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Janvier-Février 2011 - n° 569



novembre-décembre 2010
n° 568



Supplément Bac 2011



septembre-octobre 2010
n° 567

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Sommaire :

1. Editorial : "Eloge de la diversité..."
2. Sommaire du n° 569
3. Informations générales
4. Varia
5. Manifestations et concerts
6. Marcel Proust pastichant Pelléas...
7. Annonces de spectacles, concerts, expositions
8. Chronique helvétique
9. Recensions de spectacles et concerts
10. L'édition musicale

11. Bibliographie
12. CDs et DVDs

13. La vie de L’éducation musicale


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Éloge de la diversité…

Fort dissemblables certes, mais également passionnantes pour tout mélomane à l’esprit quelque peu curieux, sont les mutations que connurent, et connaissent encore, aussi bien le Quatuor à cordes, figure emblématique de la musique occidentale, que la Chanson française - celle-ci sous les effets conjugués de prodigieuses avancées technologiques.  Problématiques qui rejoignent opportunément deux thèmes au programme de l’agrégation de Musique, en 2011-2012…

Ainsi avons-nous demandé à Bernard Fournier, savant auteur d’une monumentale étude sur l’esthétique & l’histoire du quatuor à cordes (Fayard), de bien vouloir ramener, pour nous, les quelque 5 000 pages de son grand œuvre à… une douzaine de pages – admirable synthèse d’une parfaite clarté.  Cet article phare est ici assorti d’une étude, signée Marie Delcambre-Monpoël, sur l’influence décisive, chez le chambriste Webern, de la pensée de Schoenberg.

Ainsi Céline Chabot-Canet, éminente spécialiste de la chanson contemporaine, brosse-t-elle, pour sa part, un minutieux panorama des bouleversements – notamment sociologiques - induits, dans tous les champs de la variété, par l’apparition du microsillon.

Sans préjudice, sous la plume de Sylviane Falcinelli, d’un hommage au grand Henryk Górecki, récemment disparu, et d’un entretien avec le merveilleux musicien qu’est le violoncelliste Henri Demarquette.  Hélène Jarry, quant à elle, aura longuement interrogé Laurent Guirard à propos de l’ouvrage collectif dont il a pris l’initiative autour de La Perception de la musique, opus majeur de Robert Francès, dont il serait peut-être enfin temps de tirer toutes les conséquences…

Excellente année à tous, chers lecteurs !

Francis B. Cousté.

 


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Le quatuor, figure emblématique de la musique occidentale
Bernard Fournier

Reflets et extension de la pensée schoenbergienne dans les quatuors à cordes de Webern
Marie Delcambre-Monpoël

La chanson française : microsillon et macromutations
Céline Chabot-Canet

Henryk Górecki, une voix sacramentelle s’élevant sur les débris d’une civilisation en fureur
Sylviane Falcinelli

Henri Demarquette ou l’émerveillement du lyrisme
Sylviane Falcinelli

Entretien avec Laurent Guirard
Hélène Jarry

La grille d’Hélène Jarry

 

***



« Diaphonique », Fonds franco-britannique pour la musique contemporaine, vient d’être créé par la Sacem, le Bureau Export de la musique française, l’Institut français du Royaume-Uni & la Fondation des Amis de l’Institut français.  Fonds doté de 100 000 £/an.  Membres d’honneur du Comité : George Benjamin, Pierre-Laurent Aimard.  Renseignements : Françoise Clerc, coordinatrice : +44 (0) 207 073 1319.  www.diaphonique.org

 

 

The Grammy Awards.  Dans la catégorie « Œuvres de musique contemporaine composées au cours des vingt-cinq dernières années & enregistrées pour la première fois en 2010 » (106e catégorie), ont été distingués :

·                     Michael Daugherty [notre photo] : Deus ex Machina (Naxos)

·                     Hans Werner Henze : Appassionatamente Plus (Cybele Records)

·                     Magnus Lindberg : Graffiti (Ondine)

·                     Arvo Pärt : Symphony n°4 (ECM New Series)

·                     Rodion Shchedrin : The Enchanted Wanderer (Mariinsky)

Renseignements : www.grammy.com

 

©Grant Leighton

 

« Concours international de bel canto Vincenzo Bellini ».  La 1re édition de ce concours franco-italien - organisé en jumelage avec la ville de Catane, cité natale du compositeur - s’est déroulée, le samedi 18 décembre 2010, à Puteaux, au Théâtre des Hauts-de-Seine.  Parmi les 13 candidats, ont obtenu le Prix Bellini (5 000 €) : Pretty Yende (Afrique du Sud) / le Prix de la Ville de Puteaux (3 000 €) : Saioa Hernandez (Espagne) / le Prix spécial d’interprétation d’une œuvre en français (1 500 €) : Júlia Farrés (Espagne).  Présidé par Alain Lanceron, le jury était composé de June Anderson, Philippe Entremont, Vincenzo De Vivo, Gioacchino Lanza Tomasi, Enrico Castiglione, Daniel Borniquez et Sergio Segalini.

 

Pretty Yende ©DR

 

Célébrations nationales en 2011 : Philippe de Vitry (1291-1361), Louis Couperin (ca 1626-1661), Création de l’Académie royale de danse (mars 1661), Jean-Joseph Cassanéa de Mondonville (1711-1772), Franz Liszt (1811-1886), Aristide Cavaillé-Coll (1811-1899), Premier concert populaire organisé par Jules Pasdeloup (27 octobre 1861), Début de la construction de l’Opéra (été 1861), Jehan Alain (1911-1940), Marguerite Monnot (1903-1961)…  [En 2012, sera notamment célébré le 150e anniversaire de la naissance de Claude Debussy (1862-1918). ]

 

L’orgue, par Jehan Alain ©DR

 

Le violoniste chinois Lynn Chang a joué à Oslo, le 10 décembre 2010, lors de la cérémonie en l’honneur du Liu Xiaobo, lauréat du Prix Nobel de la Paix, dissident incarcéré en Chine.  « Where words end, music begins » aurait assuré le violoniste.

 

©Boston Globe

 

Fusion d’organisations chorales.  Europa Cantat (Fédération européenne des jeunes chorales) & l’Agec (Arbeitsgemeinschaft Europäischer Chorverbände) forment, depuis le 1er janvier 2011, la principale organisation pan-européenne, à but non lucratif, dédiée à l’éducation et aux échanges culturels, dans le domaine de la musique vocale, entre jeunes et adultes.  Elle se nomme désormais : European Choral Association-Europa Cantat ; son siège est à Bonn.  Ci-dessous (de gauche à droite) : Jeroen Schrijner (président d’Europa Cantat), Michaël Scheck (président de l’Agec) et Sante Fornasier (président du nouvel organisme).  Renseignements : +49 228 9125663.  www.eca-ec.org

 

©DR

 

Le ténor suisse Hugues Cuénod, admirable interprète de la mélodie française (il travailla longtemps avec Nadia Boulanger), est décédé le 3 décembre 2010, à l’âge de 108 ans.  Il est ci-dessous photographié à Glyndebourne, où il se produisait régulièrement.

 

Hughes Cuénod ©Corbis

 

L’Association internationale d’éducation musicale Willems [AIEM Willems] organise un week-end à la Cité des Arts, Paris IVe.  Le samedi 15 janvier 2011 (14h00-20h30) : Préparation au diplôme Willems.  Le dimanche 16 janvier 2011 (9h00-12h00 et 13h30-16h30) : L’improvisation vocale & instrumentale dans l’éducation musicale : de la pratique personnelle à la pratique pédagogique.  Avec Christophe Lazerges.  Renseignements : Cité internationale des arts – 18, rue de l’Hôtel-de-Ville, Paris IVe. Tél. : 06 62 33 44 98.  www.aiem-willems.org

 

Accueil

Edgar Willems ©DR

 

L’Association française d’expansion musicale [AFEM] organise, le samedi 19 mars 2011, à la Schola Cantorum de Paris, une Journée d’information dont voici le détail :

9h30 : Accueil / 9h45 : Bienvenue (par Jean Leduc, président de l’AFEM) / 10h00 : Une didactique de l’éveil musical à travers la voix & l’opéra (par Rita Ghosn, compositrice, avec Jeune public) / 11h30 : Débat // 14h00 : La dynamique naturelle de la parole dans les milieux traditionnels, d’après les travaux de Marcel Jousse (par Yves Beauperin, directeur de l’Institut européen de mimopédagogie) / 15h30 : Débat / 16h00 : Fin de la JournéeRenseignements : 269, rue Saint-Jacques, Paris Ve.  Tél. : 01 43 54 15 39.  www.schola-cantorum.com

 

Rita Ghosn ©DR

 

Le « Quatuor de la Paix » a été créé, en 2004, à l’initiative de Brian Lisus, célèbre luthier sud-africain, pour commémorer le 10e anniversaire de l’instauration de la démocratie dans son pays et honorer les quatre « Prix Nobel de la Paix » attribués à des Sud-Africains : Albert Luthuli, Desmond Tutu, Frederik de Klerk et Nelson Mandela.  Chaque instrument porte le nom de l’un des lauréats.  Successivement confiés à diverses formations, ces instruments seront joués tout autour du monde, afin de réunir des fonds en faveur, notamment, de Peace String, Musiquelaine et Musequality, associations œuvrant pour le développement & la promotion de l’éducation musicale auprès d’enfants défavorisés.  Sous le haut patronage de Frédéric Mitterrand, ministre de la Culture, et de l’actrice Charlotte Rampling, le Quatuor de la Paix est actuellement accueilli en résidence par le Comité national pour l’éducation artistique (CNEA), au Grenier des Grands Augustins, ancien atelier de Picasso.  Renseignements : 7, rue des Grands Augustins, Paris VIe.  Tél. : 01 43 54 09 00.  www.cnea.fr/pages/grenier.html & www.quartetofpeace.com

 

Quartet of Peace                

 

Au compositeur Alexandre Tissier (1970-2005) est désormais dédié un émouvant site-souvenir : www.alexandre-tissier.fr

©DR

 

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Académie Charles-Cros.  Le pianiste Benoît Delbecq [notre photo] a remporté le Grand Prix du disque de jazz de cette prestigieuse académie, pour ses albums The Sixth Jump et Circles and Calligrams, édités chez Songlines (www.songlines.com), distr. Abeille Musique.  Renseignements : www.charlescros.org

 

©Roderick Packe

 

Jazz au Centre national de la danse (CND) : du jeudi 27 au dimanche 30 janvier 2011.  Quatre journées pour voir, parler, penser & danser jazz : grande leçon, table ronde, rencontres, spectacle, ateliers, projection, stage, jam session.  Renseignements : 1, rue Victor-Hugo, 93500 Pantin.  Tél. : 01 41 83 98 98.  www.cnd.fr

 

©Anne-Sophie Voisin

 

La Fédération nationale des Centres musicaux ruraux (CMR) organise, le lundi 31 janvier 2011, à « La Cartonnerie » de Reims, une Journée sur le thème : La musique et le groupe.  10h00-12h30 : « La place des pratiques de groupe dans l’enseignement de la musique ».  14h00-17h30 : « Le musicien-conseil & les dispositifs d’accompagnement des groupes constitués ».  Un débat clora chaque séance.  Renseignements : 84, rue du Docteur-Lemoine, 51100 Reims.  Tél. : 03 26 36 72 40.  www.lescmr.asso.fr

 

logo

 

5th Bucharest International Jazz Competition (for Bands & Vocalists).  Ce concours se déroulera du 7 au 13 mai 2011.  Les compétiteurs devront être nés après le 1er mai 1976.  Date limite d’inscription : 10 février 2011.  Renseignements : +40 740 759 566.  www.jmevents.ro

 

 

La partition de Fanfare for the Common Man d’Aaron Copland, œuvre au programme du baccalauréat 2011, est désormais disponible, en fascicules séparés (pour ensemble de cuivres / pour piano), aux éditions Boosey & Hawkes.  Renseignements : www.boosey.com

 

     

 

Salon du Piano.  Sa 1re édition aura lieu au Cent Quatre (5, rue Curial, Paris XIXe), les 9, 10 et 11 septembre 2011.  Sur 4 000 m² (nef Curial) + 2 auditoriums modulables.  Renseignements : 06 14 15 62 68.  www.salon-du-piano.fr

 

 

À propos du 2nd Quatuor à cordes de Leoš Janáček.  Vidéo avec le Quatuor Mandelring (7’14).  Présentation par Gunter Teuffel, viole d’amour (en allemand, sous-titres en anglais) : www.youtube.com/watch?v=suLdTwsNRVk&feature=player_embedded

 

©DR

 

Cité de la musique, live.  Concerts donnés à la Cité de la musique & à la Salle Pleyel. À suivre sur : www.citedelamusiquelive.tv

 

 

 

Le « Cercle lyrique de Metz » étend ses activités !  Il est particulièrement actif dans le domaine de la connaissance et de la diffusion de l’art lyrique.  Outre qu’il édite, chaque saison, des opuscules analytiques détaillés sur chacune des productions données à l’Opéra-Théâtre de Metz, et qu’il renouvelle tous les ans son cycle de conférences lyriques, il vient d’éditer les Actes du colloque du 30e anniversaire de sa fondation, qui réunit neuf communications faites par des spécialistes.  L’association vient de signer un contrat de donation avec les Archives municipales de la ville, portant sur une collection de 195 plaquettes éditées depuis 25 ans ainsi qu’une dizaine de volumes de l’ouvrage d’art de son président, Georges Masson, sur le 250e anniversaire de la fondation de l’Opéra-Théâtre de la ville, le plus ancien théâtre de France en activité.  Le CLM a créé un site et un blog Internet, véritable journal lyrique retraçant l’activité musicale et lyrique de toute la région (critiques d’opéras, rubriques diverses, intégrales des livrets d’opéras, ainsi que des dossiers sur l’avenir de l’opéra & de l’opérette à Metz, et de l’Orchestre national de Lorraine, sur le prochain bicentenaire d’Ambroise Thomas compositeur originaire de Metz, etc.).  Il a multiplié ses partenariats avec des institutions musicales et culturelles de la région, participe à des émissions radiophoniques et télévisées, organise des voyages d’été dans les grands festivals, et soutient des actions en faveur de la pérennité du répertoire chanté sous sa devise : « Défense et illustration d’un répertoire de cinq siècles, de Monteverdi à la création contemporaine ».

*www.associationlyriquemetz.com

 

Opéra-Théâtre de Metz ©Jean-Pierre Pister

 

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 « L’Orchestre mondial pour la paix » de l’Unesco se produira - pour la 1re fois dans le monde arabe - le 4 janvier 2011, en ouverture du Festival d’Abu Dhabi (capitale des Émirats arabes unis).  En présence de Son Excellence Mme Hoda Al Khamis Kanoo, fondatrice & directrice artistique du Festival, des musiciens - issus de 30 pays différents & de 62 orchestres nationaux - interpréteront, sous la direction de leur chef Valery Gergiev [notre photo], l’Ouverture de Guillaume Tell de Rossini, la 1re Symphonie de Prokofiev et la 5e Symphonie de Tchaïkovski.  Renseignements : www.admaf.org ou : www.abudhabifestival.ae

 

 

      World Orchestra for Peace

                                                                    ©DR

 

Le trio argentin AlmaViva (Mónica Taragano, flûte / Pablo Márquez, guitare / Ezequiel Spucches, piano) se produira les vendredis 7 et 21 janvier, à 20h00, au Studio « Le Regard du Cygne ».  Avec le concours de : Laure Gouget (récitante), Monica Taragano, Johanne Mathaly & Philippe Mouratoglou (musiciens).  Œuvres d’Astor Piazzolla et Ezequiel Spucches.  Renseignements : 210, rue de Belleville, Paris XXe.  Tél. : 09 71 34 23 50.  www.leregarducygne.com/musique.html

 

©DR

 

Récital de musique française, par Romain Descharmes.  Le 17 janvier 2011, à 20h00, à l’Athénée Théâtre Louis-Jouvet, le pianiste interprétera Ravel (Valses nobles et sentimentales), Chabrier (Pièces pittoresques), Debussy (Études), Dubois (Sonate en la mineur).  Renseignements : 7, rue Boudreau, Paris IXe.  Tél. : 01 53 05 19 19.  www.athenee-theatre.com

 

 

« Prades aux Champs-Élysées ».  Le 26 janvier 2011, à 20h00.  Au programme : S. Prokofiev : Ouverture sur un thème juif.  P. I. Tchaikovsky : Souvenir de Florence op. 70.  A. Dvořák : Quintette avec piano en la majeur op. 81.  Avec Brigitte Engerer (piano), Svetlin Roussev & Hagai Shaham (violons), Bruno Pasquier & Vladimir Mendelssohn (altos), Arto Noras & Jérôme Pernoo (violoncelles), Michel Lethiec (clarinette).  Concert diffusé en direct sur France Musique.  Renseignements : 01 49 52 50 50www.theatredeschampselysees.fr ou www.prades-festival-casals.com

 

Pablo Casals ©DR

 

Shadoks & Cie… en musique !  Proposé par « La Péniche Opéra », du 19 au 22 janvier 2011, ce voyage musical comporte trois épisodes : Les Shadoks et la cosmopompe de Denis Chouillet (plus Sports et divertissements d’Erik Satie et L’Histoire de Babar de Francis Poulenc) / Les Shadoks pompent à rebours de Denis Chouillet (plus Chanson dada de Tristan Tzara, Comic Strip de Kathy Berberian, etc.)  / Les Shadoks et l’aréonautique (plus Le vilain petit canard de Serge Prokofiev et La Boîte à joujoux de Claude Debussy).  Renseignements : 46, quai de la Loire Paris XIXe.  Tél. : 01 53 35 07 77.  www.penicheopera.com

 

 

La pianiste finlandaise Tuija Hakkila, professeur à l’Académie Sibelius d’Helsinki, donnera, à l’Institut finlandais de Paris, une série de masterclasses (du mardi 25 au vendredi 28 janvier 2011, de 10h00 à 18h00) et un concert (le vendredi 28 janvier 2011, à 20h00).  Autour de, notamment : Sibelius, Saariaho, Lindberg et Salonen.  Renseignements : 60, rue des Écoles, Paris Ve.  Tél. : 01 40 51 89 09.  www.institut-finlandais.asso.fr

 

©DR

 

La 4e édition des « Journées internationales du Film sur l’Art » (JIFA) se déroulera, à l’Auditorium du Louvre, du mercredi 26 janvier au samedi 5 février 2011.  Avec, notamment, le vendredi 28 janvier, à 14h00, la projection du film suisse Ya Sharr Mout, réalisé autour du compositeur, guitariste & luthiste libanais Mahmoud Turkmani (Prix du meilleur portrait FIFA 2010).  Projection suivie d’un concert d’oud par Mahmoud Turkmani et d’une rencontre avec l’artiste.  Renseignements : 01 40 20 55 55.  www.louvre.fr

 

©DR

 

Conservatoire à rayonnement régional d’Aubervilliers-La Courneuve (CRR 93).  Le vendredi 28 janvier, à 19h30, en l’Auditorium Erik Satie, l’Ensemble S:IC - avec la participation de la chanteuse Donatienne Michel-Dansac & d’élèves du Pôle Sup’93 – se produira dans « Exils intérieurs » : œuvres de Stravinski, Berio, Feldman, Carter et Aperghis.  Le vendredi 11 février, à 19h30, après que les élèves du département Voix du CRR auront assuré la première partie, l’Ensemble Sequenza 9.3, dir. Catherine Simonpietri, interprétera des œuvres de Esa-Pekka Salonen, Anders Hillborg & Einojuhani Rautavaara.  […]  Renseignements : 13, rue Réchossière, 93300 Aubervilliers.  Tél. : 01 48 11 04 60.  www.conservatoireregional93.fr

 

Conservatoire régional d'Aubervilliers - la Courneuve

 

« La Folle Journée de Nantes 2011 » se déroulera en région des pays de Loire (du 28 au 30 janvier) et à Nantes/La Cité (du 2 au 6 février).  Thème : Les Titans (Johannes Brahms, Max Bruch, Max Reger, Anton Bruckner, Gustav Mahler, Hugo Wolf, Alexander Zemlinsky, Richard Strauss, Arnold Schönberg, Alban Berg, Anton Webern, Richard Strauss, Paul Hindemith, Carl Orff, Hanns Eisler, Franz Liszt, Johann Strauss II, Richard Wagner).  Renseignements :0892 705 205. www.follejournee.fr

 

 

« Maldoror » mis en rock… Spectacle théâtral & musical autour des Chants du comte de Lautréamont, conçu et interprété par Malo de La Tullaye (comédien) et Sébastien Lanson (musicien, guitare électrique).  Tous les jeudis et samedis, à 19h00, du 13 janvier au 26 mars 2011, au Guichet Montparnasse.  Renseignements : 15, rue du Maine, Paris XIVe. Tél. : 01 43 27 88 61.

 

 

« Mardi Graves 2011 », 17e édition du Festival des instruments graves, se déroulera du 6 au 19 février, de Perpignan à Montpellier, via Agde, Béziers, Narbonne, Lavérune & Saint-Jean de Védas.  L’octobasse de Nicola Moneta en sera l’invitée-vedette.  Renseignements : 6, rue Saint-Guilhem, 34000 Montpellier.  Tél. : 06 32 42 31 50.  http://mardigraves.free.fr

 

Octobasse ©DR

Francis Cousté.

 

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Quand Marcel Proust écrivait à Reynaldo Hahn, à propos de Pelléas et Mélisande...

 

« Je vous avais fait un joli petit pastiche de Pelléas...  C'est Pelléas et Markel qui sortent de soirée et qui ne peuvent retrouver leur chapeau [il faut chanter en même temps] :

 

Pelléas (dans l'antichambre) :

- Il faisait là-dedans une atmosphère lourde et empoisonnée.  J'ai cru plusieurs fois que j'allais me trouver mal.  Et maintenant tout l'air de toute la terre !  (très doux) On dirait que ma tête commence à avoir froid pour toujours.

 

Markel :

 - Vous avez, Pelléas, le visage grave et plein de larmes de ceux qui sont enrhumés pour longtemps.  Ne cherchez plus ainsi.  Nous ne le retrouverons pas.  On ne retrouve jamais rien ici.  Quelqu'un qui n'est pas d'ici l'aura emporté.  Il est trop tard.  Mais comment était-il ?

 

Pelléas :

- C'était un pauvre petit chapeau comme en porte tout le monde !  On n'aurait pu dire de chez qui il venait.  Il avait l'air de venir du bout du monde.

 

Markel :

- Nous n'en retrouverons plus d'autre maintenant.  C'est une chose terrible, Pelléas.  Mais ce n'est pas notre faute.

 

Pelléas :

- Quel est ce bruit ?

 

Markel :

- Ce sont les voitures qui s'en vont.

 

Pelléas :

- Pourquoi s'en vont-elles ?

 

Markel :

- Nous les aurons effrayées.  Elles auront su que nous nous en allions très loin.  Elles ont eu peur et elles sont parties.  Elles ne reviendront pas.

 

Tu comprends, mon cher Binibuls, ils vont revenir sans chapeau et sans voiture.  C'est embêtant. »

 

Marcel Proust.

 

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La Folle journée de Nantes 2011 : « Les Titans », de Brahms à Strauss

 

 

L'édition 2011 de la grande fête musicale qu'est La Folle Journée de Nantes, se veut ambitieuse.  Sous le thème rassembleur « Les Titans », elle se propose de couvrir pas moins de 100 ans de musique allemande, entre 1850 et 1950.  Autrement dit, une large part du répertoire germanique postromantique, puisqu'on y trouvera aussi bien Brahms et ses héritiers, un Reger par exemple, que l'innombrable cohorte des compositeurs dans le sillage de Wagner : Mahler, Wolf, Zemlinsky ou encore Richard Strauss ; mais aussi les musiciens de l’École de Vienne, Schönberg, Berg et Webern, laquelle influencera à son tour des compositeurs comme Hindemith ou Eisler.  C'est dire qu'on croisera, à Nantes, bien des figures essentielles comme des personnages moins connus.  Et que pratiquement tous les genres musicaux seront illustrés : la musique symphonique ou concertante (comme l'envoûtant Concerto pour violon de Berg « À la mémoire d'un ange », ou Burlesque de Strauss) ; mais aussi, bien sûr, le répertoire chambriste tant mis à l'honneur durant cette période : Brahms le déclinera sous les formes les plus variées (trios, quatuors à cordes, quintettes à cordes, pour piano, ou pour clarinette), comme Schönberg dans son sextuor La nuit transfigurée.  La musique vocale sera aussi largement représentée (Un Requiem allemand ou Via Crucis de Liszt, sans oublier les pages que Schönberg a dédiées à la formation chorale).  Le piano se taillera, bien sûr, une part de choix, dès lors que l'on sait que René Martin, créateur de la Folle journée, lui porte une attention toute particulière.

À la palette extrêmement large des œuvres proposées, répond - comme toujours à Nantes - un éventail d'interprètes immenses et prestigieux.  Le credo est ici d'offrir une programmation rigoureuse fondée sur des bases artistiques exigeantes : une bonne quarantaine de pianistes, confirmés ou jeunes prodiges de l'école française ou espagnole, des violonistes et cellistes de renom, des instrumentistes jouant bois ou cuivres, comme une belle affiche d'ensembles de chambre ; mais aussi des chanteurs et formations de chant choral.  Les orchestres symphoniques ne seront pas en reste : aux côtés des habitués, on citera un nouveau venu, l'Orchestre de la Résidence de La Haye que conduira Neeme Järvi.  On n'aura garde d'oublier les conférences, fort prisées, animées par d’éminents musicologues qui feront revivre personnages hors du commun ou thèmes porteurs de la musique de cette époque, comme les manifestations de musique traditionnelle, complétant un panel riche et varié.

Renseignements : Du 2 au 6 février 2011, à la Cité de Nantes (ex-Palais des Congrès).  Ouverture de la location : le samedi 8 janvier 2011 à partir de 8h00, aux guichets de La Cité-Nantes.  Tél. : 08 92 705 205 (à partir du 10 janvier, de 9h00 à 19h00).  Internet : www.follejournee.fr (le 9 janvier, à partir de 10h00).  Scolaires accompagnés : réservation par téléphone, à partir du samedi 11 janvier, au : 02 51 88 21 38 (de 10h00 à 18h00, du lundi au samedi).

 

 

Exposition : « L'ère Liebermann à l'Opéra de Paris »

 

©Michel Szabo

 

Comment ne pas se souvenir avec émotion de ces années fastes qui marquèrent l'ère Liebermann à l'Opéra de Paris.  Pour commémorer le centenaire de sa naissance, l'Opéra de Paris et la BnF honorent d'une exposition compréhensive celui qui restera l'un des plus grands directeurs de théâtre du XXe siècle.  De 1973 à 1980, durant les sept années de ce que l’on a appelé à l'époque « un festival permanent », Rolf Liebermann (1910-1999) aura réhabilité la scène lyrique parisienne en montant des productions somptueuses dont certaines sont considérées comme mythiques, telles ces Nozze di Figaro qui ouvrirent son mandat ; mais aussi redonné au ballet ses couleurs, en nouant des relations avec les grands chorégraphes de son temps.  Musicien lui-même, passionné de l'art du théâtre surtout, Liebermann aura construit une direction dynamique et innovante.  S'entourant d'une équipe restreinte, dont Sir Georg Solti comme directeur musical, il fera appel aux grands noms de la mise en scène du moment, les Strehler, Ponnelle, Lavelli (un Faust d'anthologie), Losey ou Chéreau.  Les Contes d'Hoffmann consacreront les premiers pas de celui-ci à l'opéra, avant son Ring visionnaire à Bayreuth.  Une piqure de rappel viendra avec la « création » de Lulu, dirigée par Boulez ; là aussi, un événement considérable.  Une de ses grandes fiertés sera d'avoir convaincu Olivier Messiaen d'écrire pour l'opéra.  Et si le colossal Saint François d'Assise ne sera créé à Garnier qu'en 1983, c'est à Liebermann qu'on en doit l'initiative.  Durant son règne, les chanteurs les plus prestigieux devaient affluer place de l'Opéra.

 

©Arthaus

 

L'exposition retrace les diverses étapes du parcours parisien de Rolf Liebermann comme les diverses facettes de ce qu'il y a été, l'administrateur, le directeur artistique, mais aussi le politique qui comprit avant bien d'autres que la situation économique rendait nécessaire une mutualisation des moyens entre maisons d'opéra.  Documents, photos, maquettes de décors, costumes de ses diverses productions font revivre cette ère qui, eu égard au renouveau du répertoire comme à celui de la création, réveilla « la grande boutique » et lui restitua tout son prestige.  Un superbe ouvrage-catalogue, sous la direction de Mathias Auclair et de Christophe Ghristi, prolonge l'intérêt de cette passionnante rétrospective (éditions Gourcuff Gradenigo, volume relié, 24 x 28 cm, 304 p., nombreuses illustrations n&b et couleurs).

Renseignements : Bibliothèque-musée de l'Opéra, Palais Garnier, place de l'Opéra, Paris Ier.  Jusqu'au 13 mars 2011, tous les jours de 10h00 à 17h00 (sauf fermeture exceptionnelle).  Tél. : 08 92 89 90 90 ou : 08 25 05 44 05 (pour les groupes).

Jean-Pierre Robert.

 

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Guillaume Tell curieusement revisité à l'Opernhaus de Zurich

 

©Opernhaus Zürich

 

Créé en 1829 à l'Opéra de Paris qui le lui avait commandé, Guillaume Tell sera le chant du cygne de Rossini à la scène lyrique.  Conçu dans la veine seria, quoique unique dans sa production par la synthèse opérée de sa manière italienne et du style dramatique français, cet ultime opus devait ouvrir la voie au grand opéra français qui dominera la scène durant une large partie du XIXe siècle.  La pièce épique Wilhelm Tell de Schiller que reprend l'opéra est, certes, adaptée par des librettistes pas toujours inspirés pour évoquer la lutte pour la liberté de trois cantons suisses cherchant à se dégager du joug autrichien.  Mais Rossini y trace une large fresque évoquant la grandeur et l'harmonie de la nature, de même que ce pittoresque presque réaliste que transfigure la capacité narrative de sa musique.  La mise en scène conçue pour l'Opernhaus de Zurich par Adrian Marthaler - à ne pas confondre avec l'autre Marthaler, Christoph, familier de l'ère Mortier à Salzbourg - amplifie l'anecdotique au point d'accentuer ce qui, dans cet opéra, n'est déjà pas des plus concis.  Dans une imagerie tournant résolument le dos à quelque vision historique, l'action est abordée de manière « distancée » : replacée parmi le peuple suisse d'aujourd'hui lequel, au milieu de figurants, assiste amusé ou attendri au déroulement de cette histoire médiévale curieusement datée qui naguère forgea son identité.  La célèbre Ouverture est théâtralisée, montrant une sorte de tableau panoptique de la société actuelle avec ses jeunes ressemblant à leurs confrères de partout, son troisième âge fort éclopé, ses éléments multiraciaux.  Les clichés vont abonder ensuite et rien ne sera épargné, du couteau suisse, de la cloche de vache et autre emballage Toblerone, jusqu'à la statue de Tell et de son fils grandeur nature.  Les représentants de l'oppresseur, vêtus de treillis, brandissent leur emblème frappé au bleu étoilé de quelque drapeau européen ; clin d'œil appuyé à la politique isolationniste confédérale.  Sans parler du sosie de Rossini qui, de temps à autre, pose sur tout cela un regard bienveillant ou interrogateur.

 

©Opernhaus Zürich

 

Reste que cette régie postbrechtienne qui manie une dérision pesante, héritée du regietheater qu'aime à privilégier la scène zurichoise, impose une relecture arbitraire de l'action, plus qu'elle ne n'explicite. Et il n'est pas certain qu'elle fasse réfléchir.  Tout au plus surprend-elle, à en juger par l'hilarité du public devant l'incongruité de certains traits.  Curieusement, elle flirte avec la pure convention en matière de direction d'acteurs.  Gianluigi Gelmetti, un spécialiste de l'œuvre, lui apporte dans la fosse le lustre qui lui fait défaut sur scène : sûre maîtrise de l'ambitus mélodique, flair pour monter les fameux crescendos, ménager les effets de spatialité sonore, doser les vastes ensembles concertants.  La distribution est inégale : si Michele Pertusi possède présence et voix de baryton héroïque lui permettant de soutenir le rôle tendu de Tell, et Eva Mei une ligne de chant à peu près adaptée au rôle grandiose de Mathilde, le ténor Antonio Siragusa déçoit par un timbre ingrat.  Il n'a ni la mesure ni l'ampleur vocale de la partie exigeante d'Arnold, située aux confins du bel canto et de la grande déclamation française.  Le chœur de l'Opernhaus, n'était une piètre intonation française, défend avec conviction ce qui, dans cet opéra, participe au plus haut point de l'action collective.

 

 

Quand Puccini s'attache à peindre le Far West

 

©Opernhaus Zürich

 

Giacomo Puccini savait comme peu choisir le sujet de ses opéras.  Après Madame Butterfly, il s'attaque à un autre thème exotique, cette fois puissant et dense.  La Fanciulla del West narre la vie des chercheurs d'or de l'Amérique du milieu du XIXe siècle dont l'existence, somme toute routinière, est soudain troublée par l'arrivée inopinée d'un bandit de grand chemin.  Celui-ci cherche refuge dans le camp et s'éprend de Minnie, la barmaid, qui tient son monde de main de maître, maniant aussi bien le pistolet que le verre de whisky, mais est aussi la bonne étoile des mineurs, auxquels elle inculque les leçons de la Bible.  Comme dans Tosca, on retrouve la lutte triangulaire entre deux hommes et une femme : Dick Johnson, le bandit, mais aussi le shérif Jack Rance se disputent les faveurs de la belle.  L'intrigue, relativement simple mais efficace, sertit ce que les passions humaines ont d'exacerbé.  Elle réserve musicalement une extrême tension et ces coups de théâtre dans lesquels excelle Puccini ; telle l'entrée de Minnie au Ier acte, sur fond de tumulte, créant un brusque changement d'atmosphère ; tout comme l'arrivée de Musetta au dernier acte de La Bohème. Elle connaîtra une fin heureuse, car la vie du bandit aimé, gagnée aux cartes par Minnie, est sauvée par elle de la vengeance du shérif et des mineurs auxquels elle explique les vertus du pardon.  On craignait que la production de l'Opernhaus de Zurich, signée David Pountney, ne réserve quelque relecture radicale.  Point du tout : cette reprise de sa mise en scène de 1998 propose une vision d'un juste réalisme et d'une dramaturgie efficiente, dont l'élément original est de concevoir les péripéties de l'action comme un film.  Ce médium, d'ailleurs habilement utilisé, livre quelques morceaux de pellicule en noir et blanc, style conquête de l'or ou chevauchée fantastique.  L'art de Pountney de détailler ses caractères est sagace, comme l'est la manière éloquente de créer l'animation, alors qu'un ingénieux dispositif scénique sur deux plans démultiplie l'espace.

 

©Opernhaus Zürich

 

Cette reprise, qui s'inscrit dans l'excellence vocale prônée par la scène zurichoise, fait appel à des interprètes de premier plan.  José Cura, spécialiste de longue date du rôle de Dick Johnson, offre un timbre corsé de ténor et privilégie le style à l'éclat.  Prolongeant ici sa longue carrière, Ruggero Raimondi démontre qu'il a encore de la ressource.  Ce que la voix, un peu fatiguée, a perdu en brillance est compensé par une diction incisive, à l'aise dans le style d'arioso déclamatoire qui caractérise le shérif Rance, cousin en vilénie du baron Scarpia.  Emily Magee prête à Minnie les prestiges d'un soprano étendu doté d'un superbe legato.  La carrure du rôle, quelque peu hybride, entre Tosca et Mimi, lui convient tout autant que celle des héroïnes allemandes.  La multiplicité des rôles des mineurs est bien tenue par les membres de la troupe, sans doute plus à l'aise ici que chez Rossini la veille.  Tout comme le sont les chœurs, eux aussi mieux en situation et même en voix dans l'idiome italien.  La direction d'orchestre de Massimo Zanetti se distingue par un habile assemblage de lyrisme expansif, truffé de thèmes revenant en boucle, et de rythmique soutenue.  Elle met en valeur ce que le langage harmonique a ici de différent, comparé aux œuvres précédentes du compositeur, avec l'utilisation fréquente de la gamme pentatonique, des effets sonores audacieux, des dissonances non résolues, des écarts de dynamiques aussi rapides que brutaux.  Car c'est bien dans son climat sonore particulier, annonçant la modernité de Turandot, qu'au sein de la riche production de Puccini, se distingue cet opéra.

 

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Am Piano : à Lucerne, un luxueux festival dédié au clavier

Le festival de Lucerne se veut actif en toutes saisons.  Après les débordements orchestraux du festival d'été, la fin d'automne se veut plus sereine.  La manifestation dite Am Piano se décline autour de cet unique instrument.  Les grands noms du clavier y sont convoqués, de Grigory Sokolov à Evgeny Kissin, d’András Schiff à Pierre-Laurent Aimard, ou encore Andreas Staier et Emmanuel Ax, dans l'auditorium du KKL dont les vastes proportions n'empêchent pas une présence étonnante.  Par ailleurs, le festival voit débuter les sûrs talents de demain qui se produisent dans une église moderne, d'une jauge certes plus modeste, mais dotée d'une bonne acoustique.  Durant cette semaine festive, le piano n'est pas seulement illustré par le genre du récital, mais encore dans sa forme concertante.  Elle propose aussi un festival de piano jazz, dit Piano Off-Stage, qui se donne dans divers hôtels de la ville, aussi bien qu'en apéritif des grandes manifestations nocturnes, dans la salle au bord du lac.

 

Brahms contrasté : la seconde Sérénade et le Concerto pour piano n°2

 

Bernard Haitink ©Priska Ketterer

 

Après leur cycle Beethoven qui conquit le public par son dépouillement et la recherche d'une vraie intériorité, particulièrement remarquable quant aux interprétations par Maria João Pires des concertos, Bernard Haitink et les musiciens de l'Orchestre de chambre d'Europe entreprennent un cycle Brahms, destiné à se poursuivre à Lucerne au long des festivals de 2011.  Le second des deux concerts de la présente édition programmait le Concerto pour piano n°2 et à la deuxième Sérénade ; idée originale puisque rapprochant deux œuvres on ne peut plus dissemblables.  De fait, la Sérénade op.16, qui ouvre le concert, offre quelque surprise.  Elle est écrite - à la différence de sa sœur jumelle op.11 - pour une petite formation et omet totalement les violons pour ne garder que les cordes graves.  Y est favorisée une sonorité chaude et sombre, ce à quoi contribuent pour beaucoup les pupitres d'altos.  En outre, les vents - trompettes exceptées - y tiennent une place prépondérante, laissant de temps à autre les cordes à l'arrière-plan.  Quoique répondant à l'esthétique du jeune Brahms (1860), elle laisse entrevoir un climat de gravité, caractéristique du grand maître du romantisme allemand.  Cinq mouvements la composent, la clef de voûte en étant l'adagio, au climat quasi religieux, que Clara Schumann qualifiera de « merveilleusement beau ».  Avec un effectif restreint de musiciens d'élite, Bernard Haitink obtient une élégante finesse instrumentale, à la petite harmonie en particulier.  Pièce magistrale du répertoire concertant, le Concerto pour piano op.83 mêle si intimement soliste et orchestre que d'aucuns ont cru devoir parler à son propos de concerto avec piano obligé.  En fait, comme ailleurs dans le répertoire concertant de Brahms, la trame orchestrale se voit assigner un rôle dépassant de loin celui de simple accompagnement.  Elle introduit une vraie dramaturgie au soutien du discours soliste.  Cela frappe d'évidence dès les premières mesures de l'interprétation qu'en livre Haitink, à la fois structurée et flexible, dégagée de toute grandiloquence.  Le piano d’Emmanuel Ax s'y inscrit naturellement avec une rare musicalité.  Sans doute parce que cet artiste aime plus que tout se livrer à la musique de chambre, sa vision intègre-t-elle quelque chose de partagé.  Non pas une vision d'une puissance conquérante, mais empreinte de sérénité.  L'élasticité du jeu se conjugue avec la douceur du doigté, ce qui confère à la coulée brahmsienne une allure naturelle, dégagée de pathos.  Le développement du premier mouvement, par exemple, en acquiert une saveur particulière, ample et emplie de tendresse.  C'est une fête que cet idéal équilibre entre soliste et orchestre sous la conduite du maître Haitink qui apparaît désormais comme un sage de la musique.

 

Deux débutants « confirmés »

 

Jean-Frédéric Neuburger ©Franca Pedrazzeti

 

Il faut déjà avoir conquis une certaine célébrité pour se voir afficher à Lucerne, même dans le cadre des concerts « débuts ».  Du haut de ses vingt-quatre ans, le parisien Jean-Frédéric Neuburger a derrière lui un parcours étonnant puisque formé, entre autres, chez Christian Ivaldi, finaliste du Concours Long/Thibaud en 2004, il mène carrière tant en Europe qu'aux USA et est, depuis 2009, professeur au CNSM !  Un fin musicien qui, pour sa première apparition ici, ne joue pas la facilité.  La Chaconne de Bach, extraite de la Partita BWV 1004, dans la transcription conçue par Brahms pour la seule main gauche, est d'une belle clarté, ménageant d'amples contrastes dynamiques.  En opposition, l'exploitation que fait Liszt du registre aigu du clavier dès les premières pages de la Prédication aux oiseaux, première des Deux Légendes, est mise en exergue par une extrême fluidité du jeu.  La seconde, Saint François de Paule marchant sur les flots, se déploie telles des vagues de fond.  Le Merle de roche de Messiaen (tiré du Catalogue d'oiseaux) découvre une autre facette du talent de Neuburger : courtes séquences, accords détachés et rôle du silence, tout le spectre sonore du piano est ici passé en revue.  Du poème chorégraphique de Ravel, La Valse, les diverses atmosphères sont habilement ménagées, non sans une certaine robustesse couronnant la grande montée infernale qui voit se désagréger le thème.  Ce programme, pour le moins exigeant, se complète d'une composition dont le pianiste est l'auteur.  Les « Trois Chants de Maldoror » (2008/2009) s'approprient les visions surréalistes imaginées par le poète français Isidore Ducasse, dit comte de Lautréamont.  Ils ne ménagent pas leur interprète : traits virtuoses déchaînés dans les deux volets extrêmes enchâssant une section plus calme.  Le troisième, pour piano préparé, joue de l'opposition entre des notes pointées à la sonorité étouffée et un ardent discours sollicitant démesurément le grave, en forme de vision d'apocalypse.

 

 

La jeune munichoise Alice Sara Ott (°1988) a elle aussi acquis de sérieux lauriers, et même un contrat avec la firme à l'étiquette jaune.  Cela explique peut-être la forte affluence qui honore son concert.  Son programme ambitieux remplit-il pour autant toutes ses promesses ?  Une technique irréprochable, une belle ductilité ne sont pas suffisantes pour donner toute la mesure de la vaste Sonate Waldstein de Beethoven.  La carrure, la vaillance, le délicat continuum qui doit être établi entre les diverses séquences de l'allegro con brio et ses changements continuels de climat laissent une impression d'inabouti que, l'expérience aidant, la pianiste saura dépasser, à n'en pas douter.  Les Consolations de Liszt la trouvent plus à l'aise, car ces six miniatures au ton grave, si peu virtuoses, sont jouées avec une indéniable profondeur.  Comme l'a montré l'un de ses derniers disques, elle est pleinement en phase avec l'univers des valses de Chopin. La mélancolie, la sensibilité, le charme sont là, tangibles.  Les deux Grandes Valses brillantes op.34 sont habilement contrastées avec simplicité et sans affectation, la seconde, la préférée du compositeur, libérant à travers son « lento » une douce nostalgie.  Ott s'y garde aussi de toute rutilance extravertie.  Ce sera encore le cas dans les deux premières Valses de l’op.64, justement enchaînées, d'une belle noblesse de ton.  Aussi la Campanella de Liszt, donnée en bis, hyper démonstrative - ce qui remplit de joie le public qui n'attend que cela - était-elle nécessaire pour ajouter à sa déjà belle notoriété ? Le plaisir que réserve cette artiste est ailleurs.

 

Evgeny Kissin en récital : un grand moment

 

 

Le pianiste Evgeny Kissin est passé du statut de jeune prodige à celui de grand virtuose.  Sa démarche d'adolescent sage, son calme olympien dès qu'il prend possession du clavier laissent apparaître une formidable capacité de concentration.  Anniversaires obligeant, il jouera Schumann puis Chopin.  L'admiration mutuelle des deux musiciens est connue : le premier dédicacera au second ses Kreisleriana.  Chopin en fera de même de sa deuxième Ballade. Les Fantasiestücke op.12 (1837) en référence à E.T.A. Hoffmann, sollicitent l'imagination et détaillent des climats éminemment contrastés, opposition de forces contradictoires : le tourmenté côtoie le primesautier ; le léger virevoltant laisse place à la gravité et aux sombres épanchements.  Les Novelettes op.21 (1838), contemporaines des Scènes d'enfants, content des histoires secrètes et évoquent quelque voix du lointain.  Mais c'est encore l'élément fantastique qui prédomine, l'humour, voire l'hallucination, à travers des traits syncopés et des rythmes de marche, chers au musicien.  Deux mots caractérisent la manière de Kissin : souffle et raffinement.  Le moyen : un jeu près du clavier qui ne recherche pas l'effet ; une manière de modeler le son tirant de l'instrument sa totale résonance dans le grave.  Cela se vérifie peut-être plus encore avec Chopin, en seconde partie.  Chopin aurait déclaré à Schumann, lors d'une visite rendue à ce dernier, que ses Ballades lui avaient été inspirées par des poèmes de son compatriote Mickiewicz.  Quoi qu'il en soit de cette référence littéraire, rare chez le musicien polonais, celui-ci va transfigurer le genre, cantonné jusqu'alors au domaine vocal, pour lui imprimer l'aspect d'un récit complexe, insistant à travers la diversité des sentiments, sur le facteur émotionnel.  Bien qu'il ne s'agisse pas d'un cycle, il est intéressant, en les écoutant l'une après l'autre, de déceler ce qui, au-delà de leur caractère rhapsodique, les différencie.  La première déroule des climats étincelants et fait s'affronter les thèmes à l'envi.  Dans la deuxième, la mélodie, une des plus envoûtantes de Chopin, exhalant le zal polonais, ouvre une dramaturgie du contraste, idyllique dans le chant, alors que la main gauche se fait tempétueuse.  L'atmosphère de conflit s'apaise dans les deux autres pièces : la troisième est fantasque à souhait, avec ses déhanchements caractéristiques.  Enfin, la dernière, autre sommet mélodique et traitant le thème comme en variations, progresse dans une atmosphère quasi impressionniste.  Kissin privilégie à fond le contraste, alliant rythme et dynamique pour des progressions sonores imposantes, le fff allant de pair avec la rapidité.  Il tempère ailleurs le discours, distillant les motifs élégiaques par une extrême modération du son qui cultive le ppp.  Quelque 25 minutes de bis, dédiés à Chopin, contiennent à peine l'enthousiasme du public qui lui fait une standing ovation.

Jean-Pierre Robert.

 

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Intégrale des Cantates de J.-S. Bach, 12e saison.  Dimanche 5 décembre 2010, Temple du Foyer de l’Âme : Cantate BWV 62 : Nun komm, der Heiden Heiland.

Pour le deuxième concert de cette saison, Freddy Eichelberger a fait appel à des concours extérieurs : l’Ensemble vocal Ripieno et l’Ensemble instrumental Plurium dirigés par Daniel Leininger, organiste et directeur du Service Musique de l’UEPAL (Union des églises protestantes d’Alsace…), venus de Strasbourg où, la veille, ils avaient interprété cette cantate pour le temps de l’Avent, en l’église Saint-Guillaume réputée pour sa tradition de concerts J. S. Bach.

La thématique a été lancée par la Fantaisie de Nicolaus Bruhns (1665-1697) sur le choral adapté en allemand par Martin Luther : Nun komm, der Heiden Heiland, Viens, Rédempteur des païens / Veni Redemptor gentium (et non : Veni Creator gentium, cf. programme…).  Daniel Leininger a remarquablement structuré cette Fantaisie introduite par le thème éponyme exposé en valeurs longues à la partie de ténor, repris par l’alto, puis la pédale, avec des passages en imitation, en écho et des traits de virtuosité.  L’ensemble a bénéficié d’une excellente registration, et l’organiste de Saint-Thomas a tiré le meilleur parti du nouvel orgue Quentin Blumenroeder du Foyer de l’Âme.

La Cantate éponyme de J. S. Bach (BWV 62), pour le 1er dimanche de l’Avent, s’est, dès l’introduction instrumentale, imposée par les belles sonorités des hautbois et du basson, avant l’énoncé du Choral par l’Ensemble vocal Ripieno, dont le paysage vocal était remarquable.  Après l’Air : Bewundert, o Menschen, dies grosse Geheimnis d’Akeo Hasegawa (ténor), tout en souplesse, le Récitatif : So geht aus Gottes Herrlichkeit et l’Air : Streite, siege, starker Held, avec de nombreux figuralismes pour évoquer le combat, la victoire et le héros ont été profondément vécus et chantés avec une remarquable diction par Fabien Gaschy (basse). Ensuite, le Duo : Wir ehren diese Herrlichkeit… pour soprano (Magda Lukovic) et alto (Elisabeth Boesch) bien soutenues par les cordes et le continuo, illustrant la marche vers la crèche, la joie et la lumière, servait de transition vers le choral doxologique : Lob sei Gott, dem Vater… placé sous le signe de la louange, remarquablement dirigée par D. Leininger assurant le continuo et donnant, avec une concentration exceptionnelle, les entrées aux interprètes sans les voir.  Bref : une interprétation digne de J.-S. Bach.

Enfin, pour conclure : retour à Nicolaus Bruhns, avec son Praeludium en sol majeur, massif et énergique, avec entrées précises, traits de pédale, oppositions de temps forts et faibles, et la Fugue si bien structurée par Daniel Leininger, non seulement organiste et soliste, mais aussi coordinateur.  Cette audition, parmi d’autres, comptera dans les annales du Foyer de l’Âme.

 

Temple du Foyer de l’Âme ©DR

 

[Prochain concert à ne pas manquer : dimanche 2 janvier, 17h 30, Temple protestant du Foyer de l’Âme (7bis, rue du Pasteur Wagner, Paris XIe).  Au programme : Cantate BWV 152 : Tritt auf die Glaubensbahn.  Coordination artistique : Frédéric Rivoal (www.lescantates.org) ].

 

 

Chœur de chambre « Les Temperamens Variations ».  Église des Billettes (jeudi 9. XII. 2010).  Église évangélique allemande (dimanche 12. XII. 2010).

Pour son 2e programme de la saison parisienne (cf. précédente Lettre d’information, n°43), Thibault Lam Quang a retenu des œuvres pour le temps de l’Avent.  Les nombreux auditeurs ont pu découvrir 5 motets a cappella de Gottfried August Homilius (mort un siècle après la naissance de Bach), reposant sur des textes bibliques rarement interprétés en France.  Ils se situent dans la mouvance de l’Empfindsamkeit et aussi dans une atmosphère préromantique, comme l’a souligné Gilles Cantagrel qui a le don de galvaniser l’assistance.  Les chanteurs se sont surpassés, conférant relief, éclat, luminosité, entrain à ces motets très agréables à entendre.  Le volet suivant était dévolu à des extraits de la Geistliche Chormusik (1648) de Heinrich Schütz, né un siècle avant J. S. Bach.  Ces « miniatures » - soutenues par le continuo si précis de Helga Schauerte (orgue) et Matthieu Fontana (violoncelle) - ont bénéficié de soins extrêmes pour recréer les multiples intentions du compositeur.  La virtuosité vocale était à son comble avec Tröstet, tröstet mein VolkIch bin eine rufende Stimme a été chanté avec insistance, puis avec une animation bien dosée.  Après la pause, H. Schauerte s’imposa par sa version du Prélude en sol pour orgue (BuxWV 149) de Dietrich Buxtehude.  La séquence suivante était placée dans l’optique comparative autour du choral adapté en allemand par Martin Luther : Nun komm, der Heiden Heiland, chanté en alternance avec l’harmonisation de J. S. Bach, suivi du Choral-prélude éponyme (BuxWV 211) de Buxtehude, puis des strophes 3 et 4, entrecoupées par le Prélude (BWV 659) extrait des Chorals de Leipzig, enfin des strophes 5 et 6 et, pour conclure : le Choral-prélude éponyme de G. A. Homilius, remarquablement interprété par l’organiste titulaire.  Le motet de J. S. Bach : Singet dem Herrn ein neues Lied (BWV 225) - tant redouté par les chefs de chœur, comme des chanteurs - a été enlevé avec brio, une articulation vocale remarquable et, après l’invitation à la louange : Lobet den Herrn, le concert s’est ainsi terminé sur une belle envolée et en feu d’artifice.  Décidément, le Chœur de chambre « Les Temperamens Variations », sous la direction exigeante de l’inégalable Thibault Lam Quang, est au meilleur de sa forme.

 

©DR

Édith Weber.

 

 

Envoûtante Angelica Kirchschlager. Salle Pleyel : SCHUBERT, BRAHMS. Kammerorchester Basel, dir. Paul McCreesh.

Une première partie de concert consacrée à Schubert (1797-1828) nous permit d’entendre, après l’ouverture de Rosamunde, une sélection de Lieder, transcrits pour l’orchestre par différents compositeurs, dont Max Reger.  Occasion de retrouver la remarquable mezzo autrichienne Angelica Kirchschlager qui nous gratifia d’une envoûtante interprétation, associant une grande sensibilité, une parfaite diction, une convaincante présence scénique, une technique vocale sans faille, utilisant toute l’étendue de sa tessiture pour donner plus de corps à ces sublimes Lieder, avec, notamment, un Erlkönig d’anthologie.  La seconde partie était, quant à elle, dédiée à Brahms (1833-1897), avec une Deuxième Symphonie (1877) lumineuse, gaie, méditative, où affleure par instants une douce mélancolie.  Menée tambour battant par un Paul McCreesh survolté, elle nous permit d’apprécier la réactivité de l’orchestre, son sens des nuances et les très belles sonorités de cette formation de chambre dont la réputation n’est plus à faire.  Une belle soirée.

 

©Nikolaus Karlinsky

 

 

Un magnifique concert, Salle Pleyel : WEBERN, BERG, ZEMLINSKY.  Orchestre philharmonique de Radio France, dir. Peter Hirsch.  Angela Denoke (soprano), Peter Mattei (baryton).

Les Six pièces pour orchestre op. 6 d’Anton Webern (1883-1945) et la Suite lyrique d’Alban Berg (1885-1935), dans sa version pour orchestre à cordes, se partageaient la première partie, tandis que l’impressionnante Symphonie lyrique d’Alexander von Zemlinsky (1871-1942) concluait, avec éclat, cette soirée.  La direction d’orchestre de Peter Hirsch, particulièrement efficace, précise et intelligente, donnait aux Pièces de Webern, où prédominent les vents, le scintillement, le mouvement et le mystère d’un mobile de Calder, tandis que la Suite lyrique de Berg, œuvre charnière entre tradition et modernité, chargée d’émotion et de sens caché, nous permettait d’apprécier la souplesse et l’expressivité des cordes.  Mais le meilleur restait à venir, avec l’incontestable Symphonie lyrique de Zemlinsky, mêlant les déferlantes orchestrales aux voix de Peter Mattei et d’Angela Denoke.  Œuvre composée en 1922, alliant les genres de la symphonie et du lied, elle est constituée de sept parties, écrites sur des textes du poète hindou Tagore, chantées alternativement par un baryton et une soprano.  Occasion pour l’orchestre de faire montre de toute sa cohésion, de son sens des nuances, de la richesse de ses couleurs orchestrales et du parfait agencement des différents plans musicaux, sous la baguette inspirée de Peter Hirsch.  À la voix ample, puissante, profonde et dramatique de Peter Mattei, succédait, au fil de l’œuvre, la voix, peut-être plus contestable, d’Angela Denoke dont on regrettera l’important vibrato et les aigus parfois légèrement forcés.  Enfin, une mention particulière pour Svetlin Roussev dont le violon solo, accompagnant les voix, était d’une sublime beauté. Un concert d’exception.

 

Peter Hirsch ©Adrienne Meister

 

 

Gil Shaham, un violon magique, Salle Pleyel.  Orchestre de Paris, dir. Dima Slobodeniouk.

Un climat de féerie pour ce remarquable concert de l’Orchestre de Paris dirigé par le jeune chef russe Dima Slobodeniouk dans un programme associant Le Lac enchanté, poème symphonique le plus connu et le plus joué d’Anatole Liadov (1855-1914), miniaturiste russe, le Concerto n°2 pour violon de Prokofiev (1891-1953) et Petrouchka d’Igor Stravinski (1882-1971), dans sa version originale de 1911.

 

Gil Shaham ©Christian Steiner

 

Après une interprétation du Lac enchanté, empreinte de fantastique, de scintillement et de mystère, d’où émergeaient, par instants, les interventions frémissantes des bois, de la harpe et du célesta, ce fut le violon magique de Gil Shaham qui fit chanter Prokofiev dans une vision du Deuxième Concerto pour violon pleine d’intensité, de délicatesse et d’émotion, parfaitement en phase avec l’orchestre, associant une virtuosité sans faille, un lyrisme exaltant et une sonorité ample et profonde (Stradivarius de 1699, « Comtesse de Polignac »), interrompue à plusieurs reprises par des pizzicati angoissés ou triomphants.  Une interprétation d’anthologie confirmant Gil Shaham comme l’un des plus grands violonistes du moment.  En deuxième partie de concert, Petrouchka, dans sa version 1911 avec grand effectif orchestral, permit à Dima Slobodeniouk de mettre en avant l’intelligence de sa direction d’orchestre, précise, maniant avec bonheur l’agencement des différents plans orchestraux ainsi que la qualité de tous les pupitres et notamment des vents, dans une conception plus symphonique que chorégraphique pleine de contrastes, de couleurs et de chatoiements.

 

Dima Slobodeniouk ©Marco Borggreve

 

 

Valery GERGIEV conquérant, salle Pleyel.  Gustav MAHLER (1860-1911) : Symphonie n°2 « Résurrection ».  Anastasia Kalagina (soprano), Olga Borodina (mezzo-soprano), Chœur de Radio France, Orchestre du Théâtre Mariinsky, dir. Valery Gergiev.

Après la Symphonie n°8, dite « des Mille », donnée en septembre dernier et critiquée dans ces colonnes, voici le deuxième opus de cette intégrale des symphonies de Gustav Mahler, dirigée par Valery Gergiev à la tête de son orchestre du Mariinsky.  La Symphonie n°2, composée entre 1888 et 1894, créée en 1895 à Berlin, s’intègre dans le premier volet des Symphonies s’inspirant directement du Knaben Wunderhorn.  Elle s’inscrit dans la continuité de la première symphonie puisqu’il s’agit du héros de Titan qu’on enterre, pour assister ensuite à sa résurrection, mais elle s’en distingue par une recherche du monumental marquée par l’introduction du chœur et de voix solistes.  Composée très rapidement sous l’emprise d’une force « venue d’ailleurs » qui le soulève, Mahler se compare à un instrument de musique dont jouerait « l’esprit du monde, la source de toute existence ».  Elle se compose de cinq mouvements s’inscrivant dans un véritable programme : une « cérémonie funèbre » (Totenfeier), un andante moderato, un scherzo tiré du lied « Des Antonias von Padua Fischpredigt », un lied pour voix d’alto « Urlicht » tiré également du « Wunderhorn » et un final pour voix solistes, chœur et orchestre, inspiré d’un texte de Klopstock dont Mahler eut la révélation lors des funérailles de Hans von Bülow.

 

©Fred Toulet

 

Pour Mahler, composer une symphonie c’est « créer un univers avec tous les moyens à sa disposition ».  Dans le premier mouvement le héros est porté en terre après un combat contre la vie et le destin, alternant épisodes austères et sereines éclaircies.  Le deuxième mouvement correspond à un intermezzo d’une grande fraîcheur traduisant un moment de bonheur avant le tourbillon burlesque et chaotique du scherzo, ronde infernale, synthèse de grotesque, de sentimental, ponctuée de sursauts inquiétants, reflets de l’angoisse du héros et de son « dégout de toute existence qui le saisit comme un poing d’acier et le torture jusqu’à lui faire pousser un grand cri de désespoir », la fanfare est ici explosion dissonante, vision de Jugement dernier.  Dans le quatrième mouvement, l’espoir renait avec « la voix touchante de la foi naïve qui résonne à son oreille ».  Le final, avec le « Grand Appel » des cuivres en coulisses, le chant du rossignol qui gazouille sur les tombes comme « un dernier écho de la vie terrestre » puis l’entrée pianissimo et retardée du chœur sur l’« Auferstehen » de Klopstock, exprime, pour Mahler, la confiance dans la capacité de l’homme à modeler son propre destin : « Avec des ailes que je me suis moi-même conquises, dans un brûlant élan d’amour, je m’envolerai vers la lumière invisible à tout œil, je meurs afin de revivre ».  Unies dans une même ferveur, les voix clament le mot « Auferstehen » (tu ressusciteras) avant de laisser la parole à l’orchestre dans un éclat inoubliable. La Deuxième symphonie est probablement celle qui porte la spiritualité mahlérienne à son plus haut niveau.  Gergiev en donna une interprétation monumentale, très engagée, contrastée, accentuant les nuances et les variations rythmiques poussant parfois son orchestre à la limite de ses possibilités, d’où l’émergence, par instants, d’un sentiment de confusion, effaçant la netteté de l’orchestration mahlérienne.  Si les parties orchestrales souffraient de ces quelques imperfections, en revanche les voix, solistes et chœur, étaient, quant à elles, sans reproches, avec une mention particulière pour Olga Borodina, dont les aigus limpides et les graves profonds rendaient à « Urlicht » sa lumière originelle.

 

©Fred Toulet

 

 

Le « Philhar » lumineux dans les « Jardins à la française », Salle Pleyel :  DUSAPIN, DUTILLEUX, RAVEL.  Orchestre philharmonique de Radio France, dir. Myung-Whun Chung.

Avant son départ en Russie, en guise de répétition générale, l’Orchestre philharmonique de Radio France, dirigé par son chef titulaire, nous proposait un concert en forme de promenade à travers la musique française associant Dusapin, Dutilleux et Ravel.  En première partie, Reverso, solo pour orchestre n°6, très belle composition de Pascal Dusapin, composée en 2006, créée en 2007 au festival d’Aix-en-Provence par le Philharmonique de Berlin, sous la direction de Simon Rattle.  Utilisant toute la masse orchestrale sur un fil mélodique continu qui se plie, se déplie pour se replier enfin, cette œuvre déployait toutes ses ondulations pour nous emprisonner dans un voile d’une grande sensualité mêlant, avec bonheur, pulsation rythmique oppressante et richesse des timbres.  Une composition toute différente lui faisait suite, les Métaboles d’Henri Dutilleux, composées en 1964, créées en 1965 à Cleveland sous la direction de George Szell.  Image en creux de la composition précédente, puisqu’utilisant, tour à tour, les différents pupitres dans de véritables concerti se succédant en cinq parties, dans une somptueuse orchestration : incantatoire pour les bois, linéaire pour les cordes, obsessionnelle pour les percussions, torpide pour les cuivres et flamboyante, en guise de conclusion, pour l’ensemble de l’orchestre.  En deuxième partie, le Tombeau de Couperin et les deux Suites de Daphnis et Chloé de Maurice Ravel, toutes en délicatesse, véritables ciselures orchestrales, pleines de charme et de légèreté, confirmaient la richesse en couleurs de l’orchestre magnifiquement dirigé par le chef coréen.  Un très beau concert qui nous emmène loin des chemins battus, superbement interprété par l’Orchestre philharmonique au mieux de sa forme, tant individuellement que collectivement, faisant preuve d’une grande cohésion sous la baguette précise et intelligente de Myung-Whun Chung, très à l’aise dans ce répertoire.  Une musique française dans tous ses états qui, portée par de tels ambassadeurs, remportera, à n’en pas douter, un grand succès à Moscou et Saint-Pétersbourg.

 

©Jean-François Leclercq

 

 

Salle Pleyel : Russian National Orchestra, dir. Mikhail Pletnev.  Guidon Kremer, violon.

Malgré la neige qui avait immobilisé le camion du Russian National Orchestra à quelques kilomètres de Paris, immobilisant, de ce fait, partitions, instruments et costumes, la tournée du RNO se poursuivait, Salle Pleyel, dans un programme modifié du fait des circonstances, associant les Danses slaves d’Antonín Dvořák, le Concerto pour violon et la 5e Symphonie de Tchaïkovski.  Guidon Kremer (violon Amati, 1641) donna, du concerto, une vision emplie de sensibilité, de toucher, de tension, accentuant les nuances pour mieux favoriser l’expressivité du discours, préférant en permanence l’émotion à une virtuosité, pourtant sans faille.  En seconde partie, le chef russe nous maintint sous le charme, avec une très belle interprétation de la 5e Symphonie, menant, dans une tension permanente, cette réflexion sur le destin, dégageant un climat d’accablement et de souffrance, avec l’émergence, par instants, de quelques élans d’un lyrisme poignant.  Une remarquable sonorité et une cohésion solide de ce bel l’orchestre, dirigé par Mikhail Pletnev, dans une gestique très intériorisée.

 

©Musacchio Farabola

Patrice Imbaud.

 

 

Mathis le peintre à l'Opéra Bastille.  Paul HINDEMITH : Mathis der Maler.  Opéra en sept tableaux.  Livret du compositeur.  Matthias Goerne, Scott MacAllister, Mélanie Diener, Thorsten Grümbel, Wolfgang Ablinger-Sperrhacke, Gregory Reinhart, Michael Weinius, Antoine Garcin, Martina Welschenbach, Nadine Weissmann.  Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris, dir. Christoph Eschenbach.  Mise en scène : Olivier Py.

 

©Charles Duprat/OnP

 

Une œuvre majeure de l'opéra du XXe siècle entre au répertoire de l'Opéra de Paris : Mathis le peintre.  Le grand opus de Paul Hindemith aura vu le jour, en 1938 à Zurich, après bien des vicissitudes qui lui valurent de se voir refuser de création en Allemagne.  Il ne s'y imposera que dix ans plus tard.  C'est qu'à travers la destinée du peintre Matthias Grünewald, auteur du magnifique retable d'Issenheim, le compositeur n'a pas cherché la facilité.  L'œuvre est longue, parfois déroutante, austère comme un tableau de Dürer, mais habitée d'une indéniable sincérité.  Le thème en est le sort de l'artiste, incompris de la multitude, et la liberté de l'art ; l'opposition presque irréductible entre la masse inculte, aisément manipulable du fait de son ignorance, et les érudits qui possèdent le savoir et auxquels l'art permet d'exprimer leurs idées.  Et cette question cruciale : « l’artiste doit-il prendre parti ? ».  Hindemith place cette problématique dans un contexte historique, celui de la guerre des paysans dans l'Allemagne du XVIe siècle.  L'artiste Mathis, qui épouse la cause des paysans opprimés, va vivre un véritable chemin de croix, en butte à la critique des puissants, et connaître le naufrage de ses certitudes d'artiste et d'homme ; en proie au doute du créateur, délaissé malgré les ultimes tentatives de ceux qui soutiennent son art, il finira par se murer dans la solitude.  Le substrat autobiographique n'est pas loin : ce sont ses propres démêlés avec le régime national-socialiste que laisse entrevoir Hindemith, le rejet dont il est l'objet parce que n'étant pas un « vrai musicien allemand », qui le conduiront à s'expatrier.

 

©Charles Duprat/OnP

 

Les implications politiques et morales de la pièce, Olivier Py les fait siennes dans sa mise en scène qui transpose l'action à l'époque de la création de l'œuvre, dans ces années 1934/1938 de montée de l'intolérance.  Des visions fortes et d'impressionnants tableaux s'imposent : triptyque pictural suggéré en ombre chinoise, vaste salle étagée sur plusieurs plans, scène de chaos révolutionnaire, ou encore un étonnant mur de bougies aux lueurs vacillantes.  L'emphase est mise sur quelques symboles : la petite lumière de la chambre nue de Mathis au premier plan, de l'espoir invincible, les livres amoncelés, symboles vivants de culture.  Bien qu'utilisant l'entier plateau de l'Opéra Bastille où évoluent des constructions métalliques en constante transformation, transfigurées par de suggestifs éclairages, Py ménage ce qui, dans cet opéra, ressortit à l'intimité des échanges.  La régie d'acteurs reste frappée au coin de la sobriété.  L'agitation qui, certes, anime un certain nombre de passages, n'envahit pas une lecture qui se veut concise.  Ainsi de la scène qui voit Mathis revivre en songe la tentation de saint Antoine ou du tableau final, d'un dépouillement ascétique, où tout semble se raréfier autour d'une homme résigné, conduit peu à peu à se défaire des biens qui furent les siens durant son existence.  Qui mieux que Christoph Eschenbach pouvait défendre cette partition, lui qui s'est fait le défenseur de la musique de Hindemith ?  L'empathie est évidente pour ce mélange d'hymne, de choral grégorien, de chanson populaire, de climat quelque peu mystique qui se veut proche de la polyphonie de la Renaissance.  L'Orchestre de l'Opéra se meut avec aise dans l'extrême différenciation des plans sonores qui sollicite notamment les vents et les cuivres.  D'une distribution exigeante, mais sans faille, se distinguent des individualités d'exception.  Matthias Goerne, qui choisit avec prudence ses apparitions scéniques, fait sien le rôle-titre ; comme Dietrich Fischer-Dieskau naguère.  La comparaison n'est pas fortuite car, dans les deux cas, on a affaire à un chanteur pratiquant l'art suprême du lied.  Grâce à sa parfaite articulation du texte, il s'accommode des longues phrases tendues qui soutiennent les redoutables monologues de Mathis, et des traits soutenus sollicitant la partie haute du registre de baryton.  De sa voix puissante de ténor de composition, Scott MacAllister livre un non moins formidable portrait de grand ecclésiastique imbu de soi-même.  À saluer encore les prestations de Wolfgang Ablinger-Sperrhacke, Capito, le rusé manipulateur politique, de Mélanie Diener, Ursula, et de Martina Welschenbach, Regina, deux caractères que tout sépare, deux artistes que réunit l'intensité de leur assomption scénique et vocale.

 

 

Reprise de La Fiancée vendue à Garnier.  Bedřich SMETANA : La Fiancée vendue.  Opéra comique en trois actes.  Livret de Karel Sabina.  Inva Mula, Piotr Beczala, Jean-Philippe Lafont, Andreas Conrad, Oleg Bryjak, Isabelle Vernet, Michael Druett, Marie-Thérèse Keller, Heinz Zednik.  Orchestre & Chœur de l'Opéra national de Paris, dir. Constantin Trinks.  Mise en scène : Gilbert Deflo.

 

©Christian Leiber/OnP

 

Considéré comme le père de l'école nationale tchèque, Smetana a réveillé par la musique, si ancrée dans le cœur de ses compatriotes, la conscience populaire de son pays, s'inscrivant dans le mouvement d'émancipation vis-à-vis du voisin allemand.  Son deuxième opéra, La Fiancée vendue, créé en 1866, est une comédie de genre tirée d'un fait divers pittoresque : une jeune fille éprise d'un garçon pauvre se verra unie à lui malgré une machination ourdie par un marieur visant à lui faire épouser un grand mais riche benêt.  Y sont croqués quelques personnages attachants sur fond d'imagerie paysanne : outre le marieur, deux familles de statut social opposé, et des villageois crédules.  Comme dans toute comédie, la farce peut soudain basculer dans le dramatique, à l'aune des sentiments amers de la petite Mařenka qui ose se rebeller contre ce qu'on tente de lui imposer.  Elle est surtout transfigurée par le charme d'une musique riche de tonalités slaves colorées, mobile dans ses rythmes, mêlant l'entrain irrésistible des danses, polka furiant et autre sauteuse, et une veine authentiquement populaire dans le traitement des chœurs.  La production signée Gilbert Deflo en 2008, décrypte un attrayant mélange d'humour et de tendresse, quoique elle ait quelque peu perdu de son mordant.  Si les intermèdes chorégraphiques, de facture athlétique, singeant quelques entrechats convenus, gardent leur fraîcheur naïve, et les ensembles une réelle vivacité, les scènes plus intimistes qui font dialoguer le facétieux marieur avec des clients crédules ou plus rusés que lui, paraissent moins percutantes.  Reste le plaisir que procure la présentation, un ravissement pour l'œil, volontairement stylisée à la Folon où dominent les tons francs, oranges et jaunes, et que métamorphosent des éclairages étudiés.  L'atmosphère de fête éclate d'emblée, préfigurant la parade de cirque au dernier acte.  Le plateau vocal de cette reprise est inégal : Piotr Beczala, Jeník, offre un timbre de ténor brillant et une prestation agréablement décontractée.  Celle de Inva Mula, Mařenka, l'est moins, mais la voix épouse sans difficulté le lyrisme slave.  Andreas Conrad prête au timide Vašek une amusante gaucherie.  Mais Jean-Philippe Lafont ne tire pas toutes les ficelles du rôle de l'entremetteur Keçal, à vrai dire délicat à crédibiliser.  Sans doute gêné par l'idiome tchèque, le chant souffre de manque de projection, et la faconde est minimale.  La direction musicale du jeune Constantin Trinks, qui n'évite pas de fréquents décalages avec les chanteurs, navigue entre deux excès, la fougue brouillonne (Ouverture boulée) et le ralentissement excessif qui ôte à la musique cette fluidité qui anticipe le langage coulant caractérisant les poèmes de Ma Patrie.

 

©Christian Leiber/OnP

 

 

Cadmus et Hermione revient à l'Opéra Comique.  Jean-Baptiste LULLY : Cadmus et Hermione.  Tragédie en musique, en un prologue & cinq actes.  Livret de Philippe Quinault, d'après Les Métamorphoses d'Ovide.  André Morsch, Claire Lefilliâtre, Arnaud Marzorati, Jean-François Lombard, Isabelle Druet, Arnaud Richard.  Danseurs, Chœur et orchestre du Poème Harmonique, dir. Vincent Dumestre.  Mise en scène : Benjamin Lazar.

 

©Elisabeth Carecchio

 

La reprise de Cadmus et Hermione confirme l'excellence du spectacle original et fastueux présenté il y a deux saisons à l'Opéra Comique, cadre sans doute idéal pour une telle œuvre.  Sur un sujet de Quinault, tiré des Métamorphoses d'Ovide - les amours mouvementés du vaillant Cadmus et de la fidèle Hermione soumis au bon vouloir des dieux -, Lully invente le genre de la tragédie en musique, ouvrant la voie à un nombre impressionnant de chefs-d'œuvre.  La pièce se veut démonstrative dans ses aspects visuels et dramatiques.  La musique qui les fédère mêle récitatifs, airs & chœurs empruntant à la belle déclamation française et divertissements dansés.  Situations tragiques aussi bien que comiques émaillent l'intrigue, le pathétique des sentiments des grands côtoyant l'acidité des chamailleries des confidents.  Sans oublier, au prologue, l'hommage obligé rendu à la grandeur du souverain régnant.  La tragédie en musique réclame une richesse certaine de moyens.  Elle la possède dans la vision qu'en donne la mise en scène de Benjamin Lazar, qui après un Bourgeois gentilhomme d'anthologie, renouvelait la réussite de la reconstitution historique : un grand spectacle baroque paré d'une décoration léchée adroitement figurative avec effets de symétrie parfaite, machinerie livrant apparitions du dessus (le dieu Mars empourpré sur son char, l'Amour vêtu d'or virevoltant dans les airs) ou du dessous (un monstre de pacotille, terrifiant néanmoins, méchant dragon crachant ses humeurs).  Mais aussi enluminé de costumes fastueux, aux étoffes bariolées de fort bon goût, tout en camaïeux, et d'imposants couvre-chefs emplumés, que l'éclairage à la seule bougie, autre trait marquant, pare d'une vraie poésie.  Loin de la manière naturaliste, la déclamation chantée privilégie une expression recherchée, comme un décalque du langage parlé.  La gestuelle emphatique cultivant une expression très étudiée des mains au soutien de l'expression des visages, et la noblesse des attitudes ou au contraire les amusantes parodies composent des tableaux dont la naïveté apparente ne cache pas la magnificence.

 

©Elisabeth Varecchio

 

Vincent Dumestre imprime à l'ensemble une indéniable authenticité : grandeur des passages majestueux qui n'ont rien de corseté, finesse du dosage instrumental, saveur délicate des mouvements lents, bondissement des traits enlevés hors de toute rigidité.  La générosité sonore, magnifiée par l'acoustique très présente du théâtre, n'a d'égale que la vivacité qui caractérise tant l'accompagnement vocal que les intermèdes purement instrumentaux, et confère à ces chants mêlés de danses une plasticité sonore persuasive.  Passée la surprise d'une déclamation du texte en vieux français, l'exécution vocale est irréprochable.  Le valeureux Cadmus, qui doit subir épreuve sur épreuve, comme plus tard le Tamino de Mozart, trouve en André Morsch une belle pointure et Claire Lefilliâtre, Hermione, lui rend la pareille en sûreté de style.  Arnaud Marzorati, Arbas, allie faconde vocale et cocasserie de la mimique.  Au-delà d'eux, il faut saluer un vrai esprit de troupe, dans ses composantes dansée, chorale ou instrumentale.  À noter que ce merveilleux spectacle a été gravé en DVD (Alpha).

 

 

Un grand virtuose joue Chopin : Maurizio Pollini à Pleyel.

 

©Julien Mignot/Salle Pleyel

 

Tout récital du pianiste Maurizio Pollini est un événement attendu et fait salle comble ; un phénomène plus rare ces temps.  D'autant qu'avec Chopin, le succès est au rendez-vous.  Pollini habite Chopin comme peu, déployant cet art souverain où la virtuosité technique est transcendée par une rare intelligence du texte.  Ainsi en est-il des 24 Préludes op.28.  Ce vaste panoptique, terminé en 1838 à Majorque, et dédié à Ignace Pleyel, est constitué de très courtes pièces, sorte de miniatures extrêmement différenciées, dont certaines sont des esquisses ou font figure de commencements, tant est saisissante leur brièveté.  Liszt dira que ce sont « des préludes poétiques [...] qui bercent l'âme en songes dorés et l'élèvent jusqu'aux régions idéales ».  Pollini livre un kaléidoscope de paysages choisis, de climats contrastés, une large gamme d'émotions, nous laissant repérer les liens thématiques qui les unissent.  Les mains, comme collées au clavier, libèrent le doux épanchement ou les déchaînements les plus volontaires, tel ce 16e Prélude d'un irrépressible galop.  Cortot ne le titrait-il pas « la course à l'abîme » !  À noter que le pianiste avait fait précéder cette exécution du Prélude op.45, tout de rêverie et d'instabilité tonale.  En seconde partie, Pollini propose les deux Nocturnes de l'op.27, qu'il affectionne.  Son jeu perlé saisit ce que ces pièces ont de subtilement décelable : le drame des sentiments angoissés (n°1) ou la rêverie amoureuse (n°2).  Les torrents sonores du Scherzo n°1, op.20 apporteront un saisissant changement d'atmosphère.  Viennent ensuite huit des 12 Études de l'op.25, une ingénieuse mais démoniaque compilation d'obstacles techniques, sur le versant rapide, d'une difficulté étourdissante, que transfigure l'inspiration du compositeur.  Ainsi l'Étude n°11 laisse interdit devant les accords cadencés de la main gauche et les traits en rafale de la droite.  Seule l'Étude n°7 apporte l'accalmie d'un lento qui fait la part belle à la main gauche.  Là encore, l'art du pianiste italien a peu de rivaux : un jeu atteignant une telle densité qu'elle asservit la pure vélocité et transforme ce qui procède de l'exercice en un parcours séduisant.  Une incandescente Première Ballade émaillera un florilège de bis qui prolongeront le programme d'une bonne vingtaine de minutes devant un public plus que conquis.

 

 

Les glorieux effluves mahlériens de l'Orchestre du Mariinsky.

 

©Fred Toulet

 

Dans le cadre de l'intégrale des symphonies de Mahler - en sept étapes, à Pleyel, et avec ses deux orchestres – Valery Gergiev, plus boulimique que jamais, commet le tour de force de jouer en une même soirée les Quatrième et Sixième Symphonies ; quelque trois heures de concert !  La réussite en revient d'abord à l'Orchestre du Théâtre Mariinsky.  On mesure combien Gergiev a fait en quelques années, d'une phalange plus habituée à la fosse d'opéra qu'à l'estrade de concert, l'une des meilleures formations du moment.  Il a forgé un instrument d'exception, d'une homogénéité saisissante, d'une patine sonore qui sont l'apanage des grands.  La qualité instrumentale exemplaire est particulièrement attestée par le langage de Mahler qui traite souvent les instruments en solistes et les sollicite jusqu'à leurs limites.  Tout aussi digne d'éloge est l'assimilation du timbre mahlérien, si spécifique, sans parler de la netteté de l'espace sonore qu'obtient le chef.  La Quatrième débute dans une atmosphère franche, où l'on prend son temps.  Elle restera sans doute un brin sérieuse pour traduire la fantaisie cachée que renferment les deux premiers mouvements.  Mais tout change avec le troisième, « Ruhevoll » (calme) qui, après un début plutôt allant, introduit la parole émouvante du hautbois solo puis la fluidité d'une sorte d'allegretto que traverse un formidable tutti, avant de retrouver la sérénité.  Tout cela prélude le dernier morceau, le lied de « La vie céleste », expression candide de l'enfance (bien défendu par la soprano Anastasia Kalagina), avant que la musique ne s'éteigne dans un souffle.  La nature passionnée de Gergiev, qui le porte aux extrêmes, est encore plus en phase avec le tragique et la monumentalité de la Sixième Symphonie.  Durant ce long cheminement, il nous entraîne dans un labyrinthe d'émotions fortes, tirant de l'appareil orchestral colossale puissance aussi bien que lyrisme épuré.  L'allegro energico est pris à bras le corps annonçant une vision tonique, malgré son caractère sombre, et le rythme de marche obsédante est comme martelé, inexorable.  L'andante moderato - que Gergiev place en deuxième position, comme le fit un temps le compositeur - introduit un apaisement on ne saurait plus marqué.  Il y a là l’une des plus sublimes mélodies mahlériennes qui se déploie, s'enroule sur elle-même à satiété.  Le scherzo sera âpre, hallucinatoire, découvrant des climats fort contrastés.  L'immense finale, un monde en soi, livre des traits fulgurants, des éclairs, tels ces éclats des cymbales, avant les tonitruants accords rehaussés de coups de marteau, et la cataclysmique explosion finale.  Gergiev en souligne toute la prégnante dramaturgie.  Ici, comme plus en amont, il aborde le texte de manière très liée, ne s'appesantissant pas sur les transitions souvent énigmatiques, et ne cherche pas à en diminuer l'âpreté, bien au contraire.  Les trois prochains concerts, avec le LSO cette fois, ont pour date les 26, 27 et 28 mars 2011.

Jean-Pierre Robert.

 

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Il peut advenir que… la restitution de l’esprit « salon de musique » (agrandi !) permette d’attachants moments de découverte autour d’un pianiste.  Ainsi le distributeur de disques Codaex organise-t-il, à l’Institut Goethe, des concerts pour « happy few », destinés à faire entendre des pianistes allemands tristement ignorés sur nos rives.  C’est dans ce cadre que Stefan Irmer se produisait le 16 novembre 2010, à l’occasion du lancement de son disque Fauré (lire en rubrique CDs).  On sait combien cet artiste creuse avec persévérance son sillon dans le champ des répertoires prétendument marginaux : son intégrale des Péchés de vieillesse de Rossini (MDG) a marqué la discographie.  On suivra avec le plus vif intérêt ses nouvelles explorations dans le domaine de la musique française. Lors de ce récital à l’Institut Goethe, il brossait un panorama de son répertoire (Muzio Clementi, Gioacchino Rossini, John Field, Gabriel Fauré), et apportait à chacun de ces auteurs son jeu charnu, sa consistance dans l’approche structurelle et la palette sonore.  Ainsi un tel interprète nous révèle-t-il (béni soit-il !) que ces musiques ne sont pas des mignardises négligeables rescapées d’une époque, et qu’elles peuvent sonner (mais oui, mais oui !) comme de la « grande musique ».

 

Stefan Irmer ©DR

 

Dans le cadre encore plus restreint de l’Institut hongrois à Paris, Nicolas Stavy (3 décembre 2010) nous offrait une mémorable soirée Brahms-Liszt.  Il osait un programme extrêmement homogène par la densité intérieure des pages choisies.  Complètement investi dans son message musical, il capturait notre émotion par la profondeur de son expression et la plénitude de sa sonorité.  Ses beaux graves soutenaient l’ample déroulement des Variations en ré mineur transcrites (à la demande de Clara Schumann) du Sextuor op.18 de Brahms, aussi bien que l’éclairage des étrangetés harmoniques émaillant les Quatre Ballades op.10.  La partie Liszt ne rompait en rien avec cette pensée réflexive : Bénédiction de Dieu dans la solitude en témoignait assurément.  Ensuite, Nicolas Stavy s’essayait, pour la première fois en public, à la transcription intégrale par Liszt de son ultime poème symphonique, Du berceau jusqu’à la tombe (1881), qu’il va prochainement enregistrer pour Hortus (label sous lequel on peut déjà retrouver ses interprétations brahmsiennes) ; on ne joue quasiment jamais les trois mouvements de cette transcription, et surtout pas avec cette généreuse chaleur, même si l’on connaît, grâce aux quelques valeureux pianistes explorant les pièces ultimes de Liszt, le Wiegenlied qui n’est autre que le germe du seul premier mouvement de ce poème symphonique composé dans la foulée.  Répondant aux sollicitations de bis, Nicolas Stavy, avec esprit, déclara au public que nous commémorions en cette année 2010 le bicentenaire Chopin… donc qu’il allait jouer du Schumann, autre bicentenaire largement éclipsé.  Il sut d’ailleurs ne pas jouer l’Arabesque dans un style superficiel di grazia, et, cherchant l’essence la plus schumannienne de la pièce, ne point rompre l’atmosphère exceptionnelle qu’il avait su créer antérieurement.

Après observation de ce contexte acoustique restreint, Nicolas Stavy avait décidé de jouer à couvercle fermé, donnant à la diffusion même des harmoniques – enfermées dans leur coffrage de bois et ne sortant plus que par une « ouïe » (dirait-on en lutherie), par une « bouche » et une « lumière » (dirait-on en facture d’orgue) – un « mixage » des résonances inédit… et proprement inspirant pour un analyste de l’école spectrale !  Nicolas Stavy est un pianiste très attentif à la qualité du son, aux moyens de son émission, et son jeu intense se doublait ici de lucidité sur la meilleure adéquation entre un instrument et un lieu.

 

Nicolas Stavy ©Flore

 

Le cycle « L’art total » de la Cité de la musique nous conviait à un programme rare (2 décembre 2010) : l’Orchestre national de Lyon s’y déplaçait pour une thématique prométhéenne.  L’originalité de ce concert – donné devant un public trop clairsemé – résidait dans la restitution des jeux de couleurs indiqués sur la partition du Prométhée de Scriabine (manquait seulement le chœur ad libitum : il est difficile de tout réunir pour cette œuvre assez coûteuse !).  Alain Louvier, après s’être livré à une révision minutieuse du « contrepoint à deux voix » (l’une plus fixe, l’autre en constante évolution) des changements de couleurs, tenait lui-même le clavier les commandant.  La disposition des murs de la Cité de la musique ne permettant que la projection par lampes colorées dans les alvéoles des parois, conférait une certaine rigidité à la disposition de ces « colonnes » lumineuses ; on nous dit que, à l’Auditorium de Lyon, la projection sur les tuyaux de la façade de l’orgue créa un effet bien plus féerique.  Mais au fait, pourquoi n’y a-t-il plus d’orgue dans les salles de concert parisiennes (vaste question qui rouvrirait des plaies encore saignantes) ?  Autre registre de couleurs, les recherches de timbres de Roger Muraro, dans la partie pianistique de ce qui se présente comme une symphonie concertante, apportaient des raffinements… beaucoup moins rigides que les colonnes de lumière.  Ceci dit, il est si rare que nous soit proposée cette expérience multi-sensorielle, que nous en garderons un heureux souvenir.  Le chef Jun Märkl (qui vit ses derniers mois à la tête de l’Orchestre national de Lyon) semblait avoir un peu plus travaillé cette deuxième partie du concert, laquelle s’ouvrait par quelques extraits, dont l’Ouverture du ballet de Beethoven : Les Créatures de Prométhée.  Mais la première partie décevait : dans l’admirable poème symphonique de Liszt, Prometheus, on n’entendait pas distinctement tous les détails de cette écriture tantôt incisive, tantôt appassionata, toujours précise et acérée dans son esprit visionnaire, car le chef laissait « bouler » certains rythmes ou certaines répliques de l’orchestre.  Quant au tout aussi admirable poème symphonique de Richard Strauss, Mort et Transfiguration, il était dirigé de manière à donner du grain à moudre à ceux qui, manquant de perspicacité, prétendent que les orchestrations post-wagnériennes sont lourdes.  Dans l’un comme l’autre de ces poèmes pourtant puissamment construits, Jun Märkl semblait négliger cette règle d’or de l’interprétation : savoir, face à chaque élément de l’architecture, d’où l’on vient et où l’on va.

Dans une éclairante conférence d’avant-concert, Sylvie Lannes avait – illustrations à l’appui – remarquablement exposé tout ce qu’il fallait savoir pour entrer dans le Prométhée de Scriabine, ainsi que quelques éléments sur la thématique du poème symphonique de Liszt.

 

Sylviane Falcinelli.

 

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PIANO

Roger COHEN : Debussy au XXIe siècle.  Carnet de voyage pianistique pour les petits & les grands.  Textes originaux doigtés & commentés par l’auteur.  Hit Diffusion (www.editions-hit-diffusion.fr).  23 x 30 cm, 72 p., ill n&b.  CD inclus.

Cette petite anthologie debussyste propose, en trois chapitres, 13 pièces progressives (à partir de la 3e année), un CD, ainsi qu’un fil conducteur biographique, enrichi d’anecdotes, images et citations.  « À l’aube » : Danse bohémienne, Première Arabesque, Mazurka, Rêverie, Clair de lune« Au zénith » : Golliwogg’s Cake-Walk, Doctor Gradus ad Parnassum, The Little Shepherd, Le Petit Nègre« Au crépuscule » : Bruyères, La fille aux cheveux de lin, La plus que lente, Canope.  Catalogue complet de l’œuvre pour piano.

 

 

Uwe KORN : Tango meets Jazz.  Schott (www.schott-music.com) : ED 20878.  23 x 30 cm, 78 p., CD inclus (TT : 60’44). 

Après les deux volumes de Klassik meets Jazz, Uwe Korn publie, cette fois, 10 classiques du tango (en version originale, puis sa propre version jazzy) : El Choclo, Jalousie, Por una Cabeza, Preludio del Ángel, Adiós Nonino…  Moyenne difficulté.  Pièces enregistrées par Uwe Korn.

 

 

CHANT

Carsten GERLITZ : Sing Jazz Ballads.  Chant & piano.  Schott (www.schott-music.com) : ED 20901.  23 x 30 cm, 80 p., CD inclus (TT : 77’23).

Douze des plus fameuses ballades jazzy ont été ici arrangées, dans le style piano-bar, par Carsten Gerlitz (niveaux facile à intermédiaire).  Cahier pour le chant (voix moyenne) + cahier avec accompagnement de piano.  Citons quelques titres : Georgia of my mind / My funny Valentine / Les Feuilles mortes / Ain’t Misbehavin » / Manha do Carnaval / Sometimes I feel, Stormy WeatherTitres enregistrés par diverses chanteuses professionnelles, accompagnées au piano par l’auteur.

 

SCHOTT SING JAZZ BALLADS

 

Anne-Marie GROSSER : Histoire de France.  De l’homme de Cro-Magnon à la fin du XIXe siècle.  « Trésors d’enfance » (Anthologie thématique de la chanson d’enfants).  Fuzeau Musique (www.musique-education.com) : 70509.  Relié, couverture souple, 17 x 24 cm., musiques notées, ill. couleurs, 2CDs inclus.

Merveilleux outil pour parents et enseignants soucieux de transmettre cet incomparable patrimoine historico-musical.  Car, si « en France tout finit par des chansons », c’est bien à des événements historiques que fit toujours référence le célèbre dicton.  Anthologie réunissant quelque 110 chansons, duos et canons, comptines, bouts rimés & rythmés, chefs-d’œuvre narratifs, comiques, dramatiques, satiriques, subversifs, à lire, écouter, chanter (chansons de geste, complaintes, appels patriotiques, chansons de soldats, mais aussi des mœurs de cour, de révolutionnaires, de lettrés, de « gens sans importance » ou simplement enfantines…).  Remarquables enregistrements.  Un indispensable !

 

Histoire de France

Francis Gérimont.

 

FORMATION MUSICALE

Agnès MABIRE-BEX : L’oreille à l’écoute.  Comprendre le langage musical.  Fin 2e cycle.  1 vol. textes, 1 vol. corrigés + CD.  Billaudot : G8324B.

Voici donc le troisième volume de cette méthode de formation de l’oreille dont nous avons déjà dit tout l’intérêt dans nos News 23 et 19 (novembre 2008 et mai 2009).  Rappelons qu’il s’agit d’un développement de tous les paramètres de l’écoute, de la dictée musicale traditionnelle au relevé, à l’analyse des formes, de l’instrumentation, bref de tout le discours musical.  Destiné aux élèves, il constitue aussi une excellente formation pour l’auditeur ayant quelques notions de solfège et désireux d’approfondir son écoute et sa culture musicale.

 

 

Jean-Clément JOLLET : Tour de chants.  Livre de mélodies.  Vol. 4.  CD. Billaudot : G 8089 B.

Destiné à la 4e année de premier cycle, pour les écoles qui ont un premier cycle en quatre ans, ce volume contient, dans sa première partie, des chansons françaises à réaliser par répétition, la deuxième partie est accessible par la lecture.  Les textes musicaux sont présentés sans accompagnement pour ne pas gêner la lecture des élèves, mais les accompagnements sont présents dans un encart.  Enfin, la troisième partie est consacrée à des textes du répertoire et présentés avec piano.  Le CD est un outil indispensable ; il ne donne pas seulement l’ensemble du play-back, mais des éléments du travail préconisé par l’auteur.  Il ne comporte pas moins de 85 plages… Bref, il s’agit d’un recueil tout à fait remarquable réalisé par un véritable pédagogue.

 

 

Joy KANE : Le rythme dans la peau : une collection de chansons « dits-dactiques ».  CD.  Lemoine : 28 350 H.L.

On ne présente plus Joy Kane, en France, depuis 1981.  Sa collection « La musique, c’est toi » résume toute sa philosophie.  Il s’agit de bouger dans l’espace/temps tout en chantant.  Ce volume regroupe un certain nombre des exercices/chansons proposés par Joy Kane tout au long de ses années d’enseignement.  L’enregistrement permet une mise en œuvre plus facile en même temps qu’il communique le style et l’esprit de l’auteur.  Classées par sujet, plutôt que par âge ou niveau, les chansons à la fois drôles et instructives sont faites pour être chantées et dansées avec les autres.

 

 

PIANO

Carsten GERLITZ : Classical Highlights, vingt pièces célèbres. “Piano lounge”.  CD. Schott : ED 20962.

L’éditeur présente ainsi ce recueil : « les plus belles mélodies dans le style piano-bar, dans des arrangements de niveau facile à intermédiaire. »  C’est un bon résumé mais qui est loin de traduire tout le charme de ce volume.  L’auteur n’a pas lésiné sur les airs célèbres.  Nous passons de Vivaldi à Satie, de l’Ave Maria Bach/Gounod au Boléro de Ravel ou Pomp and Circumstance d’Elgar sans oublier Beethoven, Chopin…  Ce pourrait être de mauvais goût : c’est d’un goût parfait.  Le CD, enregistré par l’auteur, est à lui seul un enchantement.  Cela dit, si la technique n’est pas difficile, l’interprétation suppose que le jeune pianiste soit également musicien…

 

 

John KEMBER : Just for Two.  16 duos faciles pour piano à quatre mains.  Schott : ED 13383.

Il est toujours agréable de trouver un répertoire à quatre mains adapté à deux instrumentistes de même niveau.  C’est ici le cas. Et c’est une réussite.  Le style est varié, de la valse à la berceuse en passant par le jazz, la musique latino-américaine et le folk.  Classées par niveau de difficulté, elles sont, même les plus faciles, pleines de charme et de séduction.

 

 

Maurice JOURNEAU : Air breton pour piano.  Armiane : EAL 481.

On pourrait s’étonner de la publication de cette pièce que Maurice Journeau composa vers l’âge de 14 ans, juste avant la Première Guerre mondiale.  Elle faisait partie d’un recueil, mais le compositeur n’a autorisé que la publication de cet Air breton.  Sans grande difficulté, elle possède un caractère un peu nostalgique et demande beaucoup de délicatesse et de sensibilité.  Une jolie pièce composée par un jeune pianiste pour de jeunes pianistes…

 

 

Gustav MAHLER : Adagietto, extrait de la Symphonie n°5.  Arrangement pour le piano par Stéphane Blet.  Combre : C06675.

Comment ne pas voir défiler les images du film de Visconti Mort à Venise en écoutant cette transcription du célèbre Adagietto !  Et merci à Stéphane Blet d’offrir aux pianistes l’occasion de s’approprier ce merveilleux texte, remarquablement adapté.

 

 

Arletta ELSAYARY : Chasse aux papillons, pour piano niveau débutant.  Lafitan : P.L.1972.

Il n’est pas facile d’écrire pour les débutants… Arletta Elsayary a écrit une petite pièce, pleine de charme et de musique, qui aidera les jeunes pianistes à mettre en place la noire pointée-croche…

 

 

Arletta ELSAYARY : Insouciance, pour piano niveau débutant.  Lafitan : P.L.1973.

Même auteur, mêmes qualités, mais cette fois, c’est le phrasé d’une jolie mélodie en croches qui est privilégié.  Beaucoup de finesse et de délicates harmonies pour une pièce qui reste cependant vraiment facile.

 

 

Bruno LESCARRET : Dino, le petit dinosaure, pour piano niveau préparatoire.  Lafitan : P.L.1987.

Ce petit dinosaure permettra au jeune pianiste de montrer ses qualités expressives : chant passant de la main droite à la main gauche, rythme un peu syncopé, mais le tout dans la bonne humeur !

 

 

Christine MARTY-LEJON : Petite étude, pour piano.  Cycle 1.  Lafitan : P.L.1980

Toutes proportions gardées, on est plus proche de Chopin que de Czerny : la musique est, en effet, présente à chaque mesure d’une étude qui permet, en même temps, de montrer à l’élève comment la même mélodie peut être habillée d’un accompagnement différent à chacune de ses apparitions.

 

 

David NEYROLLES : Rouge.  Pièce pour piano solo.  Niveau élémentaire.  Lafitan : P.L.1935.

Piano « solo », on ne rit plus ! Intégrée à la série « Les couleurs du piano », cette pièce est de type « romantique », ce qui explique certainement le piano solo…  De l’humour certes, mais surtout beaucoup de bonne musique dans cette pièce écrite par un pédagogue dont le but est, à la fois, d’aider les jeunes pianistes à « mieux maîtriser la technique […] tout en éveillant leur sens de la musicalité et en leur procurant un réel plaisir de jouer ».  Mission accomplie !

 

 

GUITARE

Konrad RAGOSSNIG : Guitar Duet Collection.  20 pièces faciles de trois siècles, éditées et doigtées.  Schott : ED 20886.

Les duos ici réunis vont de Carulli à Carlos Gardel.  Faciles, ils demandent cependant une certaine maîtrise de l’instrument et une bonne écoute du partenaire.  Ce sont de vrais duos qui permettront une authentique éducation à la musique d’ensemble. La variété du répertoire plaira à tous.

 

 

Jean-Marie LEMARCHAND : Granada.  Grande suite pour guitare.  Texte de Lynda Deltombe.  Armiane : EAL 423.

Cette suite a été composée dans une perspective théâtrale.  Si les huit pièces et l’épilogue qui la composent peuvent être interprétés séparément, on peut aussi restituer le contexte en faisant de cette suite une sorte de musique de scène.  Ensemble séduisant, varié, plein d’invention et de charme.

 

 

Jean-Marie LEMARCHAND : Mélodies d’automne pour guitare.  Armiane : EAL 431.

Voilà deux courtes pièces sans grande difficulté, mais non sans intérêt : l’une égrène une très jolie mélodie propre à la promenade tandis que l’autre, de caractère rapide, au rythme obstiné, invite plutôt à la danse.

 

 

ORGUE

Max MÉREAUX : Vitrail pour orgue.  Armiane : EAL 489.

Cette pièce pour deux claviers & pédalier n’exige pas un instrument très important.  La registration fait uniquement appel aux fonds de 16, 8 et 4.  Divisé en deux volets, ce Vitrail, d’un caractère plutôt méditatif, déploie d’amples mélodies.  Le second volet est fugué, de façon fluide, avec un thème chromatique descendant très mélancolique.

 

 

Franck BESINGRAND : Deux esquisses pour orgue.  Combre : C06678.

Si la première pièce peut être jouée sur la plupart des instruments, il n’en est pas de même de la seconde, à la registration très spécifique (cor de nuit de 2 pieds à la pédale et trois claviers indépendants).  Mais faisons confiance à l’ingéniosité des organistes : cela fait partie du métier !  Si la première pièce est un « Intermède sur le grand jeu » dans l’esprit du granjeu français classique, la deuxième est une méditation sur un verset du psaume 103 : « Tu fis la lune pour marquer les temps, le soleil connaît son coucher ».  Deux courtes œuvres, mais denses et fortes.

 

 

Maurice JOURNEAU : Simple cantilène op.50.  Version pour orgue.  Combre : C06695.

Pas besoin d’un gros instrument pour jouer cette petite pièce dont le titre traduit le caractère.  Un langage limpide, poétique, voilà ce qui caractérise la musique d’un compositeur discret mais à l’œuvre attachante, mort à cent ans en 1999.

 

 

VIOLON

Maurice JOURNEAU : Simple cantilène op 50. Version pour orgue & violon.  Combre : C06695.

On se reportera à la version pour orgue seul quant au commentaire.  Disons seulement que cette version répartit le discours entre les deux instruments.

 

 

Gréco CASADESUS : Trois pièces pour violon seul : Troublances, Réminiscences, Insistances.  Armiane (www.armiane.fr/index.php) : EAL434.  Distr. Fortin (16, rue Ganneron, Paris XVIIIe).

Saluons ces trois œuvres d’un membre de la fameuse dynastie, notamment connu pour ses musiques de film.  Elles sont, disons-le, d’une grande beauté.  Lyriques, et demandant une grande souplesse mélodique et rythmique, elles évoquent, selon le compositeur, « les vibrations de l’âme, celles qui habitent le cœur, bien sûr, mais également celles qu’héberge le cœur du violon ».  Comment mieux dire ?

 

 

Jean-Marc ALLERME : Duet hits.  Une collection inédite de duos originaux.  Lemoine : 28854 H.L

Nous avions déjà signalé, dans notre précédente Lettre, cette collection.  Voilà donc le volume consacré aux duos de violons.  Inutile d’insister sur la qualité musicale de ces petites pièces abordables par de quasi-débutants.

 

 

Vittotio MONTI : Czardas.  Bärenreiter’s Easy Concertos.  Bärenreiter : BA8975.

Quelle excellente idée de proposer dans cette collection la célèbre Czardas de Monti… La préface indique les présupposés techniques requis pour son interprétation.  De plus, un lien est proposé vers le site www.violinmasterclass.com où se trouvent des vidéos illustrant les différents points techniques ainsi qu’une exécution intégrale.

 

 

Oskar RIEDING : Concertino in ungarischer Weise op.21 pour violon & piano.  Édité par Kurt Sassmannshaus.  Bärenreiter’s Easy Concertos.  Bärenreiter : BA8973.

Dans la même collection, voilà un concerto d’Oskar Rieding, dans le style hongrois. Cette pièce n’utilise que les première & troisième positions.  Elle bénéficie également des exercices indiqués par le site www.violinmasterclass.com

 

 

Jean-Baptiste ACCOLAY : Concerto n°1 en la mineur, édité par Kurt Sassmannshaus.  Bärenreiter’s Easy Concertos.  Bärenreiter : BA8976.

Composé en 1868 par le violoniste belge J. B. Accolay, ce concerto est devenu un classique de l’apprentissage du violon.  Il constitue une étape qui permet de faire le point sur les acquisitions de l’élève.  C’est, en même temps, une musique fort agréable qui peut aussi former le goût du jeune violoniste. En voici une édition très pédagogique qui bénéficie également du soutien du site www.violinmasterclass.com

 

 

René-Louis BECKER (1882-1956) : Sonate pour violon & piano op.103.  « Compositeurs alsaciens », vol. 19.  Delatour : DLT1730.

Trois mouvements composent cette sonate : Moderato alla fantasia, Andante, Allegro con spirito.  Lyrique et passionnée, cette œuvre devrait figurer au répertoire de tout violoniste. Elle mérite d’être découverte et écoutée.

 

 

Michel CHEBROU : Serinette pour violon & piano.  Niveau débutant.  Lafitan :P.L.1860.

Voici la version violon et piano de la Serinette pour flûte, recensée en décembre 2009. L’auteur prend soin d’expliquer la nature et l’intérêt de la serinette.  Joyeuse et pleine de charme, cette pièce devrait enchanter le jeune violoniste.

 

 

VIOLONCELLE

Leonello CAPODAGLIO : Air, pour quatre violoncelles op.261.  Armiane : EAL 482.  Voici une œuvre fort intéressante de ce compositeur italien, né en 1945.  Si les différentes parties n’offrent aucune difficulté majeure, l’œuvre, quant à elle, toute chantante qu’elle soit, requiert de grandes qualités de justesse et d’expression.  Ne nous y trompons pas : loin de l’exercice pédagogique, c’est une œuvre à part entière.

 

 

Sylvia FILUS : Promenade dans la forêt, pour violoncelle & piano.  Armiane : EAL 439.

Voici une fort jolie pièce de cette compositrice polonaise, en France depuis l’âge de 16 ans, surtout connue pour ses musiques de film.  Exigeante pour le pianiste comme pour le violoncelliste, cette pièce est pleine d’originalité et de charme dans un style primesautier de bon aloi.

 

 

Alain BERNAUD : Partita en ut mineur, pour violoncelle seul.  Combre : C06708.

Cette partita est à la fois moderne, par son écriture, et classique, par sa forme. Prélude, Allemande, Sarabande, Gavotte et Gigue se succèdent dans une jubilation communicative.  Une très belle œuvre de ce toujours jeune compositeur.

 

 

CONTREBASSE

Patrick HARDOUINEAU : Trois esquisses pour contrebasse seule.  Combre : C06710.

Écrites pour une fin de deuxième cycle, ces trois esquisses mettent à contribution la virtuosité et le sens musical du contrebassiste.  Bien plus que des pièces pédagogiques, elles sont avant tout de la belle musique.

 

 

FLÛTE TRAVERSIÈRE

Maurice BARDIN : Sonatine champêtre, pour flûte & piano.  Combre : C06696.

Mort récemment à l’âge de 90 ans, Maurice Bardin, s’il avait cessé de jouer, a composé jusqu’au bout.  Que le terme « sonatine » ne fasse pas illusion : c’est plus à Ravel qu’à Clementi qu’il faut penser.  En trois mouvements, cette sonatine nous montre son caractère champêtre par une Pastorale et une Musette, le tout de caractère enjoué et bien « nivernais ».  Un dernier hommage à cette région qu’il aimait tant.

 

 

Alexandre CARLIN : Dans les bois, pour flûte en ut & piano.  Niveau débutant.  Lafitan : P.L.2030

Après le saxophone, voilà que la flûte peut aussi se promener dans ces bois enchanteurs.  Une bien jolie promenade…

 

 

Pierre-Richard DESHAYS : Thème et variations, pour flûte en ut & piano.  Niveau élémentaire (4e année).  Lafitan : P.L.1929

Un thème et quatre variations bien caractérisées qui permettront au flûtiste de montrer les diverses facettes de son talent, tout en se faisant plaisir, car c’est de la vraie musique.

 

 

Claude-Henry JOUBERT : Sérénade catalane, pour flûte avec accompagnement de piano.  Niveau : fin du 1er cycle.  Lafitan : P.L. 1948.

On ne s’ennuie jamais avec Cl.-H. Joubert.  Le plaisir commence dès la lecture du « Mot du compositeur… » Sans déflorer le sujet, disons que cette pièce comporte une séquence d’improvisation, et que flûtiste & pianiste doivent constituer une paire complice.

 

 

FLÛTE À BEC

Max MÉREAUX : Chanson indienne, pour flûte à bec soprano & piano.  Niveau préparatoire.  Lafitan : P.L.2098.

Voici une jolie pièce qui convient parfaitement à l’instrument.  La partie de piano, sans difficulté, n’est pas sans intérêt.

 

 

HAUTBOIS

Franck DOUVIN : Angelicus, pour hautbois solo.  Combre : C06705.

Cette manière de rhapsodie laisse à l’exécutant une grande liberté de jeu et d’interprétation.  Devra-t-il se montrer « angélique » ?  Cette pièce a été conçue pour un niveau de début de troisième cycle.

 

 

Joseph-Ermend BONNAL : Au pays des pommiers innombrables, pour hautbois & piano.  Delatour : DLT0975.

Les éditions Delatour continuent la publication des œuvres de ce compositeur trop méconnu.  La pièce ici proposée, de niveau moyen, est pleine de charme avec une première partie qui développe une belle mélodie et une seconde écrite sur un rythme dansant.

 

 

CLARINETTE

Christophe FRIONNET : Deux Rhapsodies op.12 et op.32 pour clarinette solo en sib.  Delatour : DLT0506.

Composées à huit ans d’intervalle, ces deux pièces nous entraînent dans un monde onirique plein d’imprévu et de charme.  De difficulté moyenne, elles sont abordables par un bon amateur.

 

 

SAXOPHONE

Dirko JUCHEM : Christmas Classics. Les 16 plus beaux chants de Noël.  Saxophone & piano.  « Schott Saxophone Lounge ».  CD.  Schott : ED 20957.

Ces seize chants incontournables sont proposés, pour l’accompagnement, dans une version légèrement swinguée.  Le CD comporte l’enregistrement intégral, ainsi que le play-back avec piano, contrebasse & percussion.  Une 33e piste propose judicieusement le sib, pour l’accord.  Pour certains noëls, les paroles sont également inscrites et, pour tous, les accords de guitare, ce qui permet d’adapter l’accompagnement à toutes les situations.

 

 

Jean-Marc ALLERME : Duet hits.  Une collection inédite de duos originaux.  Lemoine : 28838 H.L.

Voici, pour le saxophone, ces duos déclinés dans le même esprit que pour les autres instruments.  Ils devraient connaître un vif succès.  On connaît les qualités de Jean Marc Allerme…

 

 

PERCUSSIONS

Gérard BERLIOZ : Le rythme oh oui ! à la caisse claire.  10 solos avec play-back.  CD. « Percus Audio », Combre : C06698.

Comment apprendre les formules rythmiques en faisant de la musique…  Après tout, ce volume pourrait être utilisé avec profit en Formation musicale.  Il suffit de remplacer la caisse claire par un « frappé » manuel.  Gérard Berlioz offre à tous un excellent outil, bien agréable à utiliser.  Le CD contient la réalisation intégrale de chaque pièce et son play-back.

 

 

MUSIQUE RELIGIEUSE

ROSSINI : Petite messe solennelle, pour quatre solistes, chœur mixte, deux pianos & harmonium, éditée par Patricia Brauner & Philip Gosset.  Bärenreiter.  Conducteur : BA 10 501.  Réduction pour soli, chœur & piano : BA 10 501a.

La Petite messe solennelle, composée à Paris durant l’été 1863, est une très belle œuvre, bien dans le style de son auteur, et qui comporte quelques particularités tout à fait étonnantes.  La préface de P. Brauner et de Ph. Gosset est, à ce sujet, particulièrement intéressante et documentée.  La présence de l’harmonium, orgue de salon, s’explique par l’aspect « musique de chambre » de l’œuvre.  De plus, il ne s’agit pas de n’importe quel harmonium mais de l’instrument hybride dit « Harmonicorde Debain », instrument également muni de cordes frappées.  Cette Messe est en tout cas la dernière grande œuvre de Rossini et comporte des audaces harmoniques inattendues.  S’il en a réalisé une orchestration en 1867, c’est simplement pour éviter qu’un autre le fasse après sa mort.  C’est toutefois la première version qui est celle expressément voulue par le compositeur.

 

         

 

MUSIQUE D’ENSEMBLE

Roland CHAGNON : Le Fantôme de l’Étrange Opéra, pour quintette à vent.  Delatour : DLT1353.

Un fantôme taquin a détourné quatorze thèmes de la Carmen de Bizet…  Ce joyeux quintette n’est certes pas très difficile techniquement ; mais, pour livrer tout son humour, demande une parfaite liberté avec son instrument. Il suppose aussi des jeux de scène indispensables à l’exécution.  Bref, il demandera un travail sérieux pour un résultat plein d’humour et de vraie musique.

 

 

Frédéric CHOPIN (arrangements de Francis Coiteux) : Mon ami Chopin, pour piano & cordes (2 violons, violoncelle & contrebasse)Delatour : DLT1838.

Cet hommage à Chopin est constitué de quatre extraits d’œuvres célèbres (dont le 1er Concerto), soutenus par un discret accompagnement des cordes.  C’est fait avec beaucoup de goût.  Si le pianiste doit être expérimenté et avoir, surtout, le sens de cette musique, les parties de cordes sont, elles, assez faciles.

 

 

Félicien WOLFF : Concerto pour orgue & orchestre à cordes (2 trompettes ad libitum) sur le Veni Creator.  Delatour.  Conducteur : DLT1000.  Orgue : DLT1000D.

Félicien Wolff a longtemps cessé de composer avant de donner quelques œuvres majeures.  Ce Concerto en est une.  Orgue, orchestre & trompette échangent et concertent longuement autour du Veni Creator dans deux mouvements : « Prélude et Andante en trio », « Passacaille et Fugue ».  Bien que déclarées ad libitum, les trompettes sont indispensables : elles assurent souvent l’énoncé du thème en valeurs longues au dessus de la polyphonie.

 

    

 

Jean-François PAULÉAT : Oréade, pour bande de hautbois, clavecin, timbales & batterie.  « Les bandes de hautbois », Delatour : DLT1748.

Composée pour 3 hautbois, hautbois d'amour, 3 cors anglais, 2 bassons, clavecin, timbales & batterie, cette œuvre originale évoque les nymphes des grottes et des montagnes.  Dynamisme et gaieté dans un langage où l’ancien et le moderne font bon ménage… Construite sur trois mélodies et une base rythmique récurrente, cette partition nous entraîne dans un univers de rêves et de folie.

 

Daniel Blackstone.

 

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La nouvelle collection « MusicologieS », chez Vrin.  Le lundi 6 décembre 2010, à la Galerie Bernanos (Centre Jean Sarrailh), à l’occasion d’une chaleureuse réception, Malou Haine et Michel Duchesneau ont présenté cette nouvelle collection qui prend la suite des nombreuses publications dirigées par Malou Haine aux éditions Mardaga.  Les deux directeurs travaillent dans le même esprit, « loin des petites chapelles » et dans la complémentarité des recherches : l’un étant spécialiste du XIXe siècle, l’autre du XXe.  Une garantie : leur parfaite connivence et les liens d’amitié qu’ils créeront avec les auteurs sous le signe de la discussion et de l’ouverture universitaire.  Les éditions Vrin - depuis longtemps spécialistes d’ouvrages philosophiques - ont bien voulu ouvrir l’éventail de leurs publications à la musicologie : tout à l’honneur de leur longue tradition éditoriale familiale.  Trois ouvrages sont d’ores et déjà parus :

  • Sophie Stévance (dir.) : Composer au XXIe siècle.  Pratiques, philosophies, langages et analyses.
  • Pauline Pocknell, Malou Haine, Nicolas Dufetel : Lettres de Franz Liszt à la Princesse Marie Hohenlohe-Schillingsfürst, née de Sayn-Wittgenstein
  • Sylvie Douche, Philippe Cathe, Michel Duchesneau (dir.) : Charles Koechlin, compositeur et humaniste.

[Recensions à paraître dans L’éducation musicale.]

 

Les deux directeurs ont évoqué leurs dynamiques projets à long terme forçant l’admiration.  Cette sympathique réception était associée, comme de juste, à un « Moment musical Koechlin » offert par des étudiants en Musique & Musicologie de l’Université Paris-Sorbonne placés sous la haute direction si enthousiaste de Sylvie Douche, en présence de membres de la famille de ce compositeur issu d’une vieille famille mulhousienne, ayant accompli toute sa carrière à Paris.  Il n’est pas seulement l’auteur du Traité d’harmonie ou encore du Traité de l’orchestration bien connus ; il est aussi un remarquable compositeur, entre autres, d’œuvres instrumentales (piano, flûte, violon…) et vocales…, avec un sens exceptionnel de la facture mélodique.  Les chanteurs et instrumentistes ont bénéficié d’un accompagnement au piano discret et équilibré.  Le chœur La Terre, interprété par une trentaine d’étudiants, a posé un lumineux point d’orgue sur ce lancement de la collection scientifique « MusicologieS », d’ores et déjà si prometteuse.

 

Malou Haine ©DR

 

Bénédicte GANDOIS : Mendelssohn et la France, de 1847 à nos jours.  Delatour (www.editions-delatour.com) : DLT 1851.  97 p.  14 €.

L’année Mendelssohn (2009) a suscité de nombreuses publications.  Pour sa part, B. Gandois retrace l’impact du compositeur romantique en France, depuis sa mort jusqu’à nos jours.  Elle démontre à quel point « toute l’école symphonique française de la fin du XIXe siècle s’inspire de Mendelssohn (1809-1847), autant sinon plus que de Beethoven ».  Rapidement considéré comme un musicien de second plan par rapport à ce dernier, son décès, après une si brève existence jalonnée par tant de réalisations, a marqué toute l’Europe.  Cette publication est riche de constats sur la présence de Mendelssohn aux concerts et sur les affiches en France, et en questionnements : F. Mendelssohn : « génie » ou « petit maître » ?, « antithèse de Wagner » ?, « compositeur pour les besoins du temps » ?… Dans les années 1860, l’antisémitisme social et politique sévit en Allemagne et en France, mais Mendelssohn, converti au luthéranisme, n’était pas pas pour autant méprisé à Paris.  Dans une certaine mesure, les éléments de son milieu justifient son œuvre, et l’auteur tente de retrouver la vie, la pensée et « l’étrange paradoxe d’un compositeur allemand très joué en France… très populaire et pourtant rejeté par les historiographes du XXe siècle. »  Cette approche neuve mérite l’attention. Elle est complétée par des éléments bibliographiques et un aperçu des sources (y compris les sites Internet).  De quoi s’instruire à propos de la réception de Mendelssohn en France.

 

 

Odile BOURIN, Pierrette GERMAIN-DAVID, Catherine MASSIP, Raffi OURGANDJIAN : Elsa Barraine, une compositrice au XXe siècle.  Delatour (www.editions-delatour.com) : DLT 1079. 2010.  137 p.  13 €.

Quatre auteurs présentent une femme compositeur, l’une des premières à avoir obtenu le Premier Grand Prix de Rome.  En cette année du Centenaire de la naissance d’Elsa Barraine, P. Germain oriente les lecteurs à travers les étapes de sa vie, ses origines, sa formation musicale (âgée de 9 ans, elle entre déjà au Conservatoire), son séjour à Rome, puis son retour à Paris où elle est la pianiste des Chœurs Félix Raugel, puis chef de chant à l’Orchestre national.  Arrêtée et relâchée par la milice de Vichy, elle est ensuite preneur de son, compositeur et professeur au CNS de musique.  Inspectrice des Théâtres nationaux, elle continue à voyager vers l’Est, et meurt à Strasbourg, le 20 mars 1999.  Au fil des pages, sont évoquées sa personnalité exceptionnelle, son attitude spirituelle, ses activités de compositeur et de pédagogue et les leçons qu’elle laisse à la postérité.  Ces éloquentes contributions associées à un choix de textes, au catalogue complet (chronologique et par effectif) de l’œuvre, à la liste de ses élèves représentent la première monographie consacrée à cette « compositrice ».

 

Édith Weber.

 

 

Laurence BANCAUD : Tôn-Thât Tiêt, Dialogue avec la nature(Entretiens annotés & analyses).  Préface de Michèle Reverdy.  Cig’art Édition, 2010.  14 x 21,5 cm, 167 p.  22 €.

Tout est intéressant dans les éléments réunis pour ce livre : le compositeur s’impose comme une des grandes personnalités de sa génération, l’auteur a une vision très pertinente de son sujet dont elle est, en tant que harpiste, une interprète, la rencontre Orient-Occident innervant la musique et la pensée de Tôn-Thât Tiêt est un des thèmes majeurs de notre époque, les sujets philosophiques abordés (en raison de l’imprégnation de l’itinéraire du musicien par les sagesses taoïstes et bouddhistes) incitent à l’approfondissement culturel.  Alors, qu’est-ce qui ne va pas ? La structure du livre, tout simplement.  Les entretiens sont très maigres, et Laurence Bancaud a, en revanche, beaucoup à dire sur la musique et l’approche philosophique du maître vietnamien : mais (ô stupeur et consternation !) tout son propos est classé sous forme de notes et d’annexes (d’où des annexes représentant plus de la moitié des pages du livre !).  Son plan eût-il navigué entre ses propres arguments analytiques et des « propos rapportés » les étayant, l’ensemble eût gagné en cohérence rédactionnelle.  On a l’impression de lire l’esquisse de ce qui pourrait être un grand travail exégétique de Laurence Bancaud sur le musicien.  La reconversion d’un précédent ouvrage qu’elle avait fait paraître en 1998 n’a pas fonctionné et aboutit à une structure boîteuse, diminuant l’impact d’une réflexion de très grande qualité.

 

Sylviane Falcinelli.

 

 

Véronique ALEXANDRE JOURNEAU (Sous la direction de) : Arts, langue et cohérence.  « L’univers esthétique », L’Harmattan.  13,5 x 21,5 cm, 260 p., ex. mus., ill. n&b.  24 €.

Dans le droit fil de son précédent opus, Musique et effet de vie (L’Harmattan, 2009), la sinologue Véronique Alexandre Journeau développe sa réflexion sur « la cohérence dans l’œuvre d’art », corollaire essentiel de l’effet de vie (l’esprit humain n’a-t-il pas naturellement tendance à chercher l’ordre et à fuir le chaos ?).  Après une introduction de Marc-Mathieu Münch, trois parties composent l’ouvrage : Du texte à la musique (Gottfried R. Marschall, Véronique Alexandre Journeau, Marc Rigaudière, Philippe Malhaire, Hui-Mei Chen, Patrick Lang), De la littérature aux arts (Jean Ehret, Brigitte Lefèvre, Marie Burkhardt, Gérard Denizeau), Perspectives (Michel Guiomar, Danièle Pistone).  Fruit de la « rencontre scientifique » qui s’était déroulée, le 3 février 2010, sous les auspices de l’Observatoire musicale français (OMF), une somme d’importance.

 

 

Dorian ASTOR, Gérard COURCHELLE & Patrick TAÏEB : Opéra-ci Opéra-là ou comment découvrir l’art lyrique.  Gallimard.  18 x 25 cm, 400 p., ill. n&b et couleurs. 

Jailli quasiment tout armé, en 1600, du cerveau visionnaire de Monteverdi, l’opéra est désormais universel.  Vingt-cinq « hit opératiques » (sic) sont ici présentés sous leurs aspects notamment anecdotiques : Extraits du livret / Description de ce qu’on entend pour guider une première écoute / Parcours historico-culturel autour du compositeur & de son œuvre / Mises en scène historiques et/ou modernes.  Ouvrages recensés : Orfeo (Monteverdi), Atys (Lully), King Arthur (Purcell), Giulio Cesare (Haendel), Orlando furioso (Vivaldi), Platée (Rameau), Armide (Gluck), Les Noces de Figaro (Mozart), Le Barbier de Séville (Rossini), Der Freischütz (Weber), Norma (Bellini), Les Troyens (Berlioz), La Belle Hélène (Offenbach), Tristan et Isolde (Wagner), Boris Godounov (Moussorgski), Carmen (Bizet), Eugène Onéguine (Tchaïkovski), Rigoletto (Verdi), Tosca (Puccini), Pelléas et Mélisande (Debussy), Jenůfa (Janáček), Salomé (Strauss), Wozzeck (Berg), Billy Budd (Britten), West Side Story (Bernstein).  Un panel, mon Dieu, fort représentatif…

 

 

« Gilles Tremblay, ou le plain-chant contemporain ».  Revue Circuit, Musiques contemporaines.  Volume 20, n°3.  Les Presses de l’Université de Montréal (www.revuecircuit.ca).  21, 5 x 23 cm, 140 p., ex. mus, ill. n&b.  28 $ CA.

Contribution de la prestigieuse revue Circuit à la série « Hommage au compositeur Gilles Tremblay (°1932) », initiée par la Société de musique contemporaine du Québec (www.smcq.qc.ca), ce numéro propose : « L’arbre et le fleuve » (introduction par Jonathan Goldman), « Une célébration sonore de l’esprit : à propos d’Oralléluiants » (par Vincent Ranallo), « Qui êtes-vous Gilles Tremblay ? » (entretien réalisé, en 1997, par Jean Lesage), « Gilles Tremblay pédagogue, vu par ses anciens élèves » (enquête par Danick Trottier), « Compléments biographiques » (par Marie-Thérèse Lefebvre), « Gilles Tremblay : éléments d’une poétique musicale vus sous le prisme de Réseaux, Fleuves et Solstices » (cahier d’analyse par Serge Provost).  Hors dossier : « Nouveautés en bref » (Réjean Beaucage).

 

 

Compositrices françaises au XXe siècle.  Association « Femmes et musique ».  Préface de Jean Roy.  Introduction d’Alain Mitéran.  Delatour (www.editions-delatour.com).  16 x 23,5 cm, 218 p., ill. n&b.  22,16 €.

Elles sont là, (quasiment) toutes là : I. Aboulker, Cl. Arrieu, E. Barraine, N. Boulanger, L. Boulanger, Th. Brenet, M. Canal, E. Canat de Chizy, M. Cecconi-Botella, A. Clostre, Chr. Colleney, Y. Desportes, R. Falcinelli, Gr. Finzi, M. Gabus, S. Giraud, Chr. Groult, B. Jolas, E. Lejet, J. Leleu, M. de Manziarly, Fl. Mulsant, A. de Polignac, H. Puig-Roger, M. Reverdy, G. Tailleferre.  Catalogue des œuvres, bibliographies succinctes.

 

 

Françoise SCHWAB, et alii : Présence de Vladimir Jankélévitch.  Le charme et l’occasion.  « Prétentaine », Beauchesne (www.editions-beauchesne.com).  13,5 x 23,5 cm, 470 p., photos n&b.  48,50 €.

Quel bonheur de retrouver ici - en parfaite complicité avec quelques disciples & amis de l’auteur de La Musique et l’ineffable – l’éblouissant professeur dont nous eûmes naguère le privilège de suivre les cours en Sorbonne.  Où la plupart des contributeurs retrouvent, plus ou moins consciemment, les qualités d’expression d’une pensée hors du commun.  Avec la collaboration de Sofia Eliza Bouratsis & de Jean-Marie Brohm, l’historienne et philosophe Françoise Schwab a rassemblé les communications faites lors du colloque « Vladimir Jankélévitch : Actuel, Inactuel » qui s’était tenu, à l’École normale supérieure, les 16 et 17 décembre 2005 – recueil enrichi de bien d’autres textes, témoignages ou documents.  Six parties composent cet admirable Tombeau : « La temporalité enchantée » (A. Davidson, M. Massin, Fr. Schwab, J.-P. Bartoli, B. Scève), « L’émerveillement et l’indicible » (Fr. Worms, L. Jerphagnon, P.-M. Klein, G. Ernst), « L’exigence de l’agir » (E. Lisciani-Petrini, É. de Fontenay, L.-T. Somme, J. Brankel), « Le philosophe et l’histoire » (P. Kemp, A. Le Guyader, M. Le Dœuff, J.-M. Brohm), « Témoignage » (P. Grappin), « Présence de Vladimir Jankélévitch » (15 conférences, articles et entretiens).  Repères biographiques, bibliographie.

 

                          

 

 

Signes Musiques« La revue du chant liturgique » (Tél. : 01 74 31 60 60.  bpcontact@bayard-presse.com).  N°119 (septembre/octobre 2010).  N°120 (novembre/décembre 2010).  21 x 30 cm, 60 p., textes musicaux, un CD.  7 €.

Au sommaire de ces deux fort riches livraisons, outre les rubriques habituelles (Entre nous, Actualité, Rencontres, En librairie, Point d’orgue, Coup de cœur…), sont proposées de toutes nouvelles partitions à caractère proprement liturgique (sous forme de mélodies avec chiffrages, chœurs à 3 ou 4 voix, pièces d’orgue).  Numéro 119 : « Le chant et la musique dans les célébrations » du 28 novembre 2010 (1er Avent A) au 16 janvier 2011 (2e dimanche A) ».  Numéro 120 : « Le chant et la musique dans les célébrations » du 23 janvier (3e dimanche A) au 20 mars 2011 (2e carême A) ».  Les CDs inclus comportent l’enregistrement des musiques (TT : 43’31 + 50’59) mais aussi, sur piste CD-Rom, les partitions au format PDF.  Saluons l’effort ici entrepris pour sortir l’actuel répertoire chrétien de son ordinaire indigence.

 

       

 

« Le cerveau mélomane ».  Revue L’essentiel Cerveau & Psycho n°4 (www.cerveau&psycho.fr).  16,5 x 23 cm, 98 p., ill. n&b et couleurs.

Passionnante publication où, en trois grands chapitres, sont mises en lumière les multiples façons dont la musique agit sur le cerveau.  « Musique pour tous » : le langage de la musique s’acquiert de façon aussi spontanée que l’on apprend à parler / il s’installe dans le cerveau sans que nous en ayons conscience / il suscite les mêmes émotions chez tous les auditeurs / il réduit les concentrations sanguines en hormones du stress / il influe sur le comportement consumériste.  « Les effets de la musique » : favorisant l’intelligence émotionnelle, elle améliore la concentration & la coordination / sa pratique révèle des changements dans la morphologie du cerveau & les fonctions de certaines aires / la mémoire musicale partage de nombreuses aires cérébrales avec celle des mots / la musique aide à retrouver l’usage de la parole après un accident vasculaire cérébral / les locuteurs d’une langue tonale (telle le mandarin) ont l’oreille absolue.  « Des défis pour le cerveau » : l’amusie congénitale / exacerbation de la perception des sons chez les aveugles / environnements sonores des scènes de réalité virtuelle / révélations de l’imagerie cérébrale / bienfaits (inconscients) de l’écoute répétée de musique contemporaine (cfwww.cerveauetpsycho.fr).  Fasse le ciel…

 

Couverture du dernier numéro  de L'essentiel Cerveau&Psycho

 

Olivier DEGEN (Photographies de) : Jazz Portraits.  Daniel, Bruno, Louis, Michel et les autres.  « Les musiciens par leurs prénoms » (poème de Francis Marmande).  Trans Photographic Press (www.transphotographic.com).  Album relié, couverture toilée & jaquettée, 21 x 21 cm, 112 p., photos n&b.  35 €.

Magnifique album qu’il n’est certes pas trop tard pour (vous) offrir !  Où, en toute complicité, le photographe parisien Olivier Degen et l’écrivain & critique Francis Marmande rendent un extraordinaire hommage à tous ces merveilleux artistes qu’ils auront côtoyés et aiment passionnément.

 

packshot    

 

Les Cahiers du jazz, n°7 (2010, nouvelle série) : dossier Michael Brecker.  Outre Mesure (www.outre-mesure.net).  14,5 x 21 cm, 192 p., ill. n&b, ex. mus.  16 €.

Outre un très complet « Dossier Michael Brecker » (articles signés Ludovic Florin, Randy Brecker, Pierre Sauvanet, Pierre Genty, Jean-Louis Chautemps, Bertrand Lauer…), cette livraison propose des « Textes » sur Albert Ayler, Martial Solal, André Hardellet… plus les rubriques habituelles : « Événements », « Témoignage », « Anachroniques ».

 

     

                             Michael Brecker ©DR

 

Sébastien BISET (Sous la direction de) : Le performantiel noise.  MNÓAD & (Sic), éditeurs (www.sebastien-biset.com).  21 x 27 cm, 84 p., CD inclus.  15 €.

Au sommaire de cette bizarre publication (assortie d’un CD hautement névralgique) : Des fondamentaux à l’air du temps (Sébastien Biset), L’art de la bruicante et l’aspiration à l’authentique (Yves Citton), Pour une bruitologie performantielle (Pierre Albert Castanet), Le bruit du « n’importe qui », fable de la « non-musicienne » & du critique musical (Matthieu Saladin), Noise : une performance pour l’oreille (Anne Genette), Circonstances du bruit en Chine (Guy-Marc Hinant), Une singularité de la musique noise en Asie et en Afrique (C-Drík Fermont).

 

       Le performantiel noise (+ CD)

 

Hervé BOURHIS : Le Petit Livre Beatles.  Préface de Hugo Cassavetti.  Dargaud (tél. : 01 53 26 32 33.  www.dargaud.com).  22 x 22 cm, couverture cartonnée, 160 p., quadrichromie. 19,90 €.

Sous le crayon érudit d’Hervé Bourhis (à qui nous devions déjà un remarquable Petit Livre rock), est amoureusement retracée la joyeuse épopée des « Fab Four » - depuis la préhistoire du groupe, à Liverpool, jusqu’aux plus récents enregistrements des deux survivants.

 

Francis Cousté.

 

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Le classique, c’est chic.  Coffrets « Classique », en exclusivité dans les magasins Fnac & sur www.fnac.com  19.99 €.

Rien de mieux venu que cette initiative de la Fnac pour rappeler que la musique dite classique a vocation à être populaire tout en offrant des moments d’évasion dont l’équivalent ne se trouvera nulle part ailleurs. Sachant qu’aujourd’hui bon nombre de thèmes, de motifs, voire de morceaux, sont connus par les canaux indirects du film ou du message publicitaire, la Fnac a décidé de renouer avec sa tradition d’édition destinée au plus large public, tout en conservant une exigence maximale. Ce sont dix coffrets qui sont ainsi proposés, regroupant tous les incontournables de la tradition classique, interprétés par les plus grands musiciens : Karajan, Richter, Heifetz, Callas… Classé par compositeurs ou par grandes thématiques, chaque coffret comprend cinq CD et un livret de 48 pages, permettant la découverte, en version remasterisée, des meilleurs enregistrements de musique classique. Cinq premiers coffrets offrent l’essentiel de l’œuvre de compositeurs majeurs : Bach, Beethoven, Mozart, Schubert, Chopin, les cinq autres étant déclinés sur le mode thématique : Opéra, Musique sacrée, Piano, Cinéma, Publicité.

 

Gérard Denizeau.

 

Jean SIBELIUS : Quatuor en mineur « Voces intimae ».  Arnold SCHOENBERG : Quatuor en mineur op.7.  Tetzlaff Quartett.  Avi-Music : 855 3202 (distr. Codaex).

Deux quatuors en mineur, mais deux mondes que tout oppose.  Chez Sibelius (en 1909), un dépouillement qui semble même rechercher des valeurs archaïques comme vecteur de l’intimité, une atmosphère où la sobriété chaudement expressive des intentions se communique avec une grande économie de moyens, à l’exception de la frénétique explosion dansée du finale.  Chez Schoenberg encore jeune (nous sommes en 1905), une écriture foisonnante (sans un moment de répit durant plus de 45’) qui hésite entre les idées post-romantiques, des relents populaires inopinément surgis, la rigueur polyphonique, mais aussi une hyper-complexité motivique qui induit l’architecture, préfigurant la logique générative du futur système dodécaphonique.  Dans l’une et l’autre esthétique, les interprètes évoluent avec une maestria qui surclasse bien d’autres quatuors.  Le célèbre violoniste Christian Tetzlaff et sa sœur violoncelliste Tanja ont fondé leur ensemble avec Elisabeth Kufferath et Hanna Weinmeister, pour développer une identité sonore riche de leurs quatre puissances de solistes (les dialogues à découvert du Sibelius s’en nourrissent), mais fondue avec une perfection dans la plénitude qui leur permet de négocier les incessants virages du Schoenberg avec un souffle qui ne s’infléchit jamais.  Ils jouent jusqu’au paroxysme, mais ne perdent jamais le contrôle des itinéraires hors normes dans lesquels les entraînent ces musiques de l’irrémédiable au bord du précipice, car d’irrémédiable il s’agissait face aux mutations radicales que l’époque faisait se profiler, avec tant d’unanswered questions (aurait dit Ives).  On sait combien les deux compositeurs réagirent différemment à ces questions.  Un disque d’une haute portée.

 

 

Felix MENDELSSOHN : Les 2 Concertos pour piano ; Rondo brillant op.29.  Martin Helmchen (piano), Royal Flemish Philharmonic, dir. Philippe Herreweghe.  SACD Pentatone : PTC 5186 366 (distr. Codaex).

Que de duretés dans les mouvements vifs ! Quel son déplaisant, grossissant l’accent sur les vents, sans parler d’une captation qui « englobe » le piano dans l’orchestre et ne travaille pas assez la définition des plans (il s’agit pourtant d’un SACD) !  Où sont l’élégance, la finesse de trait propres à Mendelssohn ?  Il y a pourtant de belles intentions musicales dans les mouvements lents, ou dans l’art de souligner une modulation dans la coda du Rondo.  Mais cette interprétation, véhiculant encore quelques poncifs (dans le traitement du son orchestral et de l’accentuation) de la doxa baroqueuse, réussit le prodige de nous détourner de toute sympathie pour le pauvre Mendelssohn, qui n’en peut mais !

 

 

Arnold SCHOENBERG : Gurrelieder (*), Erwartung (a), Symphonie de chambre n°1, Variations op.31, Cinq Pièces op.16, Un Survivant de Varsovie (b), orchestration du Quatuor op.25 de Brahms.  Anton WEBERN : Six Pièces op.6, Cinq Pièces op.10.  Alban BERG : Lulu-Suite (c) ; final du Concerto à la mémoire d’un ange (d).  Thomas Moser, Karita Mattila, Anne Sofie von Otter, Thomas Quasthoff, Philip Langridge.  Rundfunkchor Berlin, MDR Rundfunkchor Leipzig, Ernst-Senff-Chor, Orchestre philharmonique de Berlin (*) ; City of Birmingham Symphony Orchestra, avec Phyllis Bryn-Julson (a), Franz Mazura & City of Birmingham Symphony Chorus (b) Arleen Augér (c), Gidon Kremer (d).  Direction : Simon Rattle.

Coffret de 5 CDs EMI : 50999 4 57562 2.

La collection de rééditions en coffrets thématiques honorant Sir Simon Rattle se poursuit avec cette anthologie de l’École de Vienne, panorama optimal en ce qui concerne Schoenberg.  En effet, les œuvres choisies ne se limitent pas aux inévitables jalons orchestraux, elles couvrent un parcours pertinent à travers les chefs-d’œuvre vocaux du maître.  Si le coffret reprend essentiellement des enregistrements réalisés de 1984 à 1995, à l’époque où le maestro anglais se livrait au plus persévérant travail avec sa phalange de Birmingham qu’il porta à un niveau entré dans les annales de l’histoire orchestrale, l’unique contribution de l’Orchestre philharmonique de Berlin n’est pas mince (rappelons que Berlin fut le seul poste – le plus prestigieux au monde – pour lequel Simon Rattle consentit à quitter ses musiciens de Birmingham, bien qu’ayant été l’objet de nombreuses sollicitations venues de tous horizons, dans les années antérieures).  Il s’agit, en effet, d’une interprétation lumineuse des Gurrelieder (en 2001), aussi perspicace dans l’art de souligner les emprunts au Wagner de la dernière période que claire dans le dessin et la mise en prespective de tous les éléments nourrissant l’admirable flux orchestral et vocal.  Thomas Moser (Waldemar), ténor mozartien à l’origine, s’attelait à quelques rôles wagnériens, sa voix ayant pris de belles résonances graves avec l’âge.  Karita Mattila était une Tove parfaite.  Thomas Quasthoff, en Narrateur, faisait habilement comprendre, dans la troisième partie (dont la majeure partie fut certes composée dans le sillage des deux précédentes dès 1901, mais le dernier épisode achevé et orchestré une décennie plus tard, en 1910-11) où Schoenberg laisse percer sa nouvelle identité stylistique, l’inéluctable basculement qui allait se produire entre la Sprechstimme ici employée et le Sprechgesang expérimenté l’année suivante dans Pierrot lunaire (1912).  Philip Langridge (décédé le 5 mars 2010), qui chantait Schoenberg depuis des années, apportait aussi au rôle du Bouffon les inflexions ironiques issues de sa tardive prise de rôle de Loge.  Seule Anne Sofie von Otter n’avait plus la santé vocale d’antan.  À l’autre extrême du parcours schoenbergien, on accueille avec joie une belle version de Un Survivant de Varsovie (1947), œuvre trop rarement donnée (la vindicte boulezienne contre la période américaine du maître viennois serait-elle la cause de cette désaffection ?), avec le Salzbourgeois Franz Mazura, qui fut un illustre Klingsor, en récitant du texte anglais.  Erwartung, en revanche, déçoit : à la voix trop claire de Phyllis Bryn-Julson manquent les ombres psychanalytiques encloses dans le texte de Marie Pappenheim, et on a peine à croire à ce qu’elle raconte tant elle fait « joli » ; l’orchestre s’abstient tout autant de ténèbres dramatiques, ce qui n’arrange rien.

La Symphonie de chambre n°1 (1906) reçoit l’interprétation la plus historiquement lisible qui se puisse rêver, puisque Simon Rattle fait bien ressortir toutes les références et allusions reliant l’œuvre aux « classiques » du répertoire antérieur, et la traite, non dans l’optique d’une préfiguration de l’esthétique de rupture, mais au contraire avec une tendresse – oserait-on écrire – dans la spontanéité jaillissante.  On admirera le jeu très sûr du Birmingham Contemporary Music Group, émanation du CBSO, fondé en 1987 sous la baguette de Simon Rattle.  Le chef et ses musiciens britanniques évoluent avec une très grande souplesse expressive à travers les jeux de timbres de l’op.16 schoenbergien (dans sa version originale de 1909), préparant ainsi aux féeriques touches d’atmosphère du disciple Webern dans son op.6 exactement contemporain (quoique révisé en 1928).  Une curiosité : l’étrange orchestration du Quatuor avec piano en sol mineur de Brahms, si éloignée du son brahmsien, si révélatrice des rehauts dont Schoenberg aimait souligner (à traits parfois complètement hors-sujet !) les délinéaments de l’architecture.  Quant aux Variations op.31, elles coulent avec la limpidité d’un « classique », nous remémorant la célèbre phrase de Schoenberg (rapportée par René Leibowitz) : « Ma musique n’est pas moderne, elle est seulement mal jouée ! ».  Les quelques plages dévolues à Berg captent moins notre intérêt, car s’en tenant trop à la surface des drames intérieurs évoqués ; le disque récemment chroniqué de Stefan Soltesz (Lulu-Suite, chez Cybele) s’avérait autrement plus profond.  Mais là n’est point l’essentiel de cette somme et le coffret EMI réconcilierait avec Schoenberg les plus réfractaires.

 

 

Eugen d’ALBERT : Der Golem.  Mark Morouse (le Golem), Alfred Reiter (Rabbi Loew), Ingeborg Greiner (Lea), Tansel Akzeybek (le disciple), Chœur du Théâtre de Bonn, Beethoven Orchester Bonn, dir. Stefan Blunier. MDG « Live » (SACD) : 9371637-6 (distr. Codaex).

Eugen d’Albert (1864-1932), Allemand d’origine française né à Glasgow, fut très célèbre par sa carrière de pianiste virtuose (il avait étudié auprès de Liszt à Weimar), et par le nombre de ses mariages (nous vous ferons grâce des non-épousées, afin de ne pas nous rapprocher de l’Air du catalogue de Leporello).  Le compositeur s’en trouva occulté.  On l’exhume peu à peu, notamment dans le domaine lyrique : il ne composa pas moins de 21 opéras, dont le plus connu est TieflandLe Golem, ici présenté, souffre d’un livret manquant de dimension fantastique pour véhiculer la réflexion métaphysique de cette parabole sur l’orgueil créateur de l’homme ; nous sommes loin de l’inoubliable roman de Gustav Meyrink !  Des faiblesses dramatiques plombent d’invraisemblances ce qui devrait tendre au mythe.  La représentation qu’on entend, captée pour l’occasion, a tendance à nous délivrer toute la musique sur le même plan ; découvrant que l’ouvrage fut créé par le grand Clemens Krauss (en 1926), l’éminent disciple de Richard Strauss, on se prend à rêver à ce que put donner sous cette baguette une telle musique aussi imprégnée de Wagner, que ce soit par le traitement des groupes orchestraux (pas seulement les cuivres, mais surtout les bois et les cordes) ou par des thèmes par moments décalqués des motifs du maître de Bayreuth.  Si on aime celui-ci, on se laissera prendre par la séduction du flux musical d’Eugen d’Albert.  La distribution se tient dans une honnête moyenne, les chanteurs ayant la dose… moyenne de défauts commune à tant de chanteurs mal formés de notre époque.

 

 

Philippe HERSANT : Éphémères (a) ; Musical humors (b). Alice Ader, piano (a) ; Arnaud Thorette (alto).  Orchestre de Paris-Sorbonne, dir. Johan Farjot (b).  Triton : TRI 331170.

Il est des rencontres bénies des dieux entre tel compositeur et tel(le) interprète.  On recense de ces fidélités exemplaires au fil de l’histoire de la musique.  S’y ajoutera celle reliant Alice Ader à Philippe Hersant, tant existe une symbiose entre l’écriture du compositeur et la sonorité de la pianiste, aussi personnelles l’une que l’autre.  Le goût des graves résonants qui ponctuent comme une volée de cloches le paysage, ou qui assoient l’édifice sur des soubassements profonds, ou qui ouvrent un noble champ à la réflexion et à l’espace sonore ; le sens poétique qui désigne instantanément à l’oreille les plans essentiels de la perspective sonore : par ces caractéristiques, venons-nous de décrire le style du compositeur ou le jeu de la pianiste ?  La réponse englobe les deux, indissolublement.  Éphémères ?  Haïku (puisque le recueil, composé de 1999 à 2003, s’inspire de 24 poésies de Bashō) ?  On s’attendrait à des miniatures ciselées dans l’elliptique, à l’image des brèves images allusives de cette forme japonaise.  Mais ce serait mal connaître Philippe Hersant.  Son piano brosse à la fresque, même dans la concision ; son esthétique sonore se drape de velours damassé ; son expression, qui n’a pas peur de l’émotion directe, traverse les bouillonnements d’un esprit que l’on qualifierait de « romantique », n’était que sa chaleureuse sensibilité ne sacrifie rien d’une « griffe » moderne.  On l’aura compris, les heurts et les grondements qui agitent par moments le piano n’ont rien de « japonaiseries », ou alors ce serait pour évoquer quelque volcan !  L’auditeur habitué aux œuvres de Philippe Hersant reconnaîtra au passage quelques traces de partitions antérieures.  Cette captation réalisée lors d’un concert dans l’Hérault nous livre un très grand opus pianistique par une très grande pianiste.

Le Théâtre de l’Athénée s’affiche comme le lieu des haïku de Philippe Hersant, puisque Alice Ader y avait présenté les Éphémères il y a peu, et que l’on put y découvrir le 6 décembre 2010 d’autres Haïkus, nés postérieurement (2005-2010) et cette fois étendus au piano à quatre mains : l’intimité poétique qui unissait, ce soir-là, les approches de Claire-Marie Le Guay et d’Éric Le Sage créait une atmosphère touchante mais non dépourvue de chair, quoique bien différente du monde des Éphémères.

Pour en revenir au programme du disque, le complément apporte une couleur d’archet : Musical humors (2003), né de l’amour de Philippe Hersant pour la musique de viole de Tobias Hume, n’en transmet pas moins la généreuse identité de son auteur.  Les excellents Arnaud Thorette et Johan Farjot, si constamment disponibles aux compositeurs de leur temps, se déchaînent avec passion dans cette partition limpide mais foisonnante.  Ils ont été enregistrés lors d’une répétition générale publique dans le Grand Amphithéâtre de la Sorbonne, mais l’acoustique du lieu ne doit pas seule expliquer l’ambiance hyper-réverbérée que l’on entend…  Au final, un disque qui réchauffe le cœur !

 

 

Gabriel FAURÉ : Les 13 Nocturnes.  Stefan Irmer, piano.  MDG : 618 1626-2 (distr. Codaex).

L’entrée de Stefan Irmer dans la discographie de la musique française s’effectue par une incontestable réussite.  La rondeur de son toucher et sa chaude musicalité, rencontrant le fameux Steinway de 1901 (guère adapté à tous les répertoires, mais particulièrement en situation ici) qu’emploie MDG, servent à merveille le mélange d’esprit romantique (par l’intranquillité passionnée, non par quelque ancrage stylistique, hormis les tournures chopiniennes du n°3 !) et d’invention permanente qui sous-tend l’évolution sur un demi-siècle du langage fauréen à travers les 13 Nocturnes.  Les grands flux charriant les élans des sept premiers nocturnes trouvent ici une interprétation empreinte d’une impétuosité savamment mûrie.  Stefan Irmer sait s’orienter tout aussi pertinemment entre les angles plus abstraits des dernières pièces procédant par des pas de côté qui entraînent sans relâche les insolites enchaînements harmoniques vers des horizons sans concessions (les impairs n°9, 11, 13).  Le pianiste a rédigé lui-même le livret, avec une judicieuse finesse de touche analytique.  Gabriel Fauré s’est conquis un grand interprète allemand ce qui, au-delà même de nous procurer un riche plaisir musical, est en soi une originalité.

 

Sylviane Falcinelli.

 

 

Alexander AGRICOLA : Missa in myne zyn.  Ricercar (stephanie@outhere.com) : RIC 306.  TT : 59’50.

Cette messe est conçue en trois parties : Ante Missam, Ad Missam (Gloria, Sanctus, Agnus Dei) et Ad Vesperam.  Dès les premières mesures, l’auditeur est plongé dans le paysage vocal franco-flamand avec la cadence typique du XVe siècle et la quinte à vide conclusive.  A. Agricola (ca 1456-1506) a composé sa Missa in myne zyn à partir d’une mélodie populaire hollandaise éponyme.  Cette œuvre est entrecoupée d’autres chansons à succès : Comme femme desconfortée (G. Binchois), D’un autre amer (J. Ockeghem), Tout a par moy (V. Frye).  Le traditionnel  : Regina coeli laetare Alleluia se termine par Ora pro nobis Deum.  Le musicien a emprunté le texte suivant à une citation biblique : Pater meus agricola est, tout en spéculant sur le jeu de mots.  Son goût de la fantaisie rejoint son sens de l’écriture contrapuntique, mais aussi du lyrisme : c’est ce que rendent avec fidélité les 5 chanteurs et 3 instrumentistes (violes de gambe) tout à l’honneur de l’excellente Capilla Flamenca, dirigée par Dirk Snellings.

 

 

Musique de la Grande Écurie & des Gardes Suisses.  Musiques Suisses (mirko.vaiz@mgb.ch) : MGB CD 6267.  TT : 66’34.

Toujours soucieux de révéler des interprètes suisses, la Migros propose un programme de musique française avec l’Ensemble Arcimboldo (fifres, tambours, trompettes, trompettes marines, percussions…) et l’Ensemble de Trompettes de la Schola Cantorum Basiliensis, placés sous la direction de Thilo Hirsch.  Les discophiles ne résisteront pas aux rythmes de La descente de Mars, du Concert militaire, du Concert grotesque, des Charivaris, Mascarades (J.-B. Lully, A. Philidor).  Ils découvriront peut-être les accents des Pompes funèbres en France dans l’entourage de Louis XIV, mais aussi Le Concert dans le Parc de Versailles, La Chasse (J.-B. Prin), Les embarras de Paris… sans oublier Les Gardes Suisses, Fifres et Tambours, dans les versions de M. Corrette et J.-J. Rousseau avec, bien entendu, le Ranz des vaches…  Disque utile également pour mieux saisir les timbres instrumentaux à l’époque du Grand Siècle.

 

 

Sona Shaboyan, piano.  VDE Gallo (info@vdegallo.ch) : CD 1321.  TT : 55’4.

Sona Shaboyan, d’origine arménienne, est née à Érévan et a fréquenté la célèbre École de musique Tchaikovski, puis le Conservatoire national Komitas.  Elle a également été élève à la Musikhochschule de Fribourg-en-Brisgau.  Elle s’est installée en Suisse, où elle poursuit des activités d’enseignante et de concertiste de renom international.  Elle interprète, avec une sonorité remarquable de finesse et de transparence, quatre Préludes du pianiste arménien Eduard Abramyan (1923-1986), contrastant avec l’attaque énergique de l’Allegro agitato de la Sonate n°2 en sib mineur op.36 de Sergei Rachmaninov (1873-1943), bien enlevée.  Ce CD permet aussi de découvrir des œuvres d’Arno Babajanyan (1921-1983), dont Folksong, aux sonorités cristallines et aux accords plus dynamiques.  À ne pas manquer.

 

 

Vincent PAULET : La ballade des pendus.  Hortus (editionshortus@wanadoo.fr) : 080.  TT : 75’27.

En écrivant La ballade des pendus « pour luy & pour ses compaignons s’attendant à estre pendu avec eulx », François Villon (1431-1463) ne se doutait pas que, cinq siècles plus tard, Vincent Paulet (°1962) reprendrait à son compte ce texte si dramatique, œuvre de commande créée en 1988.  Il a toujours été « marqué par la profonde humanité de ce texte emblématique : même réclamant l’indulgence, Villon reconnaît que c’est par justice qu’il a été condamné et nous implore, nous ses semblables, de prier pour qu’il soit pardonné ».  Le musicien mise à la fois sur la sobriété et la puissance du poème : 3 strophes et un envoi, avec 2 commentaires instrumentaux intercalés ; la 3e strophe n’est autre qu’une danse dans l’esprit des danses macabres médiévales.  Les dernières notes de la prière reprennent un fragment d’une antienne grégorienne, avec une « harmonie transfigurée ».  La voix d’I. Soccoja (mezzo-soprano), soutenue par la clarinette, le piano et le Quatuor Parisii, dirigés par N. Krüger, contribue à la perception du texte si réaliste.  Ce CD comprend encore la Sonatine pour violon & piano ; Nuit (piano) ; la Sonate pour violoncelle & piano, Partita 2 (flûte & piano) et Sur un nuage (piano), interprétés en respectant les intentions de l’auteur par A. Vallin (violon), J.-M. Dayez (piano) et X. Gagnepain (violoncelle).  Disque hors du commun.

 

 

Psaumes du Mont Athos.  Jade (jade@milanmusic.fr) : 699722-2.  TT : 66’.

Grâce à l’aide précieuse du hiéromoine Macaire de Simonos Pétra, les éditions Jade, spécialisées entre autres dans la musique orthodoxe, ont pu enregistrer le Chœur des moines du monastère éponyme, fondé au XIIIe siècle et dépendant du Patriarche de Constantinople.  Il propose un remarquable choix de psaumes qui « constituent non seulement une part de l’office byzantin, mais ils en sont le squelette, l’armature même. »  Ces polyphonies, de tessiture grave et très consonantes, s’élevant chaque jour de ce monastère du Mont Athos, sont extraites du Psalterion Terpnon.  « Un même souffle puissant pour chanter les Psaumes ».

 

 

Schweizer Lautenmusik der Renaissance.  Musikszene Schweiz (mirko.vaiz@mgb.ch) : MGB C  6198.  TT : 57’41.

Le canton et les habitants de Soleure ont eu raison de soutenir ce florilège extrait de manuscrits suisses de la Renaissance.  Il est interprété avec musicalité par Christoph Greuter (luth), par la voix claire et agréable d’Ulrike J. Hofbauer (soprano) et avec le concours de Julian Behr (luth).  Au total : 37 pièces brèves avec également des morceaux français de Pierre Moulu, Claudin de Sermisy ; des pages des écoles franco-flamande (N. van Ghizeghem), italienne (Fr. da Milano) et allemande (H. Newsidler), comportant un choix de danses (saltarelle…) et de chansons en plusieurs langues - dont le dialecte suisse -, accompagnées discrètement au luth.  La confrontation de 3 versions de Languir me fais, deux au luth et une vocale (Sermisy), est particulièrement intéressante.  Voici un bel échantillon de musiques de caractère plus intime, illustrant la richesse des manuscrits suisses et la vogue du luth, à la fin du XVe et au XVIe siècles.

 

 

Domenico SCARLATTI : Sonatas.  Fuga Libera (stephanie@outhere.com) : FUG 574.  TT : 74’46.

Grâce à une technique irréprochable et son sens non seulement de l’humour, mais aussi de la méditation, Alice Ader comble les discophiles par son enregistrement d’une vingtaine de Sonates de D. Scarlatti (1685-1757), contemporain de J. S. Bach.  Elle maîtrise parfaitement tous les traquenards stylistiques.  Dès les premières mesures, elle s’impose par son jeu perlé, ses attaques précises, la transparence des lignes, la bonne conduite de la basse, son sens inné du rythme et, d’une manière générale, sa finesse et son goût exempt de tout pathos.  Recherchant, selon ses propres termes, « une adéquation toujours plus parfaite entre le son intérieur et le geste », l’excellente interprète propose aux fins connaisseurs un régal de près d’une heure et quart, dont ils ne se lasseront pas.

 

 

Emmanuel de FONSCOLOMBE : Messe brève.  Voice of Lyrics (info@voiceoflyrics.com) : VOL IC 217.  TT : 52’03.

La musique religieuse romantique française bénéficie actuellement d’un regain d’intérêt.  E. de Fonscolombe, d’origine provençale, né en 1810 à Aix-en-Provence et mort en 1875, dans cette ville - célèbre par la maîtrise de sa cathédrale - est proche de Félicien David.  Sa Messe brève en sol majeur, créée à Marseille en 1856, est interprétée dans sa version pour 3 solistes : C. Manandaza (soprano), P. Garayt (ténor), M. Hacquard (baryton) et orgue (C. Shuster Fournier).  Elle s’impose par la diversité des mouvements, par un certain effet de surprise, par des entrées successives bien marquées (Kyrie) ; une intonation grégorienne souple à l’orgue et à la voix (Gloria) ; la transparence du Credo très développé ; l’expressivité du Sanctus et la douceur de l’Agnus Dei.  Ce CD se terminant par l’Ave Maria - avec également le concours de F. Bergmann (mezzo-soprano) - et le très prenant Panis angelicus reflète toute une époque dans l’évolution de la sensibilité et des mentalités religieuses.

 

 

Birmanie : Musique du théâtre classique.  2CDs VDE Gallo (info@vdegallo.ch) : 1317-1318.  TT : 66’26 + 63’12.

Le Nô japonais est généralement mieux connu en Europe que le Théâtre classique de Birmanie.  Les discophiles non spécialisés en ethnomusicologie et en ethnographie découvriront des formes cultivées par l’ethnie birmane et ses traditions : le spectacle intitulé zat (histoires, mythes, récits) aussi associé au théâtre de marionnettes, suscitant une émotion intense, avec des épisodes baignant dans la tristesse et reposant sur une structure rythmique invariable.  L’orchestre birman se compose d’instruments mélodiques (harpe, flûte) et rythmiques avec de nombreuses percussions (tambours grands, plus petits, courts, pouvant aller jusqu’à une vingtaine).  Le zat dure toute la nuit en hiver.  Les 23 pièces de ces deux CDs traduisent la plainte, la nostalgie, la « musique d’eau »...  Grâce à ces enregistrements (2005) très présents de Ph. Yampolsky : dépaysement assuré.

 

Édith Weber.

 

 

Franz LISZT (1811-1886) : Via Crucis.  Maîtrise de Notre-Dame de Paris, dir. Nicole Corti.  David Selig (piano). Saphir Productions (www.saphirproductions.net) : LVC 1107.  TT : 52’53.

Un enregistrement qui regroupe trois œuvres sacrées de Liszt dont Via Crucis, œuvre tardive pour chœur mixte, solistes & piano.  Une composition retraçant un chemin de croix en quatorze étapes, étapes initiatiques vers la foi.  Œuvre audacieuse, hétérogène et déroutante, toute empreinte de doute, de douleur mais aussi de joie, de sérénité, d’ascèse et de méditation, tous aspects parfaitement rendus par les voix et le piano de David Selig, tour à tour pesant ou envoûtant.  Un disque, comme une prière, qui mérite d’être écouté et trouvera probablement son public.

 

Via Crucis

 

Le ténor dans tous ses éclats.  Airs d’opéras italiens.  Patrick Garayt (ténor), Michel Chanard (piano).  Hybrid’music : H1821.  TT : 49’39.

Un florilège d’airs d’opéras italiens et de chansons napolitaines.  Où il apparaît que le chant est un art difficile…

 

 

L’orgue de Lunéville.  Frédéric Desenclos, orgue.  Alpha Productions : Alpha 651.  TT : 61’30.

Un nouvel opus dans cette anthologie de l’orgue, entreprise par Alpha Productions, avec une sélection d’œuvres composées entre les XVIIe et XXe siècles (Desmarets, Lully, Daquin, Lefébure-Wély, Franck, Guilmant, Widor) jouées, avec talent, par Frédéric Desenclos sur l’orgue de Lunéville.  Orgue édifié en 1751 par Nicolas Dupont dans l’église Saint-Jacques, présentant une architecture unique en son genre, richement décorée en trompe-l’œil par Héré.  Accompagné d’un copieux livret illustré, un enregistrement qui passionnera tous les amateurs d’orgue.

 

Patrice Imbaud.

 

 

Henry PURCELL : « O Solitude ».  Songs & arias extraits de : King Arthur, The Fairy Queen, Didon & Aeneas.  Chaconne en sol mineur. Pavane en sol mineur.  Musique d'accompagnement pour The Gordian Knot Unty'd.  Andreas Scholl, contre-ténor.  Avec Christophe Dumaux, contre-ténor.  Academia Bizantina, dir. Stefano Montanari.  Universal/Decca : 478 2262.  TT : 76'39.

L'attrait exercé par le chant du contre-ténor ne se dément pas.  La pléiade des interprètes qui se produisent aujourd'hui devant le public y est pour beaucoup.  Andreas Scholl, dont la réputation n'est plus à faire, grave pour la première fois un programme Purcell.  Le grand Anglais a laissé à ce type de voix de fort beaux songs, de facture intimiste, dans le registre de l'épanchement ou de la joie consolatrice.  « Sweeter than Roses » comme « Music for a while » qui, pour Scholl, est « l'une des plus belles chansons jamais écrites », développent un climat quasi hypnotique de par la modulation généreuse de la voix.  Tandis que « O solitude », tiré d'une chanson française de Marc-Antoine Girard de Saint-Amant, « O que j'ayme la solitude ! », unit paroles & musique en un tableau apaisé.  Le récital comprend aussi des extraits des opéras The Fairy Queen, King Arthur - en particulier le fameux air du Génie du froid, où le chant est comme hoqueté jusqu'à la suffocation - et Didon et Énée.  Le célèbre lamento de l'héroïne, chanté très lié, prend avec ce timbre d'une pureté céleste une couleur étonnante.  Dans la lignée d'Alfred Deller et de James Bowman, la voix de Scholl séduit par la pureté du style et la finesse de la déclamation.  À noter la contribution du contre-ténor français Christophe Dumaux, déjà remarqué à Glyndebourne, dans deux arias, dont « Sound the trompet » où, de galbe différent, les deux voix s'allient idéalement, et « Dive custos », un chant de dévotion écrit pour la mort de la Reine Mary.  Quelques pages instrumentales introduisent une agréable respiration au sein du récital, d'autant qu'interprétées avec brio par l'Academia Bizantina.

 

 

Antonio VIVALDI : Ottone in villa.  Dramma per musica en trois actes.  Livret de Domenico Lalli.  Sonia Prina, Verónica Cangemi, Julia Lezhneva, Roberta Invernizzi, Topi Lehtipuu.  Il Giardino Armonico, dir. Giovanni Antonini.  2CDs Naïve : 30493.  TT : 77'17 + 57'50.

L'Édition Vivaldi s'enrichit du premier opus théâtral du Prete Rosso.  Cet Ottone in villa, créé en 1713 à Vicence, faisait pour lui figure de galop d'essai avant d'aborder la conquête des théâtres de la Sérénissime, et consacrait le premier succès d'une carrière lyrique promise à bien des réussites.  L'intrigue est complexe, un quiproquo amoureux à la cour de l'Empereur Otton en villégiature qui, insouciant, délaisse un temps les devoirs de sa royale charge pour s'adonner aux plaisirs de la chair ; en fait, un éloge de l'infidélité amoureuse, eu égard aux manigances des divers protagonistes qui, de pièges en travestissements, affrontent rivalités, jalousie et bien sûr vendetta, sans laquelle l'action opératique baroque ne serait pas mue par un ressort déterminant.  Vivaldi illustre les passions humaines par une faconde mélodique qui semble déjà inépuisable, une sûre maîtrise du lyrisme, d'autant que le contexte est plus pastoral qu'héroïque.  Il dépeint les désordres de l'âme, les stratégies raffinées avec un instinct infaillible.  Des trouvailles originales émaillent la partition comme cette aria avec voix en répons, ou tel autre avec flûte obligée, ou encore solo de violon.  Le quintette vocal réuni est de qualité, qui privilégie les voix féminines dont pas moins de trois sopranos.  Verónica Cangemi, Roberta Invernizzi et Julia Lezhneva prodiguent leurs talents, la dernière en particulier qui possède un médium plein et agréable et une technique accomplie lui permettant d'affronter avec un égal bonheur les arias di furore et les morceaux assagis de soliloque amoureux.  Sonia Prina offre à l'empereur magnanime les prestiges de sa voix de contralto qui s'est défaite de la rugosité d'antan pour un phrasé tout en rondeur.  Enfin le ténor Topi Lehtipuu complète de sa belle voix claire un panel vocal qui s'écoute avec un plaisir constant.  C'est que l'assimilation du style vivaldien est évidente, fruit de la renaissance de ce répertoire, ces dernières années.  Giovanni Antonini est de ceux qui y ont pour beaucoup contribué : sa direction est enlevée, les tempos incisifs sachant laisser place à la tendresse des passages lyriques.  Le souffle intarissable du discours qu'offre Vivaldi trouve dans l'ensemble Il Giardino Armonico la flexibilité et les couleurs idoines.

 

 

Antonio VIVALDI : Ercole sul' TermodonteDramma per musica, en trois actes.  Livret de Antonio Salvi.  Reconstruction & édition critique de Fabio Biondi.  Rolando Villazón, Patricia Ciofi, Diana Damrau, Joyce DiDonato, Vivica Genaux, Romina Basso, Philippe Jaroussky, Topi Lehtipuu.  Coro da camera « Santa Cecilia » di Borgo San Lorenzo.  Europa Galante, dir. Fabio Biondi.  2CDs Virgin Classics : 50999 6945450.9.  TT : 65' + 78'56.

Quelle ardeur éditoriale pour la vocalité vivaldienne, alors que l'opéra romantique semble déserter les studios ! Paraît simultanément Ercole sul' Termodonte qui narre le combat d'Hercule contre les Amazones pour dérober à la reine Hippolyte la ceinture qui assure pouvoir et chasteté.  La partition qui consacrait Vivaldi à Rome, en 1723, a été perdue dans son intégralité.  Mais plusieurs éléments éparpillés à travers l'Europe en ont permis une reconstruction à laquelle s'est attelé le violoniste Fabio Biondi qui s'explique sur ses choix, en particulier quant à l'introduction de passages chorals ou d'intermèdes instrumentaux rehaussés de cors et de timbales.  Désir de s'acquérir les bonnes grâces du public romain oblige, Vivaldi privilégie le beau chant, puisant largement dans ses œuvres antérieures.  Si l'invention mélodique y est aussi manifeste, les contrastes apparaissent moins marqués.  L'éditeur a réuni la plupart des stars de son écurie pour un festival vocal à l'aune de ce qui se pratiquait à l'époque.  Cela suffit-il ?  Le panel de timbres est somptueux.  On ne saurait en dire autant du style.  Sans doute l'enregistrement, effectué en diverses prises s'étalant sur deux ans, n'a-t-il pas été adossé à une exécution de concert permettant de créer au moins un semblant de continuum dramatique.  Se tirent le mieux d'affaire ceux qui font du baroque leur pain quotidien : Philippe Jaroussky, dont la déclamation charmeuse est un modèle d'intelligence, Topi Lehtipuu, là encore beau ténor, ou Romina Basso, vraie contralto, n'était une fâcheuse tendance à l'affectation ; ou ceux qui s'y adonnent régulièrement, Joyce DiDonato, Vivica Genaux, toutes deux glorieuses dans les vocalises.  D'autres l'assimilent avec bonheur, comme Diana Damrau.  Mais il en est qui sont tout simplement à contre-emploi.  C'est le cas de Patricia Ciofi, et hélas aussi de Rolando Villazón dont on se demande ce qui l'a conduit dans cette galère : des intonations douteuses affectent les récitatifs et le style pseudo-héroïque, quoique terne, favorisé dans les arias est hors de propos.  Reste le plaisir que réserve la direction de Fabio Biondi, d'une infinie délicatesse dans les nuances élégiaques, bondissante de vivacité ailleurs.  Comme la séduction du fini instrumental que procure son remarquable ensemble Europa Galante.

 

 

Ernest CHAUSSON : Concert op.21 pour piano, violon & quatuor à cordes.  La chanson perpétuelle op.37.  Quatuor à cordes en ut mineur op.35.  Sandrine Piau (soprano), Philippe Bianconi (piano), Régis Pasquier (violon), Quatuor Parisii.  Saphir Productions : LVC 1092.  TT : 78'26.

Ce disque offre l'originalité de présenter une pièce célèbre de la première manière de Chausson et ses deux ultimes opus, rapprochement fascinant s'il en est quant à l'évolution de son style.  Le Concert op.21, écrit pour un effectif inhabituel de six instruments, n'est en fait pas un sextuor, encore moins un concerto.  Il se réfère plutôt à une forme empruntée à la musique du XVIIIe siècle.  Le procédé cyclique, hérité de Franck, en traverse les diverses parties.  La présente exécution focalise sur l'extrême clarté du trait, du piano en particulier, et l'ensemble fuit tout halo impressionniste, souvent privilégié dans cette pièce.  Les grands climats en ressortent vaillants, gagnés par des crescendos puissants.  La chanson perpétuelle - jouée dans sa version pour piano & quatuor à cordes - sur le poème de Charles Cros « Nocturne », se situe dans le prolongement poétique du Poème de l'Amour et de la mer.  Quoique cette « mélodie lugubre », selon son auteur, insiste sur le ton de la douloureuse confidence dont n'est pas absente une certaine volupté sonore - contradiction apparente que le chant recueilli de Sandrine Piau et le volontarisme de ses partenaires restituent avec emphase.  Le Quatuor à cordes op.35, resté inachevé du fait de la disparition subite du compositeur, retiendra encore plus l'attention.  Chausson a longtemps attendu pour aborder ce genre si délicat.  Il concevait la pièce comme un ensemble conséquent équipé de quatre mouvements.  De fait, le dernier manque et le troisième, en forme de scherzo, a été complété par Vincent d'Indy, de manière quelque peu abrupte.  Le musicien atteint la sérénité dans une composition à la fois riche et comme allégée, sorte d'évolution vers l'épure.  Le Quatuor Parisii en livre une interprétation engagée et franche, là où la modernité introduite par d'insolites dissonances ne parvient pas à rompre le charme de la souple modulation déjà si présente dans le Concert op.21.

 

 

« Latino ».  Roberto Alagna interprète des chansons sud-américaines de Augustín Lara, Osvaldo Farrés, Carlos Eleta Almaràn, Gérard Matos Rodriguez, Pedro Maroni Enrique, Elo Larrea Carm, Quirino Mendoza y Cortés, Consuelo Torres Ortiz Velásquez, Rafael Hernández Marín, José Alfredo Jimenéz, Carlos Gardel, Theodora Morse, Etta Scollo.  Arrangements : Yvan Cassar.  Roberto Alagna, ténor.  Les Cordes (Paris Symphonic Orchestra), dir. Yvan Cassar.  Universal/DG : 275 5663.  TT : 47'08.

La musique sud-américaine se porte bien, en particulier vocale.  Le faire-valoir n'est-il pas immense et le ravissement du public certain pour que les stars du chant, ténors de préférence, s'y adonnent volontiers !  Après Rolando Villazón et son album Mexico !, Roberto Alagna à son tour chante Latino et s'enivre de ses suaves couleurs et rythmes entraînants.  Le ténor français n'a pas à forcer sa nature.  On le sait grand communicateur, infatigable charmeur.  Le genre est à ce point assimilé que la voix est souvent à peine reconnaissable.  Par souci d'allégement et volonté de sonner intime, comme en confidence, car assure-t-il, « il faut que la voix reste instrumentale ».  Laissant de côté l'habit de chanteur d'opéra, il aborde ces chansons avec un apparent naturel, sans doute le meilleur moyen de laisser s'épanouir leur charge émotionnelle.  La faconde de l'interprète, épousant le style de la chanson populaire, maîtrise tout un attirail particulier d'effets : manière de jodler la note ou de voiler le timbre, traitement de la voix façon flamenco, etc.  Loin du podium de concert, encore plus de la scène, c'est de salle de bal qu'il faut parler ici ou de cabaret.  Non qu'il reste toujours discret : quelques notes finales lancées forte retrouvent la ferveur d'un timbre carillonnant.  Chassez la nature... Qu'importe !  Bouder le plaisir d'un excès de brillance serait mal venu.  Le charme opère, porté par les rythmes de tango argentin ou de boléro mexicain, et par des instruments aux timbres typiques, les congas, maracas, cuatro vénézuélien et autres bandonéons.  Une ombre et un regret : l'absence des textes dans la plaquette, car on a beau connaître ces standards latins - et encore pas tous - le plaisir de les relire n'est pas moindre ; le faible timing du CD.  Le ténorissimo eût été bien inspiré de prolonger encore la délectation de ses admirateurs.

 

Jean-Pierre Robert.

 

 

Giuliano d’ANGIOLINI (°1960) : Simmetrie di Ritorno.  Edition RZ (www.edition-rz.de) : RZ 10020.  Distr. Metamkine.  Ensemble 2e2m, dir. Franck Ollu.  Quatuor Parisii.  Monique Bouvet, piano.  Barbara Morihien, voix.  TT : 64’11.

« Situationniste de l’impersonnel », tel se qualifie lui-même le compositeur, dont la musique délibérément non discursive, sans articulation formelle, utilise « positivement les mutations négatives de l’auditeur citadin d’aujourd’hui, bombardé de stimuli », estime Gérard Pesson.  Six titres sont proposés : Simmetrie di Ritorno (2000) pour 10 instruments, Ita vita zita rita (1997) pour piano amplifié, Orizzonte fisso, bordoni mobili (2007) pour 8 musiciens, Und’ho d’andà (1995) pour 9 musiciens, No visto un incidente (1992 pour voix solo, Notturno in progressione (2004) pour quatuor à cordes.  Fascinantes ponctuations du silence…

 

 

 

POUR LES PLUS JEUNES

Olivier CALMEL (Musique), Florence PRIEUR (Textes) : Caravane Gazelle.  Narratrice : Julie Martigny.  Quintette à vent ArteCombo.  Hybrid’Music (www.hybridmusic.com) : H1824.  TT : 33’48.

Destiné à tous publics (à partir de 6 ans), cet adorable conte musical pour récitant & quintette à vent fait surgir dans le désert : gazelle, chameaux, voyageurs et nuit étoilée…  Un Pierre et le loup quelque peu… stravinskien au pays du Petit prince.  Poétiquement intrigantes et mystérieuses sont les musiques signées Olivier Calmel (www.oliviercalmel.com).  Un futur « classique » du genre…

 

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Francis Gérimont.

 

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S’ouvrant sur un éditorial de l’Inspecteur général de l’Éducation nationale, M. Vincent Maestracci, orientant de façon concise l’élève dans son travail, le supplément Baccalauréat 2011 de L’éducation musicale est d’une rare densité : pas moins de 148 pages d’analyses et références.

Indispensable aux professeurs d’Éducation musicale et aux élèves de Terminale qui préparent l’épreuve de spécialité « série L » ou l’épreuve facultative « Toutes séries générales et technologiques du baccalauréat », cette publication réunit les connaissances culturelles et techniques nécessaires à une préparation réussie.

À commander aux Éditions Beauchesne : 7, cité du Cardinal-Lemoine, 75005 Paris. Tél : 01 53 10 08 18.  Fax : 01 53 10 85 19.  s.desmoulins@leducation-musicale.com

 

Le Disque du Bac est de retour !
Double CD à prix spécial. Sortie le 10 janvier 2011 - Prix : 16 euros + 2,50 euros de frais de port

Pour la première fois, l'album du baccalauréat propose les œuvres au programme de l’Option facultative (toutes séries) et de l’Enseignement de spécialité (série L).  Disponible chez tous les disquaires et en téléchargement.

Après quelques années d'absence, durant lesquelles les musiques au programme du Bac avaient quitté le répertoire classique, Virgin Classics a le plaisir de reproposer le disque du Baccalauréat, qui est de nouveau entièrement consacré à la musique classique.  Des fondamentaux (Bach, Schubert et Purcell) jusqu’à la musique du XXe siècle (Copland et Varèse) et même du XXIe (Dalbavie), le Disque du Bac est proposé pour la première fois en 2 CDs, et à un tout petit prix, à la portée des bourses des lycéens !

Disque du bac 2011 

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Les dossiers de l'Education Musicale déjà parus































 

Dossiers à paraître :

* Le quatuor à cordes
*
Franz Liszt
* Francis Poulenc et le groupe des Six

 

 

Les livres pour enfants

 

« Mes histoires lues ».  Album de 32 pages + CD.  De 4 à 9 ans.  Gallimard Jeunesse Audio.  10,50 €.

Du Chat botté à Cendrillon, les plus beaux contes de Perrault, Grimm & Andersen racontés par de grands comédiens, à découvrir dans une toute nouvelle collection pour les petits, richement illustrée.  La musique, quant à elle, rythme l’histoire, capte l’attention de l’enfant  et l’incite à poursuivre sa lecture…

 

 

 

Laëtitia Girard.

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