La rencontre créative de Woody Allen et de Philip Glass :
Cassandra's Dream, en tant qu'exploration du mal et du remords.
Dr. Dragana Stojanović-Novičić, Traduction : Charles de Paiva Santana


Brève bio de l'auteur : Dr. Dragana Stojanović-Novičić, musicologue serbe née à Belgrade et professeur au département de musicologie de la faculté de musique de l'Université des Arts de Belgrade, est une spécialiste de la musique contemporaine européenne et américaine (notamment Vinko Globokar, Conlon Nancarrow, Edgar Varèse). Elle est auteur de plusieurs livres (dont un sur Globokar) ainsi que de chapitres de livres (en anglais et en serbe), tandis que ses études ont été publiées dans des revues dont les comités de lecture dont American Music, New Sound, Musicology. Stojanović-Novičić a participé à de nombreuses conférences de musicologie en Europe et aux États-Unis. Elle a donné plusieurs conférences à l'université Aristote de Thessalonique, en Grèce, dans le cadre du programme de mobilité internationale de crédit Erasmus+ (2018). Stojanović-Novičić a été une enseignante/chercheuse Fulbright au Bard College, NY, États-Unis (2016), bénéficiaire de la bourse post-doctorale gouvernementale de perfectionnement à l'étranger (réalisée à Bâle, Suisse, 2008), d'une bourse de la Paul Sacher Stiftung à Bâle, Suisse (2006/7), ainsi que d'un prix pour les meilleurs jeunes chercheurs de Serbie (2002).

“I feel the use of music in films is a very, very important part
of the tools that you’re working with. Just like light and sound.”1
Woody Allen

Introduction
Pour son film Cassandra's Dream - développé en tant que coproduction franco-américaine et britannique, produit en 2007 et présenté en avant-première lors de la saison 2007/2008 - Woody Allen (né en 1935) a invité Philip Glass (né en 1937) à composer la bande originale. En même temps, c'est le premier film de W. Allen qui sort avec une bande sonore stéréo (et stéréo pour la musique uniquement). À partir du milieu des années 80, Allen choisissait généralement la musique de ses films à partir d'enregistrements existants et commandait rarement des partitions originales à un compositeur ; cette démarche était plus caractéristique de ses premiers films. Parmi les films d'Allen mettant en scène la musique d'un seul compositeur, on peut citer Take the Money and Run (1969) et Bananas (1971) dont la musique a été composée par le pianiste, compositeur et chef d'orchestre Marvin Hamlisch (1944-2012), qui a ensuite remporté l'ensemble des prix PEGOT2, et Everything You Always Wanted to Know About Sex /But Were Afraid to Ask/ (1972), dont la musique a été écrite par le guitariste de jazz Mundell Lowe (1922-2017). Allen lui-même définit la période de Annie Hall (1977) et Interiors (1978) comme celle de transition vers la direction musicale qu'il préférait.: “At that point I was in a transitional phase from composed music to the recordings of ‘my kind of music’.”3 Plus tard, plus souvent, afin d'arranger lui-même tout le paysage musical du film, Allen utilisait certains de ses morceaux ou chansons préférés de provenance jazz ou classique (les sources étaient nombreuses : une musique écrite par le compositeur et parolier Cole Porter (1891-1964), un pianiste de jazz et un compositeur Dick Hyman (b. 1927)4, George Gershwin (1898-1937), Felix Mendelssohn Bartholdy (1809-1843), Franz Schubert (1797-1828), Sergei Sergeyevich Prokofiev (Сергей Сергейевич Прокофъев, 1891-1953), Kurt Weill (1900-1950)…), parfois en jouant les titres avec son propre groupe musical. Ainsi, le choix de la musique n'a pas été fait par un superviseur musical, mais par Allen lui- même, en tant que réalisateur, ce qui le rapproche des réalisateurs tels que Tarantino (Quentin Tarantino, 1963) ou Almodovar (Pedro Almodóvar, 1949)5. Cette approche “ready-made”6, c'est-à-dire l'utilisation des musiques déjà existantes, pourrait le dispenser des discussions potentielles avec les compositeurs engagés sur la nature et les possibilités stylistiques de la musique et son rôle dans un film: “c'était ce que c'était”, et Allen a utilisé la musique qu'il aimait. A cet égard, Eric Lax a déclaré : “L'une des principales caractéristiques des films de Woody Allen est l'utilisation presque exclusive du jazz américain et des standards populaires des années 1900 à 1950 et le recours à la musique classique pour pratiquement tout le reste de la musique du film.”7

Une nouvelle composition ou déjà composée ?
En général, dans l'esprit d'Allen, il y a deux approches possibles en matière de musique de film : l'un est basé sur l'utilisation d'enregistrements (c'est-à-dire l'utilisation de matériel musical existant) et l'autre est le scoring (dans ce cas, un réalisateur engage un compositeur pour écrire une nouvelle musique, non préexistante, pour le film)8. Allen était pleinement conscient des implications de cette approche de la musique de film et surtout de sa prédilection pour les supports musicaux déjà existants.
“Dans les premiers films, j'avais l'impression que “engager un compositeur pour écrire une bande originale - DSN” n'était qu'un cliché. Tout le monde faisait appel à quelqu'un pour écrire la musique de ses films. Alors j'ai pensé, voici ce gamin (Marvin Hamlisch - DSN), il est très talentueux. Et je l'ai utilisé et il a fait la musique de mes premiers films. Puis, un peu plus loin, j'ai commencé à réaliser qu'à chaque fois que je faisais un montage, je collais ces disques derrière les coulisses. Et je préfère ça comme ça. J'aime le son des disques. Je peux le contrôler, je peux faire la musique moi-même, ici même dans cette pièce. (…) Je prends tout simplement les plus belles musiques et mélodies du monde, et je peux choisir ce que je veux. Et je n'ai pas besoin de finesse. Je peux monter le son quand je veux. Je peux l'éteindre quand je veux. Alors j'ai commencé à faire ça, et je n'ai jamais arrêté.”9
Néanmoins, Allen n'avait pas complètement exclu la possibilité d'une collaboration avec un compositeur spécialement employé pour un projet de film spécifique : “De plus, de temps en temps, je vais, pour des raisons particulières, utiliser une bande originale.”10

Une histoire sombre sur des hommes ordinaires
Le mystère des "raisons spéciales" inexpliquées qui ont présidé à la réalisation de la musique du film Cassandra's Dream est partiellement caché dans ses perspectives de thriller imaginatif.11 Le film présente une narration dramatique linéaire, dans laquelle le passé et l'avenir ne s'entremêlent pas.12 L'intrigue du film est basée sur une histoire tragique faite de chaînes de relations et d'événements sombres, effrayants et brutaux. Ian et Terry Blaine, deux "frères cockney" de Londres, ont de sérieux problèmes financiers et le désir irréaliste de vivre une vie de luxe. Ils achètent un voilier, qu'ils nomment Cassandra's Dream.13 Bien que Ian dirige un restaurant avec leur père, il veut en fait investir dans des hôtels en Californie. Terry répare des voitures, et c'est un flambeur, qui perd beaucoup d'argent aux cartes et aux dés.
Lorsque, pour obtenir beaucoup d'argent, leur oncle Howard, un médecin (chirurgien plastique) qui mène une vie très luxueuse et possède plusieurs cliniques dans le monde, leur propose de se tourner vers le crime - de tuer une personne qui, en révélant ses actions frauduleuses, pourrait ruiner ses plans d'affaires et le mettre en prison - les choses tournent mal : après une période où ils rejettent la possibilité de le faire, ils finissent par accepter de commettre un crime. Deux frères, jusqu'alors reconnaissables comme deux -dans les termes de l'action criminelle- jeunes hommes innocents, commettent un homicide. Cela brûle la conscience de Terry, qui ne peut supporter cette situation. Après un certain temps, il veut se rendre, mais l'oncle Howard et Ian - connaissant l'état d'esprit instable de Terry - élaborent un plan : Ian va tuer le frère pour l'empêcher d'informer la police. Sur le bateau Cassandra's Dream, après s'être disputés sur la question de savoir s'ils devaient reconnaître le crime, les frères se battent et, par accident, c'est Terry qui tue son frère. Après cela, Terry, désemparé, se suicide.14
Ce film est l'un des rares de l'opus d'Allen qui ne comporte presque aucun élément humoristique - aucun humour léger, du moins. Il y a beaucoup d'ironie, de sarcasme, mais rien de vraiment drôle, ni aucun éclat excentrique caractéristique des Allen. “Cassandra's Dream est la tragédie la plus pure qu'il ait jamais écrite, sans la moindre blague.15 À cet égard, le film est en grande partie l'héritier du contenu psychologique de Match Point (2005) d'Allen. Dans ces deux films d'Allen, d'un certain point de vue, presque tous les mouvements et toutes les pensées sont axés sur le meurtre, en tant qu'acte crucial de la pièce, et sur le regret, en tant que conséquence fatale du crime accompli. Les deux films ont pour cadre Londres, comme si cette ville avait réveillé des visions fantasmagoriques profondes et inquiétantes dans l'imagination d'Allen. Au (presque) tout début de Match Point, on peut voir que Chris, un entraîneur de tennis, qui deviendra plus tard un meurtrier, lit Crime et châtiment de Dostoïevski. C'est un signe assez étrange, sachant qu'à ce moment-là, il n'y a rien d'autre qui puisse être lié à son futur crime. Nous pourrions définir ce type de caractéristique artistique comme la narration "névrotique" spécifique d'Allen, comme le dispositif du désir du réalisateur explosif d'exposer immédiatement toutes les personnes et tous les motifs importants. En fait, on peut dire que la narration névrotique évoquée par l'allusion littéraire spécifique (Crime et Châtiment) dans Match Point, a été transférée au niveau musical dans Cassandra's Dream : cette fois, Allen ne voulait pas trop en révéler au tout début, mais Glass, au contraire, l'a fait dans son matériel musical d'introduction.
L'autre chaîne de similitude peut être tracée en rapport avec le film d'Allen, Crimes and Misdemeanors (1989), qui met également en scène un couple de frères qui concocte un homicide.16 Mais, alors que dans le premier film, l'un des frères est un meurtrier de sang-froid expérimenté à qui son frère a demandé de commettre un homicide, dans Cassandra's Dream, deux frères, deux hommes ordinaires de la basse classe moyenne (en fait, ils peuvent aussi être considérés comme appartenant à la haute classe ouvrière), deviennent les victimes des plans et des projections maléfiques de leur oncle ; d'une certaine manière, ils se sentent tous deux obligés de commettre un crime, même s'ils sentent au plus profond d'eux-mêmes que l'idée de se “débarrasser” de quelqu'un d'une manière aussi cruelle est quelque chose de très injuste et terrifiant. Allen inclut également une chaîne de leitmotivs, souvent présents dans nombre de ses réalisations : “Tous les leitmotivs habituels sont là : l'actrice belle mais difficile dont tombe amoureuse d’ Ewan McGregor, c'est-à-dire l'un des frères - Ian, l'ironie du sort par laquelle les frères rencontrent leur future victime lors d'une fête, l'ombre des dieux anciens (le yacht du héros porte le nom de la prophétesse Cassandre), et les clins d'œil à d'autres cinéastes (film réaliste britannique et aussi hommage à Plein Soleil, 1960 de René Clément à la fin).”17
Certains critiques ont exprimé l'opinion que le type d'approche psychologique dans Cassandra's Dream est similaire à celui de Dostoïevski. (Фёдор Михайлович Достоевский de Fyodor Mikhailovich Dostoyevsky, 1821- 1881). Florence Colombani, par exemple, constate que le film Cassandra's Dream «est une pure invention, un film noir croisé, comme Match Point, avec une touche de Dostoïevski.» L'intrigue de Cassandra's Dream a amené le critique Peter Travers de Rolling Stone à décrire son thème, manifestement sans grande sympathie, comme un “Dostoevski réchauffé. (sic!).” Néanmoins, ces caractéristiques étaient liées à l'orientation typique d'Allen : «À certains égards, même s'il est dépourvu d'humour et se déroule à Londres, Cassandra's Dream est un film typiquement Allen. Comme dans Crimes And Misdemeanours (sic)19, c'est une histoire sur la mort et la culpabilité.»20

À la recherche de la musique
Quelle que soit la musique ready-made qu'Allen aimait, elle n'aurait pas été appropriée pour une intrigue aussi asphyxiante et compliquée. Au début de ses réflexions sur les solutions musicales possibles, Allen a décidé que tout ce qui lui venait à l'esprit comme candidat à l'idiome musical - jazz, Cole Porter ou opéra - serait trop cliché. Il ne savait pas quoi faire. En fait, il a d'abord envisagé la possibilité de faire un film sans musique "ajoutée" et, d'une certaine manière, il ne s'est pas trop inquiété : “Je sais que le film est suffisamment dramatique pour que, même s'il n'y a pas de musique, il fonctionne. Au moins, je ne suis pas effrayé à l'idée que si nous avons besoin d'un certain type de musique, je ne pourrai pas me le permettre. Je sais que, comme il s'agit d'un drame, ce ne sera probablement pas du jazz mélodieux. Ce sera probablement quelque chose de spécial.”21 Il y avait aussi une question financière très importante - Allen était conscient du fait que les droits d'auteur pour la musique de jazz déjà existante ne sont pas si facilement abordables, et qu'engager un compositeur pour ce genre de travail est plutôt abordable : “Un compositeur coûte moins cher parce qu'avec tous ces disques de jazz, vous n'obtenez pas seulement les droits de Miles Davis, vous payez les musiciens ou leurs héritiers et les maisons de disques.”22 Puis, en même temps que ses assistants, il a eu une vision de la participation de Philip Glass.23 Considérant – a posteriori – l'expérience de Glass avec Allen, nous pouvons dire que l'approche du directeur à l'égard de leur coopération est celle que Glass a vraiment appréciée ; En d'autres termes, Glass avait le sentiment d'avoir la direction de la musique entre ses mains. Glass pensait également qu'Allen traitait ses collaborateurs de la même manière qu'il le faisait lui-même dans d'autres médias : “Le réalisateur qui m'a le plus surpris est Woody Allen.24 J'ai travaillé avec lui sur Cassandra's Dream, et il m'a laissé complètement libre de placer la musique dans le film. Il a également accueilli mes suggestions quant au tempérament de la musique. En fait, c'est tout à fait la façon dont je travaille avec mes collaborateurs d'opéra, de théâtre et de danse. Je pense que si je crois en leur capacité et leur talent, la meilleure chose que je puisse faire est de m'écarter et de les laisser faire leur travail. Woody semble travailler à peu près de la même manière.”25
De l'autre côté, Allen a affirmé que Glass acceptait ses suggestions avec une attitude désinvolte et que Glass rejetterait quelque chose s'ils convenaient tous les deux que certains éléments devaient être modifiés.26
Un défi en matière de musique minimaliste L'orientation musicale de Glass a (peut-être) attiré le réalisateur pour sa perspective dramatique obtenue par des moyens d'expression limités. Conscient du fait que l'intrigue du film est constamment sombre et pessimiste, presque dépourvue de tout aspect plus “léger” qui pourrait créer une sorte d'équilibre expressif, Allen voulait un support musical fort et fiable qui pourrait éventuellement approfondir la dimension tragique. Ses déclarations selon lesquelles “le film est plutôt tragique et il [Philip Glass - DSN] semblait être quelqu'un dont l'œuvre était pleine de, vous savez [...], de souffrance et d’angoisse” et “il semblait que ce ne serait pas une partition hollywoodienne, mais une partition de sentiments appropriée à l’histoire", peuvent approuver cette approche.27 Allen a manifestement trouvé un potentiel prometteur dans le type de langage musical de Glass. Dans le film, un drame sombre est "couvert et imprégné" par de la musique principalement dans une tonalité mineure, et certains des motifs musicaux courts et chargés sont répétés tout au long du film comme corrélats des obsessions et des frustrations des personnages principaux. L'attitude psychologique d'Allen, comme une sorte de cercle vicieux, était un bon cadre pour la qualité répétitive de la musique de Glass. Le concept du film a permis à la musique sans trop de méandres d'entrer en douceur dans la "scène". En ce qui concerne ce problème, certains chercheurs voient plutôt les limites de la musique minimaliste - principalement en raison de leur qualité statique - lorsqu'il s'agit de certaines procédures narratives conventionnelles. Commentant les partitions de films de Glass (mais ne faisant pas référence à Cassandra's Dream), Mervyn Cooke révèle son opinion sur le sujet :
“La mélancolie sombre de certaines des compositions pour cordes de Glass semblait convenir à l'atmosphère d'époque sombre de The Secret Agent, mais une tendance à la morosité n'a guère contribué à mettre en valeur The Hours (2002), le film de Stephen Daldry sur Virginia Woolf. Une comparaison avec les limitations de Nyman est révélatrice : les idiomes répétitifs des deux compositeurs fonctionnent exceptionnellement bien lorsqu'ils peuvent suivre leur propre cours autonome sur fond d'images visuelles vivantes ou contemplatives qui ne nécessitent pas une logique linéaire, mais la nature essentiellement statique de leur musique et leurs pouvoirs d'invention parfois pauvres peuvent entraver le rythme de structures narratives plus conventionnelles.”28
C'est ce genre de raisonnement que Cooke désigne comme une "objection au minimalisme filmique".29 Stephen Eddins ne voit pas de différences importantes entre la musique de Cassandra's Dream et certaines des premières musiques de film de Glass : “La musique de Glass est plus menaçante que d'habitude, avec une prépondérance de lignes d'unisson lancinantes dans les cordes graves, mais en général, sa partition ressemble fortement à celle de beaucoup de ses autres partitions pour des drames cinématographiques, notamment The Hours et Notes on a Scandal. Il n'innove pas ici, mais il fournit un accompagnement serré et harmoniquement chargé de l'action à l’écran."30

La musique de Glass et autres sphères sonores dans Cassandra's Dream
Le matériel musical qui apparaît au début de Cassandra's Dream anticipe une série finale d'actes tragiques (deux homicides et un suicide), de la même manière que le nom même du bateau (Cassandra's Dream) que les frères achètent au début du film (scène : Buying the Boat), avec son allusion à une malheureuse Cassandre de la mythologie grecque, préfigure l'épilogue terrifiant du film. S'il est impossible de se faire une idée de la clé finale du film - de la fin de l'histoire - rien qu'en regardant les deux premières scènes du film, la musique elle-même est explicite dès le début. Plus précisément, la musique d'introduction est la même que celle qui est utilisée pour la fin du film. Il n'y a pas de secret à cet égard, et nous sommes en quelque sorte inconsciemment préparés à la suite des événements occultés. À cet égard, Cynthia Lucia note la puissance et la signification de la poétique minimaliste de Glass, ainsi que son effet immédiat : “Dès le début, la circularité minimaliste de la partition télégraphie l'atmosphère claustrophobe et inquiétante, même lorsque les personnages naviguent sur des eaux calmes et ouvertes. La partition en donne trop, trop tôt, drainant les nuances et ambiguïtés potentielles du récit et du cadre visuel.”31
Dans un documentaire sur Glass, au cours de la conversation Glass-Allen, Allen exprime son appréhension du fait que, peut-être, en ce qui concerne la musique, on en donne trop au début.32 La musique d'introduction occupe une position particulière dans la scène du conflit du frère sur un bateau (Death On The Boat), au moment où la tension dramatique est à son paroxysme. Là, le motif musical principal de l'ouverture est d'abord présenté à l'unisson des cordes graves, et le compositeur lui applique un procédé additif. On dirait que la cohérence du matériau est brisée, tout comme l'amour du frère. Les morceaux de l'ensemble sont dispersés tout autour, puis accélérés, ce qui dénote l'impossibilité de revenir en arrière, de la manière suggérée par la remarque du diabolique oncle Howard : “What’s done is done.”
Dans cette partition, Glass utilise et combine certaines des caractéristiques reconnaissables de son langage musical : de longs unissons, une ligne de basse de type ostinato avec une mélodie lyrique, des arpèges, des processus additifs et soustractifs de motifs et de rythmes, des collisions de pulsations métriques à 2 et 3 temps, le saut rapide de la métrique à 2 temps à celle à 3 temps, etc, tout cela sur la base du système tonal dominant. L'orchestration établit un équilibre délicat entre les sons des cordes et ceux des instruments à vent, avec l'utilisation efficace de la couleur du registre grave du piano dans la scène du meurtre. La musique est présente dans tous les moments importants du film : lors de la première rencontre entre Ian et Angela ( qui deviendra bientôt sa nouvelle petite amie), lors de la chasse à la victime, lors de l'acte de meurtre de la victime, pendant le conflit entre les frères et lors de la scène de la mort. Le caractère de la musique est constant tout au long de l'œuvre, bien que transformé par de fines nuances de couleurs, de tempo et de dynamique différentes. Les parties du film qui ne sont pas accompagnées par la musique de Glass sont réalisées de trois manières : 1) par le silence, dans le sens où l'on n'entend aucun son spécifique à l'exception du dialogue (réel) ; 2) par la musique populaire, utilisée de manière diégétique (comme une musique intrinsèque à l'action et entendue par les personnages) ; et 3) par la source music, qui est le terme d'Allen pour les sons acousmatiques.33 Quelques fragments de musique populaire sont présentés lorsque les frères naviguent avec leurs petites amies, ainsi que lors des deux fêtes organisées auxquelles les frères participent. La première fois, alors qu'ils sont sur le bateau Cassandra's Dream avec leurs amies, les frères chantent une chanson populaire Show me the way to go home, écrite en 1925 par Irvin King.34 Après avoir chanté la chanson, ils se souviennent de la phrase du film Bonnie and Clyde (1967), quand l'un des frères Barrow demande : "Ain't life grand ?” En établissant un lien entre les frères Barrow et Ian et Terry Blaine, Allen indique ce qui va se passer : les Barrows étaient des criminels, et les Blaines le deviendront. Lors d'une des fêtes avec de la musique populaire, Ian et Terry, de façon surprenante, sans plan préalable, rencontrent l'homme qu'ils sont censés tuer dans quelques jours. Il est évident que la musique populaire est utilisée de telle manière que des signes présageant de futurs événements tragiques l'entourent toujours. En ce qui concerne la source music, nous pouvons entendre le chant sinistre des oiseaux aquatiques avant que les frères n'achètent le bateau, l'aboiement des chiens lors de la poursuite de la victime, et le bruissement de la Tamise lors de leur dernière discussion sur le bateau, ainsi qu'après la découverte des deux frères morts sur un bateau.
A quelques exceptions près, incarnées, comme on l'a montré, par l'utilisation de certaines mélodies populaires, la substance musicale du film - même si elle n'est pas très longue dans son intégralité - est celle de Glass.35 Tous les motifs acousmatiques et diégétiques et les sons musicaux utilisés dans le film construisent un "autre" sonore et musical par rapport à la musique de Glass, dont le vocabulaire, avec toutes ses stratégies reconnaissables, imprègne la base austère de l'histoire d'Allen. On ne peut pas parler de cette musique comme de quelque chose qui est dans l'ombre de l'intrigue, ou qui accompagne le développement du film, mais comme d'une substance per se dont le caractère propre est impliqué dans le tissu même du film.36

Quelques réactions à l'union du film et de la musique
La réaction critique au film d'Allen, considéré comme une source potentielle pour une musicologie du film plus élaborée, n'a pas été du tout satisfaisante.37 Les critiques mentionnent rarement la musique. Parfois, l'aspect musical est complètement ignoré, et nous n'apprenons jamais s'il y a (avait) de la musique ou quel est (était) le rôle de cette musique. Dans d'autres cas, les critiques ont juste remarqué que Philip Glass a écrit la musique du film d'Allen. Il y a beaucoup de phrases récurrentes dans ces critiques, qui n'ont manifestement pas été utilisées dans un dessein sérieux. De nombreuses critiques se concentrent sur les attraits de base du public, en s'appuyant sur des phrases telles que “un Glass génial”38 et ainsi de suite.
Certains critiques insistent sur le fait que la réussite musicale de Glass est beaucoup plus importante que ce que le film requiert, qu'il s'agit d'une sorte de ambient music inhabituelle dans la production de ce réalisateur, et que le thriller d'Allen n'est pas un succès : “La partition est l'œuvre du légendaire et absurdement surqualifié compositeur Philip Glass. La partition est grave et mélancolique et serait efficace dans un thriller différent et mieux réalisé. Cependant - et je me rends compte que ce n'est probablement qu'un problème pour les personnes qui se trouvent dans ma situation unique - chaque fois que la partition de Glass a été jouée, j'en ai été distrait et j'en ai été très conscient, ne serait-ce que parce que je n'ai pas l'habitude d'entendre de la “ambiant music” dans un film de Woody Allen.”39 Andy Klein, du Pasadena Weekly, estime que "le travail de Glass est effrayant et inquiétant dès le début ; il contribue à maintenir la tension pendant le premier tiers du film,”40 tandis que Dana Stevens, de Slate, a mentionné “les arpèges trépidants de la bande sonore de Philip Glass”41. Par ailleurs, après la première à Venise, une critique, parlant de collaborateurs formidables ( le directeur de la photographie Vilmos Zsigmond et le compositeur Philip Glass ) a conclu que “l'on avait l'impression que même eux travaillaient à mi- régime.”42
D'autres observations sont, dans une certaine mesure, coordonnées avec ce type de perception de la musique de Glass dans le film d'Allen : à partir de ces opinions, nous commençons à penser que quelque chose manque dans cette unité souhaitée (imaginaire) du drame et de la musique. En tout cas, ils ne reconnaissent pas que le drame d'Allen et la musique de Glass soient dans une harmonie souhaitable. Maitland McDonagh a suggéré que le film, peu convaincant du début à la fin, est “porté par la partition sinistre de Philip Glass, qui jette une ombre sonore sur les scènes les plus ensoleillées”.43 Le critique - Peter Rainer - du Christian Science Monitor a conclu que “la musique insistante de Philip Glass ne fait que souligner le manque de substance”44, tandis que Philip French, du Guardian, a vivement suggéré que “la musique pulsée de Philip Glass est totalement inappropriée au sujet et au cadre”.45
La raison de la publication de nombreux articles sur Cassandra's Dream qui ne s'intéressent pas ou peu à son contenu musical peut résider dans le fait que, dès sa première, Cassandra's Dream a été traité comme une anomalie dans la production de Woody Allen, un film qui n'a pas eu beaucoup de succès et par lequel un réalisateur célèbre a (désagréablement ?) surpris son public. Il semble que peu de critiques se soient intéressés à l'élaboration du langage poétique du film : le film, y compris ses aspects musicaux, n'était pas vraiment provocateur pour eux. Peu de critiques ont été satisfaits de la fusion artistique Allen-Glass dans Cassandra's Dream : c'était le cas des critiques qui avaient une bonne opinion du scénario d'Allen, de sa réalisation et de sa mise en scène, et qui considéraient que sa musique méritait d'être mentionnée et évaluée plus avant. Dans certains cas, lorsque la qualité de la musique était reconnue, celle-ci était appréciée plus que l'intrigue elle- même, la structure du film et la force de persuasion des personnages d'Allen. "Presque rien dans ce thriller faustien de deux frères de l'East End (Colin Farrell et Ewan McGregor) mêlés à un complot de meurtre ne sonne vrai : ni la vie intérieure et les aspirations des personnages, et certainement pas leur dialogue, qui sonne à peine humain, et encore moins britannique. La compensation vient du soutien de Sally Hawkins et de la passionnante partition de Philip Glass.”46

Unification créative
Malgré ces différentes appréciations, nous pouvons conclure, sur la base de l'analyse des relations entre la musique et la narration de Cassandra's Dream, qu'il existe une sorte d'unification émotionnelle entre l'intrigue du film et la musique qui était censée incarner l'histoire. La noirceur de l'intrigue était en outre exprimée par les motifs répétitifs et processuels de la musique minimaliste.
“C'est l'époque où deux grands artistes new-yorkais sortent de leur zone de confort. Ce n'est peut-être pas le meilleur travail des deux hommes, mais c'est une collaboration fascinante.”47
Après ce film, Allen est revenu à sa "voie" prédominante en matière de musique : il a continué à utiliser des musiques pré-composées dans ses films ultérieurs. Peut-être l'expérience de Cassandra's Dream était-elle trop douloureuse sur le plan émotionnel dans sa structure psychologique interne, et encore plus douloureuse avec l'aide de Glass dans le domaine de la musique ; Allen ne pouvait pas, semble-t-il, aller plus loin lorsqu'il s'agit des profondeurs de l'effondrement de l'âme humaine.

Livres cités :
1. Bailey, Peter J. (2016): The Reluctant Film Art of Woody Allen. Lexington, Kentucky: University Press of Kentucky.
2. Colombani, Florence (2010): Masters of cinema: Woody Allen. Paris: Cahiers du cinéma.
3. Cooke, Mervyn (2008): A History of Film Music. Cambridge, New York, Melbourne, Madrid, Cape Town, Singapore, São Paulo, Delhi: Cambridge University Press.
4. Girgus, Sam B. (2002): The Films of Woody Allen. Cambridge: Cambridge University Press.
5. Glass, Philip (2015): Words without Music: a memoir. New York, London: Liveright Publishing Company, A Division of W. W. Norton and Company.
6. Kalinak, Kathryn (2010): Film Music: A Very Short Introduction. Oxford, New York: Oxford University Press.
7. Lax, Eric (2011): Conversations with Woody Allen: His Films, the Movies, and Moviemaking, updated and expanded. New York: Alfred A. Knopf.
8. Maycock, Robert (2002): Glass: A Portrait. London: Sanctuary Publishing.
9. Shone, Tom (2015): Woody Allen: A Retrospective. London: Thames & Hudson.
10. Solomons, Jason (2018): Woody Allen: Film by Film: Introductory Interview with Woody Allen. London: Carlton Books.
11. Woody Allen on Woody Allen (2004): in Conversation with Stig Björkman. Edited by Stig Björkman. London: Faber and Faber.

Articles cités :
1. Lucia, Cynthia and Woody Allen: “Status and Morality in Cassandra's Dream”: An Interview with Woody Allen. Cinéaste, Vol. 33, No. 2, Spring 2008, pp. 40-43, JSTOR, www.jstor.org/stable/41690629.
2. ТВ Новости /TV News/, 14-20. 9. 2013 (September 14-20, 2013), p. 8. (in Serbian)

Sources en ligne :
Cassandra’s Dream, http://www.metacritic.com/movie/cassandras-dream/critic-reviews [Retrieved June 27, 2021]
Cassandra’s Dream, Every Woody Allen Movie, a site no longer available
Cassandra’s Dream Theme – Music Of Woody Allen Films, http://www.woodyallenpages.com/2016/03/cassandras-dream-theme-music-of-woody-allen-films/, 7 March 2016 [Retrieved June 27, 2021]
• Collin, Robbie and Tim Robey: “All 47 Woody Allen movies – ranked from worst to best”, The Telegraph, 12 October 2016, https://www.telegraph.co.uk/films/0/woody-allens-best-and-worst-movies/ [Retrieved June 6, 2021]
• Eddins, Stephen: “AllMusic Review,” https://www.allmusic.com/album/cassandras-dream-original-motion-picture-score-mw0000586055 (a review of CD released on Glass' own Orange Mountain Music label) [Retrieved June 6, 2021]
• French, Philip: “Cassandra’s Dream,” The Guardian, Sunday, 25 May 2008, https://www.theguardian.com/film/2008/may/25/ • Hicks, Scott: 1) “Glass: A Portrait of Philip In Twelve Parts,” 2007 http://www.youtube.com/watch?v=lGaG5VJqgZg (cd1); 2) “Glass: A Portrait of Philip In Twelve Parts,” 2007 hhttp://www.youtube.com/watch?v=x__legLn4q8 (cd2). These sites are no longer available.
• Klein, Andy: “Grim Work: Woody Allen’s ‘Cassandra’s Dream’ has more crime, less humor,” Pasadena Weekly, January 24, 2008, https://pasadenaweekly.com/grim-work/ [Retrieved June 6, 2021]
• Macnab, Geoffrey: “Why ‘Cassandra’s Dream’ is turning out to be Woody Allen’s nightmare,” Independent, Sunday, September 2, 2007, https://www.independent.co.uk/arts-entertainment/films/features/why-cassandra-s-dream-turning-out-be-woody-allen-s-nightmare-463831.html [Retrieved June 6, 2021]
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1 Woody Allen on Woody Allen: in Conversation with Stig Björkman, Publié sous la direction de Stig Björkman (Londres : Faber and Faber, 2004), 197. Rappelant l'attitude très particulière d'Ingmar Bergman (1918-2007) à l'égard de la musique de film, Allen exprime ainsi son avis contraire à celui de Bergman : "Dans une interview, il a dit à un moment donné qu'il trouvait que l'utilisation de la musique dans les films était barbare. C'est le mot qu'il a utilisé. Mais ce n'est pas mon cas. " Ibid. En dehors de leurs positions assez différentes sur la musique de film, Allen a beaucoup apprécié la poétique cinématographique de Bergman.
2 Hamlisch est, avec le compositeur Richard Rogers (1902-1979), l'une des deux seules personnes à avoir remporté un prix Pulitzer et un Emmy, un Grammy, un Oscar et un Tony (PEGOT). Une collaboration avec Allen a été réalisée avant toutes ces récompenses importantes.
3 Woody Allen on Woody Allen, 101.
4 Richard "Dick" Hyman était l'auteur de musique préféré d'Allen dans les années 80. (Stardust Memories, 1980; Zelig, 1983; Broadway Danny Rose, 1984; The Purple Rose of Cairo, 1985; Radio Days, 1987), et ils avaient également collaboré dans les années 90 (Mighty Aphrodite, 1995, Everyone Says I Love You, 1996, Sweet and Lowdown, 1999).
5 Cf.: Kathryn Kalinak, Film Music: A Very Short Introduction, Oxford, New York, Oxford University Press, 2010, 5.
6 Le terme “compilation score” est utilisé pour cette procédure. Kathryn Kalinak, Ibid.
7 Eric Lax, Conversations with Woody Allen: His Films, the Movies, and Moviemaking, updated and expanded (New York: Alfred A. Knopf, 2011), 299.
8 Woody Allen on Woody Allen, 34.
9 Ibid.
10 Ibid., 35.
11 L'intrigue du film présente, dans une certaine mesure, des similitudes avec la pièce de théâtre d'Allen A Second Hand Memory de 2004, écrit pour la Atlantic Theater Company in New York City. Cf.: Tom Shone, Woody Allen: A Retrospective (London: Thames & Hudson, 2015), 240.
12 Peter Bailey souligne le processus dramaturgique de ce film et des films connexes, où il n'y a pas d'accumulation de gags, comme dans de nombreux films antérieurs d'Allen. Cassandra's Dream appartient à un groupe de films basés sur une narration linéaire, dont certains, comme Sweet and Lowdown (1999) et Match Point (2005), precedent Cassandra's Dreamet qui est ensuite suivie d'une matrice dramaturgique similaire dans le film d'Allen suivant, Vicky Cristina Barcelona (2008). Il est intéressant de noter qu'en 2009, Allen a simplement classé Match Point, Cassandra's dream et Vicky Cristina Barcelona, parmi ses meilleures productions. Comparez avec : Peter J. Bailey, The Reluctant Film Art of Woody Allen (Lexington, Kentucky, University Press of Kentucky, 2016), 411 (note de bas de page 14) et 414 (note de bas de page 1).
13 En fait, Terry et Ian ont acheté un bateau avec l'argent que Terry a gagné à la loterie et en pariant sur une course de chiens.
14 Les critiques ont reconnu une qualité particulière dans le personnage de Terry : “Les meilleurs moments viennent de Colin Farrell, dans le rôle du frère qui a des problèmes de conscience.” Florence Colombani, Masters of cinema: Woody Allen (Paris: Cahiers du cinéma, 2010), 90.
15 Jason Solomons, Woody Allen: Film by Film (London, Carlton Books, 2018), 218.
16 Selon Sam B. Girgus, Crimes and Misdemeanors est probablement le premier film d'Allen où il engage des “forces de nuisance et de destruction intentionnelles”. Sam B. Girgus, “Manhattan”, in The Films of Woody Allen (Cambridge: Cambridge University Press, 2002), 62.
17 Colombani, Masters of cinema, 90.
18 Ibid., 90.
19 Peter Travers, “Cassandra’s Dream,” Rolling Stone, February 7, 2008, http://www.rollingstone.com/movies/reviews/cassandras-dream-20080207
20 Geoffrey Macnab, “Why ‘Cassandra’s Dream’ is turning out to be Woody Allen’s nightmare,” Independent, Sunday, September 2, 2007, http://www.independent.co.uk/arts-entertainment/films/features/why-cassandras-dream-is-turning-out-to-be-woody-allens-nightmare-463831.html
21 Lax, Conversations with Woody Allen, 318-319.
22 Ibid., 319.
23 “L'idée de Philip Glass était très bonne pour le film. Dès que j'en ai parlé, tout le monde a dit : “J'allais dire ça”, et c'est vrai, car c'est le choix logique pour le film.” Ibid., 319. Outre les participants "habituels" du Philip Glass Ensemble, dont Michael Riesman (né en 1943 ; ici en tant que chef d'orchestre et producteur), et Kurt Munkacsi (ici en tant qu'"assistant de M. Glass"), certains représentants de la nouvelle génération ont été inclus dans les collaborateurs de l'équipe musicale d'Allen, parmi lesquels le compositeur Nico Muhly (né en 1981), qui travaillait à la préparation de la partition. Glass était tellement collaboratif qu'il a accepté certaines suggestions de son entourage : à un moment du film, où Glass voulait que le son soit celui du sextuor à cordes, Nico Muhly témoigne qu'il a persuadé Glass de ne pas utiliser ce type de son ! Voir le film réalisé par Scott Hicks : “Glass: A Portrait of Philip In Twelve Parts,” 2007 http://www.youtube.com/watch?v=lGaG5VJqgZg (cd1). Malheureusement, ce site n'est plus disponible.
24 À l'époque, faire de la musique pour le cinéma était un engagement qui n'était pas du tout inconnu pour Glass. Jusqu'à aujourd'hui, il avait réalisé la musique de près de trente bandes originales, et avant Cassandra’s Dream il était déjà très expérimenté dans le domaine. Philip Glass, Words without Music: a memoir New York (London: Liveright Publishing Company, A Division of W.W. Norton and Company, 2015), 349. Les films dont il a fait la musique sont, entre autres : North Star: Mark di Suvero (François de Menil, 1977), Koyaanisqatsi (Godfrey Reggio, 1982), Mishima: A Life in Four Chapters (Paul Schrader, 1985), Hamburger Hill (John Irvin, 1987), Powaqqatsi (Godfrey Reggio, 1988), The Thin Blue Line (Errol Morris, 1988), Mindwalk (Bernt Capra, 1990), Candyman (Bernard Rose, 1992), Anima Mundi (Godfrey Reggio, 1992), A Brief History of Time (Errol Morris, 1992), Compassion in Exile: The Life of the 14th Dalai Lama (1993), Candyman: Farewell to the Flesh (Bill Condon, 1995), Jenipapo (Monique Gardenberg, 1995), The Secret Agent (Christopher Hampton, 1996), Bent (Sean Mathias, 1997), Kundun (Martin Scorsese, 1997), The Truman Show (Peter Weir, 1998), Dracula (Tod Browning, 1999), Man in the Bath (Peter Greenaway, 2001), Diaspora (Atom Egoyan, 2001), Naqoyqatsi (Godfrey Reggio, 2002), The Hours (Stephen Daldry, 2002), Undertow (David Gordon Green, 2004), Taking Lives (D. J. Caruso, 2004), Notes on a Scandal (Richard Eyre, 2006), Елена /Elena/ (Андрей Петрович Звягинцев /Andrey Petrovich Zvyagintsev/, 2011), Fantastic Four (Josh Trank, 2015) etc. Cf.: Robert Maycock, Glass: A Portrait (London: Sanctuary Publishing, 2002), 188; Cf. also: Mervyn Cooke, A History of Film Music (Cambridge, New York, Melbourne, Madrid, Cape Town, Singapore, São Paulo, Delhi: Cambridge University Press, 2008), 286, 480-481.
25 Glass, Words without Music, 349-350.
26 Cf. l’entretien d'Allen avec Scott Hicks, “Glass: A Portrait of Philip In Twelve Parts,” 2007 http://www.youtube.com/watch?v=x__legLn4q8 (cd2). Ce site n'est plus disponible non plus.
27 Lax, 319.
28 Mervyn Cooke, A History of Film Music, 481.
29 Ibid.
30 Stephen Eddins, “AllMusic Review,” http://www.allmusic.com/album/cassandras-dream-original-motion-picture-score-mw0000586055
31 Cynthia Lucia et Woody Allen, Status and Morality in Cassandra's Dream: An Interview with Woody Allen, Cinéaste, Vol. 33, No. 2, Spring 2008, 40-41, JSTOR, www.jstor.org/stable/41690629.
32 “Glass: A Portrait of Philip In Twelve Parts,” http://www.youtube.com/watch?v=lGaG5VJqgZg (cd1). Une attitude similaire concernant le fait que le code musical est peut-être venu trop vite, au tout début du film, révélant toute l'amertume et le manque de joie de la future ligne de conduite, est exprimée dans Cynthia Lucia et Woody Allen, Status and Morality in Cassandra's Dream, op. cit.
33 Woody Allen on Woody Allen, Op. cit., 76. Commentant sa propre approche “prudente” de la musique dans le film Annie Hall, Allen a conclu que "la seule musique dans Annie Hall est la source music. Il n'y a pas du tout de scoring. Elle provient soit d'un autoradio, soit d'une fête ou autre. Mais il n'y a pas de musique dans le film. Je ne sais pas, je voulais juste expérimenter, voir ce que ça donnerait. D'être très, très économe avec la musique. J'étais si intransigeant dans mes sentiments. Je me fichais que le public aime ou pas. Je voulais juste faire ce que je voulais faire là, prendre un tournant.” Ibid.
34 En fait, Irvin King était un nom commun/pseudonyme pour les deux auteurs-compositeurs britanniques – Jimmy Campbell (1903-1967) et Reginald (Reg) Connelly (1895-1963).
35 La bande originale du film a été publiée par OMM (Orange Mountain Music, 0038), 2007. Alors que la bande sonore dure environ 30 minutes, le film entier dure 109 minutes.
36 Il n'est pas rare que les spécialistes ou les critiques traitent la musique de film comme une sorte d'accompagnement. De manière typique, en traitant la partie musicale comme subordonnée à l'histoire du film, Sam B. Girgus, commentant Manhattan, mentionne la création par Allen “d'un panorama visuel qui explose littéralement à l'écran sur l'accompagnement extraordinairement beau de Rapsody in Blue de Gershwin”. Sam B. Girgus, The Films of Woody Allen, 62.
37 Cf. “Cassandra’s Dream,” http://www.metacritic.com/movie/cassandras-dream/critic-reviews
38 Dans une courte critique du film - publiée dans un journal de programmes télévisés serbes - qui est, en fait, une annonce de la présentation du film dans un programme de diffusion serbe, un critique mentionne un réalisateur célèbre qui a surpris le public, et le génial Philip Glass, auteur de la musique de The Hours et de The Truman Show, qui a écrit la partition. Cependant, ayant à l'esprit une courte place pour le résumé du film, cette note est l'un des meilleurs exemples d'une description de film concentrée et efficace dans laquelle toutes les lignes poétiques fondamentales du film (les émeutes faustiennes, les tentations morales) sont comprises. ТВ Новости /TV News/, 14-20. 9. 2013 (Septembre 14-20, 2013), 8.
39 “Cassandra’s Dream, Every Woody Allen Movie”; ce site n'est plus disponible.
40 Andy Klein, “Grim Work: Woody Allen’s ‘Cassandra’s Dream’ has more crime, less humor,” Pasadena Weekly, Janvier 24, 2008, https://pasadenaweekly.com/grim-work/
41 Dana Stevens, “Cassandra’s Dream: The new Woody Allen is not unredeemably bad,” Slate, Janvier 18, 2008, http://222.slate.com/articles/arts/movies/2008/01/cassandras_dream
42 Geoffrey Macnab, “Why ‘Cassandra’s Dream’ is turning out to be Woody Allen’s nightmare,” op. cit.
43 Maitland McDonagh, “TV Guide,” https://www.tvguide.com/movies/cassandras-dream/review/2000282126/
44 Peter Rainer, “With 'Cassandra's Dream' Woody Allen once again gets away with murder,” The Christian Science Monitor, Janvier 18, 2008, http://www.csmonitor.com/The-Culture/Movies/2008/0118/p15s02-almo.html
45 Philip French, “Cassandra's Dream,” The Guardian, Dimanche, 25 Mai 2008, http://www.theguardian.com/film/2008/may/25/culture.woodyallen
46 Robbie Collin et Tim Robey, “All 47 Woody Allen movies – ranked from worst to best”, The Telegraph, 12 Octobre 2016, http://www.telegraph.co.uk/films/0/woody-allens-best-and-worst-movies/
47 Cassandra’s Dream Theme – Music Of Woody Allen Films, http://www.woodyallenpages.com/2016/03/cassandras-dream-theme-music-of-woody-allen-films/, 7 Mars 2016

 

 

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