allegro vivace en Si b Majeur à 3/4, se présente comme un scherzo, dans un trio un poco meno allegro confié aux bois et aux cors, avec réponses en écho des premiers violons et se termine en force. Le 4e : Allegro ma non troppo, en Si b Majeur à 2/4, frappe par sa légèreté et un trait rapide aux violons. Beethoven fait appel à une arabesque ornementale, à un court développement, puis à la coda. Le mouvement se termine fortissimo sur une gamme, avec des dissonances assez brutales. Ces détails ressortent davantage, semble-t-il, dans cette version que dans celle « de poche ».
Quant à la 5e Symphonie en ut mineur (op. 67), achevée en 1808, dans laquelle le « destin » frappe davantage et produit un choc émotionnel plus grand que dans la version de poche qui, en revanche, bénéficie de la transparence. Dans le 1er mouvement : Allegro con brio, en ut mineur, à 2/4, le thème initial rythmiquement très marqué et éclatant (clarinettes, cordes), sera très largement développé et une conclusion fortissimo. Dans le 2e : Andante con moto en La b majeur, à 3/8, un thème plus serein dolce, confié aux altos et violoncelles, donne lieu à des variations et à la réaffirmation du thème initial. Le 3e : Allegro en ut mineur, à 3/4 : se présente comme une interrogation des violons et altos, puis des bois, avec reprise du « thème du destin ». Le 4e : Allegro en Ut majeur à 2/2 est très développé, avec retour énergique du premier thème du finale aboutissant à un accord parfait d’Ut majeur. Bien entendu, le rythme prévaut aussi bien dans la version d’origine que dans l’adaptation et l’approche de Peter Stangel. Question d’atavisme.
Édith Weber
Jerzy Gablenz — né à Cracovie, le 23 janvier 1888, dans une famille de musiciens, disparu lors d’un tragique accident d’avion, le 11 novembre 1937 — a retenu l’attention de Jan A. Jarnicki qui, grâce à Tomaz Gablenz (son fils) a obtenu de nombreuses partitions. (cf. Lettre d’information n°119, avril 2018, concernant le CD Piano and Chamber Works). Le Label polonais Acte Préalable vient de lancer une série concernant ses Songs (Chants) accompagnés par sa pianiste attitrée Anna Mikolon (piano) qui interprète également en solo 4 Bagatelles pour piano (op. 1, n°1) — mettant en valeur les oppositions de mouvements : Moderato, Vivo, Andantino triste et Tempo di valse — et 2 de l’op. 8, 2 Morceaux pour piano (op. 3 : Mélodie et Menuet), 3 Improvisations pour piano (op. 1, n°4) et 2 Esquisses « Es war einmal » (Il était une fois…), de caractère triste, puis rêveur ; toutes ces pièces s’imposent par la clarté de leur structure.
Le baryton Robert Kaczorowski interprète trois chants polonais (op. 7) concernant le bonheur et l’amour. Pour leur part, Beata Koska (mezzo-soprano), Donata Zuliani (alto) et Barabara Lewicka (soprano) révèlent les deux trios polonais : Nuit de mai, Matin de printemps (tous deux avec des modulations surprenantes) ainsi que la mélodie Dobranoc – Bonne nuit (op. 19), très élaborée, avec une belle envolée lyrique et si bien soutenue par Anna Mikolon.
Édith Weber
Hanna Herfurtner (soprano), Carola Günther (alto), Georg Poplutz (ténor), Raimonds Spogis (basse) et la Kölner Akademie, tous placés sous la baguette énergique et alerte de Michael Alexander Willens, interprètent avec entrain et dynamisme 5 Cantates de Noël qui — en marge de l’imagerie traditionnelle pour la Nativité — sortent des sentiers battus. Ce disque permettra de découvrir : de Gottfried August HOMILIUS (1715-1785) : Erhöhet die Tore der Welt (Ouvrez haut les portes du monde), évoquant la gloire du Christ ; de Johann Heinrich STÖLZEL (1690-1749) commençant à être mieux connu en France : Kündlich gross ist das gottselige Geheimnis (concernant le mystère divin) ; de Johann Heinrich ROLLE (1716-1785) : Siehe, Finsternis bedecket das Erdreich (Voici, les ténèbres recouvrent la terre), se terminant par la jubilation des anges, et Jauchze, du Tochter Zion (Toi, fille de Sion, exulte), relatif à l’accueil d’Emmanuel ; enfin, de Christoph FÖRSTER (1693-1745) : Ehre sei Gott in der Höhe (Gloire à Dieu au plus haut des cieux). Les mélomanes reconnaîtront aussi quelques Chorals conclusifs bien connus, par exemple : Ich lag in tiefer Todesnacht ; Sei mir willkommen, edler Gast. De quoi varier agréablement le répertoire et recréer autrement l’atmosphère de Noël.
Édith Weber
Atavisme, folklore, couleurs locales, traditions régionales servent indubitablement d’inspiration aux poètes et compositeurs. C’est le cas, entre autres, de Charles BORDES (1863-1909), l’un des fondateurs de la Schola Cantorum (Paris), ardent défenseur des folklores français et espagnol.
Le contenu de cet album est totalement basque. Il comprend la Suite basque (op. 6), en sa transcription d’Ernest Chausson (1855-1899) pour piano à 4 mains, en 4 mouvements : I. Prélude, II. Intermezzo, III. Paysage, IV. Pordon Dantza (danse des bâtons), objet du CD 1 et — en version originale pour flûte, 2 violons, alto et violoncelle — (CD 2) : Rhapsodie basque pour piano et orchestre (op. 9), présentée dans l’adaptation de Gustave Samazeuilh, la partie d’orchestre étant réduite au second piano. Euskal Herria (musique de fête pour accompagner une partie de paume au Pays basque [français]), ainsi que Dix Danses, marches et cortèges populaire du Pays basque espagnol, interprétées par l’excellent pianiste François-René Duchâble.
Les pianistes Fr.-R. Duchâble et Olivier Laville, de même que l’Ensemble Hélios jouent la carte basque. Seuls, les musiciens et les Pianos Érard (contemporains du compositeur, 1899) ne sont pas basques…, mais l’esprit basque plane sur cette réalisation.
Édith Weber
Lauréate du 9e Concours international de violon Leopold Mozart, qui a eu lieu en 2016 à Augsbourg, Ji Won Song, violoniste sud-coréenne née à Séoul, prouve à la fois ses qualités de concertiste virtuose et de partenaire avisée en musique de chambre. Elle s’est imposée très tôt sur la scène internationale : en Chine, en Allemagne, au Canada et aux Etats-Unis. José Gallardo, pianiste brésilien né à Buenos Aires, a fait ses études dans sa ville natale, puis à l’Université de Mayence. Concertiste invité par de nombreux Festivals internationaux, il a enseigné à Mayence, puis au Centre Leopold Mozart (Université d’Augsbourg). Le nom du père de Wolfgang Amadeus plane sur l’interprétation violonistique, conformément à son ouvrage didactique : Versuch einer gründlichen Violinschule (1756). Leur programme s’échelonne de W. A. MOZART à Fritz KREISLER (1875-1962), en passant par Ludwig van BEETHOVEN et Pablo de SARASATE (1844-1908), d’horizons divers mais associés par des emprunts thématiques d’une part à Mozart (Flûte enchantée) et d’autre part à Beethoven. Les formes représentées se réclament des Sonate (en 3 mouvements), Romance, Rondo, Rondino et Fantaisie. À noter, dans les Sonates en mi b majeur (KV 481) et en fa majeur (KV 376), le jeu perlé du pianiste, les répliques précises de la violoniste, la discrétion et la grâce mozartiennes, et le lyrisme dans la Romance en fa majeur (op. 50) de Beethoven ; la belle envolée lyrique dans le Rondino de Fritz Kreisler sur un thème de Beethoven ; la Fantaisie virtuose sur La Flûte enchantée de Pablo de Sarasate, déployant toute la palette sonore du violon. En outre, les discophiles seront sensibles à l’équilibre exceptionnel entre les deux instrumentistes et leur parfaite connivence, mais aussi à l’interprétation baignant dans la sonorité si chantante du violon, la sensibilité et la finesse. À ne pas manquer.
Édith Weber
Sports et divertissements (texte et musique) révèlent un des divers aspects de l’inspiration protéiforme d’Érik Satie (1866-1925) en 20 miniatures : d’un côté, le yachting, le golf, le tennis… ; de l’autre, la comédie italienne, le carnaval, le feu d’artifice. Les paroles sont déjà musique. Ces pages sont destinées aux théâtres d’alors.
Dominique Michel (voix, comédienne), formée au Conservatoire National d’Art Dramatique et professeur invitée au CNSMD de Lyon, et Thierry Ravassard, pianiste et chef de chant dans ce même Conservatoire, authentiques spécialistes du Musicodrame, s’investissent pleinement dans ce climat d’insouciance régnant avant 1914. Ils interprètent également Histoire (Jacques Prévert) et la musique d’Alphonse Stallaert (1920-1995), chef d’orchestre et compositeur néerlandais influencé notamment par Arthur Honegger. Selon Marion Navone, cette œuvre figure parmi les « exemples les plus significatifs du musicodrame du XXe siècle. Le piano agit en véritable comédien… il devient tour à tour un cœur qui bat, des mains qui s’ouvrent en larges arpèges, une romance de printemps ou encore la pesanteur en accords minimalistes et brutaux d’un homme baignant dans son sang. » Descriptions réalistes correspondant aux quatre parties : Cœur de docker ; Le fusillé ; On frappe ; Adrien.
Cette réalisation est complétée par La Prière de Charlotte, poème de Jean Rictus (1867-1933), musique de Ferdinand Warms (mort en 1960), arrangeur et chansonnier autour de 1920. Non exempte d’argotismes, cette prière est devenue célèbre. Œuvres « imaginaires » — selon le titre de la Collection — pour mélomanes curieux et amateurs de musicodrames.
Édith Weber
La vie et la carrière de Henri MARTEAU (1874-1934) — né à Reims d’un père français et d’une mère allemande, résidant en Allemagne, ballotté entre deux pays et, victime de l’antagonisme franco-allemand, finalement naturalisé suédois, parfaitement bilingue et biculturel — sont tributaires des aléas de l’histoire. Grand voyageur, ami de Max Reger, successeur du célèbre violoniste Joseph Joachim, il se situe dans la mouvance romantique tant par ses choix de textes que par son style musical.
Il a déployé des activités de professeur à Prague, Leipzig et Dresde ; conférencier ; concertiste (jusqu’à 120 concerts annuels) et compositeur d’environ 45 œuvres : musique de chambre, d’orchestre, musique chorale, musique religieuse et Lieder dont 2 Cycles, l’un intitulé en français : Huit Mélodies pour chant avec accompagnement de piano (op. 19c) ; l’autre avec le même titre traduit en allemand (op. 28). D’une manière générale, ses thèmes d’inspiration concernent, entre autres, la nature, la pluie, les matins d’octobre, la rue le soir ou encore le chêne, la nuit d’amour... Ils sont chantés par la mezzo-soprano bulgare Vesselina Kasarova à la voix puissante et dramatique, accompagnée tout en délicatesse au piano par Galina Vracheva, professeur de piano et de composition à Munich, Kiev et Berlin, sollicitée pour des masterclasses notamment dans la Maison de la famille Marteau. Cette spécialiste de l’improvisation se révèle également être une accompagnatrice attentive.
Le CD se termine par Fünf Schilflieder für Bariton mit Begleitung des Klaviers & obl. Bratsche (5 Chansons du roseau avec accompagnement du piano et alto obligé), évoquant le coucher de soleil, la tempête, le chemin forestier, et se terminant avec la mélodie : Auf dem Teich (« Sur l’étang »), interprétée par l’inégalable voix puissante et dramatique de Dietrich Fischer-Dieskau à retrouver avec intérêt. Henri Marteau : révélation d’un esprit romantique.
Édith Weber
L’enregistrement des Lieder de Hans SOMMER (1837-1922) est réalisé par la mezzo-soprano Constance Heller (née à Laufen, en Bavière) qui, après ses études au Mozarteum de Salzbourg, devenue Master of Art, a fait ses débuts à l’Opéra dans le rôle de La Muse (Contes d’Hoffmann) et se produit sur le plan international tant dans les salles d’opéra que de concert. Elle est accompagnée au piano par Gerold Huber (né à Munich), élève en piano au Conservatoire de Munich et ayant bénéficié, à Berlin, des cours de Lieder de Dietrich Fischer-Dieskau. Accompagnateur souvent sollicité, sa discographie est impressionnante. Depuis 2013, il est professeur d’accompagnement au Conservatoire de Wurzbourg.
Hans SOMMER est né à Brunswick en 1837 et mort dans sa ville natale en 1922. Son nom est un pseudonyme de E. T. [phonétiquement en français « été » soit, en allemand, « Sommer » (la saison)] Neckniz [anagramme de ZINCKEN]. Après une première formation musicale, il étudie l’optique et les mathématiques au Polytechnikum de Göttingen, où il obtient son Doctorat en 1858, et enseigne l’année suivante à l’Université technique de Brunswick. Il a l’occasion de rencontrer J. Brahms, R. Schumann, Richard et Cosima Wagner, ainsi que Joseph Joachim. Il étudie la composition auprès d’Adolf Bernhard Marx à Berlin et de Wilhelm Meves et, à partir de 1884, se consacre entièrement à la musique.
Hans SOMMER a mis en musique des poèmes du XIXe siècle : les 6 Sapphos Gesänge (op. 6) de Carmen Sylva (1843-1916), faisant alterner effusion et retenue ; les 7 poèmes (op. 16), de Gottfried Keller (1819-1890) assez lyriques — en premiers enregistrements mondiaux — ; Desdemona (1897) d’Emil von Schönaich-Carolath ; 3 poèmes de Joseph von Eichendorff (1788-1857), dont la célèbre Lorelei (op. 7) dans laquelle Constance Heller déploie tout son talent expressif; 3 Lieder d’après des extraits de Mignon de Johann Wolfgang von Goethe (1749-1832) — dont l’opus posthume, Mignons Sehnen, a servi de titre au disque — et, enfin, la si nostalgique mélodie : Stumme Liebe (op. 1) de Nikolaus Lenau (1802-1850).
Une remarquable plongée dans la Sehnsucht (nostalgie, aspiration…) typiquement allemande magnifiquement servie par les deux interprètes.
Édith Weber
Jozef Wienawski, pianiste, pédagogue et compositeur polonais, est né en 1837 à Lublin où, après une première formation, il étudie le piano au Conservatoire de Paris avec Antoine François Marmontel et Charles-Valentin Alkan, et la composition avec Félix Le Couppey, puis la théorie musicale à Berlin. À Paris, il rencontre Rossini, Gounod, Berlioz et deviendra l’un des artistes favoris de Napoléon III. Après avoir enseigné au Conservatoire de Moscou, il s’installe à Bruxelles où il meurt en 1912. Bien que très apprécié de son temps, il est quand même tombé dans l’oubli, et c’est le mérite de Jan A. Jarnicki d’avoir relancé son œuvre vocale en polonais et allemand, sur les thèmes : amour, matin, nature et mois de mars, de mai, alouette et oiseaux… (d’après V. Hugo, H. Heine, J. W. von Goethe, entre autres). Cinq solistes et le Chœur de l’Académie Sztuki de Stettin placés sous la direction autorisée de Barbara Halec permettent enfin de redécouvrir son œuvre vocale empreinte de sensibilité et de sentimentalité.
Édith Weber
La pianiste, claveciniste, organiste, soprano et théoricienne polonaise, Aleksandra Garbal (née en 1970) est également compositrice. Cette réalisation, en premier enregistrement mondial, témoigne de sa polyvalence compositionnelle : musique vocale, œuvres pour : piano (1997/2010), saxophone alto et piano (2011), clarinette (1994/2009, Incantation pour clarinette solo), marimba (1997), flûte (2005/2016), violoncelle (2010) — poignant Recitativo e Arioso per violoncello solo à la mémoire des victimes de l’accident d’avion à Smolensk, traduisant ses sentiments personnels de solitude et d’impuissance face à cette tragédie — ; soprano, baryton et piano (2014), et aussi orgue (2017). Elle cultive les formes traditionnelles : Préludes pour piano (2011-13), Valse (2013), Toccata Sursum corda-Habemus ad Dominum pour orgue (2017), où se manifeste sa joie de vivre et sa vision mystique du monde. Ces Miniatures s’insérant dans la longue tradition du folklore polonais, et témoignant de l’attachement de la musicienne à son pays et à sa langue, sont émaillées de nombreuses réflexions sur l’existence. Compositrice polonaise gagnant à être connue (et reconnue).
Édith Weber
DANIEL MOULINET
24.00 €. 178 pages
Ces dernières décennies, le chant liturgique a connu de profondes évolutions. Il a même suscité débats et tensions. Comment le chant liturgique, aujourd’hui en France, est-il révélateur des évolutions du langage théologique, des sensibilités spirituelles, des orientations pastorales ? Plus de cinquante ans après le concile Vatican II, ne devons-nous pas nous interroger et évaluer comment il répond à sa fonction ministérielle en liturgie et nous aide à mieux célébrer ?
C’est pour approcher ces questions que les journées d’études organisées en juin 2017 par l’Institut pastoral d’études religieuses de Lyon et les Amis de Marcel Godard ont réuni différents acteurs, universitaires, professionnels, acteurs de terrain et pastoraux, de façon à conjoindre différentes approches de cette action d’Église, du point de vue de l’histoire et de l’ecclésiologie, certes, mais aussi en prenant largement en compte la pastorale et la technique vocale.
Au terme, nous sommes invités à une réflexion sur la manière d’assurer la communion ecclésiale dans le contexte de la diversité actuelle des pratiques liturgiques. Par-delà cette variété des communautés qui prient et qui chantent, c’est le même Christ qui célèbre et se rend présent à notre monde.
48.00 €, 432 pages
Disparu en mars 2014 à l’âge de 86 ans, Serge Gut compte au nombre des figures majeures de la musicologie française des dernières décennies. Spécialiste de Franz Liszt, auquel il consacra deux grands ouvrages et de nombreux articles, il fut également un analyste réputé. Après une première formation de compositeur, il avait commencé sa carrière musicologique, dans les années 1960-1970, par des publications traitant surtout de questions de langage musical – un domaine qui, bien que parfois négligé par les milieux universitaires, constitue le pont naturel entre composition et théorie. Au terme de cinquante années d’une activité brillante, qui le vit notamment présider aux destinées de l’Institut de musicologie de la Sorbonne, Serge Gut devait revenir dans ses dernières années à cette passion de jeunesse. Son expérience unique, aussi bien dans les domaines de la recherche que de l’enseignement supérieur ou de la publication scientifique, lui inspira le présent ouvrage, qu’il qualifiait lui-même de testament. Théorie et histoire y tiennent un passionnant dialogue. (suite)
59.00€, 386 pages
« Connaissez-vous beaucoup d'inventeurs d'instruments de musique ? Ceux dont l'histoire a retenu les noms se comptent sur les doigts d'une main. Jean- Christophe Denner a inventé la clarinette, Adolphe Sax le saxophone. Et puis ? On connaît des facteurs d'instruments, Stradivarius, par exemple. Mais il n'a pas inventé le violon. Alors qui ? Qui le piano ? Qui a inventé le tambour, la flûte, la harpe ? Autant demander qui étaient Adam et Ève ! »
En octobre 1980 mourait accidentellement, à Paris, Maurice Martenot, musicien, pédagogue, inventeur des ondes musicales. Trois mois plus tôt, l’auteur était allé l’interviewer à sa maison de campagne de Noirmoutier.
Ce livre relate l’histoire des ondes Martenot, instrument électronique de musique exceptionnel qui a séduit des personnalités aussi diverses que Mau- rice Ravel, Rabindranath Tagore ou Jacques Brel, et des compositeurs connus, tels Olivier Messiaen, Darius Milhaud, André Jolivet, Arthur Honegger, Edgar Varèse, Maurice Jarre, Akira Tamba – auxquels se sont ajoutés, depuis la première édition de ce livre, parmi bien d’autres, Jacques Hétu, Jonny Greenwood, ou encore Akira Nishimura. (suite)
25.00 €. 137 pages
« CHANTS Harmonisés à quatre voix pour orgue et chœur par Yves Kéler et Danielle Guerrier Kœgler
Textes originaux rassemblés, mis en français et commentés par Yves Kéler
Ouverture, par le pasteur David Brown et Guylène Dubois
Préface du pasteur Alain Joly
Avant-propos d’Édith Weber
Ce recueil regroupe, pour la première fois, les 43 paraphrases françaises de chorals de Martin Luther, strophiques, versifiées, rimées, très fidèles aux intentions du Réformateur (ce qui n’est pas le cas des quelques rares textes figurant dans d’autres recueils français), et chantables sur les mélodies traditionnelles bien connues.
Il se veut un volume fonctionnel pour le chant des fidèles, avec des harmonisations à 4 voix destinées aux organistes pour accompagner l’assemblée lors des cultes et des messes. Il s’adresse également aux prédicateurs soucieux de trouver un choral pour illustrer les thèmes abordés chaque dimanche, aux organistes pour accompagner l’assistance et aux chefs de chœur pour diriger le chœur paroissial. Pour quelques harmonisations écrites en fonction des possibilités de l’orgue et, dans quelques rares cas, difficilement chantables (tessiture trop élevée ou trop grave, intercalation du texte à plusieurs des parties), (suite)
24.00 €. 270 pages
Cet ouvrage paraît à l’occasion de la création à Lausanne, lors de la semaine sainte 2017, de La Passion selon Marc. Une passion après Auschwitz du compositeur Michaël Levinas. Cette création prend place dans le cadre du 500e anniversaire de la Réforme protestante. Elle entreprend de relire le récit chrétien de la passion de Jésus dans une perspective déterminée par la Shoah.
Ce projet s’inscrit dans une histoire complexe, celle de l’antijudaïsme chrétien, dont la Réforme ne fut pas indemne, mais aussi celle des interprétations, théologiques et musicales, de la passion de Jésus de Nazareth. Et il soulève des questions lourdes, mais incontournables. Peut-on mettre en rapport la crucifixion de Jésus – la passion chrétienne – et l’assassinat de six millions de juifs ? Ne risque-ton pas d’intégrer Auschwitz dans une perspective chrétienne, et du coup de priver la Shoah de sa radicale singularité ? De redoubler la violence faite aux victimes d’Auschwitz en lui donnant un sens qui en dépasserait le désastre, l’injustifiable, l’irrémédiable ? (suite)
Michaël Levinas : La Passion selon Marc. Une Passion après Auschwitz par Michèle Tosi
34.00 €. 356 pages
Ce livre, que le compositeur souhaitait publier dans sa maison d’édition à Kürten, se propose de présenter les orientations principales de la recherche de Karlheinz Stockhausen (1928-2007) à travers ses œuvres, couvrant sa vie et ouvrant un accès direct à ses écrits. Divers domaines investis par le plus grand inventeur de musique de la seconde moitié du xxe siècle sont abordés : composition de soi à travers les matériaux nouveaux ; découvertes formelles et structures du temps ; musique spatiale ; métaphore lumineuse ; musique scénique ; l’hommage au féminin de l’opéra Montag aus Licht ; Wagner, Stockhausen et le Gesamtkunstwerk, œuvre d’art total. Les témoignages des femmes qui l’ont accompagné dressent un portrait vif et saisissant de l’homme, artiste génial qui aimait plus que tout la musique et la recherche compositionnelle au nom du progrès de l’être humain...(suite)
14.50 €. 75 pages
Mozart aurait-il été heureux de disposer d'un Steinway de 2010 ? L'aurait-il préféré à ses pianofortes ? Et Chopin, entre un piano ro- mantique et un piano moderne, qu'aurait-il choisi ? Entre la puissance du piano d'aujourd'hui et les nuances perdues des pianos d'hier, où irait le cœur des uns et des autres ? Personne ne le saura jamais. Mais une chose est sûre : ni Mozart, ni les autres compositeurs du passé n'auraient composé leurs œuvres de la même façon si leur instrument avait été différent, s'il avait été celui d'aujourd'hui. Mais en quoi était-il si différent ? En quoi influence-t-il l'écriture du compositeur ? Le piano moderne standardisé, comporte-t-il les qualités de tous les pianos anciens ? Est-ce un bien ? Est-ce un mal ? Qui a raison, des tenants des uns et des tenants des autres ? Et est-ce que ces questions ont un sens ? Un voyage à travers les âges du piano, à travers ses qualités gagnées et perdues, à travers ses métamorphoses, voilà à quoi convie ce livre polémique conçu par un des fervents amoureux de cet instrument magique.
29.00 €. 268 pages
Au travers du récit que James Lyon nous fait de l’existence de Dickens, il apparaît bien vite que l’écrivain se doublait d’un précieux défenseur des arts et de la musique. Rares sont pourtant ses écrits musicographiques ; c’est au travers des références musicales qui entrent dans ses livres que l’on constate la grande culture musicale de l’écrivain. Il se profilera d’ailleurs de plus en plus comme le défenseur d’une musique authentiquement anglaise, forte de cette tradition évoquée plus haut.
Et s’il ne fallait qu’un seul témoignage enthousiaste pour décrire la grandeur musicale de l’Angleterre, il suffit de lire le témoignage de Berlioz (suite)
25.00 €. 232 pages
En plein essor à l'étranger, particulièrement en Allemagne, l'hymnologie n'a pourtant pas encore acquis ses titres de noblesse en France.
Dans l'esprit de la collection « Guides musicologiques », cet ouvrage se veut une initiation méthodologique. Il comprend une approche de l'hymnologie se rattachant à la musicologie historique et à la théologie pratique, et résume l'historique de la discipline.
Pratique et documentaire, il offre aussi de précieuses indications : un large panorama des institutions et centres de recherche, un glossaire conséquent ou les mots clés. et les entrées sont accompagnés de leur traduction en plusieurs langues, et une bibliographie très complète (431 titres) tenant compte du tout dernier état de la question.
Outil de travail indispensable, ce livre s'adresse aussi bien aux musicologues, aux théologiens, traducteurs et chercheurs, qu'aux organistes, maîtres de chapelle, chanteurs, et bien entendu, aux hymnologues.
49.00 €. 336 pages
Ce guide s’adresse aux musicologues, hymnologues, organistes, chefs de chœur, discophiles, mélomanes ainsi qu’aux théologiens et aux prédicateurs, soucieux de retourner aux sources des textes poétiques et des mélodies de chorals, si largement exploités par Jean-Sébastien Bach, afin de les situer dans leurs divers contextes historique, psychologique, religieux, sociologique et surtout théologique.
Il prend la suite de La Recherche hymnologique (Guides Musicologiques N°5), approche méthodologique de l’hymnologie se rattachant à la musicologie historique et à la théologie pratique dans une perspective pluridisciplinaire. Nul n’était mieux qualifié que James Lyon : sa vaste expérience lui a permis de réaliser cet ambitieux projet. Selon l’auteur : « Ce livre est un USUEL. Il n’a pas été conçu pour être lu d’un bout à l’autre, de façon systématique, mais pour être utilisé au gré des écoutes, des exécutions, des travaux exégétiques ou des cours d’histoire de la musique et d’hymnologie. » (suite)
76.00 €. 484 pages
Cet ouvrage regroupe pour la première fois les 43 chorals de Martin Luther accompagnés de leurs paraphrases françaises strophiques, vérifiées. Ces textes, enfin en accord avec les intentions de Luther, sont chantables sur les mélodies traditionnelles bien connues.
Aux hymnologues, musicologues, musiciens d'Eglise, chefs, chanteurs et organistes, ainsi qu'aux historiens de la musique, des mentalités, des sensibilités et des idées religieuses, il offrira, pour chaque choral ou cantique de Martin Luther, de solides commentaires et des renseignements précis sur les sources des textes et des mélodies : origine, poète, mélodiste, datation, ainsi que les emprunts, réemplois et créations au XVIè siècle... (suite)
19.00 €. 224 pages
L’imbroglio baroque de Gérard Denizeau
BACH
Cantate BWV 104 Actus tragicus : Gérard Denizeau - Toccata ré mineur : Jean Maillard -
Cantate BWV 4: Isabelle Rouard -
Passacaille et fugue : Jean-Jacques Prévost -
Passion saint Matthieu : Janine Delahaye -
Phœbus et Pan : Marianne Massin -
Concerto 4 clavecins : Jean-Marie Thil -
La Grand Messe : Philippe A. Autexier -
Les Magnificat : Jean Sichler -
Variations Goldberg : Laetitia Trouvé -
Plan Offrande Musicale : Jacques Chailley
COUPERIN
Les barricades mystérieuses : Gérard Denizeau -
Apothéose Corelli : Francine Maillard -
Apothéose de Lully : Francine Maillard
HAENDEL
Dixit Dominus : Sabine Bérard -
Water Music : Pierrette Mari -
Israël en Egypte : Alice Gabeaud -
Ode à Sainte Cécile : Jacques Michon -
L’alleluia du Messie : René Kopff -
Musique feu d’artifice : Jean-Marie Thill -
79.00 €. 720 pages
Pour la première fois, le Tchèque Leoš Janácek (1854-1928), le Finlandais Jean Sibelius (1865-1957) et l'Anglais Ralph Vaughan Williams (1872-1958) sont mis en perspective dans le même ouvrage. En effet, ces trois compositeurs - chacun avec sa personnalité bien affirmée - ont tissé des liens avec les sources orales du chant entonné par le peuple. L'étude commune et conjointe de leurs itinéraires s'est avérée stimulante tant les répertoires mélodiques de leurs mondes sonores est d'une richesse émouvante. Les trois hommes ont vécu pratiquement à la même époque.
Ils ont été confrontés aux tragédies de leur temps et y ont répondu en s'engageant personnellement dans la recherche de trésors dont ils pressentaient la proche disparition. (suite).
39.00 €. 400 pages
L’histoire de David et Jonathan est devenue aujourd’hui un véritable mythe revendiqué par bien des mouvements homosexuels qui croient y lire le récit d’une passion amoureuse entre deux hommes, alors même que la Bible condamne de manière explicite l’homosexualité comme une faute grave.
Cette lecture s’est tellement imposée depuis quelques décennies que les ouvrages qui traitent de la question de l’homosexualité dans la Bible ne peuvent contourner le passage et l’analysent dans les moindres détails afin de découvrir si le texte parle ou non d’une amitié particulière entre le fils de Saül et le futur roi d’Israël, ancêtre de Jésus.
Le texte est devenu le lieu de toutes les passions et révèle les interrogations profondes de la société sur la question homosexuelle. (suite)
24.00 €. 186 pages
Publié l'année même de son ouverture, cet ouvrage raconte avec beaucoup de précisions la conception et la construction du célèbre bâtiment.
Le texte est remis en pages et les gravures mises en valeur grâce aux nouvelles technologies d'impression.
INITIATION À L’HARMONIE ET À L’INTERPRÉTATION À PARTIR DES POLONAISES DE CHOPIN.
VOLUME 1 Les Polonaises de jeunesse en sol mineur et sib majeur.
22.00 €,
INITIATION À L’HARMONIE ET À L’INTERPRÉTATION À PARTIR DES POLONAISES DE CHOPIN.
VOLUME 2 Les Polonaises de jeunesse en lab majeur et sol# mineur
22.00 €
COLLECTION VOIR ET ENTENDRE
Jean-Marc Déhan et Jacques Grindel ont réalisé, dans les années 1980, collection « voir & entendre », qui s'adressait autant aux collèges et lycées qu'aux conservatoires et écoles de musique. Il nous est apparu que cet outil remarquable pouvait, avec quelques compléments, redevenir un outil pédagogique de tout premier plan. Le parti pris a été de réimprimer à l'identique les fascicules, enrichis d'un court dossier pédagogique. Pour chaque titre, des pistes d'utilisation s'ajoutent à celles déjà mises en lumière dans les partitions elles-mêmes.
Il est possible d'utiliser ces partitions :
- pour la lecture de notes
- pour la lecture de rythmes
- pour la dictée musicale ;
- pour le chant, en faisant chanter et mémoriser les principaux thèmes
- pour la formation de la pensée musicale : les thèmes mémorisés, transposés à l'oreille, donneront lieu, le cas échéant, à des autodictées ;
- pour l'analyse musicale et l'harmonie, avec les analyses fines de J.-M. Déhan et J. Grindel reportées sur la partition
- pour l'histoire de la musique grâce aux textes de présentation ;
- enfin, pour l'écoute raisonnée des œuvres en suivant simplement la partition, quitte à faire porter l'audition sur des éléments précédemment indiqués par le professeur qui pourra adapter ces exercices au niveau de ses élèves.
Mais ces partitions sont également destinées aux amateurs éclairés pour qui la lecture des clés d'ut dans les partitions d'orchestre habituelles, ainsi que le casse-tête des instruments transpositeurs sont souvent des obstacles insurmontables.
Souhaitons que cette réédition permette une meilleure connaissance par tous, jeunes et moins jeunes, futurs professionnels ou amateurs éclairés, de quelques œuvres fondamentales du répertoire.
W.A. Mozart. Symphonie n° 40 (K550)1. Allegro Molto – 3. Menuetto
9 €, 26 pages
A. Borodine. Dans les steppes de l’Asie centrale
9 €, 22 pages
H. Berlioz. Symphonie fantastique 5e mouvement
12 €, 42 pages
J.-S. Bach. Cantate BWV 140« Wachetauf, ruft uns die Stimme »
10,50 €, 34 pages